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Vincent Voiture, un témoin du monde politico-littéraire du XVIIe siècle

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Le poète Vincent Voiture (1597-1648) est né le 24 février 1597 à Amiens d’un père marchand de vin. Membre de l'Académie française dès 1634 et courtisan protégé des plus grands, il exerça aussi diverses charges à la cour de France, comme en témoigne son abondante correspondance.

La préface de l’édition de 1650, Les œuvres de Monsieur de Voiture, est adressée au Prince de Condé. Elle est rédigée par son neveu Martin Pinchesne (1616-1680), lui-même homme de lettres.  

« Quoi qu’il ait passé la meilleure partie de sa vie dans les divertissements de la cour, il ne laissoit pas d’avoir beaucoup d’étude et de connaissance des bons auteurs »

 

 
Un homme de cours, témoin de son temps

Vincent Voiture est d’abord un homme de cours proche de Gaston d’Orléans (1608-1660), frère cadet de Louis XIII (1601-1643).

Il est le protégé du cardinal de Richelieu (1585-1642). Certains propos de son neveu le rappellent clairement : « Si le neveu ne participe entre autre chose aux bonnes qualités d’un oncle que vous avez honoré de quelques estimes, il le fait pour le moins dans la passion avec laquelle il est ».

Portrait du cardinal de Richelieu en buste, de 3/4 dirigé à droite : estampe

Cette partie de l’hommage du neveu à son oncle précise aussi l’estime dont Vincent Voiture bénéficiait de la part de Louis II prince de Condé (1621-1686) dit le Grand Condé.

Vincent Voiture dédie ainsi une lettre au futur prince de Condé sur sa victoire à la bataille de Rocroi 1643 au cours de la guerre de Trente Ans. « Je me réjouis avec votre Altesse de ce que j’entends dire qu’elle a gagné la plus belle victoire ».
Un poème est adressé au cardinal Mazarin, qu'il faut replacer dans le cadre de la Fronde, lorsque Mazarin dut s’exiler en 1651 : « Dessous les flots vous a fait trébucher. / On ne lui doit ce crime reprocher ».

à ce courtisan proche des plus grands, on ne manquait toutefois pas à l’occasion de rappeler qu’il était le fils d’un marchand de vin d’Amiens.

Un poète précieux

Le poète Vincent Voiture appartient au courant précieux, très en vogue dans les salons littéraires de la première partie du XVIIe siècle. L'une de ses principales protagonistes est Catherine de Vivonnes, marquise de Rambouillet (1588-1665). Vincent Voiture fait partie de ceux qu'elle reçoit à l’Hôtel de Rambouillet, parmi d'autres invités illustres comme le jeune Armand du Plessis de Richelieu : « Nous n’oserions présenter ici… une liste des familiers illustres que comptait dès le début l’Hôtel de Rambouillet ». Vincent Voiture a aussi été en relation avec François-Honorat de Beauvilliers, duc de Saint-Agnan (1607-1687), homme de lettres et protecteur des gens de lettres. Vincent Voiture lui dédie des vers : « Amis des chevaliers antiques. Amis des mélancoliques ».

Ses stances et ses sonnets ont donné plus de liberté à la poésie de son temps. On peut lire par exemple son célèbre Sonnet à Uranie

ou le sonnet de la « Belle Matineuse »

Il excelle également dans le rondeau humoristique, par exemple :

Vincent Voiture est membre de l’Académie française dès 1634.

Après sa mort à Paris le 26 mai 1648, le poète et prosateur Jean-François Sarasin (1614-1654) lui dédie en 1649 une pièce de vers La pompe funèbre de Voiture :

« Voiture ce pauvre mortel,
Ne doit plus être appelé tel
[...] Voiture est mort c’est grand dommage. »

Cet hommage est un témoignage de la notoriété dont il jouissait.

Les Œuvres de Voiture ne sont réunies qu’après sa mort, par son neveu Martin Pinchesne,
 

 
Elles seront fréquemment rééditées ensuite. Jusqu’à la fin du XVIIe siècle, son œuvre est très appréciée. La querelle de Girac et de Costar à son sujet a un long retentissement (voir par exemple la Suite de la défense des œuvres de Mr. de Voiture par Pierre Costar en 1655).

Au siècle suivant, Voltaire écrit que « Voiture donna quelque idée des grâces légères de ce style épistolaire qui n’est pas le meilleur, puisqu’il ne consiste que dans la plaisanterie. C’est un baladinage que deux tomes de lettres dans lesquelles il n’y en a pas une seule instructive, pas une qui parte du cœur, qui peigne les mœurs du temps et les caractères des hommes ; c’est plutôt un abus qu’un usage de l’esprit. » et « C’est le premier qui fut en France ce qu’on appelle un bel esprit. Il n’est guère que ce mérite dans ses écrits, sur lesquels on ne peut se former le goût ; mais ce mérite était alors très rare. On a de lui de très jolis vers, mais en petit nombre ».  (Le Siècle de Louis XIV. Œuvres complètes de Voltaire, Garnier, 1878, tome 14, p. 541 et p. 143).

Paul Pellisson se fait l’écho de l’opinion de son temps dans son Histoire de l’Académie française : « Ses œuvres ont été publiées après sa mort en un seul volume, qui a été reçu du public avec tant d’approbation, qu’il en fallut faire deux éditions en six mois. Sa prose est ce qu’il y a de plus châtié et de plus exact... la lecture en est infiniment agréable. Ses vers ne sont peut-être guère moins beaux, encore qu’ils soient plus négligés. »

Un peu oublié du grand public aujourd’hui, Vincent Voiture est un témoin de son époque. Poète, homme de lettres et homme de cour, il côtoie les plus grands et fait partie des beaux esprits du XVIIe siècle. Sophie Rollin souligne combien ses lettres échangées dans la sphère privée prennent un statut de texte littéraire : « Ces lettres jouent un rôle fondateur dans la formation de l’épistolaire en tant que genre littéraire ».

 

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