Joséphine Baker, portraits dessinés dans la presse
30 novembre 2021
Figure emblématique du music-hall des années 1920 et 1930, Joséphine Baker a été représentée par de nombreux artistes. Son entrée au Panthéon nous donne l’occasion de passer en revue certains de ses portraits dessinés publiés dans la presse.
Affiche de Jean Chassaing (1931)
Tout débute en 1925 avec le succès de La Revue Nègre, immortalisée par les affiches et dessins de Paul Colin. Il conçoit notamment l’affiche du spectacle La Revue nègre au music-hall des Champs-Elysées. En 1927, il illustre Les Mémoires de Joséphine Baker recueillis et adaptés par Marcel Sauvage (Réédition de 2006) et publie un recueil de lithographies Le Tumulte noir. (Tous ces documents sont consultables uniquement dans Gallica intramuros.)
Il n’est pas possible d’oublier l’imagerie coloniale (lire par exemple l’analyse d’Olivier Roueff Politiques d’une « culture nègre »), bien présente dans le dessin de presse. Les représentations de Joséphine Baker reprennent à la fois le traitement des silhouettes et également celui de l’homme et de la femme noire. Le fil que l’on va suivre est celui du dessin de presse, faisant le portrait d’une danseuse métisse qui joue sur les stéréotypes, tout en y étant enfermée, comme le fut Chocolat.
Il n’est pas possible d’oublier l’imagerie coloniale (lire par exemple l’analyse d’Olivier Roueff Politiques d’une « culture nègre »), bien présente dans le dessin de presse. Les représentations de Joséphine Baker reprennent à la fois le traitement des silhouettes et également celui de l’homme et de la femme noire. Le fil que l’on va suivre est celui du dessin de presse, faisant le portrait d’une danseuse métisse qui joue sur les stéréotypes, tout en y étant enfermée, comme le fut Chocolat.
La Revue Nègre, dessin de Pol Rab, 1er novembre 1925 et de Paul Gibert, 1er février 1931 pour La Rampe
Joséphine Baker a été aussi beaucoup photographiée. Après le succès de la Revue Nègre et ses débuts aux Folies Bergères (« Joséphine Baker, étoile noire », La Femme de France, 19 décembre 1926), elle devient rapidement une icône de la mode parisienne (14 août 1927) et ce statut de vedette durera jusqu’à l’après-guerre (Regards, 1er mai 1945). Sa silhouette et son visage vont continuer d’inspirer illustrateurs et affichistes.
Deux dessins de Pierre Payen et un dessin de presse (L’Ami du peuple, 12 décembre 1932)
Ceux-ci sont la plupart du temps également dessinateurs de presse, et cet engouement va se refléter dans les journaux. Comme pour les publicités de ses spectacles, les illustrateurs jouent à la fois sur le mouvement du corps qui danse et sur le visage qui permet toutes les variantes de l’esthétique des années folles.
Le visage stylisé de Joséphine est très souvent décliné, par exemple ici par Pierre Payen dans Le Rappel, en jeu typographique dans Gringoire ou dessiné par Nikoval.
Le visage stylisé de Joséphine est très souvent décliné, par exemple ici par Pierre Payen dans Le Rappel, en jeu typographique dans Gringoire ou dessiné par Nikoval.
Le Rappel, 23 juillet 1926 ; Gringoire, 15 juin 1934 ; L’Intransigeant, 16 décembre 1934
Lorsque le dessinateur choisit de faire un gros plan sur le visage de Joséphine Baker, l’accent est très souvent mis sur le sourire, ici Paul Colin et Cam :
L’Intransigeant, 16 juillet 1927 ; La Patrie, 18 octobre 1928 ; Le Matin, 19 décembre 1934
Variations sur un dessin de Cabrol :
Lorsque le mouvement dansé est représenté, ce sont alors d’innombrables petites silhouettes qui envahissent les pages des journaux, pour essayer de donner à voir et à ressentir la frénésie du rythme :
Le Petit Marseillais, 16 mars 1934 ; Affiche « La joie de Paris », Casino de Paris, 1930 ; La Femme de France, 19 décembre 1926
Le motif du corps nu, avec uniquement la ceinture de bananes est évidemment reproduit de très nombreuses fois (Roger Roy, Julien de Pavil). De la danse, on peut passer à la seule connotation sexuelle avec Auguste Liquois ou bien à l’humour qui va détourner ce cliché en l’inversant. C’est Antoine Toé qui fait danser Marcel Sauvage, auteur des Mémoires de Joséphine Baker, nu et avec les bananes.
