Le Blog
Gallica
La Bibliothèque numérique
de la BnF et de ses partenaires

Depuis quand joue-t-on à 15 ?

0
21 septembre 2023

On entend encore l’arbitre demander au 15 rouge de venir ici ou réprimander le 3 blanc pour une position de hors-jeu. De tout temps, l’arbitre a coutume d’interpeller les joueurs par leur numéro dans le dos. Mais au fait, depuis quand y a-t-il des numéros dans le dos des joueurs de rugby ?

Programmes de match du Tournoi des six nations France-Ecosse/Ecosse-France, 2009, Fédération Française de Rugby

Les origines des numéros

On part de loin ; à l’origine, le nombre de joueurs dans un match de football rugby  (le rugby a été inventé lors d’une partie de foot) n’était pas limité et il n’y avait pas de positions de jeu précises. Les matches dans les écoles ou universités étaient disputés par des volontaires formant ainsi une énorme masse d’où̀ n’émergeait aucun signe distinctif. Afin d’y voir plus clair dans le jeu, il faut attendre 1897 et suivre la Nouvelle-Zélande, partie en tournée chez le voisin australien, pour apercevoir les premiers chiffres.
Lors d’un match à Brisbane contre le Queensland, une nouveauté́ permet aux spectateurs locaux d’identifier les acteurs, les joueurs de la Nouvelle-Zélande porteraient les numéros 1 à 15 et ceux du Queensland, du 16 au 30. Impossible de se tromper, d’autant plus que le public se voit proposer un imprimé avec les noms accolés aux numéros, une sorte de feuille de match. 

L’idée se répand ; en 1903, à l’occasion de leur première rencontre officielle, Australiens et Néo-Zélandais se présentent sur le terrain avec des numéros au dos de leur maillot. Les Lions britanniques et irlandais prennent le pas lors de la tournée de 1904 aux antipodes. L’Afrique du Sud, à son tour, adopte la numérologie dorsale en 1906. À noter que les numéros ne collaient pas encore au poste sur le terrain. Lors de la célèbre tournée des Invincibles Néo-Zélandais sur le sol britannique, le 16 décembre 1905, les deux équipes étaient numérotés : 1 pour l’arrière du Pays de Galles et 15 pour le dos des All Black.

Un flou dans le règlement concernant ces signes distinctifs

En France, pendant ce temps-là̀, il n’y a pas de numéros dans le dos, les équipes jouent encore avec des maillots vierges, y compris l’équipe de France qui existe depuis le 1er janvier 1906. Un flou règne dans le règlement, pas spécialement éclairci par le législateur. En 1921, sous l’impulsion des Gallois et des Anglais, l’International Rugby Board (IRB) préconise que chacun fasse comme il veut, au choix des joueurs. Ce sujet ne sera plus justement un sujet jusqu’à l’après-guerre. Beaucoup d’équipes n’ont pas de numéros sur leur tenue, d’autres adoptent des numéros sur le dos ou sur le torse, et même parfois des lettres comme signe distinctif.

Match South Afrikanders contre équipe de France [en maillot blanc], 3 janvier 1907, Agence Rol

Une première pour la France

Le XV de France a donc succombé à la mode des numéros en avril 1921, mais cette première face à l’Irlande n’a pas eu de suite immédiate. En effet, lors de la rencontre suivante, le 2 janvier 1922, plus aucun numéro ne figure sur les maillots des deux équipes. Il faudra attendre 1926 pour que la France retrouve ses signes distinctifs lors de chaque match.

Rugby, journal illustré publiant L'Officiel de la Fédération française de Rugby, 16 avril 1921

Le match France-Irlande, avril 1921, Fédération Française de Rugby

À l’aube du Tournoi des 5 Nations 1921, la jeune Fédération Française de Rugby créée un an plus tôt sort le numéro 1 de son tout nouveau magazine hebdomadaire Rugby ; elle présente les enjeux du futur tournoi ainsi que la sélection possible du XV de France. Les Probables jouent contre les Possibles, ce qui veut dire que chaque pays fait ce qu’il veut en ce qui concerne la numérotation en l’absence de reglèment. Dans Rugby, la composition des équipes fait référence aux postes, mais il n’est pas encore question de numéros. Lors du dernier match contre l’Irlande, les joueurs du XV de France ont un numéro sur leur maillot. C’est une première chez les Bleus, il n’y en avait pas quinze jours plus tôt lors de la réception des Anglais à Colombes.

Les clubs français s’y mettent et s’accordent sur l’ordre à respecter : du pilier gauche (1) jusqu’à l’arrière (15). Mais les Anglais, Gallois et Écossais numérotent à l’inverse, le 1 étant l’arrière. D’autres petites entorses et variations ont aussi lieu dans le monde ; par exemple en Argentine, on aime bien l’échange du 6 et du 7 ou 11 et 14. Idem pour l’Afrique du Sud. Superstitieux, le Pays de Galles préfère éviter le numéro 13 : il numérote de 1 à 16. Les Diables Rouges ont aussi eu recours aux lettres dans les années 1930, mais ont mis fin à cette pratique en 1948.

La fin des lettres

Depuis la non-règle de 1921, l’IRB décide de mettre de l’ordre dans tout ça. En 1967, il est demandé aux équipes nationales d’adopter la numérotation des Français et des Irlandais. Les trois autres nations vont donc changer leurs habitudes. Mais cette règle ne s’applique qu’aux équipes nationales ; les clubs font encore un peu comme ils veulent, notamment en Angleterre. Nobles, Leicester et Bristol ne brisent pas la tradition et continuent de jouer avec des lettres dans le dos, alors que Bath et Richmond ont banni le 13.

En France, les clubs ont tous adopté le flocage international. Il faudra alors attendre une nouvelle injonction de l’IRB pour mettre définitivement fin aux lettres dans le dos. Ce sera le cas en 1997, les Tigres de Leicester et Bristol disputent leur dernière saison avec les lettres dans le dos, parfaitement visible lors de la finale lors de la Coupe d’Europe en janvier 1997 contre Brive qui s’offrira une belle victoire, écrite sûrement en lettres d’or dans son palmarès !

L''Olympiade Culturelle est une programmation artistique et culturelle pluridisciplinaire qui se déploie de la fin de l’édition des Jeux précédents jusqu’à la fin des Jeux Paralympiques. La série "200 ans de ballon ovale : l’histoire du rugby" de Gallica s'inscrit dans la programmation officielle de Paris 2024.

Ajouter un commentaire

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et de courriels sont transformées en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.