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Maurice Barrès (1862-1923), ou le culte du moi

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Le 4 décembre 1923, il y a près de cent ans disparaissait Maurice Barrès. Il fut écrivain, homme politique et figure marquante du nationalisme français. Son œuvre Le Culte du moi forme une trilogie.

Jacques-Émile Blanche, Maurice Barrès, 1890.

Dans Sous l’œil des barbares, le premier volet de cette trilogie, il défend l’individualisme de son moi, qu’il faut défendre contre tout ce qui pourrait le contrarier, notamment les « barbares ».  

Il naquit dans l’est de la France et dans un milieu où il n’y avait rien de méridional.

A travers cette citation, nous pouvons percevoir le souci de l’identité collective qui sera celui de La Terre et les morts. Le moi est avant tout défini par son origine, sa formation. Dans l’introduction de cet ouvrage, Maurice Barrès précise d’emblée :

Le patriotisme n'est pas autre chose que l’égoïsme national[...] Tous les penseurs l'ont bien vu, la conservation des corps organisés tient à l'égoïsme.

On perçoit là aussi un discours qui tend à revendiquer une pensée traditionnaliste. On va évoluer du moi individuel au moi national.
 

 

Le moi rentre en contradiction avec ceux qui l’entravent et qui constituent une menace. La menace provient du monde environnant dépourvu de sens. Les Barbares semblent incarner tout ce qui contrevient, menace le moi dans son développement.

Tout de son long étendu, les yeux fatigués par le couchant, seul et lassé, il parut regarder en soi.

Il y a une volonté d’aller vers soi, vers sa vérité. On pourrait faire un parallèle avec certains passages des Nourritures terrestres d’André Gide : « crée de toi, impatiemment ou patiemment, ah ! le plus irremplaçable des êtres ».

Il y voyait grouiller les Barbares, il tremblait à l'idée de descendre parmi eux ce lui était une répulsion et une timidité, avec une angoisse

Il y a un sentiment de menace permanente, un appel à la vigilance. Il faut lutter pour défendre son authenticité, sa vérité profonde.
 
Le deuxième tome de cette trilogie est Un homme libre.
 

 
Ce passage exprime la nostalgie de Maurice Barrès pour ses Vosges natales. Il n'est pas sans rappeler Joachim Du Bellay (1522-1560) avec son sonnet Heureux qui comme Ulysse. Il y a une volonté d’enracinement dans ce terroir lorrain.


Charmes-sur-Moselle - vue générale, carte postale (1880-1945)
coll. Bibliothèque multimédia intercommunale d'Épinal 

 


Charmes, Pont sur la Moselle et le canal de l'Estcarte postale (1880-1945)
coll. Bibliothèque multimédia intercommunale d'
Épinal 

Les ordres religieux ont créé une hygiène de l'âme qui se propose d'aimer parfaitement Dieu une hygiène analogue nous avancera dans l'adoration du Moi

Barrès fait ici un parallèle entre la discipline monastique et la recherche de son moi, qui doit répondre à un désir d’authenticité et d’ordre. La religion répond à ses questions sur le but de sa vie. Le 6 juin 1912, il écrira dans son cahier « Je suis né catholique… »

Le troisième tome du Culte du moi est Le Jardin de Bérénice. Philippe, le héros, s’engage au côté du général Georges Ernest Boulanger (1837-1891). Il organise une élection. Il retrouve dans Arles, Bérénice qu’il a connu autrefois.

Tiens, m’écriais, Petite Secousse je ! j’allais à elle.

Il y a une recherche des racines, du passé. Nous sommes le fruit d’une histoire, d’une continuité à laquelle nous devons fidélité. Nous sommes la résultante de cette continuité. Nous devons rendre des comptes de ce que nous avons fait de la tradition léguée par les générations précédentes. et plus loin
 

J’ai redouté les barbares qui me reprochaient d’être différent ; j’avais le culte de ce qui est en moi d’éternel…

Face à Bérénice qui rêve d’un bonheur inaccessible, il cultive ce qui est permanent dans son moi. Cette affirmation fait encore appel à la notion de continuité et de fidélité.
 

 
La notion de permanence et de continuité est revendiquée à plusieurs reprises dans ce texte.
 
Cette trilogie romanesque contient en germe tout ce qui constituera la pensée barrésienne, notamment La Terre et les mortsLa terre nous donne une discipline, et nous sommes le prolongement des ancêtres

Car le moi se réalise dans la confrontation avec les autres, les barbares. Ne faut-il pas dans la genèse de cette pensée faire intervenir le traumatisme que constitua pour beaucoup la défaite de 1870-1871 face à la Prusse et la perte de l’Alsace et Moselle ?

Cette pensée traditionaliste alimentera la nationalisme intégral de Charles Maurras (1868-1952) et le républicanisme de Georges Bernanos (1888-1948).

 
Pour feuilleter les trois volumes :
 

Le Culte du moi - Sous l'oeil des barbares
 

Le Culte du moi - Un homme libre

Le Culte du moi - Le Jardin de Bérénice

 

Bibliographie


Jacques-Émile Blanche, Maurice Barrès : A Maurice Barrès, 189.

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