Titre : Le Petit journal
Auteur : Parti social français. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Clermont-Ferrand)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Pau)
Date d'édition : 1891-03-06
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 06 mars 1891 06 mars 1891
Description : 1891/03/06 (Numéro 10297). 1891/03/06 (Numéro 10297).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Description : Collection numérique : La Commune de Paris Collection numérique : La Commune de Paris
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/09/2008
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y
ADMMSTRAÎIOIs, RÉDACTION ET ANNONCES
61, rue Lafayette, 61
A PARIS
On reçoit aussi les Annonces rue Grange-Batelière, 15
ABONNEMENTS PARIS •
TROIS MOIS 5 FR.
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UN NUMÉ RO: 5 C ENTIMES
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LE SUPPLÉMENT ILLUSTRÉ : 5 CENTIMES
ABONNEMENTS DEPARTEMENTS
TROIS MOIS 6 FR.
SIX MOIS 12 FR.
UH AN.. 24 FR.
VENDREDI 6 MARS 1891
300 SAINTE COLETTE— 65.
Numéro 10297
VINGT.NEUVIÈME ANNÉE
PERMgRE EDITION
société anonyme dïï Petit Journal
CAPITAL : VINGT-CINQ MILLIONS
AVIS AUX ACTIONNAIRES
MM. les actionnaires de la Société
anonyme du Petit Journal, propriétaires
de cinq actions au moins, sont Convoqués
en assemblée générale ordinaire pour le
mercredi 8 avril 1891, à trois heures de
relevée, à l'Hôtel Continental, à Paris.
Les actionnaires qui ne pourraient pas
assister à l'assemblée ont le droit de
s'y faire représenter par un de leurs
coactionnaires en lui donnant leur pou
voir à cet effet.
Les titres et les pouvoirs serontreçusen
dépôt, au siège social, 61, rue Lafayette,
à Paris, du 9 mars au 2 a,vril inclusive
ment, de dix heures à midi et de une
heure et demie à quatre heures.
IL sera délivré, en échange, un récépissé
et une carte d'entrée.
Afin de ne pas retarder l'ouverture de
la séance, les portes de la salle seront
ouvertes à deux heures.
Le retrait des actions, après l'assem
blée, s'effectuera aussi de dix heures à
midi et de une heure et demie à quatre
heures.
MURAILLE_DE CHINE
H semblerait, vraiment, à entendre certains
-de nos confrères, et non des moindres, que la
réforme préparée par notre Parlement, tou- 4
chant notre régime douanier, va mener notre
pays à la ruine, aux pires catastrophes. -
La passion s'en mêlant un peu plus que de
raison, on en vient presque aux injures; en
-tous cas on va jusqu'à dénier à la commisr
. sion des douanes et",à la Chambre elle-même
le pouvoir et l'autorité nécessaires à donner,
à ces questions, les solutions conformes aux
vœux manifestés par le pays lors des derniè-
. res élections.
L'un s'écrie: « Notre commission générale
des douanes, qui abat des tarifs comme une
corneille abat des noies, ne se doute pas que,
au dehors, son œuvre est surveillée, contrôlée
et que, le jour où nous voudrions en tirer des
conséquences pratiques nous rencontrerions
autre chose que des complicités dociles ou
d'ignorants enthousiasmes. »
Un autre, membre de L'Institut, s'il vous
plaît, va jusqu'à dire que cette œuvre de la
commission des douanes est extravagante et
sera, avant trois mois, jetée au panier.
Et quant à la Chambre, voici comment il la
drape : « De ce que six cents messieurs, les
uns en redingote, les autres en veston, cer
tains enfin en blouse, se mettent .à décider
qu'un grand pays va vivre isolé, replié sur
lui-même, à l'état d'ermite, il n'en résulte pas
le moins du monde que.cela va arriver ».
Et il prédit que la force des choses, c'est-à-
dire l'attitude des pays étrangers, infirmera
les lois votées par notre Parlement, en ma
tière économique.
