Le Blog
Gallica
La Bibliothèque numérique
de la BnF et de ses partenaires

La peinture arabe à la Bibliothèque nationale de France

0

L'exposition Paroles de Bêtes (à l'usage des princes) : les fables de Kalila et Dimna présentée à l'Institut du monde arabe du 10 septembre 2015 au 3 janvier 2016 grâce à la participation de la Bibliothèque nationale de France constitue l'occasion de s'interroger sur l'évolution de la peinture arabe, au travers de manuscrits d'exception produits entre le XIIe et le XVIIIe siècles.

Les deux chacals. Kalila wa Dimna, manuscrit arabe, Syrie ?, vers 1200-1220. 146 fol.,  28 x 21,5cm. Arabe 3465, fol. 48r

Les premières manifestations de l’art pictural dans le monde arabo-musulman remontent à l’époque omeyyade (660-750). Les palais construits pour les souverains à la bordure du désert syro-jordanien montrent en effet de riches peintures murales à décors figurés, reflétant un apport des modes de représentation byzantins, mais également perses sassanides.

            La peinture arabe connaît son apogée au XIIIe siècle dans les manuscrits littéraires. Les fables de Kalila wa Dimna, rédigées en Inde et traduites en arabe vers 750 par Ibn al-Muqaffa, ont été richement illustrées dans le monde arabe, persan et turc. La plus ancienne copie arabe illustrée a sans doute été produite en Syrie dans les années 1200. Les peintures y sont exécutées directement sur papier, sans cadre, ni fond. Le paysage est symbolisé par quelques éléments : une bande d'herbe, des arbustes aux feuilles et aux fleurs stylisés. Hommes et bêtes sont représentés avec des couleurs vives et des traits simplifiés.

Le Livre des séances, rédigé à la fin du Xe siècle par al-Hariri, connaît une formidable diffusion à travers tout le monde arabe. Le texte, qui raconte les aventures du brigand Abu Zayd, se prête tout particulièrement à l’illustration. Les exemplaires de la Bibliothèque nationale de France reflètent le rayonnement de la peinture arabe au XIIIe siècle.

image2ima.jpg
Abu Zayd et ses auditeurs. Maqamat d’al-Hariri, manuscrit arabe daté 619/1222 ; 30 x 23 cm. Arabe 6094, fol. 147r

Le plus ancien manuscrit des Séances, daté de 1222 et attribué à la Syrie, présente maints traits byzantins dans l’iconographie et la facture. Une seconde copie contient un colophon très complet indiquant que le manuscrit a été produit à Bagdad en 634 / 1237 par le peintre et copiste al-Wasiti. Ses quatre-vingt-dix-neuf illustrations font preuve d’une grande maîtrise dans la mise en scène des personnages au sein de compositions parfois complexes. Ce manuscrit constitue réellement un des chefs-d’œuvre de la peinture arabe, les scènes qui l'animent illustrant parfaitement la vie quotidienne des villes et des campagnes.

image3ima.jpg
Abu Zayd et al-Harith arrivent dans un village. Maqâmât d’al-Hariri, manuscrit arabe copié à Bagdad en 632 / 1237 par al-Wasiti. 167 fol. ; 37 x 28cm. Arabe 5847, fol. 138r

Les invasions mongoles et la prise de Bagdad en 1258 marquent un repli certain du monde arabe sur lui-même. Celui-ci se perçoit dans la peinture des manuscrits produits sous la domination des Mamelouks d’Egypte et de Syrie (1250-1517). Une copie des fables de Kalila wa Dimna produite au XIVe siècle illustre la cristallisation des schémas de composition et la mise en valeur des éléments décoratifs au sein de la peinture. La palette de couleurs est plus vive.

image4ima.jpg
Les deux chacals, Kalila wa Dimna, manuscrit arabe, Syrie ? XIVe siècle. 119 fol.,  30 x 23 cm. Arabe 3467, fol. 21r

Après la chute de la dynastie mamelouke en 1517, les Turcs ottomans prennent le pouvoir en Egypte et en Syrie. La production de manuscrits peints dans ces régions, mal connue, témoigne  d'une multiplicité des apports et des pratiques picturales, visibles par exemple sur les copies datées des fables de Kalila wa Dimna conservées à la Bibliothèque nationale de France. Ces manuscrits reprennent souvent modèle dans des manuscrits plus anciens.

image5ima.jpg
Le marchand et le dépositaire infidèle, Kalila wa Dimna, Manuscrit arabe, Egypte, 1175 / 1762. 199 fol., 22 x 16,5 cm. Arabe 3475, fol. 83r

Isabelle Imbert, Doctorante en Histoire des arts islamiques à Université Paris – Sorbonne (UMR 8167 Orient et Méditerranée)

Pour aller plus loin :
- La peinture arabe, Richard Ettinghausen, Paris, Skira, 1977.
- L'art du livre arabe : du manuscrit au livre d'artiste [exposition, Paris, Bibliothèque nationale, 9 octobre 2001-13 janvier 2002] [catalogue sous la direction de] Marie-Geneviève Guesdon, Annie Vernay-Nouri, Paris, Bibliothèque nationale, 2001.
- Le livre manuscrit arabe : préludes à une histoire, François Déroche, Paris, Bibliothèque nationale, 2004.
- les expositions virtuelles de la BnF consacrées au livre arabe et aux enluminures en Islam

L'exposition Paroles de Bêtes (à l'usage des princes) : les fables de Kalila et Dimna se tient à l'Institut du monde arabe du 10 septembre 2015 au 3 janvier 2016 :

Ajouter un commentaire

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et de courriels sont transformées en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.