La presse algérienne de la seconde guerre mondiale à l'indépendance : 1939-1962
La BnF possède de nombreux périodiques des XIXe et XXe siècles publiés en Algérie coloniale (1830-1962). Reçues par dépôt légal, ces publications diverses se font l’écho de l’actualité et renseignent sur la vie quotidienne et les débats agitant la colonie. Ce quatrième et dernier billet est consacré à la période allant de la Seconde Guerre mondiale à l'indépendance de la République algérienne en 1962.
M'zab, Ghardaïa, place du marché, 1950 / Philippe Joudiou
Pendant la Seconde Guerre mondiale, la censure préventive et le régime d’autorisation préalable s’abat sur l’ensemble de la presse algérienne. La presse politique musulmane est particulièrement visée de même que la presse de gauche. Plusieurs titres disparaissent comme Le Petit Sétifien apparu dès 1905 sous le nom de L’Union républicaine de Sétif. D’autres se sabordent à l’instar d’Alger républicain en 1940 qui reparaît en octobre 1943, repris par une équipe de résistants. Il devient progressivement un quotidien communiste et prend part à la campagne antinationaliste.
Parmi les titres qui continuent de paraître durant l’Occupation figure L’Écho d’Alger dont le directeur de publication, Alain de Sérigny, lance un nouvel hebdomadaire en 1942, Alger-Soir. Durant la guerre, le Parti communiste algérien parvient à faire paraître clandestinement quelques numéros de La Lutte sociale.
Devenue en juin 1943 capitale de la France libre, Alger est, de façon plus ou moins éphémère, le lieu de parution de plusieurs publications aussi diverses que Tam, « l’hebdomadaire de l’Empire », Tourbillon, le « Journal des enfants de France et de l'Empire », mais aussi du Journal officiel de la République française.
La législation de guerre applicable à la presse est toutefois maintenue jusqu’à la loi du 28 février 1947 qui met fin à l’autorisation préalable, et celle du 7 mai 1947 qui supprime la censure préventive. Parmi les titres sortis après-guerre, citons à Alger La Dépêche quotidienne d'Algérie « organe de grande information » qui entend renseigner son lectorat « en pleine neutralité », ou à Oran, Écho-Soir, lancé par Pierre Laffont le directeur général de L’Écho d’Oran. Tous deux apparus en 1949, ils paraissent jusqu’aux années 1962-1963.
Du côté de la presse nationaliste, le Parti du peuple algérien de Messali Hadj redevenu légal sous le nom de Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD), ainsi que les confréries religieuses font renaître des publications en arabe mais également en français afin d’obtenir une audience plus grande, notamment parmi la jeunesse.
En 1948, le nationaliste Ferhat Abbas, président de l’Union démocratique du manifeste algérien (UDMA) fonde El Watann (La Patrie), sans lien avec le titre homonyme actuel.
En 1949, est créé Al-Chouala. Malgré des tirages très faibles (en 1948, seuls 4,9% des hommes et 1,6% des femmes sont capables de lire le français, encore moins l’arabe), la presse politique algérienne est rapidement victime d’une répression par l’administration qui va croissant à partir de 1952. La loi n° 55-385 du 3 avril 1955 institue un état d'urgence. L’Algérie entre durablement dans un conflit qui ne prend fin qu’avec l’indépendance de la République algérienne démocratique et populaire.
Dans son édition de 1962, L’Annuaire de la presse introduit la section « Algérie » par ces mots : « A la suite des événements qui se sont déroulés en Algérie au cours de ces derniers mois, des changements très importants sont intervenus dans la Presse Algérienne. D’autre part, il est vraisemblable que d’autres modifications non moins importantes se produiront après le 1er juillet 1962, date fixée pour le vote sur l’autodétermination ».
Retrouvez les autres billets de la série sur la presse dans l'Algérie coloniale :
- La presse dans l'Algérie coloniale : 1830-1880
- L'âge d'or de la presse algérienne : 1880 - 1914
- La presse algérienne d'une guerre à l'autre : 1914-1939
Pour aller plus loin
Accessible sur Gallica :
- La sélection Presse algérienne dans Presse et revues, une sélection des titres de presse sur l'Algérie coloniale numérisés dans Gallica
A consulter à la BnF ou via abonnements :
- Ageron, Charles-Robert, « Regards sur la presse politique musulmane dans l’Algérie « française », Genèse de l'Algérie algérienne. Volume 2., Saint-Denis, Éditions Bouchène, « Histoire du Maghreb », 2005, p. 325-354
- Bellot, Marina, Demougin, Laure, La presse coloniale : à la conquête des « Français d'un autre monde », Retronews, 15/12/2021
- Demougin, Laure, L'empire de la presse : une étude de la presse coloniale française entre 1830 et 1880, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2021
- Guignard, Didier. « Comptes rendus. Arthur Asseraf. Electric News in Colonial Algeria. Oxford, Oxford University Press, 2019, 223 p. », Annales. Histoire, Sciences Sociales, vol. 75, no. 2, 2020, pp. 352-354.
- Ihaddaden, Zahir, Histoire de la presse indigène en Algérie, des origines jusqu'en 1930, Alger, les Editions Ihaddadene, 2003
- Legg, Charlotte Ann, The new White race: settler colonialism and the press in French Algeria, 1860-1914, Lincoln, University of Nebraska Press, 2021
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