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Philippe d'Orléans, le savant

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31 janvier 2023

Il y a 300 ans, en 1723 mourait Philippe d'Orléans. L'Histoire a retenu qu'il a assuré la régence de la France, de la mort de Louis XIV jusqu'au sacre de son arrière petit-fils. Mais le personnage se révèle beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît.

Portrait de Philippe d'Orléans, régent, en pied : estampe (Collection Michel Hennin)

Le duc de Chartres est né en 1674 de l’union arrangée d’un couple hautement improbable, Monsieur, frère de Louis XIV, ayant épousé en secondes noces la Princesse Palatine. Grâce à son précepteur, l'abbé Dubois qui lui inculque ses connaissances très poussées pour l'époque en sciences physiques, mathématiques, chimie, peinture, gravure et musique, le futur régent reçoit une éducation très solide.

 

Portrait du Cardinal Guillaume Dubois, en buste, de profil dirigé à gauche dans une bordure ovale : estampe (collection Michel Hennin).

L'ecclésiastique aux moeurs très libres conserva par la suite une grande influence sur son ancien élève dont il devint le compagnon de débauche. En effet, le régent se forge assez rapidement une réputation de libertin à peine dissimulé. Mais c'est par une toute autre activité qu'il se distingue de ses contemporains.  

En effet, il manifeste un intérêt certain pour la science. Fuyant les mondanités, doué d’une grande mémoire, très intelligent, Philippe d'Orléans est le savant de la famille. Il se passionne pour l’alchimie et, afin de parfaire ses connaissances, offre sa protection au chimiste néerlandais Guillaume Homberg (ou Humbert). En 1704, il le nomme Premier médecin attaché à son service. Il fait construire un laboratoire  dans son hôtel particulier du Palais-Royal. Tous deux y élaborent des parfums entêtants ou tentent de fabriquer des pierres précieuses. Ils ne sont cependant pas à l'origine du Régent, diamant aux dimensions exceptionnelles. Reportons-nous aux Mémoires pour servir à l’histoire des hommes illustres dans la république des lettres de Jean-Pierre Niceron paru de 1729 à 1745 :

M. le Duc d’Orléans qui se livrait au goût et au talent qu’il avait pour les sciences, ayant voulu entrer dans les mystères de la chimie et de la physique expérimentale, prit en 1702  M. Homberg auprès de lui en qualité de son physicien, et lui donna une pension et un laboratoire le mieux fourni et le plus superbe que la chimie eût jamais eu.

Leurs recherches portent aussi sur  la fameuse pierre philosophale : les scientifiques de l’époque ne doutent pas de leur faculté de transmuter le plomb en or grâce à cette hypothétique substance alchimique.

L'Alchimiste / David Teniers. Source : Musée de La Haye. 

Pourtant le régent semble faire preuve de lucidité quant à son existence. Facétieux, il s’amuse même à égarer les recherches de Homberg vers… de la matière fécale ! C’est d’ailleurs de cette façon que le chimiste néerlandais découvre ce que l'on nommera le pyrophore de Homberg ! Dans l’Alchimie et les alchimistes, Louis Figuier relate à son tour l'anecdote sur un mode humoristique. 

L'alchimiste / Jan Steen

Ses activités de chimiste vont placer Philippe d’Orléans dans une situation délicate car il commet l'erreur d'avouer son intérêt pour les sciences occultes. Dans le passé, il aurait même participé  à des séances de sorcellerie où on invoque le diable. Il prend ensuite rapidement ses distances vis-à-vis de ces pratiques. Mais il n’en faut pas plus pour qu’il soit accusé d’empoisonnement sur la descendance directe de Louis XIV afin de servir son ambition personnelle. L'entourage de son principal rival - le bâtard légitimé de Louis XIV et de Madame de Montespan, le duc du Maine - se charge de propager la rumeur. Car, à la mort du monarque, tous deux se disputent âprement la régence. Dans un premier temps, le Duc du Maine semble l’emporter grâce au dernier testament de Louis XIV - sans doute rédigé sous l’influence de Madame de Maintenon, l’ancienne préceptrice des enfants illégitimes royaux. Mais le Parlement casse le testament en faveur de Philippe d’Orléans. Depuis lors, l'hécatombe de la famille royale a été attribuée à une maladie contagieuse, la scarlatine.

En 1715-1718, le prince de sang diligente une enquête auprès des intendants afin de faire le point sur l'état des ressources naturelles du pays et en confie la direction à l'Académie des sciences. Une preuve supplémentaire de la curiosité d'esprit qui ne cessa d'animer le Régent tout au long de son existence !

Les infirmes du temps : estampe, 1681.

Billet mis à jour en novembre 2022. 

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