Maurice Renard

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"Les flots eux-mêmes riaient confusément". (Le fantôme du Cormoran)

Maurice Renard n’est pas un auteur ayant sombré dans les limbes de la littérature. Ses romans et nouvelles sont sans cesse rééditées (surtout depuis son entrée dans le domaine public), adaptés (Serge Lehman réalise, avec le dessinateur Gess, une adaptation libre de L'homme truqué dans une bande-dessinée éponyme parue aux éditions L’Atalante), ou filmées (au cinéma : quatre films tirés de Les mains d’Orlac, à la télévision un petit bijou signé Jean-Christophe Averty tiré du Péril bleu, ...).
Touche à tout car selon son propre aveu il devait « écrire pour vivre », il est cependant plus connu pour ses œuvres fantastiques (il est d’ailleurs considéré comme le père du Merveilleux scientifique, ancêtre de la science-fiction française), Le docteur Lerne, sous dieu, Un homme chez les microbes, Les vacances de monsieur Dupont,...
Mais on lui doit aussi des romans policiers (? Lui ?, Le mystère du masque,...), des romans historiques (Les mousquetaires des Halles) ou des romans (La jeune fille du yacht), une pièce de théâtre (L’amant de la morte) et des centaines de nouvelles.
Ses nouvelles les plus longues sont le plus souvent publiées en livres après un passage dans la presse, comme c’est souvent le cas entre les deux-guerres (Le professeur Krantz, L’homme truqué, Le brouillard du 26 octobre, La damnation de l’Essen,...). Mais la plupart d’entre-elles sont restées prisonnières des pages des journaux ou des revues. On ne les trouve que dans les archives de Monsieur Jean-Maurice Leclerc, son plus jeune fils. Et ... dans Gallica.
Imaginez six gros classeurs enfermant les tapuscrits et les épreuves annotés des futures nouvelles. Une récurrence : la quasi-totalité des ces centaines d’histoires ont été publiées dans un seul périodique : Le Matin.
Le Matin, quotidien français crée en 1884 et disparu en 1944, collaboration oblige, publiait une rubrique fort courue ; « les milles et un matin » (ou « les contes des mille et un matin », selon la période). Pour beaucoup d’auteurs c’est un gagne-pain régulier. Maurice Renard y publiera des centaines de nouvelles (pas loin de 600 entre 1913 et 1940 – bien que l’auteur soit décédé en 1939).
Dans ce fourmillement de textes tous les genres, tous les sujets sont abordés. Donc lire, lire et relire. Jusqu’à Jérôme.
Jérôme dont on peut suivre la vie (Le photographe insoupçonné) et la carrière de ses débuts comme enquêteur (Chez le voyant), puis inspecteur (Le coup de la surprise, Trente ans après), commissaire (Comment John quitta ce monde), jusqu’au très respecté commissaire divisionnaire (Ce qui s’est passé, L’ingénu). Il mène l’enquête entre 1933 et 1939, en tout 26 nouvelles. Comme souvent, Maurice Renard s’amuse à brouiller les pistes : la chronologie de publication ne respecte pas celle de Jérôme. La seule date précise nous indique que Jérôme est inspecteur en mai 1928 (Trente ans après).
Jérôme est le plus souvent le narrateur de l’histoire mais il arrive à Maurice Renard de se mettre en scène (L’ingénu, Mors et vita)
Voilà plus de 70 ans Maurice Renard disparaissait, à l’aube d’une terrible guerre. Le Maître du merveilleux scientifique pouvait-il s’imaginer qu’il ne ressortirait pas vivant de l’hôpital de Rochefort ? Admis pour une opération de la prostate, il ne s’est pas réveillé. Tout simplement. Jérôme, à n’en pas douter, aurait trouvé l’occasion d’une ultime enquête.
Pour conclure : "ce qui suivit ce curieux raisonnement ne fit qu'en démontrer l'exactitude, mais ne vaut pas la peine d'être rapporté". (L’affaire de la maison bleue).

Le Centre du livre et de la lecture en Poitou-Charentes a publié en version numérique Les aventures du Commissaire Jérôme dans "Les clefs du patrimoine écrit", sa bibliothèque numérique du patrimoine de Nouvelle-Aquitaine.