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Jacques-Julien Houtou de la Billardière et l’expédition d’Entrecasteaux

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14 septembre 2020

Jacques-Julien Houtou de La Billardière est un botaniste français (1755-1834) qui participe aux grandes expéditions de découverte des terres australes à la fin du 18ème  siècle et au début du 19ème siècle. En particulier, il fait partie de l’expédition d’Entrecasteaux lancée sur les traces de La Pérouse, disparu durant son exploration de l’Océanie.

Portait de Jacques-Julien Houtou de La Billardière

J. J. H. de la Billardière naît à Alençon en 1755. Après le collège, il rejoint Montpellier pour étudier la médecine et notamment la botanique sous la férule d’Antoine Gouän, premier à avoir adopté en France la nomenclature binominale de Carl von Linné ; puis c’est Reims et enfin Paris où il obtient son doctorat en 1780. Dès lors, sa vie est tournée vers les voyages.
 
Première destination, Londres. Là et dans ses environs, notamment aux jardins royaux de Kew, il observe les végétaux exotiques que l’on cultive déjà à l’époque. Joseph Banks lui fait découvrir les riches herbiers qu’il a ramenés en Angleterre lors du premier voyage de James Cook. Il étudie aussi sous la direction de James Edward Smith qui plus tard lui rendra hommage en donnant le nom de Billardiera à une des plantes de son herbier.
La Billardière continue sa formation botanique en montagne aux côtés de Dominique Villars, dans le Dauphiné. Puis vient la découverte de la flore des Alpes piémontaises avec Carlo Antonio Lodovico Bellardi et Adriano Balbi.

En 1786,  le gouvernement français lui propose d’aller en Syrie, en passant par Chypre et la Palestine. La peste et la guerre interrompent son voyage et il s’arrête au Liban. Là, il étudie la flore du Mont Liban, dont le cèdre, arbre emblématique de ce pays. Ayant des talents de géomètre, il mesure la montagne du Sannin (1491 toises soit environ 2900 m). Du pied au sommet du Mont Liban, il peut étudier les différents types de végétations s’étageant en fonction du type de climat, d’aride à froid en passant par tempéré. Il rentre en France, visitant Damas, l’Île de Candie (la Crète), puis la Sardaigne, la Corse et commence la compilation de ses recherches et travaux dès le début de l’année 1791.

Cèdre du Liban
    Histoire Universelle des Végétaux / par Buchoz, Paris, 1771-1774

 

En février 1791, l’Assemblée constituante et Louis XVI décident d’envoyer d’Entrecasteaux à la recherche de La Pérouse disparu en Océanie. Le 28 septembre, La Billardière embarque à Brest sur la "Recherche", l’un des deux vaisseaux de l’expédition. Passé en octobre par Sainte Croix de Ténériffe, aux îles Canaries, il rallie le Cap de Bonne Espérance, en Afrique du Sud, en janvier 1792. Là, il étudie la végétation des Montagnes de la Table (Tafel-berg), du Lion (Leeuwen-berg), de Stellenbosch et de ses alentours puis pousse sa reconnaissance jusqu’aux montagnes de Fransche-Hoek.
Mi-février 1792, le départ est donné pour rejoindre les Îles de l’Amirauté, au nord-est de la Nouvelle-Hollande (Australie) où La Pérouse aurait été vu. Gênée par les vents, l’expédition doit d’abord aborder la terre de Van-Diemen (Tasmanie), au sud de la Nouvelle-Hollande, où elle arrive le 23 avril 1792, après deux mois de navigation ayant soumis navires et équipages à rude épreuve. La Billardière en profite pour explorer l’intérieur des terres avec les autres naturalistes et y découvre notamment l’Eucalyptus Globulus et la Perruche Ingambe (fig. 8 en bas de la planche).

