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Plantu, dessinateur de presse depuis 1970

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10 juin 2021

En 2019,  Plantu faisait don à la BnF d'un ensemble de 500 dessins originaux. Aujourd’hui, l’ensemble est consultable dans Gallica. Plantu devient ainsi l'un des rares artistes  à voir son œuvre figurer dans la bibliothèque numérique de la BnF de son vivant.
 

"Congés de paternité", Plantu, dessin publié dans "Le Monde" en 2005

 

C’est en 1972 que Jean Plantureux, alias Plantu, a publié son premier dessin dans le journal Le Monde : une colombe aux ailes déployées serrant dans son bec un point d’interrogation en regard d’un article sur la guerre du Vietnam. Symbole universel de la paix, l’oiseau se fait messager d’un doute quant à l’issue du conflit.
 
Ce dessin elliptique contient en germe tout l’art de Plantu : en quelques traits rapides, il synthétise plusieurs notions et dégage l’idée porteuse, cœur de cible des contradictions observées. De ces arrêts sur images où l’absurde de situation se dispute avec le désarroi des personnages, surgissent des effets de surprise qui font rire sans heurter. L’humour à la fois tendre, caustique et distancié de Plantu a séduit les lecteurs du quotidien au point d’occuper sa une sans interruption de 1985 à 2021. L’artiste, devenu ainsi célèbre et incontournable dans le monde du dessin de presse, avait auparavant travaillé pour de nombreux journaux. Sa toute première collaboration date de 1970 avec la Vie du Rail puis au fil des années, ses dessins ont été publiés par des journaux aussi variés que l’Étudiant, Pariscope, La Vie, Croissance des Jeunes Nations, le Monde diplomatique et le Monde de l’Éducation pour n'en citer que quelques uns.
 

En février 1991 et pendant presque 30 ans, l’hebdomadaire d’actualité L’Express accueille à son tour ses caricatures.

 

En une cinquantaine d’années, Plantu a ainsi réalisé plus de 20 000 dessins qu’il a confiés à la Bibliothèque nationale de France en 2019, lui faisant don de 500 pièces représentatives de son évolution graphique et stylistique.

 

Les archives de Plantu : conservation, description, numérisation

Soucieux de garder ses dessins dans les meilleures conditions, Plantu a pris soin dès le début de sa carrière, de les coller sur des papiers Bristol et de les stocker dans des boîtes d’archives, non sans les numéroter, les indexer, les annoter des dates et journaux de publication. C’est au milieu des années 1980 qu’il confie ce travail d’archiviste à une première assistante, Brigitte Rocquin,  recrutée par Le Monde et chargée de continuer à engranger les dessins et d’affiner leurs repérages. Avec l’arrivée de la numérisation dans les années 2000, les œuvres récentes sont scannées.
En 2009, Maïté Léon, la nouvelle assistante de Plantu, entreprend de reclasser l’ensemble des dessins conservés dans plus d’une centaine de boîtes d’archives selon les numéros d’indexation tout en supprimant les doublons. Grâce à la mise à disposition d’un photocopieur scanner imprimante de bonne qualité, elle constitue une banque d’images en format JPG à 400 dpi comprenant les dessins du jour mais aussi les anciens, numérisés systématiquement avec l’aide de bénévoles et stagiaires.
Ces images sont stockées dans un serveur comprenant deux dossiers principaux : l’un organisé par thèmes, l’autre par ordre chronologique.
L’ensemble de ces images numérisées accompagnées du fichier des métadonnées (numéros, titres, dates, publications, indexation) ont été remis à la BnF en même temps que les originaux. Le département des systèmes d’information s’est chargé de verser les images dans Gallica et de créer les notices correspondant à chaque dessin dans le catalogue général.
 
Le travail graphique de Plantu : évolution des techniques et adaptation des supports
Les premiers dessins des années 1970 sont réalisés à l’encre de Chine sur papier vélin fin sur une esquisse au crayon graphite dont il reste des traces après gommage.
Au fil des années, les modifications en cours des dessins (corrections et ajouts) sont franchement visibles : collages d’éléments dessinés (supplémentaires ou correctifs), de bulles pour les dialogues, de trames points (en noir et blanc ou couleur), de correcteur blanc. De même, les outils se diversifient avec l’utilisation de la plume Sergent-Major au début puis du stylo technique à pointes plus ou moins fines, de feutres noirs et de couleurs, de gouache ou d’aquarelle.

