La Correspondance de Marie de Rabutin-Chantal, marquise de Sévigné (1626-1696)
Dans le cadre du projet européen "Rise of literacy", le blog Gallica vous propose une série de billets sur la naissance de l’Europe des savoirs. Aujourd'hui, nous vous invitons à (re)découvrir la correspondance de Madame de Sévigné.
Musée de Versailles : [carte postale] : Marie de Rabutin, Marquise de Sévigné (coll. Bibliothèque Marguerite Durand)
Madame de Sévigné entama une correspondance assidue avec sa fille, Françoise Marguerite, dès le départ de celle-ci en 1671, à la suite de son mariage avec François Adhémar de Monteil de Grignan, nommé lieutenant général du roi en Provence.
Cette relation épistolaire, qui dura vingt-cinq années, au rythme de deux à trois lettres hebdomadaires, relate des événements liés à la vie de la Cour de Louis XIV, comme le décès de Turenne, maréchal de France, le suicide resté célèbre de Vatel, maître d’hôtel du Prince de Condé, le mariage de La Grande Mademoiselle ou l'arrestation de Lauzun. Elle est principalement constituée de lettres d'une mère à sa fille.
Il faut d’ailleurs aller contre une idée reçue nourrie par l’œuvre elle-même : même si la Marquise se plaint fréquemment du contraire, la mère et la fille se sont vues très souvent et sur de longues périodes. Madame de Sévigné deviendra, peu à peu, consciente de la force de la littérature ce qui l’emmènera au-delà de ses sentiments pourtant sans cesse réaffirmés :
Eh quoi, ma fille, j’aime à vous écrire : cela est épouvantable, c’est donc que j’aime votre absence !
S'il était admis que les correspondances circulent au sein d'un cercle choisi, ces lettres privées sont devenues publiques du fait d’éditions partielles : celle de 1725, orientée surtout vers la chronique, et celle de 1726, penchant davantage vers la représentation de l’intériorité.
Plus tard, Pauline de Grignan, petite-fille de la Marquise, confia à Denis-Marius Perrin l'ensemble des missives pour en réaliser une première édition (1734) suivie d'une seconde vingt ans plus tard (1754). Les six cent quatorze lettres furent censurées et remaniées pour les rendre conformes au bon goût de l'époque, notamment en en limitant les verdeurs d’expression. Plus tard, Marcel Proust fera dialoguer l'œuvre de Mme de Sévigné avec la sienne en l'inscrivant au sein de la Recherche du temps perdu et en faisant du personnage de la grand-mère une lectrice assidue de Madame de Sévigné.
Pour parvenir à une édition critique rendant compte des différents états d’une œuvre toujours à constituer, la plupart des originaux ayant été détruits lors des deux premières éditions de Perrin, il faudra attendre 1978, avec l’édition de Roger Duchêne dans la Pléiade (Gallimard), précédée d’une première édition en 1953, par Gérard Gailly, dans la même collection.
L'œuvre de Mme de Sévigné est tellement devenue le modèle et la mesure de toute correspondance que la localité de Grignan, dans la Drôme, a eu l’idée d’un beau festival d’été portant sur cette pratique et cet art.
Ajouter un commentaire