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Les vampires : existence réelle ou fantasmée ?

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Pour conclure cette série sur les vampires, interrogeons-nous une dernière fois sur leur existence et tentons quelques tentatives d’explications rationnelles afin de trancher la question suivante : les vampires existent-ils oui ou non ?

 

Dans le numéro de juillet 1758 du Journal étranger, périodique français édité à Paris de 1754 à 1764, notamment par François Arnaud et Antoine François Prévost, il est question de lutter contre les peurs irrationnelles et les préjugés obscurantistes d’une  partie de la population du XVIIIe siècle, dont l’existence supposée des vampires est une conséquence.
 
Le journal émet donc des hypothèses plausibles à l’apparition des vampires : tout d’abord, la peur, exacerbée par cette « folle du logis » (selon l'expression généralement attribuée à Nicolas Malebranche) qu’est l’imagination, cause des impressions irrationnelles.
 

« Ceux qui les ont vus sont toujours ceux qui les craignent »

stipule en effet doctement l’article en question !
 
Le journal tente ensuite d’expliquer les phénomènes dits surnaturels grâce à des conjectures qui se veulent scientifiques : ceux que l’on appelle « vampires » seraient en réalité les victimes d’une maladie causant une défaillance ressemblant dans ses aspects à la mort ; les malades seraient donc malencontreusement enterrés vivants, ce qui expliquerait que certains d’entre eux resurgissent à la surface. De surcroît, si les corps ne sont pas enterrés suffisamment en profondeur, précise l’article, la chaleur conserve le sang fluide, surtout dans les pays chauds, comme la Hongrie !

Dans Le Petit Parisien du 17 juin 1886, soit plus d’un siècle après la rédaction de l’article ci-dessus, il est de nouveau question des vampires à l’occasion des crimes profanatoires de Henri Blot, fossoyeur du cimetière de Saint-Ouen.
 
Le journal fait alors la distinction entre deux formes de vampirisme : la première, dont l’existence est avérée, concerne des personnes atteintes d’une maladie mentale, une « démence spéciale » causée par l’alcool et susceptible d’engendrer d’irrésistibles envies d’« anthropophagie macabre ». Le « vampirisme » clinique en tant que symptôme est ainsi reconnu par le corps médical. La seconde est une simple légende urbaine née il y a plusieurs siècles au sein de populations danubiennes.

Si le mythe s’est particulièrement développé en Albanie, Pologne et Hongrie, ce serait avant tout parce que de nombreux cas cliniques de vampirisme y ont été détectés, engendrant auprès de certains esprits ingénus une émulation de l’imagination, de la peur et des superstitions à l’origine de la transformation d’un phénomène réel en légende horrifique.
 
Heureusement pour certains et hélas pour d’autres, force est de constater que les vampires suceurs de sang, êtres surnaturels et immortels, n’existent pas.
 

Les vampires font ainsi partie des multiples causes surnaturelles qui ont pu être évoquées pour expliquer des phénomènes incompréhensibles. À ce titre, le vampires, comme la sorcière à une époque, apparaît comme un bouc-émissaire imaginaire bien commode.

 

En 1979, une explication complémentaire est apportée par Lion Murard, historien spécialiste d’histoire urbaine, et par Patrick Zylberman, professeur émérite d’histoire de la santé à l’École des hautes études en santé publique.

Ces derniers rappellent à juste titre que, jusqu’au milieu du XIXe siècle, le phénomène biologique irréversible qu’est la mort reste encore une énigme par bien des aspects. La définition même de la mort reste largement imprécise. À titre d’exemple, notons qu’à partir de la Révolution française, le droit d’inhumer une personne supposée morte est accordée par un officier d’État civil n’ayant aucune connaissance médicale. De cet état de fait résulte une peur ancrée aux XVIIIe et XIXe siècles, celle d’être par mégarde enterré vivant, angoisse renforcée par les préoccupations religieuses d’un XIXe siècle très dévot et par les théories théologiques sur la vie dans l’au-delà qui en découlent.

Au XIXe siècle, ce n’est pas la mort elle-même en réalité qui est l’objet de bien des fantasmes mais cet entre-deux énigmatique séparant la vie et la mort, ce moment fugace où une dépouille est susceptible de trouver une troisième voie possible en devenant un « vampire », autrement dit une créature ni vivante ni morte, à la fois immortelle et sans vie. La légende interroge ainsi nos peurs et fantasmes inconscients liés à notre propre mortalité.
 
Dans le doute, n’hésitez pas à consulter l’ouvrage intitulé Les vampires : comment s'en faire aimer ! ou bien en cas d’échec le Guide du chasseur de vampires ! 
Le billet de blog Gallica intitulé Petite histoire de la transfusion peut également être utile !

Pour aller plus loin

- À découvrir sur les postes audiovisuels des salles de lecture de la bibliothèque tous publics :
Le bal des vampires de Roman Polanski ou Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau.
- Exposition à la Cinémathèque française, Paris : "Vampires, de Dracula à Buffy", jusqu'au 19 janvier 2020
- Voir aussi les précédents billets de la série  Vampires, des créatures à (re)découvrir :
1. Mammifère bizarre ou créature du diable
2. Les vampires, portée politique et sociale du monstre
3. Naissance du vampire comme personnage littéraire au 19e siècle
4. Stryges et Goules, ces vampires femelles protéiformes
 

 

Commentaires

Soumis par Gaspard le 01/12/2020

Mais du coup les vampires existe ?

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