Sport au féminin, une course de longue haleine
A partir de la fin du XIXe siècle, nombreuses sont les représentations de la femme sportive. Pratique physique féminine et place des femmes dans le sport sont au cœur des débats, entre manuels de bonne conduite et plaisirs de l’activité physique suscitant de nouvelles postures, émancipées et libérées.
Sport loisir et bonne conduite
Au XIXe siècle, un nombre restreint de femmes issues de l’aristocratie et de la bourgeoisie pratiquent des activités sportives de loisir. En conformité avec les codes de la sociabilité mondaine, le sport définit un style de vie élégant. Il joue un rôle de discriminant social visant à montrer son statut privilégié.
Équitation, escrime sont les sports de prédilection des femmes à cette époque.
La fin du XIXe siècle marque le début de la démocratisation de la pratique sportive. Avec la diffusion des distractions sportives, Paris voit naître de nouveaux espaces de loisirs tels le Palais de glace et les bassins de natation.
Les manuels de savoir-vivre connaissent leur âge d’or au XIXe siècle et dans la première moitié du XXe siècle. Ces manuels rappellent le rôle premier assigné aux femmes, à savoir la maternité. Aussi, il est déconseillé aux femmes de pratiquer trop intensément un sport, ce qui les éloignerait du foyer domestique. De plus, pour des raisons morales, il n’est pas convenable pour une femme de faire du sport en public. Pudeur et vertu doivent être toujours préservées.
Sport plaisir et émancipation
Au début du XXe siècle, les activités physiques deviennent accessibles à un plus grand nombre de femmes. La bicyclette, symbole par excellence de modernité, favorise l’émancipation des femmes. Elle leur permet de se déplacer librement dans l’espace public tout en bousculant les convenances. Par la position à califourchon, la pratique du vélo a bouleversé la norme vestimentaire et ainsi libéré le corps de la femme. Le port du pantalon, longtemps interdit ou soumis à autorisation spéciale, devient toléré pour faire du vélo.
Dors enfant, dors ! Ta mère mon petit lapin pense à son chérubin ! Dors enfant, dors !,
carte postale, circa 1900, coll. Bibliothèques spécialisées de la Ville de Paris
La première moitié du XXe siècle voit également la structuration du sport féminin en sociétés et fédérations. Femina sport est une association qui a largement œuvré pour le sport féminin. Créée en 1912, elle compte parmi ses fondatrices les sportives Suzanne Liébrard et les sœurs Jeanne et Thérèse Brulé. Femina sport est à l’origine des premiers championnats féminins d’athlétisme de France organisés en 1916.
Présidente du club Femina sport en 1915, Alice Milliat a fait du sport féminin son combat. Sportive pratiquant l'aviron à haut niveau, elle a aussi fondé la Fédération des sociétés féminines sportives en 1917 et est à l’origine de l’organisation des premiers jeux Olympiques féminins en 1922.
Autre sportive reconnue dans les années 20, Violette Morris multiplie les performances. Elle est championne du monde au lancer du disque et du poids lors des premières olympiades féminines. Au football, elle est la capitaine de l’Olympique et remporte la coupe de France en 1925. Egalement férue de sports mécaniques, elle gagne le Bol d’or en 1927 devant un parterre constitué d’hommes. Femme rebelle, Violette Morris se voit retirer sa licence des sociétés féminines sportives de France. Elle entame alors un procès appelé « procès du pantalon » qu’elle perd mettant fin à sa carrière de sportive.
Les jeux olympiques féminins de 1922 sont une véritable révolution par rapport aux premiers jeux olympiques de 1896 exclusivement masculins conformément à la volonté de Pierre de Coubertin.
Pierre de Coubertin, lors des Jeux Olympiques de 1912 à Stockholm :
Une olympiade femelle serait impratique, inintéressante, inesthétique et incorrecte. Le véritable héros olympique est, à mes yeux, l'adulte mâle individuel. Les JO doivent être réservés aux hommes, le rôle des femmes devrait être avant tout de couronner les vainqueurs.
Aux jeux olympiques de 1900, seules quelques femmes sont admises à participer uniquement dans deux disciplines, le tennis et le golf. Il faudra attendre les jeux olympiques de 1928 pour voir des femmes concourir aux épreuves d’athlétisme.
Pour aller plus loin
Représenter la sportive dans les arts et les lettres de la Belle Epoque aux années 1950 : conférence du cycle L’Art en histoires par Julie Gaucher, maîtresse de conférences à l’université Claude Bernard Lyon 1, docteure en littérature française, autrice de l’anthologie De la « femme de sport » à la sportive (éditions du Volcan, 2019), le mercredi 27 mars à 18h30 au grand auditorium, Bibliothèque nationale de France, site Tolbiac
L'ouvrage La Selle et le costume de l'amazone : étude historique et pratique de l'équitation des dames de Jules Pellier
Les billets de blog Gallica
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Suzanne Lenglen
Les premiers dribbles du football féminin
Articles
Gilles Dhers, "Fémina sport : aux sources du foot des femmes en France" in https://www.liberation.fr, 10/06/2019, consulté le 07/03/2024.
Marina Bellot, 'Violette Morris, d'athlète « excentrique » à agent de la Collaboration" in https://www.retronews.fr, 26/02/2019, consulté le 09/03/2024.
L'Olympiade Culturelle est une programmation artistique et culturelle pluridisciplinaire qui se déploie de la fin de l’édition des Jeux précédents jusqu’à la fin des Jeux Paralympiques.
La série "Histoire du sport en 52 épisodes" de Gallica s'inscrit dans la programmation officielle de Paris 2024.
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