Gomment veut-on que, quand on lit ces
choses-là, à l'étranger, ces appels à la résis
tance, ces accusations excessives ; quand on
y considère ce mépris des résolutions de nos
pouvoirs publics prêché par des Français, on
ne se sente pas, en effet, quelques velléités
de résister ?
Aussi les. mêmes feuilles que je viens de
citer triomphent-elles sans mesure de l'atti
tude que semblent vouloir prendre la Belgi
que et la Suisse et s'écrient-elles avec fracas :
Vous voyez bien, voilà déjà que cela com
mence. •
Pour bien juger du péril que cela peut faire
naître pour nous, un examen de quelques
instants suffira.
Je vais le faire en ce qui concerne la Belgi
que et ensuite pour la situation générale que
créera l'élévation projetée de nos tarifs doua
niers.
Nous professons, pour la Belgique, une
très profonde et très sincère amitié ; à vrai
dire la Belgique est plus qu'une amie pour la
France, c'est sa sœur cadette.
Il est donc malaisé de croire que ce pays
ami se portera à. quelque excès d'où pourrait
sortir une guerre de tarifs. Dans ce cas, j'ose
lui prédire qu'il ne serait pas le plus fort et
je le lui démontre.
Les économistes qui traitent ces questions
n'en semblent jamais envisager qu'un seul
côté ; ils disent : nous vendons à tel pays
pour tant de millions de marchandises. Ils
négligent la contre-partie qui consiste à savoir
ce que ce même pays nous vend.
Je parlais justement de la Belgique, ici
même, le 38 janvier dernier et je montrais à
quel chiffre se réduisent les 570 millions portés
à notre compte d'exportation dans ce pays,
en 1889. Ils se réduisent à 3.32 millions de
francs, le reste appartient au commerce gé
néral et de transit,, etc. :
Mais d'autre part, la Belgique nous a vendu
•pour 352 millions de francs de ses propres
produits, soit 30 millions de, plus. Elle nous
vend donc plus, en fait, qu'elle ne nous
achète.
Et en voici la preuve, d'après ses propres
statistiques.
Le petit tableau suivant établit le compte
de nos échanges avec la Belgique au com
merce spécial, pendant les cinq dernières
années :
IMPORTATIONS EXPORTATIONS
' BM FRANCS DE FRANCIS
Millions . : Millions
1885.........v 321 6 258 5 ,
1886.......... 329 5 251 »
1887.......... 335 . 2 282 8
1888 342 6 289 6
1889.;........ 352 7 322 7
Totaux... 1.681 8 1.404 6 *
Ainsi, pendant ces cinq années la Belgique
nqus a acheté pour1,404 millions 600,000 francs
de marchandises et nous a vendu pour 1,681
millions 800,000 francs des siennes*
D'où résulte, pour elle, un bénéfice de plus
de 277 millions dans cette période de cinq
ans, soit environ 55 millioiis et demi de francs
par an.
Voilà ce qu'on ne dit pas-et ce qu'il faut
pourtant qu'on sache.
Parmi les produits que nous vend la Belgi
que, il en est un qui tient, dans ce compte; la
plus grande, place : c'est la houille, avec le
coke.
Année moyenne, elle nous en envoie envi
ron 4 millions de tonnes pour une somme de
plus de 100 millions. f
Je vois, en 1889, figurer à notre compté
d'importation belge 2 millions 733,000 tonnes
de houille et 867,000 tonnes de coke, pour la
somme de 112 millions de francs. C'est quel
que chose, n'est-ce pas? .
Or, ce chiffre a encore été supérieur en 1890,
puisqu'il atteint pour la houille à 4 millions
100,000 tonnes, et pour le coke, à 825,000
tonnes.
Nous achetons donc à la Belgique le quart
environ de sa production houillère.
