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Marcelle de Lacour : musique baroque et clavecin

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A travers l'écoute de plusieurs de ses enregistrements, Gallica vous invite à découvrir le parcours de Marcelle de Lacour, chanteuse, harpiste et surtout claveciniste qui participa activement à la redécouverte de la musique baroque en France.

Marcelle Antoinette Eugénie Schaeffer est née le 6 novembre 1896 à Besançon dans le Doubs.Très tôt attirée par la musique, elle étudie au Conservatoire de Besançon le piano, le chant et la harpe, instrument où elle excelle.  Mariée au comte Robert de Lacour, docteur en droit et lui-même amateur de musique, elle vient à Paris dans les années vingt où elle devient l'élève de Lily Laskine, première femme à être admise dans l’orchestre de l’Opéra de Paris en 1909 à l’âge de 16 ans,  pour la harpe et de Wanda Landowska pour le clavecin. Cette dernière remet au goût du jour le clavecin ainsi que le cantor de Leipzig, en offrant en mai 1933 la première représentation des variations Goldberg de Bach. Marcelle de Lacour s’inscrit toute sa vie dans cette lignée en militant pour la renaissance de la musique baroque et la redécouverte du clavecin.
 

Wanda Landowska en 1930

 

Bien qu'elle ait participé à plusieurs concerts en tant que chanteuse (elle chanta le Pie Jesu de Gabriel Fauré aux Invalides après la disparition de Mermoz en mer en 1936), elle dédia presque exclusivement sa carrière au clavecin.
Presque car on peut l’entendre à la harpe sur La flûte de pan d'André-Marie Cuvelier qui met en musique le poème de Pierre Louÿs tiré des Chansons de Bilitis. C’est le seul morceau, à notre connaissance, où l’on peut entendre Marcelle de Lacour  jouer de cet instrument.

 


La flûte de pan d'André-Marie Cuvelier (Aulos, Part 999/ 1000)

 

A partir de 1935, elle participe au projet musical du label l’Anthologie Sonore fondé par le musicologue allemand, Curt Sachs, et l’éditeur de livres Bernard Steele de la maison d'édition "Denoël et Steele". Il reprend le principe déjà développé en Allemagne par le même Curt Sachs et la maison de disques allemande Parlophone, sous le titre "2 000 ans de musique". L’Anthologie sonore, « thesaurus » de la musique ancienne allant du Moyen-âge jusqu’à la fin du XVIIIe siècle comprendra 169 disques 78 tours publiés de 1935 à 1953.
Marcelle de Lacour enregistre ainsi pour l’Anthologie sonore trois disques : la sonate HWV 373 en mi majeur (volume 11) de Georg Friedrich Haendel (1685-1759) en 1935, le Trio (volume 48) de Jean-Marie Leclair (1697-1764) et la Sonate pour viole de gambe et clavecin en do majeur (volume 49), toujours de Haendel en 1937.
 

Sonate en mi majeur de Georg Friedrich Haendel (l'Anthologie sonore, vol. 11)
 

Trio de Jean-Marie Leclair (l'Anthologie sonore, Vol. 48)
 

Sonate pour viole de gambe en do majeur de Georg Friedrich Haendel (l'Anthologie sonore, Vol. 49)
 
La même année, elle enregistre également pour la Gramophone, La leçon de ténèbres de François Couperin (1668-1733).

 


La leçon de ténèbres de François Couperin (Gramophone, DB 5010 / 5011)

  

 
En janvier 1938, elle grave pour le tout jeune label discographique l’Oiseau-Lyre, fondé par  l’australienne Louise Hanson-Dyer, trois disques de musique baroque : Les Fastes de la grande Ménestrandise (l'Oiseau-Lyre OL 11) et le Tombeau de M. de Blancrocher, la chaconne et Le duo en sol mineur  (l'Oiseau-Lyre OL12) de François Couperin ainsi que les Sarabandes en ré et en sol (l'Oiseau-Lyre, OP 13), œuvre rare de la compositrice Élisabeth Jacquet de la Guerre (1665-1729). Cousine de François Couperin, Élisabeth Jacquet de la Guerre, est la première femme à être reconnu pour sa musique pour clavecin et être une des premières à composer des sonates en France pour lesquelles Louis XIV reconnaitra la qualité et l’originalité.

 


Les fastes de la grande menestrandise de François Couperin (l'Oiseau-Lyre, OL 11)

  


Tombeau de Mr. de Blancrocher de François Couperin (l'Oiseau-Lyre, OL 12)
 

Sarabande en ré et en sol d'Élisabeth jacquet de la Guerre (l'Oiseau-Lyre, OL 13)

  

A partir de mai 1938, elle grave quatre disques pour la société Gramophone, des pièces de Johann Rosenmüller (1619 ?-1684) et d’Antonio Vivaldi (1678-1741).

