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Adolphe Alphand et les parcs et jardins de Paris

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19 novembre 2019

À l’occasion du colloque « Droit(s) et jardin », redécouvrons Adolphe Alphand, qui est à l’origine du réseau actuel des squares, parcs, jardins, bois et allées arborées de Paris. Au moment où Haussmann perce la capitale de grandes avenues, Alphand l’orne d’une parure végétale.
 
Le Monde illustré, 35ème année, no 1811, 12 décembre 1891
 

De Grenoble à Paris

Adolphe Alphand naît en 1817 à Grenoble dans une vieille famille dauphinoise. Ses études l’amènent à Paris où il réussit successivement les concours de l’Ecole polytechnique et de l’Ecole des Ponts et Chaussées. En 1839, il part à Bordeaux s’occuper des installations maritimes et des chemins de fer : quais de la Gironde, boisement des Landes… Il y fait la connaissance du baron Haussmann, préfet de Gironde en 1851. Avec l’aide de l’horticulteur Barillet-Deschamps, les deux hommes organisent de grandes fêtes à Bordeaux en 1852 en l’honneur du prince-président qui ne tarde pas à les appeler pour s’occuper de la capitale. Alphand devient ainsi directeur du service des Promenades et Plantations à la préfecture de la Seine dirigée par Haussmann. En effet, Napoléon III veut changer le visage de Paris. En exil à Londres, il a découvert les grands parcs londoniens et les bienfaits qu’ils apportent à la population en termes de loisirs ou d’hygiène. Paris est alors très dense, avec des quartiers insalubres propices aux épidémies (le choléra en 1832).
 

Bois de Boulogne
, Vue prise au dessus de la Porte Dauphine, Muller Th.

Le Bois de Boulogne et les parcs parisiens

Le premier chantier auquel s’attelle Alphand est celui du bois de Boulogne. Cette ancienne réserve de chasse royale est transformée en parc à l’anglaise avec ses allées sinueuses et ses lacs pittoresques sur le modèle de la Serpentine à Hyde Park. Le bois de Vincennes est également aménagé dans cet esprit. Mais ces deux bois sont hors de l’enceinte de Thiers édifiée en 1840. Dans Paris intra-muros existent bien quelques parcs et promenades : Tuileries, Luxembourg, Parc Monceau, Palais-Royal, Jardin des Plantes, Champs-Elysées. Il reviendra à Alphand de compléter largement ce dispositif avec deux parcs (Montsouris au sud, Buttes-Chaumont au nord-est), vingt-quatre squares et des allées arborées. Les grandes avenues sont plantées de milliers d’arbres en alignement, donnant à la rue parisienne le visage qu’on lui connaît aujourd’hui. Les squares permettent à tous les quartiers parisiens de bénéficier d’un lieu de loisir de proximité, y compris les communes annexées à Paris en 1860.
 

Des parcs qui font rayonner la capitale

Ce système de parcs fait beaucoup pour le prestige de Paris, siège de plusieurs expositions universelles. Le bois de Boulogne est prêt pour celle de 1855, et le parc des Buttes-Chaumont est inauguré pour celle de 1867. Cet ancien site de carrières est totalement réaménagé avec sa grotte, sa cascade et son lac. Alphand est chargé de niveler la colline de Chaillot pour l’exposition de 1867 ; les terres dégagées servent à combler le Champ de Mars où sont bâtis les pavillons de l’exposition. Pour mener ses travaux, Alphand est entouré d’hommes compétents comme Jean-Pierre Barillet-Deschamps qui crée le Fleuriste de la Muette. Il s’agit d’une pépinière chargée d’alimenter les parcs parisiens de milliers d’arbres et de fleurs pour les parterres. Les arbres sont transportés sur des chariots prévus à cet effet. Des espèces exotiques sont introduites pour leur effet décoratif. Un mobilier urbain spécifique est créé, devenu lui aussi symbole de la capitale, tout comme les bâtiments installés dans les parcs.
 

L'exposition universelle de 1889

Après avoir été membre de la commission de l’Exposition universelle de Paris de 1878, il devient commissaire général et directeur des travaux de l’Exposition universelle de 1889. Il est alors à l’apogée de sa gloire. Il fait de l’exposition un événement mondial, soutenant le projet de tour Eiffel. Cette tâche immense épuise l’homme qui meurt en 1891. Les services qu’il dirigeait sont alors démantelés ; le service des Promenades et Plantations perd son autonomie et est placé sous la direction du service d’Architecture. Mais son œuvre est continuée par tous les architectes, jardiniers, horticulteurs ou paysagistes passés par ses services comme Edouard André ou Jean-Claude-Nicolas Forestier. Ils reprennent l’aménagement des parcs parisiens et en répandent le modèle dans le monde entier. Alphand s’est chargé lui-même de faire connaître son œuvre dans Les promenades de Paris.
L’ouvrage, très recherché par les collectionneurs, donne lieu à un procès intenté par Jules Prat à Jules Rothschild, éditeur des Promenades de Paris. Prat, chef de cabinet des bureaux d’Alphand de 1861 à 1878, se veut co-auteur de l’ouvrage. Mais il est débouté par le tribunal de première instance et par la Cour d’appel de Paris qui lui reconnaissent une coopération et non une collaboration avec son supérieur hiérarchique.

 

 

En près de quarante ans, Adolphe Alphand marque la capitale de son empreinte, contribuant à façonner l’image que Paris donne au monde entier. Le succès des parcs et jardins parisiens ne se dément pas aujourd’hui. La réflexion sur la trame verte de l’agglomération parisienne travaille les urbanistes depuis plus d’un siècle. Il est un temps question de transformer l’enceinte et la zone non aedificandi en une ceinture verte qui aurait réuni les différents parcs dus à Alphand, mais l’espace est finalement loti. À l’heure du Grand Paris, les questions abordées par Alphand restent d’actualité.
 

Pour aller plus loin

- Toujours dans le cadre du colloque « Droit(s) et jardin », le blog Gallica a successivement mis à l’honneur l’abbé Lemire et la création des jardins ouvriers, la communauté des maîtres jardiniers de Paris, Jean de La Quintinie, créateur du Potager du roi, et l’intendance du jardin royal des plantes.
- Poursuivez encore votre exploration du thème « Droit(s) et jardin », en consultant la bibliographie sélective qui lui a été consacrée.

 

 

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