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Le florilège du mal ou Baudelaire dans les collections sonores de Gallica

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5 novembre 2021

Mort en 1867, dix ans avant l’invention de l’enregistrement sonore, Baudelaire, dont une nouvelle exposition à la BnF célèbre le bicentenaire, n’a pu laisser de témoignage de sa voix. Nous nous intéressons ici à ses nombreux interprètes dont les disques sont à l’écoute dans Gallica.
 

La mise en musique de poèmes de Baudelaire n’attend pas longtemps après la mort du poète puisque c’est en 1870 que le jeune Emmanuel Chabrier compose une mélodie accompagnant  L’invitation au voyage. Depuis, Baudelaire a été mis en musique par des dizaines de compositeurs, de Duparc à Stockhausen, de Debussy à Gainsbourg. Aujourd’hui encore, des artistes aussi différents que Jean-Louis Murat ou Mylène Farmer ont chanté, occasionnellement, du Baudelaire. Il n’est nul besoin d’être devin pour savoir que cette tradition perdurera.

Penchons-nous, néanmoins, sur le passé plutôt que l’avenir. L’enregistrement sonore, reflet de tous les répertoires de son temps, nous permet de retrouver les interprétations de l’œuvre du poète. On peut diviser ces enregistrements en deux blocs : les poèmes dits par des comédiens et les poèmes mis en musique.

Les poèmes lus

Le plus ancien enregistrement de poème de Baudelaire présent dans Gallica date de 1912. Un artiste anonyme déclame L’albatros sur un disque de 35 cm de diamètre de la collection « Chefs d’œuvre de la langue française » éditée par Pathé pour le procédé Pathégraphe (une méthode d’apprentissage audiovisuel des langues et de l’articulation). Le style déclamatoire plutôt ampoulé de l’interprète correspond tout à la fois au goût de l’époque et au fait que le présent disque est un outil pédagogique.
 

Baudelaire semble n’avoir eu qu’exceptionnellement la faveur des interprètes de l’époque du disque 78 tours. Il faut se projeter dans les années 50, avec l’arrivée du disque vinyle 33 et 45 t pour que l’industrie phonographique s’y intéresse à nouveau. C’en est  fini des artistes anonymes et de très grands noms vont alors graver des poèmes de Baudelaire.
C’est le cas de Jean-Louis Barrault, qui grave chez Decca en 1957 du Baudelaire et du Verlaine.

 

D’autres comédiens, célèbres également alors mais oubliés aujourd’hui, gravent du Baudelaire : c’est le cas de Jean Marchat, sociétaire de la Comédie-Française. Un siècle après son procès, le poète a cessé depuis longtemps d’être sulfureux et n’effraye plus les comédiens du  premier théâtre de France. Notons également que le disque est publié par le label Lumen, spécialisé dans la musique religieuse et les vieux chants français.

 

Baudelaire est devenu un classique et est étudié au lycée. La maison Hachette, qui publie en 45t la collection L’encyclopédie sonore, fait appel à Pierre Blanchar, qui n’est plus l’immense vedette qu’il fut dans les années 30 mais reste un acteur renommé. La pochette et le disque indiquent : « Les pages de Baudelaire qu’il faut connaître », appuyant  bien l’intention pédagogique de cette édition.

 

On remarquera que les femmes sont absentes de ce panorama. Frilosité des maisons de disque ou des comédiennes ? Seule la jeune, mutine et déjà célèbre Danièle Delorme s’y aventura, accompagnée au piano par Jean Wiener, pour apporter un peu de légèreté dans ce paysage marqué par des hommes mûrs.
 

Les poèmes mis en musique

 L’essor du vinyle dans les années 1950 est également propice à l’enregistrement de mélodies. A tout seigneur, tout honneur : Chabrier, l'un des premiers compositeurs à avoir mis Baudelaire en musique, fait l’objet d’un disque publié par le label Pléïade en 1955. La soprano Renée Doria, morte le 6 mars de cette année 2021 à l’âge de cent ans, y interprète L’invitation au voyage.

 

Renée Doria participa à un disque collectif de mélodies de Gabriel Fauré, toujours édité par Pléïade, mais c’est la soprano Berthe Montmart qui y grava La rançon.

 

Cependant, c’est la mise en musique d’Henri Duparc qui reste la plus célèbre et la plus enregistrée. Philips la fait enregistrer en 1956 par le baryton Camille Maurane.

 

Il serait fastidieux d’énumérer tous les enregistrements de L’invitation au voyage de Duparc. On se bornera ici à signaler un ou deux grands noms, celui notamment du baryton Charles Panzéra, enregistré en 1924 (un autre enregistrement de Panzéra, daté des années 1930, est réédité en 1958 par la voix de son maître).

 

 
Celui également du baryton Michel Dens, qui nous livra en 1960 une belle version où il est accompagné par la pianiste Jacqueline Bonneau.

 

Gardons-nous d’oublier le cycle de Cinq poèmes de Baudelaire mis en musique par Debussy de 1887 à 1889. Signalons l’interprétation du Jet d’eau par la soprano Janine Micheau accompagnée au piano par Aldo Ciccolini chez Columbia en 1958.
 
Enfin, comment ne pas achever ce bref panorama de l’œuvre enregistrée de Baudelaire sans évoquer Léo Ferré ? Toute sa vie, Ferré devait mettre en musique les poètes : Aragon, Verlaine, Rimbaud, Villon et d’autres. Baudelaire est le premier poète à qui Ferré consacre un album 30 cm complet, enregistré en mars 1957.
 
C’est également la première fois, dans le monde de la chanson, qu’un album microsillon complet est consacré à la mise en musique d’un seul poète.

 

Ferré consacra un autre album complet à Baudelaire en 1967 (chez Barclay) et continua jusqu’aux années 1980 à le mettre en musique.
 
Fermons maintenant les yeux et écoutons la musique de Baudelaire !

 

Pour aller plus loin : 

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