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Anne Brontë : la recluse de Haworth

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15 janvier 2020

Moins connue que ses sœurs Emily Brontë, auteur de Wuthering Heights, et de Charlotte Brontë, célèbre pour avoir publié Jane Eyre, Anne Brontë est une femme de lettres britannique discrète qui a néanmoins inspiré les premiers combats féministes.

Patrick Branwell Brontë, Les Soeurs Brontë (Anne, Emily, Charlotte), huile sur toile, vers 1834
National portrait Gallery (Londres)

L’enfance à Haworth

Née le 17 janvier 1820 à Haworth, un petit village isolé du Yorkshire, Anne Brontë a grandi auprès d’un père vicaire et d’une tante venue s’occuper des enfants après le décès de sa mère Maria en 1821. Ses deux sœurs aînées, Maria et Elizabeth, sont mortes de la tuberculose durant leur séjour à l’école de Cowan Bridge. C’est dans ce climat austère qu’elle grandit auprès de son frère Branwell et de ses sœurs Charlotte et Emily.

 Pierre Audiat, « La vie des sœurs Brontë », L'Européen : hebdomadaire économique, artistique et littéraire, Paris, 28/08/1929, p. 4.

Lorsque le frère Branwell reçoit en cadeau des soldats de plomb, les enfants Brontë vont créer le royaume de Glasstown, qui sert de territoire d’écriture à Charlotte et Branwell dans une Afrique imaginaire, tandis qu’Anne forme un duo avec sa sœur Emily autour du royaume imaginaire de Gondal, situé dans une île du Pacifique Nord. C’est dans des livres miniatures de la taille d’une boîte d’allumettes qu’ils rédigent et compilent ces sagas autour de personnages imaginaires. Ce n’est que bien plus tard, en 1941 que l’universitaire Fanny Ratchford retranscrira intégralement les juvenilia, ces écrits de jeunesse collectifs considérés comme les prémices des romans des trois sœurs.

Patrick Branwell, Brontë, Blackwoods magazine, 1829 © Harvard Library

 

J. Blondel, « Cent ans de critique autour d’Emily Brontë », Les Langues modernes : bulletin mensuel de la Société des professeurs de langues vivantes de l'enseignement public, Paris, 1948-05, p. 287-288.

Vers la publication

Nourrie par des lectures variées, qui vont des romans de Walter Scott à Milton et Byron, véritable héros romantique qui fascine les sœurs Brontë, Anne s’entraîne très jeune au métier d’écrivain et rédige des sagas et des poèmes. Sous l’impulsion de Charlotte, les trois sœurs publient dès 1846 leurs poèmes dans un recueil collectif sous le pseudonyme d'Acton, Ellis et Currer Bell. Celui-ci aura peu de succès, mais confortera les sœurs dans leur envie d’écrire. Les poèmes lyriques y sont souvent associés au royaume de Gondal, exprimant la mélancolie et la nostalgie.

La vie de gouvernante

Devant gagner sa vie à 19 ans, comme ses sœurs, Anne va être irrémédiablement marquée par son expérience de gouvernante, dont elle tire un portrait amer dans son premier roman Agnes Grey (1847), dans lequel elle dénonce le manque de rectitude morale chez les enfants de certaines familles riches.

Georges Sadoul, « Le génie dans la cave », L'Humanité : journal socialiste quotidien, 1937-10-23, p. 8.

Inspirée par Walter Scott et les romans gothiques d'Ann Radcliffe ou d'Horace Walpole, Anne continue d’écrire, seule, créant un univers plus réaliste que celui de ses sœurs Emily et Charlotte.

 

Edmond Jaloux, « Les livres », Excelsior : journal illustré quotidien : informations, littérature, sciences, arts, sports, théâtre, élégances, Paris, 09/09/1938, p. 7.

À l’avant-garde des combats féministes

Dans The Tenant of Wildfell Hall, son second roman, Anne relate avec justesse l’expérience de la déchéance en s’inspirant de son frère Branwell, qui s’est enfoncé dans l’alcool et le laudanum. Le livre suscitera le scandale par son réalisme et l'attitude de l'épouse, Helen, qui se rebelle contre son mari volage et finit par prendre la fuite avec leur enfant, ce qui à l'époque était illégal. Publié en 1848, ce roman sera considéré comme l’un des premiers romans féministes.

L'Ouest-Éclair : journal quotidien d'informations, politique, littéraire, commercial, Rennes,1938-05-31

Peu après la mort de Branwell en septembre 1848, suivi par le décès d’Emily en décembre, Anne Brontë meurt de la tuberculose dans la station balnéaire de Scarborough en mai 1849. Elle s’était rendue avec sa sœur Charlotte et son amie Ellen Nussey au bord de la mer, dans l'espoir que l'air marin améliore sa santé. Sa tombe est située dans le cimetière de St Mary's à Scarborough.
 

 W.J. Cleaver, Scarborouh, South Shore, 1886

 

Pour aller plus loin :

La banque d’images de la Brontë Society
Découvrir les manuscrits d’Anne Brontë à la British Library

Retrouvez également tous les billets de cette série consacrée aux Femmes de lettres anglaises :

Terreurs gothiques chez Ann Radcliff
Mary Shelley et le mythe de la création
Une Anglaise en Turquie : Lady Montague
George Eliot : écrire la ruralité
L’engagement social d’Elizabeth Gaskell
L’imagination féminine des romans de Fanny Burney

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