. Eh bien f reportons-nous à ce qui s'est
passé avec l'Italie pour ses vins. Les Italiens
étaient persuadés qu'on ne toucherait pas à
leurs vins, que la France en avait un impé
rieux besoin. Ils le croyaient et le disaient
tout haut. •
On les a frappés d'une taxe prohibitive, ces
vins, et cela ne nous a pas gênés du tout; les
vins nous sont arrivés d'ailleurs en plus
grande abondance et l'Italie se débat dans
d'inextricables embarras. Cependant, là aussi,
nos économistes nous prédisaient des embar
ras, des pertes énormes.
, v Or, si la Belgique venait, contre toute vrai
semblance, à faire ce que, chez nous, certains
semblent craindre,.. ou espérer, est-ce que la
France ne serait pas fondée à frapper d'une
taxe de 5 francs par 1,000 kilogrammes les
houilles au lieu de 1 fr. 20 ? Il n'en entrerait
plus une tonne.
Et croyez-vous que la France en pâtirait ?
Ah ! certes, nos houillères du Nord et de l'Est
se mettraient vite en état de suppléer à cette
perte. Puis il y a l'Angleterre, l'Angleterre,
qui nous fournit plus de quatre millions et demi
de tonnes et qui ne demanderait pas mieux
que de doubler cette fourniture.
Et qu'on tienne pour certain que nos em
barras ne seraient pas très grands, tandis
qu'en Belgique ?...
Que voudriez-vous que,fit la Belgique de ces
4 millions de tonnes et*"de» ouvriers qui en
opèrent l'extraction? Est-ce qué déjà «Hé n'a
pas assez d'embarras avec ces ouvriers et les
prétentions qu'ils affichent? Il ne manquerait
plus que d'en priver vingt-cinq mille de leur
travail. Ce aérait un joli toile là-bas !
Non, décidément, la Belgique ne tentera
rièn contre nous et toute chose, le premier
mouvement d'humeur passé, s'arrangera très
amicalement. Le risque, pour elle, serait trop
grand à se fâcher.
***
Au point de vue général je veux dire aussi
quelques mots.
.La France n'est pas la seule nation qui ait
effectué le relèvement de ses tarifs douaniers.
Deux grands pays, lés Etats-Unis et l'Allema
gne, l"ont fait avant elle. .
Et non seulement ils l'ont fait, mais ils ont
persévéré puisqu'on 1885 l'un et l'autre ont
opéré de nouveaux relèvements.
Je me souviens de ce qui s'est passé alors.
On-écrivait que ces deux nations allaient à
la ruine en s'isolant du reste du monde.
Bref, on disait d'elles ce qu'on dit de nous au
jourd'hui.
Ces prophéties sinistres se sont-elles réâli-
rées? La muraille de Chine élevée à leur
frontière par chacune d'elles a-t-elle arrêté le
courant commercial, empêché les produits des
autres pays de, franchir cette frontière ? Qu'on
en juge.
En 1885, l'importation des-produits étran
gers des Etats-Unis était de 2 milliards 887
millions de francs. En 1888, erï" dépit des ta
rifs rehaussés, cette importation a- atteint à
3 milliards 630 millions, soit en quatre ans
733 millions d'augmentation. Et . notez bien
que les ventes de toutes,, les nations euro
péennes aux Etats-Unis ont progressé dans
cette période : l'Angleterre de 683 millions à
839; l'Allemagne de 316 millions à 392; la
Belgique de 43 millions à 69; la France en
fin de 285 millions à' 356. ' .
Et voilà comment s'est trouvée fermée la
frontière.des Etats-Unis et ruiné le pays.
Passons à &Allemagne. Les tarifs surélevés
de 1885 devaient, là aussi, produire un effet
désastreux. „
Eh bien! j'en suis fâché pour les prophètes,
en 1885, l'importation des produits étrangers
en Allemagne était de 2 milliards 944 mil
lions de marks, soit 3 milliards 680 millions
de francs. Elle a décru, sans doute, sous l'em
pire de la protection?