En ce qui concerne le papier, on perçoit également une évolution sensible : les premiers dessins sont réalisés sur des feuilles de petits formats aux contours irréguliers collés sur les cartons Bristol (21 X 29,7 cm) orientés en hauteur ou en largeur selon le format des dessins. Dans les années 1990, on note plus de liberté dans le choix du support papier : utilisation de feuilles plus grandes, « papier d’imprimante » en format A4, découpées et collées sur Bristol, puis absence de découpages et de collages, et réalisation de dessins encore plus grands, sur des feuilles d’imprimante en format A3.
C’est aussi à la fin de ces années que Plantu multiplie les études pour un seul dessin. Ainsi, ces ensembles préparatoires permettent-ils de suivre la genèse du dessin de l’esquisse globale, à la composition définitive avec les étapes intermédiaires pour les indications des couleurs en aplat à destination de l’imprimeur.

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Ce travail encore « artisanal » avec multiplication de croquis et prises de repères manuels n’est plus d’actualité dès les années 2000 quand l’utilisation de palette graphique intervient. Offrant de nombreuses et nouvelles fonctionnalités, elle permet un gain de temps inestimable pour ce métier « de l’urgence ». Plantu réalise désormais son dessin, toujours à la main, en noir et blanc sur une feuille d’imprimante et le scanne, appliquant la couleur avec l’outil informatique. C’est ce dessin, envoyé à distance au journal, qui est publié.
Conserver les dessins originaux et les croquis intermédiaires représente par conséquent un véritable intérêt pour l’histoire du dessin de presse. Cela aide à comprendre comment l’artiste a su adapter son travail en s’appropriant les outils et matériaux disponibles sur le marché au fur et à mesure des évolutions technologiques.
 
Le registre iconographique : thèmes récurrents et sujets de prédilection
Dessinateur de presse, Plantu suit l’actualité au quotidien, s’amusant à « emboîter » différents sujets, par des jeux de superpositions, de glissements de sens, d’ amplifications des situations ou de réductions drastiques, suscitant, par ces effets inattendus, un rire, parfois complice, d’autres fois offusqué peut-être, mais jamais indifférent.
Par ce graphisme à la ligne claire, drapé d’une aimable rondeur et cet humour à la fois incisif et enjoué, Plantu couvre une large gamme de sujets, des plus anodins aux plus graves.
Ce sont les conflits (entre individus ou groupes, des partis politiques aux nations), la terre dans tous ses états , déchirée par les problèmes sans solutions entre les riches et les pauvres, les diffusions médiatiques exponentielles et /ou les menaces écologiques.

 

Pointant les contradictions à l’origine de nombreux maux, s’amusant à montrer la banalité, voire la fragilité, des hommes et femmes politiques, il présente fréquemment des personnages faisant le grand écart entre deux situations inextricables.

 

Dans d’autres cas, il fait appel à des images implantées dans l’imaginaire collectif. Ce sont des figures symboliques d’un pays (Marianne, l’Oncle Sam ou le Manneken-Pis) ou de bandes dessinées (Mickey, Tintin, Astérix ou les Dalton) ou bien empruntées à des œuvres d’art célèbres ("Le Penseur" de Rodin, l’autoportrait de Léonard de Vinci ou la "Liberté guidant le peuple" de Delacroix).

 

C’est au début des années 1980 que la souris malicieuse est apparue dans les dessins concernant les questions domestiques et/ou locales. Elle est représentée au premier plan ou, toute petite, dans un coin de l’image. Elle exprime la pensée supposée du lecteur, entre frayeur et amusement, en passant par une infinité de physionomies et d’attitudes soulignées par quelques attributs signifiants.
 

Pour en savoir plus

La sélection Gallica consacrée à Plantu donnant accès aux 500 dessins.

La fiche "Gallica vous conseille" sur Plantu

Commentaires

Soumis par Nelly Feuerhahn le 13/06/2021

Excellente présentation qui donne un relief très intéressant aux dessins. Bravo aux personnes de la BnF et en particulier à Martine Mauvieux pour ce gros travail.

Soumis par Jean GERARD le 17/06/2021

Magnifique idée de pérenniser ainsi et de rendre accessible à tous, via Gallica, une partie de l'oeuvre de Plantu et ses multiples représentations des vicissitudes de l'existence humaine...

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