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Les premières années de la Fédération française de Rugby

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En octobre 1920, la Fédération française de Rugby (FFR) s’émancipe de l’Union des sociétés françaises de sports athlétiques (USFSA) et devient une fédération sportive à part entière. Ses débuts  florissants multiplient le nombre de clubs et de joueurs. Si elle est sans le sou dans un premier temps, cette toute jeune Fédération cherche à maintenir l’idée de l’amateurisme ; elle doit pourtant lutter contre le « fléau » qui gangrène le rugby des clubs : l'argent.

 

Fédération française de rugby, Championnat de France, le 23 Novembre 1924, BNU Strasbourg

La FFR existe officiellement depuis le 11 octobre 1920. Elle a pris la suite du comité de rugby de l’Union des sociétés françaises de sports athlétiques (USFSA). Ses débuts sont humbles, sous la houlette de Frantz Reichel, joueur emblématique du Racing club de France, mais aussi et surtout déjà dirigeant avisé de cette discipline confinée en France. Ses nouveaux dirigeants imaginent le rugby d’une manière désintéressée, un peu comme l’idéal britannique du sportsman étudiant et de bonne famille. La question de l’argent n’est pas un sujet, encore moins pour la nouvelle institution née sans un centime, sans toit ; seul un organe d’expression nommé Rugby (l’ancêtre de Rugby Mag) maintient le lien avec les affiliés. La commission des calendriers est famélique, seuls deux ou trois membres du bureau expédient les affaires courantes durant cette première année d’existence.

Rugby : journal illustré publiant L'Officiel de la Fédération française de Rugby, 8 janvier 1921

Pas d’argent à la Fédération

Il n’y a pas d’argent à la Fédération, c’est une certitude, mais il y en a déjà dans le rugby français des clubs ; là aussi, cela ne fait aucun doute. Les annonces des clubs français fleurissent pour recruter les meilleurs joueurs contre une rémunération garantie. La FFR est démunie face à ce fléau. Durant ces années, les affaires se multiplient au point que l’USFA (qui organise le sport avant 1920) invente une licence pour les étrangers afin d’empêcher le commerce de talents.

Chaque village a son club

Dans les années 30, le rugby français connaît un essor grandissant. On frôle les 600 clubs alors qu’ils étaient au nombre de 241 à la création de la FFR. En dessous de la Loire, le rugby s’implante vigoureusement, chaque village a son club, chaque club a son derby. Le rugby n’est plus seulement l’affaire des cols blancs du Racing ou du Stade français, c’est aussi celui des territoires et des petits entrepreneurs. Des championnats et de la passion. Les idéaux britanniques sont éparpillés par les rivalités exacerbées ; le rugby change de nature. La ferveur des derbys endiablés, la tentation d’en faire un peu plus que de défendre l’honneur, l’appétit pour une valorisation autre que celle d’un trophée l’emporte sur l’amateurisme qui n’est plus qu’un mot pour tous ces clubs : l’argent pour beaucoup est une source de motivation à défaut d’inspiration.

Colombes, match Racing-Stade, 2 février 1931, Agence Rol

Une nouvelle commission

Mais la FFR, présidée par Octave Léry [1920-1928 ?], n’est pas exemplaire non plus lorsqu’une indemnité est votée pour les internationaux en déplacement alors que l’amateur, en principe et par définition, se doit de supporter ses propres frais. Mais elle peut se le permettre désormais, car ses caisses se remplissent  : elle vient d’être reconnue « association d’utilité publique » et échappe ainsi au droit des pauvres perçu sur les spectateurs (jusqu’à 9 % de taxe) ainsi qu’à une autre taxe de 25 % instaurée un an plus tôt.

Cependant, certains décident de réagir pour lutter contre « ce fléau qu’est le professionnalisme », dénoncé par Gaston Vidal, sous-secrétaire d’État à l’enseignement technique, mais aussi délégué pour la Fédération du Comité d’Armagnac-Bigorre. Il sera radié de la Fédération pour ces propos, puis réhabilité et enfin deviendra président de la toute nouvelle commission d’amateurisme et des licences (1922). Il n’y a pas de doute : l’argent est tabou ! Gaston Vidal tient à lutter contre « ce professionnalisme honteux ». Les clubs fautifs sont sous surveillance étroite, et cela entretient aussi un climat de défiance avec les Britanniques purs amateurs et qui ne veulent pas entendre parler de gros sous.

 Parc des Princes, Gaston Vidal serre les mains des joueurs, le 31 décembre 1923, Agence Rol

Hélas, la commission n’a aucune autorité ; les joueurs radiés en début de saison sont requalifiés parfois même en cours de saison. C’est la crise dans le rugby français, il faut assainir : l’ensemble des membres de la commission va démissionner, de nouveaux membres non issus des clubs les remplacent. Les joueurs suspendus ou radiés sont amnistiés. Les règlements généraux de la FFR se durcissent. Après quelques belles années de croissance, c’est le temps des divisions avec les premières menaces de rupture des relations. Avec les Britanniques dans un premier temps, mais aussi certains clubs. Sale temps sur le rugby français.

La Commission d'amateurisme et des Licences

Créée en 1922, elle a pour mission de veiller à interdire toute forme de « manque à gagner ou de racolage et réglementer les frais de voyages ». Gaston Vidal en est le président. La commission veille entre autres sur les clubs corporatistes, les sociétés immobilières proches qui achètent des terrains, construisent des sta

des et prêtent (ou donnent) de l’argent à des joueurs pour ouvrir des commerces. La commission ne sait plus où donner de la tête : des noms de joueurs ayant touché de l’argent sont divulgués dans la presse, d’autres clubs n’hésitent pas à accuser leurs voisins de professionnalisme, les décisions sont incohérentes et manquent d’objectivité, bref même si un règlement drastique est élaboré en 1924 (tous les joueurs mutés sans exception doivent désormais faire une demande de mutation devant la commission), la commission sera dissoute en 1926, laissant le champ libre à la circulation de l’argent.

 

L'Olympiade Culturelle est une programmation artistique et culturelle pluridisciplinaire qui se déploie de la fin de l’édition des Jeux précédents jusqu’à la fin des Jeux Paralympiques. La série "200 ans de ballon ovale : l’histoire du rugby" de Gallica s'inscrit dans la programmation officielle de Paris 2024.

 

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