Collection d'Anville

La carte ayant le titre latin « Iaponia » est une planche extraite de l’édition en français de l’atlas de Gérard Mercator (1512-1594) publié à Amsterdam, chez Hondius en 1633. Elle a toutes les caractéristiques des cartes néerlandaises du XVIIe siècle : cartouches à l’ornementation monumentale pour le titre et l’échelle, décoration de navires à voiles et de monstre marin, tracés colorés pour les côtes, avec en plus ici un navire japonais qui donne une note d’exotisme. Le verso de la planche porte un commentaire en français intitulé : Iapon ou Iapan isle.

Dans sa collection, Jean-Baptiste d’Anville a conservé aussi des cartes dont il est l’auteur. Et parmi les nombreuses cartes qu’il réalisa, il s’intéressa beaucoup à l’Asie. La Carte générale de la Tartarie Chinoise publiée en 1732 est classée avec les autres documents traitant de la Mongolie et de la Mandchourie. Mais comme d’Anville avait porté un soin particulier à représenter le Japon sur cette carte, il l’ajouta aussi dans la partie consacrée au Japon (n° 7444) en découpant seulement l’archipel nippon.

La collection d’Anville par ses divers documents montre toutes les hésitions de la géographie française du XVIII° siècle dans la représentation des régions septentrionales du Japon qui font encore partie des zones à explorer de la terre à ce moment-là.  Au début du XVIII° siècle, le débat portait toujours sur la question de savoir si le Japon est une île, comme en témoigne la lettre de Claude Delisle (1644-1720), publiée dans le Journal des Savans du lundi 31 mai 1700.

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Né à Paris en 1697 Jean-Baptiste Bourguignon d’Anville fut formé au collège des Quatre-Nations. Il avait développé un intérêt précoce pour la géographie. Au cours de sa longue carrière, le géographe produisit une œuvre imposante qui ne compte pas moins de 211 cartes et plans, ainsi que 78 mémoires majoritairement publiés par l’Académie des inscriptions et belles-lettres. Parmi toutes ses cartes, celles de Chine (1735), d’Italie (1743) et d’Afrique (1749) étaient particulièrement réputées pour les progrès qu’il avait apportés. Il fut couvert d’honneurs et reçut un logement au Louvre.

En 1719, alors qu’il n’avait que vingt-deux ans, il obtint le brevet de géographe du Roi. Membre de plusieurs académies françaises et étrangères, son expertise et sa méthode de travail étaient appréciées et louées par ses contemporains. Il fut considéré comme le modèle de « géographe de cabinet » parce qu’il n’avait jamais voyagé de sa vie. Il s’intéressa à la géographie de l’Antiquité, en étudiant les textes grecs et latins, dans le but de faciliter la compréhension de l’histoire ancienne. Mais sa géographie moderne fut tout aussi renommée. Bougainville a dit le plus grand bien de la Carte d’Asie publiée en 1752. Puis, d’Anville compléta ses cartes à la suite des découvertes faites par Bougainville. A côté des cartes qu’il réalisa lui-même, le géographe d’Anville rassembla une des plus importantes collections de cartes de son temps à vocation encyclopédique. Il la vendit à Louis XVI en 1779. Le roi voulait créer une cartothèque pour le secrétariat d’Etat des Affaires étrangères et y installer la collection. D’Anville mourut à Paris en 1782 à l’âge de quatre-vingt-cinq ans et Condorcet écrivit son éloge. Sa collection a rejoint le département des Cartes et plans en 1924 quand le ministère des Affaires étrangères la céda à la Bibliothèque Nationale.