Le phare de Walde : dernier phare métallique de France
Le phare de Walde, près de Calais. (D’après une photographie de M. Ruffin.)
La Nature : revue des sciences et de leurs applications aux arts et à l'industrie : journal hebdomadaire illustré / rédacteur en chef Gaston Tissandier, 23/06/1894
A la limite entre Mer du Nord et Manche, le Phare de Walde, unique en France, trône toujours sur sa structure sur pilotis, tout en métal. Construit en 1859, sur la plage de Marck (environ 1 500 mètres du rivage à marée basse), près de Calais, sa structure lui confère une forte résistance aux assauts des vagues qui le traversent, et la meilleure adaptation sur un sol mouvant constitué de sable. Mais la mer oxyde le métal et la force des flots entraine du jeu au niveau des tirants et des difficultés d’entretien des vis et écrous de serrage.
Département du Pas-de-Calais /Sté d'éditions cartographiques (Paris), 1911
Traité d'architecture.... Planches 1 / par Léonce Reynaud,...,1867-1870
La structure métallique possède trois niveaux : le premier, constitué d’un fort pilier central autour duquel rayonnent 6 piliers moins épais, le tout maintenu par des tirants, est enfoncé à 5 mètres de profondeur dans le sable, selon un système de pieux à vis inventé par un ingénieur anglais, M. Mitchell ; au deuxième étage, se trouve le logement du gardien, une plate-forme hexagonale de 7 mètres d’envergure, munie d’un balcon circulaire avec rambarde ; enfin au sommet, à 11 mètres au-dessus des flots à marée-haute, se trouve la coupole et sa lanterne en cuivre et verre, renfermant un feu fixe, sans éclipse, varié d’éclats rouges.
Fig.93. – Elévation du phare de Walde, construit sur pieux à vis
Les Travaux publics de la France [...] Tome cinquième, Phares et balises : Avec 50 planches phototypées, 200 gravures et une carte en chromolithographie. Tome 5 / E. Allard...
Alimentée à l’origine par le gardien avec de l’huile, puis avec du gaz propane, la lanterne subit une explosion à la fin du XIXème siècle. De fait, le phare est automatisé en 1899 et dépourvu de son gardien. La lanterne est retirée en 1986 mais est toujours visible à la capitainerie du port de Boulogne-sur-Mer. Actuellement, le phare comporte une petite lanterne solaire, de faible lueur dans la nuit. Pour les navires, il sert surtout de point de repère dans la journée.
Le phare de Walde est classé au titre des monuments historiques depuis juillet 2022.
Les deux phares disparus du Cap de La Hève
Les phares / par Léon Renard,... ; ouvrage illustré de 53 vignettes par Jules Noël, M. Rapine, etc., 1867
Le Cap de la Hève, qui porte plusieurs autres désignations comme Chef de Caux, Heurt d’Aine, Chef de Seine ou encore Foyer de guerre, est situé en Normandie, à Sainte-Adresse, près du Havre. Ses falaises se voient dotées en 1364 d’une première tour à feu, sous le règne de Charles V. Elle sera détruite au XVIème siècle par un éboulement de la falaise minée par les flots.
Carte de la baie de Seine et d'une partie de la Manche. 1827
Au début du XVIIIème siècle, l’ensemble du monde marin se mobilise pour obtenir la construction de quatre phares, dont deux au Cap de la Hève, pour le balisage de la Baie de Seine, après le passage de la péninsule du Cotentin. Demande appuyée par une crainte économique de détournement des navires marchands sur les côtes anglaises, mieux indiquées depuis 1724 et la construction des trois feux de l’ilot des Casquets (îles anglo-normandes). Le projet n’aboutit pas.
Nouvelle carte réduite de la Manche de Bretagne / Degaulle, Jean-Baptiste (1732-1810). Cartographe, 1776 [avec un encadré sur l’«observation des nouveaux phares de Normandie » et l’indication des «brasseiages et qualités des fonds»]
Il faut attendre l’hiver 1764-1765, qui voit plus d’une quarantaine de navires couler ou s’échouer sur ces côtes, pour que le projet soit plus fortement envisagé et aboutisse à son accord en 1773. Les quatre phares (phares Gatteville à Barfleur et Louis XV à la pointe de l’Ailly et les deux phares du Cap de la Hève) sont ouverts en novembre 1775. Ceux de la Hève sont installés à une centaine de mètres de la falaise.
