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Le ginkgo

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26 septembre 2022

Apparu il y a 300 millions d’années, il a survécu aux dinosaures, bravé les périodes glaciaires et a même refleuri sur les cendres d’Hiroshima. En à peine quelques siècles, il s’est étendu de l’Orient à l’Occident. Vous l’aurez compris, le ginkgo est un voyageur de l’espace et du temps.

Kitao Shigemasa, [Représentations animalière avec branche de ginkgo], 1805, estampe japonaise

Aujourd’hui bien intégré dans nos paysages d’Europe, il est longtemps resté le privilège de l’Extrême-Orient. C’est d’ailleurs au Japon que le botaniste allemand Engelbert Kaempfer le découvre vers 1690 et le décrit pour la première fois dans son Amœnitatum exoticarum. En 1771, Linné reconnaît le genre Ginkgo et le complète par le nom d’espèce Biloba, en référence à ses feuilles bilobées (partagées en deux lobes).

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Engelberto Kæmpfero, « Ginko biloba » dans Amœnitatum exoticarum politico - physico - medicarum fasciculi V, quibus continentur variæ relationes, observationes & descriptiones rerum Persicarum & ulterioris Asiæ, multâ attentione, in peregrinationibus per universum orientem, collectæ, ab auctore D, 1712, eau forte

Voisin des conifères, le Gingko Biloba est l’unique espèce vivante appartenant aux préphanérogames, constitutifs de la flore de l’ère primaire ou Paléozoïque. A la fin de l’ère secondaire, le ginkgo manque d’ailleurs de disparaitre et se réfugie finalement dans le sud de la Chine. Ce qui lui vaudra le surnom de « fossile vivant » inspiré par Charles Darwin lui-même.

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« Type foliaire d’une espèce de la famille du Ginkgo, trouvée dans les couches jurassiques de l’Afghanistan. (Photo G. Tendron) » dans Science et Nature par la photographie et par l'image, SEDIS/Museum national d'histoire naturelle, n°7, 1955

Tout comme les palmiers ou les houx, les gingkos sont des arbres dioïques puisque chaque individu est unisexué. Les gingkos mâles présentent une inflorescence en épis tandis que les ginkgos femelles révèlent simplement une courte tige terminée par deux ovules. La distinction n’est pas toujours aisée, on se contentera alors de repérer les grappes de fruits jaunes portées exclusivement par les individus femelles. En Asie, on a pris l’habitude de planter le couple sacré à l’entrée des temples. La tradition s’est perpétuée jusqu’en Europe comme c’est le cas à Paris au Musée Albert Kahn ou au Musée d’art asiatique Guimet. Au Jardin des Plantes, réside un pied mâle auquel fut greffée une branche femelle.

« Ginkgo Biloba » (Planche 41), dans Jean-Augustin Barral et Aristide Dupuis, Le règne végétal : divisé en traité de botanique générale, flore médicale et usuelle, horticulture botanique et pratique, plantes potagères, arbres fruitiers, végétaux d'ornement, plantes agricoles et forestières, histoire biographique et bibliographique de la botanique. Flore médicale, Atlas, 1864-1869

Arbre à croissance lente, son allure élancée peut dépasser les 30 mètres. Symbole de longévité par excellence, cette espèce robuste peut atteindre les 3000 ans. Lorsqu’il avance dans l’âge, de curieuses excroissances en forme de mamelles peuvent se développer sur son tronc : ces racines aériennes ont d’ailleurs fait l’objet en Asie d’un culte populaire autour de l’allaitement maternel.

Les feuilles du ginkgo sont particulièrement caractéristiques et lui ont valu sa renommée. Si en Occident, leur forme rappelle immédiatement la silhouette de l’éventail, en Chine, on la compare davantage aux pattes de canard, yazô.  Dans tous les cas, l’élégance de ses feuilles est appréciée aussi bien dans les œuvres de l’Ukiyo-e que de l’Art nouveau.

Georges Auriol, [Cul de lampe de l'album "Les peintres-graveurs" en forme de ginkgo], 1896, gravure sur bois

Ce potentiel décoratif se manifeste également dans son feuillage caduc qui verdit au printemps et se couvre d’or à l’automne. Il fait de lui un arbre d’ornement idéal : on pense notamment aux jardins de Kyoto dont il est le symbole. Parfois appelé « l’arbre aux quarante écus », il doit en partie ce surnom à la couleur jaune vif de ses feuilles. Selon d’autres versions encore, c’est son prix exorbitant qui inspira cette appellation.

Le Japon artistique : documents d'art et d'industrie réunis par Siegfried Bing, Paris : Marpon et Flammarion, 1888-11, p.167

Outre ses attraits esthétiques, le ginkgo tient une place non négligeable dans la médecine chinoise. L’amande contenue dans le noyau de ses fruits faciliterait la circulation sanguine. Son goût délicat est d’ailleurs très apprécié dans la cuisine thaïlandaise. Ses feuilles, quant à elles, amélioreraient la mémoire et la vigilance. Aujourd’hui encore, les vertus du ginkgo sont particulièrement estimées et sont même reconnues par la médecine moderne.

Longévité, félicité, beauté de la nature ou remède sacré : le gingko brille de toutes ses feuilles et jouit encore d’une excellente réputation par-delà les continents.

Commentaires

Soumis par Thomas John Donahue le 06/11/2022

La beauté du gingko biloboa est bien connue--ses feuilles, sa forme et même son écorce, mais en automne les fruits ont une odeur bien mauvaise.

Soumis par Laurence THOMAS le 07/11/2022

Magnifiques planches de couleur de cette plante que je découvre grâce au blog de Gallica.
Extraordinaire; Superbe travail pour notre (et le mien en particulier) plus grand bonheur.
Merci!

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