"Vous n'y-êtes point. En 1888, cette importa
tion, èn dépit de la fameuse muraille de Chine,
s'est élevée à 3 milliards 290 millions de
marks, soit, en francs, à 4 milliards 112 mil
lions, c'est-à-dire qu'elle a progressé de 432
millions de francs en.quatre ans, soit 108 mil
lions de francs par an. *
: ***
Et voilà comment se réalisent les prédic
tions de nos économistes ; et voilà ce qu'il
advient des prétendues murailles de Chine;
des menaces dè représailles, des isolements et
autres visions connues qui les hantent.
Il en adviendra de même pour ce qui nous
concerne. La Belgique ne renouvellera pas la
faute de l'Italie; car la France,—et cela je ne
me lasserai pas de le crier très haut,— la
France est le pays qui a le moins à craindre
économiquement des mauvais vouloirs d'au-
trui.
Le monde continuera de tourner ^ le com
merce de progresser,celui de la Franée comme
les autres. Qu'on marche sur cette fameuse
muraille de Chine dont il est si fort question
dans tous les articles des économistes ët* l'on
verra que, comme celle dont ils .prétendaient
que l'Allemagne et les Etats-Unis s'étaient
enveloppés, cette muraille est en simple
baudruche.
Thomas Grimm.
lEîolxos de £ )a,rtoiJLt
Plus de deux mille personnes se pressaient
hier matin, à l'église Saint-Sulpice, où la
Société de secours aux blessé* militaires
faisait dire une messe de Requiem à la mé
moire des soldats et marins morts pour la
France.
Au fond de l'église, derrière l'autel, était
tendue une grande draperie noire surmontée
de trophées de drapeaux tricolores. et d'éten
dards de la Croix-Êougô.
De chaque côté de l'autel se trouvaient deux
grands éçussons avec des inscriptions rappe
lant le but de la cérémonie.
. M. le maréchal de Mac-Mahon, en grand
uniforme, se trouvait au premier rang avec
les représentants |du président de la Républi
que, des ministres de la. guerre et de la ma
nne et du gouverneur de Paris.
Pendant la messe, la maîtrise et des chœurs
ont fait entendre-de fort beaux chants reli
gieux. M. AVidor tenait l'orgue.
Après l'Evangile,- le P. Gardet, de' l'ordre
des Dominicains, a, dans une touchante allo
cution, - rappelé les services rendus par la
Société de secours aux blessés militaires, ,et
invité les assistants à aider cette œuvre si
éminemment patriotique.
A l'issue de la cérémonie que présidait l'ar
chevêque de Paris, une quête fructueuse a été
faite par les "dames patronnesses de l'œuvre
ayant à leur tête Mme la maréchale de Mac-
Mahon.
M. le comte d'Aubigny. ministre de France
à Alexandrie, a débarque hier à Marseille ve
nant d'Egypte. Il est mandé a Paris par
M. Piibot au sujet des affaires d'Egypte^
Fatale méprise.
Il en est arrivé une bien bonne, ces jours-ci,
aux soldats logés» à la, caserne Saint-Roch, à
Avignon. Ces bons -militaires, pour charmèr
leurs loisirs, n'avaient rien trouvé de mieux
quedebombarder, àl'aide de projectiles variés,
toutes les personnes qui passaient à proximité
de leurs fenêtres.
Quand, ils avaient hien visé et qu'une pomine
de terre ou une. carotte lancée d'une main
sûre s'était écrasée sur le dos d'un passant,
une joie délirante éclatait parmi les tireurs.
Soudain vint à passer un monsieur fort
bien mis, coiffé d'un chapeau haut de forme,
tout reluisant neuf. Quelle cible, mes en
fants ! tous les militaires en écarquillaient les
yeux. L'un, d'eux saisit un énorme morceau
de pain de munition, visa quelques secondes,
et paf... le tube s'aplatissait comme un ac
cordéon. ' ;
Des éclats de rire formidables retentirent;
mais ils furent dè courte durée. Le monsieur
au tube se retourna pour voir d'où était venu
le projectile#t entra immédiatement au quar
tier. Cinq minutes après, les soldats très
penauds apprenaient que le , passant qu'ils
avaient si bien bombardé n'était autre que le
général Quenot, commandant la 30 e division
militaire. Celui-ci' a consigné tous les chefs
de chambrée jusqu'à ce que les coupables se
soient fait connaître.
