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Gabriel de Montgommery, entre histoire et roman

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Il y a 440 ans, Gabriel de Montgommery (1) mourait en place de Grève à Paris. De lui, on sait tout au plus qu’il a été le régicide involontaire du roi Henri II et qu’il est mort décapité en place de Grève à Paris, sans qu’il y ait d’ailleurs de relation entre ces deux événements. Son histoire, pourtant mouvementée et riche, est encore largement ignorée. Après avoir embrassé avec ardeur la cause huguenote, il est en effet devenu un homme de guerre important, l’un des commandants de l’amiral de Coligny durant les guerres de religion.

Le Tournoy ou le Roy Henry II fut blessé à mort, le dernier de juin 1559. 1570. Recueil. Collection Michel Hennin. Estampes relatives à l'Histoire de France. Tome 4, Pièces 301-436, période : 1547-1559

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8400428h

 

Le comte Gabriel de Montgommery (v. 1530-1574), capitaine de la Garde écossaise du roi, entre dans l’histoire le 30 juin 1559 pour avoir combattu contre Henri II lors d’un tournoi et lui avoir malencontreusement planté sa lance dans l’œil. Ce tournoi, la reine Catherine de Médicis le redoute car elle a rêvé la nuit précédente de son époux, blessé, la tête ensanglantée. Elle craint depuis 4 ans un accident de tournoi ou une mort violente lors d’un combat singulier, parce que Nostradamus a écrit dans ses Centuries (Livre I, centurie XXXV) publiées en 1555 :

« Le lion jeune le vieux surmontera
En champ bellique, par singulier duelle,
dans cage d’or les yeux lui crèvera,
Deux classes une, puis mourir : mort cruelle ».

Après l'accident, le célèbre chirurgien Ambroise Paré est convoqué. Il tente tout pour sauver le roi mais en vain.

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Ambroise Paré arrachant de la blessure de Henri II le fer de la lance du sire de Montgomery, par Meunier, La Médecine populaire, 24 mars 1881 (BIU Santé)

http://blog.bnf.fr/uploads/gallica/2014/12/medecinesmall.jpg

 

L’agonie d’Henri II va durer 10 jours, pendant lesquels il absout son partenaire de tournoi de tout blâme. Mais Gabriel prend peur et préfère fuir Paris. Il se réfugie en Angleterre à la cour d’Elisabeth Ière. Là, il se convertit au calvinisme. A son retour en France, il devient un des principaux fers de lance des Réformés et livre à partir de 1562 de nombreuses batailles durant les guerres de religion. Saccages, sièges, combats se succèdent alors en Normandie et dans tout le Sud-Ouest, notamment pour le compte de la reine de Navarre Jeanne d’Albret.

En 1572, il échappe par miracle au massacre de la Saint-Barthélémy. La tête de Montgommery est alors mise à prix par le roi Charles IX et sa mère Catherine de Médicis, la veuve d’Henri II. En 1574, au cours d’un siège à Domfront, Gabriel refuse d’abandonner ses hommes et est contraint de se rendre. Conduit à Paris, il est torturé, jugé rapidement et sommairement puis décapité en place de Grève le 26 juin 1574. Apprenant qu'un édit royal confisque ses biens et retire à ses enfants leurs titres, il dit à ses bourreaux : « Dites à mes enfants que s’ils ne peuvent reprendre ce qui a été pris, je consens à l’arrêt ! ».

Gabriel de Montgommery, la postérité littéraire

On ne saurait résumer Gabriel de Montgommery au funeste tournoi qui l'a fait connaître. Celui dont Brantôme dit, dans la troisième partie des Hommes illustres françois : « il était le plus nonchalant en sa charge et aussi peu soucieux qu’il était possible, car il aimait fort ses aises et le jeu, mais quand il avait une fois le cul sur sa selle, c’était le plus vaillant et le plus soigneux capitaine que l’on eut pu voir, au reste si brave et si vaillant qu’il assaillait tout faible ou fort qui se présentait devant lui » a été l’un des grands chefs du parti huguenot. Un texte des Archives curieuses de l'histoire de France retrace les derniers exploits guerriers de Gabriel de Montgommery, le siège de Domfront, l'arrestation, le procès et l'exécution de Gabriel. Ensuite, du XVIIe au XXe siècle, c’est surtout l’épisode du tournoi qui marque. Madame de La Fayette le relate avec minutie dans La Princesse de Clèves.

"Sur le soir comme tout estoit presque finy et que l' on
estoit prest de se retirer, le malheur de l' estat fit que le
roy voulut encore rompre une lance. Il manda au comte
de Montgomery, qui estoit extrêmement adroit, qu' il
se mist sur la lice. Le comte supplia le roy de l' en dispenser
et allégua toutes les excuses dont il put s' aviser,
mais le roy, quasi en colère, luy fit dire qu' il le vouloit
absolument."

Victor Hugo l'évoque également, dans Le Rhin (voir page). Mais le sommet de sa postérité littéraire, Gabriel le connaîtra avec Alexandre Dumas qui fait de lui le personnage principal d'un de ses romans : Les deux Diane. Amour et vengeance sont les principaux ingrédients du roman.

(1) On adopte l'orthographe originelle avec deux "m", cependant on trouve aussi ce patronyme écrit : Montgomery.

Corinne Castel

Direction des Services et des réseaux, Département du Dépôt légal

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