Eucalyptus Globulus
           [Illustrations de Atlas pour servir à la relation du voyage à la recherche de La Pérouse
            fait par ordre de l'Assemblée Constituante pendant les années 1791, 1792...], Paris, 1799
 

Les navires ayant ravitaillé et étant réparés, l’expédition explore le Sud de la Nouvelle-Hollande et la Nouvelle-Zélande. La Billardière enrichit ses collections de beaucoup de plantes peu connues ou mal décrites jusque-là. Il décrit notamment deux espèces importantes pour l’alimentation de  ces régions, le Sagoutier et le cocotier des Maldives. A partir de la moelle du Sagoutier les populations fabriquent le Sagou, une fécule leur servant à confectionner du pain, alimentation de base de ces populations.
Pour rallier le Nord de la Nouvelle–Hollande, l’expédition subit de nombreuses tourmentes au cours des dix-huit mois suivants. D’Entrecasteaux ainsi que quatre-vingt-huit hommes y laissent la vie, sans avoir pu retrouver La Pérouse aux Îles de l’Amirauté. Lors de ce périple, la Billardière embarque des arbres à pain à l’archipel des Îles Tonga. La Billardière a l’intention d’acclimater cet arbre pour le cultiver en quantité, conscient de son importance alimentaire à l’époque (on se souvient du célèbre navire «le Bounty» qui alla le chercher à Tahiti en 1789 et fit l’objet d’une mutinerie de  son équipage). La Billardière le ramènera à Paris mais c’est Thouin qui le fera s’acclimater plus tard à Cayenne.

Arbre à pain
     Histoire Universelle des Végétaux / par Buchoz, Paris, 1771-1774
 

Les navires rejoignent néanmoins Java où La Billardière découvre un nouveau palmier, le palmier Arenga ou palmier à sucre, une autre plante utile pour l’alimentation. Mais en octobre 1793 l’équipage est fait prisonnier par les Hollandais qui détiennent l’île et sont alliés des Anglais à nouveau en guerre contre la France. La Billardière, dont les collections ont été confisquées et envoyées en Angleterre, est mis en détention à Samarang puis à Batavia (Djakarta), en compagnie du dessinateur Piron. Il est libéré le 29 mars 1794 et peut alors rejoindre l’Île de France (Île Maurice). Là, Jean Nicolas Céré le reçoit au jardin royal botanique de Pamplemousses. Il y découvre de nouvelles plantes, notamment le cocotier des mers, espèce cultivée depuis 1769 dans ces jardins.     
La Billardière demande à Joseph Banks d’intervenir en Angleterre afin que ses collections lui soient rendues, ce qui est fait ;  ce grand botaniste anglais ne souhaite pas «enlever à un homme une des idées botaniques qu’il était allé conquérir au péril de sa vie.».
De retour en 1796  à Paris, il apprend qu’il a été nommé correspondant de l’Académie des sciences. La Billardière se consacre à organiser ses collections et à publier les travaux botaniques issus de ses voyages. Pour ceux en Méditerranée jusqu’en Syrie, il continue sa compilation commencée en 1791 et qu’il n’achèvera qu’en 1812 : Icones plantarum Syriae rariorum descriptionibus et observationibus ilustratae. Pour ceux sur les terres australes, il écrit Novae Hollandiae plantarum specimen (flore d’Australie) en 1804-1806 et Sertum austro-caledonicum (Nouvelle Calédonie) en 1824-1825.  Il fait aussi en 1799 le récit de l’expédition d’Entrecasteaux dans Relation du voyage à la recherche de La Pérouse , ainsi que le texte des illustrations de l’atlas qui s’y rapporte. Une carte du voyage accompagne les deux ouvrages en 1800. Cette même année, il devient membre de l’Académie des sciences, suite au décès de Charles Louis L'Héritier de Brutelle, autre botaniste de l’époque et surintendant du roi à la Maîtrise des eaux et forêts.

Calao de l’Île de Waigou
               [Illustrations de Atlas pour servir à la relation du voyage à la recherche de La Pérouse
              fait par ordre de l'Assemblée Constituante pendant les années 1791, 1792...], Paris, 1799
 

Grâce à  Jacques-Julien Houtou de La Billardière, les botanistes de cette période découvrent un grand nombre de nouvelles espèces de végétaux des terres australes. Mais La Billardière ramène aussi de  ses voyages une multitude d’études touchant à l’ensemble des sciences naturelles (minéralogie, géologie, zoologie et anthropologie), faisant de lui un des grands naturalistes de son époque.
 

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