[Poème par Léon Buquet, 1839]
Histoire du Chef de Caux et de Sainte-Adresse, par Alphonse Martin, 1888
Guides-itinéraires. De Paris au Havre / par Eugène Chapus,..,1855.
Les feux à charbon, choisis à la Hève, car utilisés quasiment partout (feux de Chassiron, des Baleines, de Cordouan, de Fréhel ou du Stiff), nécessitent 600 kilogrammes de charbon par nuit. Afin d’en réduire le coût excessif, il est rapidement envisagé de remplacer le dispositif à charbon par des réflecteurs sphériques à mèche plate, de type Sangrain, dont les phares de la Hève sont équipés dès 1779.
Science progrès découverte : publié avec la participation du Palais de la découverte, 19/08/1893
En 1811, la tour Sud voit l’arrivée du système de réflecteurs à double effet de Bordier Marcet. En 1863, les phares passent de l’huile aux feux électriques, avec des feux de type Serrin, après un essai sur l’une des deux tours, montrant une intensité lumineuse augmentée de près de six fois. Le système est perfectionné en 1875 avec une lanterne, toujours électrique, mais utilisant le système à lentilles de Fresnel. En 1893, une nouvelle lanterne lenticulaire est installée (cf figure ci-dessus). Enfin au début du XXème siècle, des lampes à incandescence, dégageant moins de chaleur que celles à arc, sont installées.
La tour Nord du phare de la Hève
Le Yacht : journal de la navigation de plaisance, 01/09/1945
Les deux phares, guidant les navires à l’entrée de l’estuaire de la Seine, sont détruits par l’artillerie alliée, lors de la Libération de 1944. Le nouveau phare du Cap de la Hève (commune de Sainte-Adresse), une tour octogonale de 28 mètres de hauteur, est ouvert en 1951 et se voit doté d’un radar sommital en 1975, pour mieux assurer les approches des navires.
Vue aérienne du Cap de la Hève, vers 1960. (Coll. Jean Guyader).
Le phare de Port-Haliguen : aux portes de la baie de Quiberon
À la France : sites et monuments. L'Armorique (Morbihan, Finistère, Côte-du-Nord) / [notices de Onésime Reclus], 1903
Au milieu du XIXème siècle, le fanal de la digue de Port-Haliguen (presqu’île de Quiberon, Morbihan, Bretagne) s’éteignait sous les assauts des violentes rafales de vent, avant même d’atteindre le haut du mât où on l’installait. Les ingénieurs, en charge de la construction d’un phare, décident de le construire plus en retrait, au bout d’une des deux nouvelles jetées prévues pour créer un petit port. Les bateaux y sont mieux abrités des forts vents d’ouest que dans le port de Quiberon.
Carte du Morbihan et la presqu'île de Quiberon / Bellin, 1764 (Port-Haliguen est situé à l’extrémité de la presqu’île de Quiberon, sur sa côte Est)
Le phare de Port-Haliguen permet d’embrasser la baie de Quiberon avec un point de vue remarquable, rapporté ainsi :
En face, on voit Carnac-Plage, la presqu’île de Locmariaquer, l’entrée du Golfe du Morbihan, Port Navalo et la presqu’île de Rhuis »
Le phare n’est plus utilisé depuis 1972. Il est ouvert lors des Journées du patrimoine pour une visite en petits groupes. Une occasion où sont déployées des archives sur son histoire marquée notamment par le débarquement d’Alfred Dreyfus, lors de son retour en France, dans la nuit du 30 juin au 1er juillet 1899, pour son second procès.
A Port-Haliguen (+ Maison de M. Henri Cérard, où se trouvait notre dessinateur, Georges Redon, au moment du débarquement du capitaine Dreyfus. – X Cale où a débarqué Dreyfus)
La Vie illustrée : journal hebdomadaire, 06/07/1899
Le petit port, longtemps dédié à la pêche (principalement sardines et homard) s’est transformé en créant deux nouveaux ports (Port-Haliguen 1 en 1968 et Port-Haliguen 2 en 1971) pour développer des activités de plaisance. Trois nouveaux phares sont construits à l’entrée du port, mais le tout premier est encore là.
Zig-Zags en Bretagne. La Bretagne qui s'en va / par H. et G. Dubouchet…, 1894
Les phares des côtes de France n’attendent que votre visite, pour vous raconter leurs petites et grandes histoires. Bonne balade iodée auprès de ces vigies éclairant la nuit !
Pour aller plus loin
Série de billets de blog Gallica : « Promenades aux phares »
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