 


Sonate en mi mineur de Johann Rosenmüller (Gramophone, DB 5064)

  


Concerto en la mineur d'Antonio Vivaldi (Gramophone, DB 5065)
 
Le 6 juin 1939, elle participe pour la maison Pathé à l’enregistrement  du Concerto pour flûte en ré majeur op. 10 n°3 « Le Chardonneret » d’Antonio Vivaldi.

 

 
Toujours durant les années 1930, elle sollicite également les compositeurs contemporains afin d'enrichir le répertoire du clavecin. Elle est ainsi l'inspiratrice et la dédicataire du compositeur tchécoslovaque Bohuslav Martinu (Concerto pour clavecin – 1935),  de la compositrice et  cheffe d’orchestre britannique Ellen Coleman (Thème et variations - 1948), le compositeur, essayiste et musicologue portugais Fernado Lopez Graça (Três velhos Fandangos portugueses  para cravo - 1953),  la compositrice hollandaise Bep Geuer (Suite en contrepoint) ou encore la compositrice et pédagogue française Marcelle Soulage (Ronde villageoise pour clavecin - 1939). Ces partitions ont fait l'objet d'un don au département de la Musique de la Bibliothèque nationale de France.

Pendant la seconde guerre mondiale, Marcelle de Lacour se retire dans le sud de la France avant de revenir à Paris en 1944 :
« Notre collègue Marcelle de Lacour, après quatre années passées dans le Midi, ou elle a fait entendre au clavecin bon nombre d'œuvres anciennes, a donné à Paris de nombreux concerts historiques, soit dans les principales salles de musique, soit à la Radio. Citons entre autres le Concert de la Société La Loggia, consacré aux clavecinistes anglais, et celui de la Société Française de Musicologie lors de la séance Campra (15 décembre 1944). A la Radiodiffusion Nationale, sous la direction de notre collègue Felix Raugel : Lully,  Miserere (2 novembre 1944),  Mozart : Messe en ut, K. 337 (8 avril 1945, première exécution en France), et la Messe du Couronnement (1er mai 1945) ; Palestrina : Messe ( Assumpta est ) (3 juin 1945) ». (Suzanne Clercx, in Revue de Musicologie T. 24, No. 73/74 (1945), pp. 29-31)
 
En décembre 1947, elle  signe huit faces pour le label Scola-disques  sous la direction de Georges Aubanel : Pavane, extrait de Noce de village (Scola-disques 4001) de Jean-Baptiste Lully (1632-1687), Le menuet, extrait Orfeo ed Euridice (Scola-disques 4002) de Christoph Willibald von Gluck (1714-1787),  Gavotte, extrait de La Fête du village (Scola-disques 4003) de François-Joseph Gossec (1734-1829) et Le passepied, extrait de  L’Europe galante (Scola-disques 4004) d’André Campra (1660-1744).

 


Pavane, extrait de Noce de village de Jean-Baptiste Lully (Scola-disques, 4001)
 

Le menuet, extrait d'Orphée se Christoph Willibald von Gluck (Scola-disques, 4002)
 

La gavote, extrait de La fête du village de François-Joseph Gossec (Scola-disques, 4003)
 

Le passepied, extrait de L'Europe gallante d'André Campra (Scola-disques, 4004)
 
En 1954, l’organiste et compositeur Marcel Dupré (1886-1971) devient directeur du Conservatoire national supérieur de musique de Paris. Il désire alors créer une véritable classe de clavecin. Il choisit  Marcelle de Lacour  qui est engagé le 1er décembre 1955. Elle y enseignera 11 ans avant de prendre sa retraite en novembre 1966.
 

Marcel Dupré lors de la remise des orgues restaurées du Trocadero le 25 février 1927.
 
En 1957, elle enregistre un dernier disque pour la société Pathé intitulé Portraits de femmes au XVIIIe siècle (Pathé DTX 234). Il s'agit d'un nouvel hommage à la musique baroque mais cette fois-ci à travers ses femmes. Ce microssillon proposent en effet les compositions de François et Armand-Louis Couperin, mais aussi de François D'Agincour, Jean-François Dandrieu ou encore Louis-Claude Daquin aux titres évocateurs : La superbe, l’étincelante, La voluptueuse, L’évaporée ou encore La gémissante. Le disque s’achève par une composition de Marcelle de Lacour : Trois airs que jouait la pendule de la Reine Marie-Antoinette.
 

Source : Collection département Son, Vidéo, multimédia
 
Marcelle de Lacour décède le 24 mars 1997 à l'âge de 100 ans. Son travail pour faire vivre et aimer le clavecin et plus largement la musique perdure à travers la Fondation de Lacour pour la Musique et la Danse créée en 2000.

 

Pour aller plus loin :

Marcelle de Lacour et la presse.
 

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