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Apollinaire et la presse

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19 mars 2018

Dans le cadre du cycle de manifestations sur les écrivains et la presse, et pour préparer la rencontre sur Apollinaire et la presse avec Laurence Campa et Julia Ribeiro Thomaz du 22 mars, ce billet présente l’œuvre journalistique d’Apollinaire.
 

 

Se destinant à une carrière littéraire, le jeune Guillaume Apollinaire cherche très tôt à proposer ses services aux nombreux journaux et revues de son époque.

 

Des débuts difficiles

À la suite d’un voyage en Allemagne, en Autriche-Hongrie ainsi qu’à Prague de février à mai 1902, il présente quelques articles à La Revue blanche, dont « Le Pergamon à Berlin » (15 mai 1902). Plusieurs nouvelles et chroniques de l’auteur y sont également publiées : « L’Ermite », « L’Hérésiarque », ainsi que « Le Passant de Prague ».

Apollinaire fréquente les soirées de la revue littéraire La Plume, où il rencontre notamment Alfred Jarry et décide de fonder sa propre revue Le Festin d’Ésope, qui publiera neuf numéros entre 1903 et 1904. Il y contrôle tout : du titre au recrutement de ses collaborateurs. Il tient la rubrique « Les notes du mois » où se révèlent ses talents naissants de journaliste. L’année suivante il occupe le poste de directeur de publication de La Revue immoraliste qui n’aura qu’un numéro, prolongé par Les Lettres modernes qui connaîtra le même sort éphémère. Il y tient les rubriques sur la peinture et les nouveaux livres ainsi que les « Propos mensuels » qui prolongent son expérience des « Notes du mois » du Festin d’Ésope.

 
 

Défense et illustration de l'avant-garde esthétique

Fin 1904, par l’intermédiaire de Max Jacob, Apollinaire rencontre Picasso avec qui il se lie d’amitié. Son premier article sur le peintre intitulé « Les jeunes : Picasso, peintre » est publié en mai 1905 dans la revue La Plume. Son auteur l’utilisera pour le début du chapitre sur Picasso dans son ouvrage  Méditations esthétiques / les peintres cubistes  (Figuière, 1913). Il ne cessera plus de défendre le peintre et l’avant-garde picturale. Ainsi en février 1912 « De Michel-Ange à Picasso » (Les Marches de Provence) ou encore en mai 1917 « Pablo Picasso » dans la revue SIC.

Jusqu’en 1910, sa collaboration aux journaux et revues reste parcimonieuse. Il publie en mars 1907 un portrait de Maupassant : « Guy de Maupassant athlète » dans la revue  La Culture physique. Entre septembre 1907 et février 1908 il publie huit contes dans la revue Messidor et de mars 1908 à avril 1909, il tient une rubrique de critique littéraire à La Phalange.

 

Des collaborations régulières

Entre 1910 et 1914, il parvient enfin à obtenir des collaborations régulières. Il devient critique d’art à L’Intransigeant, de mars 1910 à mars 1914 dans la rubrique « La vie artistique ». Il y évoque entre autres « Le salon des indépendants » (18 mars 1910), « Paul Gauguin » (11 mai 1910), « Marie Laurencin » (21 avril 1911). Il dresse le portrait de son ami Max Jacob (29 novembre 1910) et évoque le « rapt de la Joconde au Louvre » (24 août 1911), quelques temps avant d’être inculpé de recel pour le vol d’une statue ibérique qu’un ami indélicat avait déposé chez lui. Ayant restitué l’objet par l’intermédiaire de Paris-Journal, il est toutefois incarcéré sept jours à la prison de la Santé.

Le goût d’Apollinaire pour les avant-gardes esthétiques provoque une incompréhension, puis une hostilité latente de la part de la rédaction de L’Intransigeant qui le poussera à démissioner.
 


L'Intransigeant, 24 août 1911 et la gazette Montjoie !, 8 mars 1913
 
À partir du 1er avril 1911, il tient, sous le pseudonyme de Montade, la rubrique « La Vie anecdotique » au Mercure de France, qu’il signe de son nom à partir du 16 juin 1911. Il y traite avec sa sensibilité de poète des petits faits de la vie quotidienne et dresse des portraits d’amis (Ernest La Jeunesse) ou de rencontres de hasard.
Il collabore également à deux autres rubriques : « La France jugée à l’étranger » créée par Remy de Gourmont et « Les échos », dont Apollinaire devient responsable en mai 1917. Durant cette période il continue à défendre sa vision de la peinture, notamment dans le numéro spécial de mars 1913 de la revue Montjoie, qu'il rédige entièrement, mais également dans  Les Soirées de Paris (1912-1914), créée par les amis d’Apollinaire pour le soutenir. Il y publie ainsi « Du sujet dans la peinture moderne (février 1912), « Quatre lettres sur la peinture de Paul Cézanne » (mars 1912), ainsi qu’un article sur le douanier Rousseau et son tableau « La muse inspirant le poète », où l’on reconnaît Apollinaire dans le portrait du poète (janvier 1914). On peut y lire le passage suivant, qui éclaire le rapport difficile qu’Apollinaire entretient avec la profession de journaliste :
 
D’autre part, ni moi ni le Douanier ne fréquentions les salles de rédaction, et nous connaissions peu de journalistes. Ils ne faisaient alors et ne font encore pas grand cas de moi […]
 

Poème Lettre-océan, Les Soirées de Paris (15 juin 1914)
 
La revue cesse de paraître entre juin et novembre 1913, époque à laquelle Apollinaire prend le poste de directeur de publication dévolu jusque-là à son ami André Billy. Il oriente fortement la revue vers le cubisme et l’avant-garde avec de nombreuses reproductions d’œuvre (Picasso, Matisse, Laurencin, Braque, Léger…). Il y publie également ses premiers calligrammes ainsi que le poème « Lettre-océan ».
 

Les dernière années

Engagé lors du premier conflit mondial, blessé puis trépané en 1916, il déploie malgré tout, lors de ses deux dernières années, une activité journalistique soutenue. Il se fait interviewer en août 1916 dans la revue SIC, pour laquelle il écrit également un énième article sur Picasso (mai 1917).
 

Revue SIC, mai 1917 et un portrait d'Apollinaire par Picasso
 
 
Il collabore également à Paris-Journal (« L’art de la guerre », 9 déc. 1916), à L’Europe nouvelle à partir de mai 1918 (N°17, 4 mai 1918), à L’Excelsior à partir de septembre 1918, ainsi qu’à La Baïonnette (« L’Almanach des gothas », sept. 1918).

Les publications posthumes de ses articles et chroniques (Anecdotiques, Contemporains pittoresques, Le Flâneur des deux rives) permettent de mesurer son travail d’échotier poétique, de critique d’art et dans une moindre mesure de critique littéraire. Malgré son rapport compliqué au journalisme, il semblait apporter un certain crédit à sa production journalistique, dont il s’est servi pour porter ses idées sur l’art, puisant également parfois dans leur contenu pour alimenter sa production littéraire.

 


L. Marcoussis, eau-forte pour Alcools

 

Pour aller plus loin

Le 24 juin 1917 : Les Mamelles de Tirésias, billet sur la réception des Mamelles de Tirésias dans la presse et sur la thématique de la presse dans les Mamelles de Tirésias.
Voir également la bibliographie "Les écrivains et la presse".

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