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La giroflée

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La giroflée révèle sa présence grâce à son parfum suave et égaille chemins et jardins de ses coloris chatoyants. Faisons connaissance avec cette frugale coquette.

Jean-Augustin Barral, Le règne végétal. Paris, 1864-1869

La giroflée, Cheiranthus cheiri L. (Crantz) ou Erysimum cheiri, est une plante vivace ou bisannuelle de 20 à 80 cm. Ses noms scientifiques portent les traces de son origine méditerranéenne. Ainsi, Cheiranthus est un mot hybride créé par Linné à partir d’un mot arabe et d’un mot grec. Originaire de Grèce, la giroflée, littéralement "parfumé au girofle", s’est naturalisée dans la majeure partie de l’Europe.

Désiré Bois, Atlas des plantes de jardins et d'appartements exotiques et européennes :320 planches coloriées inédites, dessinées d'après nature, représentant 370 plantes, accompagnées d'un texte explicatif donnant la description, l'origine, le mode de culture, de multiplication et les usages des fleurs les plus généralement cultivées. Ed. P. Klincksieck. Paris, 1896.

Elle appartient à la famille des brassicacées (crucifères), grande famille contenant plus de 300 genres répartis en plus de 4 000 espèces différentes qui comporte non seulement les choux mais encore le cresson, la roquette, la moutarde ou encore le colza.

Henri Baillon, Histoire des plantes. Tome 3, Partie 4, Monographie des crucifères. L. Hachette, Paris,1867-1895

Plante entièrement pubescente, dont la  tige a tendance à devenir ligneuse à la base. Les feuilles sont alternes, lancéolées et rapprochées. La fleur possède 4 pétales dont les coloris varient du jaune d’or au rouge brun. La floraison a lieu de mars à juin. Son parfum est particulièrement fort, notamment la nuit, et les pétales sont employés en parfumerie.

René Oberthür, Répertoire de couleurs pour aider à la détermination des couleurs des fleurs, des feuillages et des fruits. Paris, Début du XXe siècle.

Aussi appelée Violier en raison de son parfum proche de la violette, bâton d’or, ramoneur ou encore fleur des murailles, la giroflée est une plante frugale qui se contente de peu. Elle se plaît parmi les sols pauvres et calcaires et poussera dans tout type d’environnements pourvu que le terrain soit bien drainé et ensoleillé

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Johann Walter, Giroflée horticole à fleurs blanches. 1661.

Son parfum, ses coloris attrayants et sa facilité de culture ont contribué à son succès pour un usage d’agrément. Il existe ainsi un très grand nombre de cultivars horticoles obtenus par hybridation. Ces nouvelles variétés proposent des fleurs doubles et une gamme encore plus étendue de couleurs. Par ailleurs des giroflées à fleurs violettes (Matthiola sinuata) existent sur le littoral.

Johann Walter, Giroflée horticole à fleurs roses, 1661.

Les applications médicinales de la giroflée sont peu usitées car cette plante peut s’avérer  dangereuse. Comme d’autres crucifères, la giroflée contient un hétéroside sulfuré mais également plusieurs hétérosides cardiotoxiques comme ceux présents dans la digitale . C’est pourquoi elle est parfois employée comme tonique cardiaque ou diurétique mais son usage est délicat. L’empoisonnement par ingestion reste rare car son amertume prévient les possibles intoxications.

Madame de Chabreul, Jeux et exercices des jeunes filles. L. Hachette. Paris, 1890.

La popularité de la giroflée est telle, qu’elle inspire nombre de créateurs. Ainsi, elle apparaît dans le refrain d’une ancienne chanson enfantine : Giroflée, girofla. C’est une ronde dont les participants miment les paroles en même temps qu’ils les chantent. Le titre de cet air enfantin a ensuite inspiré un opéra-Bouffe éponyme à l’intrigue plutôt insignifiante.

Affiche d'Antoine Barbizet pour l'Opéra-bouffe en 3 actes, Giroflé-Girofla. Paroles de MM. A. Vanloo et E. Leterrier. Musique de Ch. Lecocq. 1874.

Cette mélodie traditionnelle et innocente deviendra pourtant en 1935 un chant de lutte anti militariste. Rosa Holt une allemande antinazie, réfugiée à Paris, emprunte cet air pour y dénoncer les horreurs de la guerre et conclut sur ce dernier vers désespéré : « Et tout ça pour rien ! ». Yves Montant en sera l’interprète.

La grande Sarah Bernhardt aimait dit-on la giroflée plus qu’aucune fleur si l’on en croit Félix Cola, parfumeur qui rapporte les propos d’un journaliste ayant connu l’actrice :

Revue des marques de la parfumerie et de la savonnerie. Avril 1926.

L’anecdote est difficile à vérifier mais elle permet d’entrevoir la popularité de cette belle fleur facile à cultiver, dont le parfum enivrant n’a rien à envier aux roses ou autres lys.
Après ces histoires de fleurs et de parfums, espérons que nos lecteurs ne reçoivent jamais de « giroflée à 5 doigts », il n’est plus question ici de beauté et le jardinage, ce sont vos joues qui risquent de prendre des teintes écarlates ou grenat, car c’est d’une gifle dont il s’agit...

Pour aller plus loin :

Pour découvrir encore plus de fleurs odorantes ou être séduit par des coloris étonnants, déambulez dans la sélection Botanique du parcours Gallica La Nature en images ou découvrez les autres billets de l’Herbier de Gallica.

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