Gringoire, 3 octobre 1930 ; Comœdia, 19 août 1927 ; Séduction, 25 août 1934 ; L’Intransigeant, 7 décembre 1930
Joséphine Baker est tout de même représentée habillée, en train de danser, dans tous les registres possibles, classique, comique (Yves Brayer) ou franchement caricatural (Déro) :
Femina, 1er janvier 1933 ; Beaux-arts, 1er janvier 1940 ; L'Information financière, économique et politique, 22 mai 1954
On peut suivre aussi l’évolution des illustrateurs sur le sujet. Parmi cet ensemble énorme et très varié, nous avons retenu un dessinateur et une dessinatrice. Tout d’abord, Serge, qui souvent associe texte et dessin. Dessinateur, journaliste, historien du cirque et du music-hall (Le monde du cirque, 1939), chansonnier, producteur radiophonique, il a croqué Joséphine Baker des années 1920 aux années 1950. Avec des portraits :
Les Nouvelles littéraires, 10 mars 1949 ; Le Crapouillot, 1er janvier 1950
Et également des silhouettes associant la recherche du mouvement dansé et du rythme avec un comique complice :
Le Crapouillot, 1erjuillet 1926 ; Comœdia, 24 septembre 1931 ; La Rampe, 15 décembre 1931
Et enfin Lucienne Pageot-Rousseaux, dessinatrice spécialisée dans les croquis de danse et de théâtre et qui a illustré Serge Lifar à l'Opéra défini par Paul Valéry ; parlé par Jean Cocteau (1943) et L'Ame et la danse de Paul Valéry (1954) :
La Rampe, 15 octobre 1930 ; Femme de France, 22 janvier 1933 ; Le Figaro, 4 mars 1949
Le mouvement de danse stylisé et la nudité entraînent une grande variété de dessins, dans le trait et l’esprit, allant de l’art premier à la recherche de l’abstraction ou à la caricature.
L’Intransigeant, 26 octobre 1930 ; L’Écho d’Alger, 15 mars 1928 ; Paris-Soir, 12 mai 1926
Le premier dessin est un auto-portrait de Joséphine Baker, publié par Marcel Sauvage ; le dernier est une caricature espagnole anonyme.
Ce survol rapide montre la richesse de l’iconographie de presse. Ces nombreuses représentations peuvent transcender les clichés de la « culture nègre », montrent la recherche esthétique qu’a pu inspirer son personnage et la liste des dessinateurs semble inépuisable. Ici encore Bécan, Tigre (Pierre de Régnier) ou Garry :
Ce survol rapide montre la richesse de l’iconographie de presse. Ces nombreuses représentations peuvent transcender les clichés de la « culture nègre », montrent la recherche esthétique qu’a pu inspirer son personnage et la liste des dessinateurs semble inépuisable. Ici encore Bécan, Tigre (Pierre de Régnier) ou Garry :
L’Œuvre, 24 janvier 1929 ; Gringoire, 10 juillet 1931 ; Le Parisien libéré, 5-6 mars 1949
Commentaires
félicitations
Immense bravo pour ce superbe, superbe travail...
Cordialement
Serge Laget
Bravo
Bonjour,
Un bel article richement illustré, continuez à numériser les trésors de la culture française et à écrire aussi bien pour les diffuser.
J'ai utilisé l'affiche de J. Chassaing en image de couverture pour mon article « Joséphine Baker par Simone de Beauvoir, de revue en revue », Voyages autour de mon cerveau, novembre 2021. URL : https://vadmc.hypotheses.org/?p=2240
À bientôt de vous lire, cordialement.
Commentaire
Bravo pour l énergie qui se dégage de ce magnifique diaporama.
J aime beaucoup l affiche deJean Chassaing symbole de la joie de vivre..
Merci beaucoup.
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