Les manuscrits de Pasteur (1/3) : premières découvertes
Rentrés tardivement dans les collections de la Bibliothèque nationale, les manuscrits de Pasteur témoignent d’une vie consacrée à la recherche. Ses cahiers de laboratoire donnent à voir plus encore que des faits et des observations : une pensée à l’œuvre.
Gloire de la IIIe République et célébré de son vivant dans le monde entier, Pasteur, contemporain de Hugo, en est l’égal du côté des sciences ; leurs statues trônent d’ailleurs ensemble dans la cour de la Sorbonne. Cependant, si Hugo organisa dès 1881 son entrée dans ce Panthéon des Lettres que représentait la « Bibliothèque nationale de Paris qui deviendra un jour la Bibliothèque des États-Unis d’Europe… » (codicille à son testament), il fallut attendre 1964 pour que les cahiers, lettres et autres archives de Pasteur rejoignent celles de son confrère littéraire sous les voûtes de la Bibliothèque nationale. Ce don fut célébré par une grande exposition.
NAF 18107, f.393. Enveloppe d'une lettre adressée à Pasteur, qui, bien qu'il ait multiplié les domaines d’expertise, ne fut jamais médecin.
Pourtant, Pasteur est un monument de son vivant : statues, médailles, affiches à quoi s’ajoutent après sa mort les timbres, les billets de banque (en 1966 pour le billet de 5 francs), les noms de rue et d’institutions (écoles, lycées,…)... jusqu’à donner son nom à un cratère lunaire en 1961.
Son musée ouvre en 1935 à Paris, sanctuarisant son dernier lieu de vie, comme l’avaient été précédemment ses maisons d’enfance à Dole et à Arbois. Mais ses carnets et archives scientifiques ne bénéficient pas d’une pareille mise en valeur. Il faut attendre le don des archives à la Bibliothèque nationale par son petit-fils, Louis Pasteur Vallery-Radot. Ce long délai s’explique par le souhait de Pasteur lui-même. Dès 1878, à la suite de son article sur une publication posthume des cahiers de Claude Bernard, Pasteur avait donné la consigne de ne « montrer à personne [s]es cahiers d’expériences ». De fait, Pasteur remarquait dans cet article, à propos du cahier de son illustre prédécesseur :
ce manuscrit est une des révélations les plus curieuses qui se puissent voir de l'influence d'un système défectueux sur l'esprit même le plus juste, le plus voué au culte d'une expérimentation rigoureuse...
Attaché à l’histoire des sciences, Louis Pasteur Vallery-Radot, opta pour un statu quo : s’il décida de ne pas détruire les documents, il n’en permit pas pour autant la communication. Cependant, une des conditions du don impliquait de n’y donner accès qu’après sa mort, qui survint sept ans après, en 1971. Depuis cette époque, ces archives sont conservées au département des Manuscrits de la BnF.
Ce ne sont pas moins de 152 registres de laboratoires, cahiers d’expériences, de projets ou d’enquêtes de terrain, de notes de travail, 16 volumes de correspondance (plus de 4000 pages), 7 volumes de papiers scolaires, 6 volumes de cours, et de nombreuses brochures annotées par Pasteur qui constituent l’ensemble principal des archives de Pasteur à la BnF (inventoriés aux cotes NAF 17923-18112). Autant de preuves de son activité inlassable, gigantesque, et des différents sujets qu’il aborda, lui qui fut chimiste et biochimiste, biologiste et microbiologiste, professeur d'université, lithographe et lecteur...
Premiers registres. NAF 17923-17928
À cet ensemble il faut ajouter d’autres compléments, et notamment les deux importants cahiers (NAF 19773-19774) retrouvés dans un tiroir lors du déménagement du laboratoire de cristallographie de la Sorbonne vers le campus de Jussieu en 1969, à la suite de à la dissolution de l’Université de Paris. Car Pasteur, juste après l’École normale, commença par des études de chimie sous la direction de Jean-Baptiste Biot, spécialiste de l’utilisation de la lumière polarisée.
Portrait de Pasteur à l’École Normale Supérieure. Dans Une page d'histoire du XIXe siècle. Pasteur (l'oeuvre, l'homme, le savant), par Victor Fraitot (1913)
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