A l'occasion des Journées européennes du Patrimoine...
Il y a deux choses dans un édifice : son usage et sa beauté.
Son usage appartient au propriétaire, sa beauté à tout le monde »
Victor Hugo, Guerre aux démolisseurs !
Voir aussi la Journée du Patrimoine à la BnF
Source: Bibliothèque nationale de France
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b69076997
Événement culturel enregistrant chaque année plus de 11 millions de visites, les Journées du patrimoine sont l'aboutissement d'une lente prise de conscience. C’est au 19e siècle que le sentiment d’un patrimoine monumental et culturel à préserver - à transmettre - a connu sa gestation.
Déjà en 1787, Quatremère de Quincy s’inquiétait du sort fait à l’histoire des arts, si les « édifices dépositaires du génie de chaque siècle, au lieu d’acquérir en vieillissant cette vénération publique qui doit les rendre sacrés, se trouvaient condamnés, comme les productions éphémères de la mode, à ne paraître un jour que pour faire place à ceux du lendemain. »
Plusieurs noms sous l’Ancien Régime s’étaient déjà illustrés par leur sensibilité au patrimoine, apport d’autant plus précieux que leur matériau avait pu disparaître ensuite : Gaignières, Montfaucon ou encore l’abbé Lebeuf.
Suite aux dispersions et aux destructions révolutionnaires, l'idée de patrimoine prend définitivement son essor, et s’étend aux œuvres d’art. Ce sont des biens fondamentaux, inaliénables, considérés au travers d'une perspective morale ou pédagogique. Ils permettent de s’interroger sur les origines de la nation, à l’exemple de Michelet sur la créativité artistique du Moyen Age.
Mais faut-il accepter ce passé en l’état, ou bien chercher à le faire revivre ? Entre indifférence et restauration abusive, une autre forme d’héritage se développe : le musée. Conçu comme centre idéal d’un patrimoine universel et lieu d’initiation - sur le modèle du Louvre de Vivant Denon - il peut aussi être vu comme une sorte de reliquaire de l’art, sur le modèle du Musée des monuments français d’Alexandre Lenoir, de l’Hôtel de Cluny de Du Sommerard, ou encore du nouveau Musée des monuments français conçu sous l’influence de Viollet-le-Duc.
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b7757048z
En 1830 à l’initiative de Guizot est créée une inspection des monuments historiques chargée de dresser la liste des édifices à protéger. A la suite d’un Nodier (son Voyages de l’ancienne France) d’un Destailleur ou d’un Guilhermy, Prosper Mérimée, par son enquête sur le terrain, représente bien l’intuition moderne du patrimoine. Inspecteur des monuments durant un quart de siècle, il réalise un véritable tour de la France monumentale de 1834 à 1839.
Du domaine construit, de l’art, la notion de patrimoine s’étend enfin à la mémoire de l’espace, aux légendes, à la langue et à l’environnement. Il se diffuse aussi sur un plan local par la mise en valeur d’identités régionales, sous l’influence d’un Arcisse de Caumont, d’un Alexandre du Mège, promoteurs d’une prise de conscience et d’une sociabilité culturelles régionales.
Arnaud Dhermy
Lire aussi :
Alexandre Lenoir, Annales françaises des arts, des sciences et des lettres, 1819-1823.
Victor Hugo, Guerre aux démolisseurs !, Le dernier jour d'un condamné, Littérature et philosophie mêlées, 1858, p.348
Prosper Mérimée, Discours aux membres de la Société des Antiquaires de Normandie, 31 juillet 1854.
Maurice Barrès, Pour les Eglises de France, enregistrement d'un discours à la Sorbonne, 10 février 1914 (Archives de la parole).
Publié initialement le 18 septembre 2009.
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