Les multiples richesses de la pensée d’Ernest Renan
À l’occasion du bicentenaire de la naissance d’Ernest Renan (1823-1892), ce billet propose de revisiter les textes de cet auteur aux talents multiples, écrivain et membre de l’Académie française, mais aussi philosophe et historien, réformateur social et érudit.
et semble évacuer l’appareil théologique pour faire de Jésus de Nazareth un penseur : une comparaison avec Socrate ne semble pas fausse.
Pour Ernest Renan tout part d’Aristote (384-322 av. J.C.) et de la philosophie grecque. Il écrit p. 42 dans Averroès et l'averroïsme (1852) :
"Aristote est le principe de toute philosophie ; on ne peut différer que dans l’interprétation de ses paroles et dans les conséquences à en tirer."
Il prône la supériorité de la raison sur le moi. La nature a toujours raison (Examen de conscience philosophique, 1899) :
Pour Ernest Renan la Grèce ancienne représente la perfection (Prière sur l'Acropole ; Illustrations en couleurs de Serge de Solomko) :
Quand je vis l’Acropole, j’eus la révélation du divin, comme je l’avais eue la première fois que je sentis vivre l’Evangile…
Il y a dans ce texte et dans la pensée d’Ernest Renan un lien entre la perfection de la civilisation grecque classique et la raison :
Renan évoque aussi ses Souvenirs d'enfance et de jeunesse (1883) à Tréguier dans les Côtes d’Armor, sa ville natale. Il émet des critiques sur l’éducation qu’il reçut de la part des prêtres (qualité de l’enseignement et orientation idéologique) :
Il porte également un regard sur son passé, son éducation familiale et ce qu’il est devenu selon lui :
Ma race, ma famille, ma ville natale, le milieu si particulier où je me développai, en m’interdisant les visées bourgeoises et en me rendant absolument impropre à tout ce qui n’est pas le maniement pur des choses de l’esprit, avaient fait de moi un idéaliste fermé à tout le reste.
Ernest Renan semble aussi attaché à son terroir qu’il évoque souvent, par exemple dans ces Lettres intimes : 1842-1845 :
On pourrait aussi évoquer son attrait pour la philologie et notamment les langues sémitiques. Ou encore sa conférence Qu’est-ce qu’une nation, prononcée en 1882 à la Sorbonne, où il souligne qu’une nation est déterminée par la volonté d’hommes de vivre ensemble et de partager des choses en commun. Des polémiques se sont fait jour sur le fait qu’Ernest Renan utilisait un peu trop la notion de race. Néanmoins la richesse, la curiosité et la diversité de l’œuvre d’Ernest Renan mérite que l’on s’y intéresse et que l’on se replonge dans l’œuvre d’un homme marquant de son époque.
Joseph Ernest Renan / A. Liebert
Bibliographie
- L'avenir de la science : pensées de 1848. Paris, Calmann-Levy, 1890.
- Averroès et l'Averroïsme : essai historique. Paris, A. Durand, 1852.
- Examen de conscience philosophique. Paris, A. Franck, 1889.
- Lettres intimes : 1842-1845 ; précédées de Ma soeur Henriette (4e éd.). Paris, Calmann Levy, 1896.
- Prière sur l'Acropole ; Illustrations en couleurs de Serge de Solomko. Paris, 1920.
- La Réforme intellectuelle et morale.Paris, Michel Lévy frères, 1871.
- Souvenirs d'enfance et de jeunesse. Paris, Calmann-Levy, 1883.
- Spinoza : discours prononcé à La Haye le 21 février 1877, à l'occasion du 200e anniversaire de sa mort. La Haye, 1877.
- Vie de Jésus. Paris, M. Levy, 1863 (Histoire des origines du Christianisme, 1)
Sur Ernest Renan
- Ernest Renan à la BnF (data.bnf)
- Ernest Renan : "Qu'est-ce qu'une nation ?", 1882 : texte et présentation ; suivis de Genèse et postérité, de l'Empire à la nation / Maya Boutaghou. Paris : Honoré Champion, 2020.
- Ernest Renan : une biographie / Jean Balcou. Paris : Honoré Champion, 2015.
- Mona Ozouf. « La réforme intellectuelle et morale d’Ernest Renan », L’Histoire, n° 369, novembre 2011
- Weinberg, Kurt. « "Race" et "races" dans l'œuvre d'Ernest Renan ». Zeitschrift Für Französische Sprache Und Literatur, vol. 68, no. 3/4, 1958, p. 129–164.
- Maison d’Ernest Renan
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