Feuilletons et publicité
Le roman devient un genre littéraire majeur au XIXe. La preuve : il fait vendre ! Pour s’assurer que le lectorat achète, les journaux font de la publicité pour leurs romans-feuilletons. Pour en savoir plus, vous pouvez consulter la sélection Les Feuilletons dans la presse et assister à la journée d’étude du 10 avril.
Affiche annonçant la publication de L’Infamie d’Oscar Méténier
Au fil des années, l’importance du feuilleton dans la vente des quotidiens augmente. À mesure que l’alphabétisation progresse et que le prix des journaux baisse, le public devient de plus en plus nombreux. Pour l’inviter à rester fidèle à un titre, on publie des romans qui attisent la curiosité et à l’approche de la fin du siècle, de nombreuses affiches annoncent leur publication. Colorées et dramatiques, elles se veulent accrocheuses.
Des affiches accrocheuses
Affiche pour la parution du Bossu.
C’est le cas pour cette affiche qui annonce le plus gros succès de Paul Féval. Le roman Le Bossu, où est créé le personnage célèbre de Lagardère, est paru pour la première fois en 1857 dans Le Siècle : il s’agit donc ici de la reprise d’un texte déjà connu du public et très populaire.
En 1865, Le Journal du dimanche publie à nouveau ce roman populaire dans ses colonnes dans l’espoir d’attirer un lectorat plus large. L’effet de l’annonce est aussi fort que possible : le nom de l’auteur et le titre de l’œuvre sont utilisés… mais également une image dramatique représentant le moment (et la phrase) clé de l’œuvre :
Oui, s’écria-t-il, voici la fille de Nevers !... Viens donc la chercher derrière mon épée, assassin ! toi qui as commandé le meurtre, toi qui l’as lâchement achevé par derrière !... Qui que tu sois, ta main gardera sa marque, je te reconnaîtrai. Et, quand il sera temps, si tu ne viens pas à Lagardère, Lagardère ira à toi !
Affiche pour la parution de La Marâtre.
Pour attirer le lectorat, les affiches ne lésinent pas sur les images et les couleurs, et ce tout particulièrement à la fin du siècle. C’est le cas de cette affiche pour La Dépêche, qui date de 1895.
Affiche de Germinal, journal du Matin
Les exemples sont nombreux. Un élément est néanmoins commun à l’ensemble de ces affiches : à y regarder de plus près, elles sont toutes consacrées au quotidien en lui-même. Le roman-feuilleton est un prétexte publicitaire.
Le nom du journal est toujours présent en caractères aussi voire plus grands que le titre du roman : dans l’affiche du journal Germinal, le feuilleton de Jules de Gastyne n’apparaît qu’en bas. Dans le cas de l’affiche du Journal du dimanche, on remarque que les marges annoncent un autre roman moins célèbre : Le Chevalier de Saint Georges par Roger de Beauvoir.
Les romans-feuilletons permettent de rendre le quotidien plus attractif. C’est dans cette logique que ces affiches sont créées !
Le journal qui se vend lui-même
Cette logique publicitaire se répercute à l’intérieur des quotidiens, ce qui alimente l’envie de continuer à acheter les prochains numéros. Certains journaux proposent en première page une liste de leurs articles du jour, dont une bonne part sont des pièces littéraires :
Sommaire du Gil Blas du 17 février 1883
De cette façon, ils attisent l’intérêt du lecteur, qui sait ce qu’il va trouver en achetant son journal. Plus généralement, avant de publier un nouveau roman, les quotidiens présentent le romancier et l’œuvre afin de préparer le lectorat à l’œuvre à venir.
Dans La Presse, en 1841, on peut lire cette annonce pour la parution des Mémoires de deux jeunes mariées de Balzac :
Début du feuilleton de La Presse du 19 novembre 1841
C’est à la fois l’occasion d’attiser la curiosité du lecteur et de prévenir certaines critiques qui pourraient décourager de la lecture du roman, et donc de l’achat du quotidien. La publicité pour les romans-feuilletons se continue donc dans la rubrique « feuilleton » elle-même.
Le roman à fabriquer
Dès le milieu du XIXe siècle, plusieurs quotidiens proposent à leurs lecteurs de fabriquer son roman à partir des textes publiés dans le journal. En 1850, Le Siècle publie ainsi les œuvres complètes d’Alexandre Dumas, en parallèle avec d’autres romans-feuilletons, sous une forme pensée pour être découpée et reliée.
Début de la parution d’Othon l’archer dans Le Siècle du 21 août 1850
Le Petit journal propose également à ses lecteurs de faire des romans parus en feuilleton de véritables livres, en suivant ces instructions pour les découper et les relier :
Publicité dans Le Petit journal du 17 octobre 1907
Cette activité ludique permet de doubler l’intérêt de l’achat du journal : le roman-feuilleton peut être relié en volume, et participer à la création d’une bibliothèque, une collection issue du quotidien.
Pour découvrir davantage de thèmes présents dans les romans-feuilletons, la sélection des Feuilletons dans la presse permet explorer de nombreux romans-feuilletons !
Voir aussi :
- La série de billets de blog Les Feuilletons dans la presse
- La vidéo de la Rencontre Gallica Du "rez-de-chaussée" au format "livre" : l'envolée d'un genre, le roman-feuilleton, 2 mars 2021
- La vidéo de la Journée d'étude Les feuilletons dans la presse, 10 avril 2021
- La bibliographie Le roman feuilleton dans la presse
Pour aller plus loin :
Écouter le podcast de l'émission Les mystères du roman-feuilleton, une aventure rocambolesque, Le Cours de l'histoire, France Culture, 4 septembre 2024
Ajouter un commentaire