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Manuscrits : secrets de fabrication

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9 novembre 2018

Grâce au mécénat de la fondation Polonsky, 800 manuscrits médiévaux  antérieurs au XIIe siècle conservés à la BnF et à la British Library sont en cours de numérisation. Le blog de Gallica vous fait pénétrer dans l’intimité de leur fabrication.

Un manuscrit est un objet d’art, sur lequel interviennent de multiples artisans. Depuis la préparation des peaux pour assurer le support d’écriture jusqu’à la réalisation de la reliure, sa production peut durer plusieurs mois au Moyen Âge.
Dans un premier temps, la sélection et la préparation des peaux est une étape parfois difficile. En effet, plus un manuscrit est grand, plus il est compliqué de trouver les peaux en qualité et en quantité suffisante. Pour les très grands formats, comme la bible ci-dessous, qui mesure 53 x 36,5 cm, on a eu recours à nombre d’animaux. Les éleveurs de l’époque sont tributaires des conditions météorologiques et géographiques. Aussi, on trouve dans certains parchemins des trous, qui sont en fait des défauts d’origine dans la peau des veaux ou des moutons.

Après une préparation comprenant dépilation, effleurage, traitement non tannant, et enfin séchage sous tension, les parchemins sont coupés et assemblés en cahiers de plusieurs bifeuillets, cousus au milieu. Chaque cahier de quatre bifeuillets, par exemple, est composé de huit pages. Il peut porter au bas de la dernière page un numéro, dit "signature", qui permettra l’assemblage final du manuscrit une fois la copie du texte et les enluminures réalisées.

Les pages du manuscrit sont aussi numérotées, et, comme le français du Moyen Âge, la graphie des chiffres peut être perturbante pour notre regard contemporain.

Une fois les cahiers formés, les copistes peuvent enfin commencer leur travail. Plusieurs techniques de copie sont utilisées : la copie directe depuis un autre manuscrit ou la copie sous la dictée, qui permet à plusieurs copistes d’écrire simultanément le même texte.

Le coût du parchemin et de l’encre a poussé au développement d’un système complexe d’abréviations. Ainsi, "Dieu" est couramment abrégé en "Dˉs".

Les techniques des copistes ne s’arrêtent pas là ! Pour obtenir un texte soigneusement écrit, des lignes parallèles sont tracées sur le parchemin, d’abord à l’aide d’une pointe sèche, puis à l’aide de la mine de plomb. On trouve encore sur certains parchemins des "piqûres", petits trous réguliers en bordure de marge permettant de tracer ce quadrillage.

L’enlumineur intervient ensuite, quand ce n’est pas le copiste lui-même qui occupe aussi ce poste. Il appose, sur les manuscrits les plus richement décorés, des feuilles d’or appliquées avec un collant d’origine animale et des pigments à base végétale ou minérale, tel que l’orpiment, le minium, ou le lapis-lazuli.

Comme le budget de fabrication peut parfois manquer à cette étape et que les produits rares peuvent devenir difficiles à se procurer, certains ne colorisent que quelques images, ou seulement certaines parties des images, voire "grisent" les illustrations au lieu de les coloriser.

Une fois tous les cahiers prêts, le travail du relieur peut commencer. Les cahiers sont réunis par des nerfs avec une âme, c’est-à-dire une lanière, souvent de peau de veau pour assurer solidité et souplesse au dos du manuscrit pendant sa manipulation.


Nerfs apparents d’une reliure médiévale, manuscrit Latin 2310.
 

Les manuscrits du Moyen Âge ne possédaient pour la plupart pas de couverture, c’est pourquoi les premières et dernières pages (dites "feuillets de garde" ou "gardes") sont souvent endommagées. Ce n’est que plus tard qu’y ont été ajoutées des ais de bois, pour les conserver et protéger dans les meilleures conditions.
 

Le programme de la Fondation Polonsky "France-Angleterre 700-1200 : manuscrits médiévaux de la Bibliothèque nationale de France et de la British Library" permet la numérisation, la restauration, le catalogage ainsi que la valorisation scientifique de manuscrits d’une valeur inestimable. Retrouvez ici tous les autres billets de la série "France-Angleterre 700-1200", et les billets dédiés au programme dans le Carnet de recherche Manuscripta !

      

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