Ouvrages profanes
La xylographie a été employée au XVe siècle pour produire des œuvres profanes de nature diverse, toutes devenues rarissimes : des grammaires élémentaires, alors incontournables dans l’édition scolaire, des calendriers, des feuillets littéraires et facétieux destinés à l’affichage.
Le thème des Neuf Preux, attesté pour la première fois au début du XIVe siècle dans un texte de Jacques de Longuyon, Les voeux du paon, fut largement diffusé dans la littérature et l'iconographie de la fin du Moyen Âge. Il met en exergue les qualités chevaleresques de neuf héros historiques et légendaires tirés de l'Ancien Testament, de l'Antiquité gréco-romaine et de la culture chrétienne, respectivement : Josué, David et Judas Maccabée ; Hector, Alexandre et César ; Charlemagne, le roi Arthur et Godefroy de Bouillon.
Les Preux, plus précisément Charlemagne, Alexandre, David et César, ont fourni le modèle des figures des rois des cartes à jouer européennes.
Au XIIIe siècle, le monde des lettrés, jusqu’alors très fermé et étroitement apparenté au monde des couvents, s’ouvre à l’aristocratie et à la bourgeoisie. L’émergence de ce nouveau public augmente la charge de travail des ateliers monastiques, responsables de la copie de textes. Pour répondre à une demande toujours croissante de textes fiables et de plus en plus diversifiés (bibles universitaires, traités juridiques et théologiques, manuels de pastorale, romans de chevalerie), des ateliers de copistes civils voient le jour. Mais cette solution s’avère insuffisante et d’autres moyens de reproduction d’un texte à l’identique sont recherchés.
Plusieurs tentatives ont lieu jusqu’à l’invention décisive de l’imprimerie par Johannes Gutenberg à Mayence. La gravure sur bois (xylographie), déjà utilisée pour multiplier les images pieuses, est l’une de ces tentatives et a donné lieu aux livrets xylographiques, imprimés pour la plupart entre 1440 et 1530. Leur procédé de fabrication consiste à tailler des blocs de bois, de manière à y faire apparaître un dessin en relief, accompagné de quelques mots ou de quelques lignes de texte également gravés. Ce bloc gravé était ensuite encré puis on y appliquait une feuille de papier que l’on pressait au verso avec une balle de crin (le frotton). La marque profonde laissée sur le papier par l’empreinte de la gravure explique que ces livrets soit imprimés sur une seule face. Cette technique issue de l’impression sur les étoffes ne nécessitait pas d’investissement matériel important et pouvait s’exercer de façon artisanale et itinérante, de ville en ville.
Mais la xylographie était impropre à la multiplication de textes de quelque longueur : à part dans quelques essais (grammaire élémentaire de Donat), la priorité demeure à l’image. Les livrets xylographiques sont donc pour la plupart des séries d’images munies d’inscriptions ou de légendes à caractère religieux ou parfois profane (l'Apocalypse, l'Antéchrist, Art de mourir, Bible des pauvres, grammaire de Donat, calendriers, danse macabre, almanachs). Il existe également une variante qui consiste en l’association de bois gravés accompagnés de la copie manuscrite des quelques lignes de texte : on parle alors de chiro-xylographie. Aucun de ces opuscules, tous aujourd’hui rarissimes, n’est jamais daté ni localisé. Les Xylographica commencèrent à être farouchement collectionnés par de riches amateurs de curiosités ou des érudits friands des circonstances qui entourèrent l’apparition de l’imprimerie en Europe occidentale précisément lorsqu’ils avaient presque tous disparus, au XVIIIe siècle.