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Rire dans les galeries des peintures au Salon 1/2

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Au XIXe siècle, les salons caricaturaux, ces comptes-rendus comiques du Salon de peinture et sculpture, présentent des parodies et satires des œuvres exposées, majoritairement des peintures. Ils moquent ainsi la technique et le vocabulaire plastique des artistes peintres. Allons donc rire au Salon…

Le Salon de 1874 / Stop. Journal amusant, 1874, 6 juin

 

Rire du travail et des choix plastiques de l’artiste

Si ces éléments sont parfois difficiles à traduire par le dessin de la caricature, on trouve cependant des exemples où choix de composition, de format, de luminosité, de couleur, de technique picturale sont pris pour cible par les auteurs des salons caricaturaux…

Tailles et formats

La taille des toiles présentées est un thème récurrent de moquerie. Le choix de celle-ci par l’artiste est souvent stratégique : il faut essayer d’être remarqué dans un accrochage très chargé.

 

Certains peintres, coutumiers de formats caractéristiques, sont ainsi régulièrement attaqués année après année : Horace Vernet pour ses immenses toiles militaires, Ernest Meissonier pour ses petits formats minutieux de scènes de genre ou de batailles aux multiples détails...

Les formats représentent un ressort comique pour les caricaturistes, que les peintures soient réelles ou imaginées :
 

 

Compositions

La composition, c’est-à-dire la mise en page de la peinture, est aussi scrutée de près par les caricaturistes qui soulignent, accentuent ou créent des erreurs de perspective, de perception…

 

 

Certains tableaux présentés semblent n’être qu’une fraction d’une composition plus vaste qui aurait été découpée...
D’autres sont jugés peu lisibles par le public, le sujet principal de l’œuvre n’occupant qu’une place très restreinte sur la toile…
 

 

 
Devant des choix de composition qui peuvent sembler inhabituels, les auteurs des salons caricaturaux s’interrogent sur la finalité recherchée par les artistes…

 

 

Technique picturale

Divers éléments de technique picturale sont aussi moqués : luminosité, couleur, touche de l’artiste…
Certains tableaux sont critiqués pour leur noirceur, comme ci-dessous « dans une cave », d’autres à l’inverse, souvent des représentations du soleil, insoutenables pour les yeux, éblouissent le spectateur.

 

 

 

 
Evoquer et faire rire de la couleur des toiles exposées est une tâche difficile. En effet les publications des salons comiques sont illustrées de gravures en noir et blanc, seuls quelques exemplaires sont parfois aquarellés. On trouve cependant quelques charges de peintures exposées qui font référence à des considérations de couleurs, dans le texte de la légende.

 

 

On moque des toiles jugées trop « propres », la peinture académique, lisse, au rendu fini, au travail et à la touche invisibles…
Et on moque aussi les toiles jugées « sales », la peinture épaisse, les effets de matière et les empâtements de la peinture de l’école de Barbizon (Charles François Daubigny ci-dessous) et la touche visible et rugueuse de la peinture des réalistes, les couleurs terreuses, au bitume et à la « boue d’Ornans » pour Courbet…

 

Salon de 1868 / Cham ». Le Charivari, 1868, 31 mai (Charles-François Daubigny, Le Printemps)

 

Rire des convictions esthétiques, des querelles d’écoles

Au cours du siècle, les convictions plastiques et le rapport au réel des artistes, dessinent des courants picturaux caractéristiques. Les salons comiques se font bien-sûr l’écho de ces différents partis pris esthétiques, de ces familles plastiques et des querelles d’écoles qui animent le débat artistique.
Alors que la peinture académique est mise en cause, le dessinateur Gill se représente, ci-dessous, tirant l’oreille à une statue antique :

 

 

Les salons caricaturaux mettent en scène des oppositions, opposition entre école classiques et école « fantaisiste »…

 

 

 

… opposition entre artistes « fantaisistes » (Charles Chaplin, peintre de femmes et de scènes de genre et Edouard Dubuffe, portraitiste célèbre et leur peinture à « l’eau de rose ») et artistes réalistes (la «bande de Courbet et de Manet»).
Courbet est représenté un balai au macadam à la main en guise de pinceau, allusion à la peinture sombre au bitume qu’il utilise, comme les artistes de l’école de Barbizon, Manet est représenté par un chat noir comme souvent, depuis L’Olympia :

 

 

Les salons caricaturaux présentent aussi des allégories de la peinture moderne, femme à la tenue négligée, à la robe tachée de macadam, échevelée…

 

 

 
A suivre prochainement…
Salons caricaturaux. 10, Rire dans les galeries des peintures au Salon 2/2
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