Le Tour de France de Gallica, étape 5 : la Planche des Belles Filles
Dans le département de la Haute-Saône, les coteaux fertiles de la vallée sont bordés à l’Est par une extrémité de la chaîne des Vosges. Parmi les trois montagnes mentionnées dans le Dictionnaire géographique, historique, industriel et commercial des toutes les communes de la France… (Paris, 1846), le Ballon de Lure, qu’on appelle aussi la Planche des Belles filles, culmine à 1 300 mètres d’altitude.
Carte de Franche Comté, zone de la Planche aux belles Filles, 1845
Voyages en[tre] ballons
Il semble que le titre du plus beau ballon soit disputé dans la région : « Il n’y a rien au monde d’aussi joli que le ballon de chez nous, la Planche des Belles-Filles. Les envieux lui préfèrent le ballon de Servance ; mais il ne faut pas les écouter, car les gens de Servance sont des êtres qui veulent toujours avoir un ballon plus beau que celui des autres » (p. 32), écrit Alexandre Pothey dans l’épisode « La Fée des Mines » de son livre de contes La Muette (Paris, 1883).
Chaîne de Lure photographiée par Wilfrid Kilian, 1888
Au pays des fées ou des sorcières
La beauté du paysage offre aux randonneurs des terrains d’exploration qui sont consignés dans les guides. A la Planche des Belles Filles, elle nourrit aussi des récits légendaires attachés à ce nom si singulier. Ainsi, dans le roman d’histoire locale Quand les coqs chantaient librement (Remiremont, 1995), l’auteur dresse-t-il le portrait de la profession traditionnelle de guérisseur. Ici, l’art de soigner les brûlures par l’imposition des mains, de soulager les irritations de la peau, ou de réparer les foulures prend un genre exclusivement féminin relevant du lien ancestral et secret des femmes de la région avec « la Vouivre et des 12 fées de La Planche des belles filles ». Fées ou sorcières, elles sont la clé d’un véritable esprit du lieu.
Cime des Hautes Chaumes, par Paul Jean Moisson et Paul Nourrisson en 1887
La légende de la Planche aux Belles Filles
Voici donc la légende. Pendant la guerre de Trente Ans, en 1632, à l’entrée des envahisseurs suédois dans la montagne de Lure, les femmes des villages alentours se suicidèrent collectivement afin d’échapper à leurs outrages. Certaines versions rapportent jusqu’à 600 femmes mortes de cette façon (Bulletin de la Société belfortaine d’émulation, 1892). Outre le nombre de victimes, les modalités du sacrifice varient aussi selon les récits. Noyées dans l’étang des Hautes Chaumes (Revue du Touring club de France, avril 1924) réfugiées dans la montagne et mortes de froid dans la neige, ou bien jetées du sommet dans une gorge abrupte (La Montagne, revue mensuelle du club alpin français, janvier 1924), on voit que chacune des versions de ce conte macabre exalte une particularité du paysage.
Levé du soleil au Hohneck, Vallée de Munster, janvier 1928
Cinquième étape du tour de France 2017
C’est sur ces montagnes moyennes dont la neige abondante en hiver, hier obstacle redoutable (La Franche-Comté d’autrefois, Roanne, 1981), a permis aujourd’hui au tourisme de se développer avec l’aménagement de stations de ski, que sera disputée la cinquième étape du tour de France 2017. Souhaitons aux coureurs de ne pas être distraits par quelques unes de ces fées qui savent aussi être dangereuses pour qui les approcherait de trop près (Croyances et traditions populaires, Lyon, 1874).
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