On a fini dè rire à la caserne Saint-Roch,
L'Observatoire ne semble paà s'émouvoir du
projet de démolition présenté au conseil mu
nicipal par le représentant d'un quartier voi
sin, qui l'a dénoncé comme obstacle à la cir
culation. On y travaille activement en ce mo
ment au montage du grand équatorial coudé
dont nous avons donné la description com
plète il y a environ deux mois.
L'instrument doit , êt re présenté paf M. Mau
rice Lœwy à ses collègues lors du congrès
international astronomique qui se tiendra à
l'Observatoire le 31 mars prochain.
Mme Millière, veuve du membre de la Com
mune Millière qui fut tué sur les marches du
Panthéon en 1871, est morte hier à l'âge de
cinquante-six ans. Elle était directrice, de l'é
cole municipale de la rue Louis-Blanc.
Mme Millière a demandé que son corps fût
incinéré.
Louise Michel y pût* déployer à l'aise sa fié
vreuse activité. Aussi est-elle venue s'établir
à Londres, et, depuis son séjour ici, la Vierge
rouge a presque éclipsé le général Booth
comme bienfaitrice du genre humain.
*» Elle vient de fonderune école où quarante
enfants reçoivent gratuitement une instruc
tion comprenant l'anglais; le français, l'alle
mand, la musique, le* dessin, et autres bran
ches de connaissances,sans oublier une science
socialiste spéciale qui doit régénérer l'huma
nité. » ^ '
- ■ ■■ 1 ■ l 1
LA qUESnON DES COURSES
! On sè préoccupe toujours de cette question.
A la Chambre, on paraî t très embarrassé.
En dehors du Parlement, la décision de
M. Constans est approuvée de tous. La situa
tion du ministre de l'intérieur est, en effet,
inattaquable. Que voulait-on qu'il fit en pré
sence de la décision de - la Chambre ? Qu'il
tolérât le pari et les bookmakers de son auto
rité privée et pour répondre à des sentiments
cruiV paraît-il, n'osaient pas se manifester en
discussion publique. Que n'eùt-on pas dit
alors? . ; ~ ^
M. Constans n'avait et n'a encore qu'à faire
exécuterun vote très nettement .formulé. Où
le jeu est légal ou il ne l'est pas. La question
se pose ainsi nettement et sans détours. Or, à
maintes reprises, la Chambre a refusé de re
connaître le jeu. Elle l'a supprimé au Tonkin,
en Cochinchme, au Cambodge. Elle vient de
l'interdire en France. C'est une doctrine.Elle
pouvait accepter la doctrine contraire. Le jeu
est légal, en effet,.-en Espagne, en Italie,"en
Autriche. Elle ne : l'a pas voulu. On ne saurait
l'en blâmer. . ; '
Mais voudrait-on que ce qu'on condamne
par un vote existât par une tolérance admi
nistrative ? M. Constans ne pouvait pas accep
ter une semblable interprétation, qui n'était
pas assurément dans la pensée de la Chambre'.
Le ministre de l'intérieur a donc la mission
dé fairé - prévaloir là volon té du Parlement' ;
et ce serait douter de l'autorité du gouverne
ment de la République que de penser qu'il
puisse être-tenu en échec dans cette œuvre
par un petit nombre d'intéressés si puissants
qu'ils soient.
; r -«S» - *
Le' crime de Saint-ïî-ems
De notre correspondant de Londres :
« Paris était un théâtre trop étroit poUr que
L'enquête ouverte'au sujet de la tentative,
d'assassinat.dont.-laveuve Larmet a été vic
time a produit de rapides résultats, grâce à
la décision avec laquelle elle a été menée par
M. Rouquier, commissaire de police.
Dans la soirée de *■ mercredi; ce magistrat
apprit qu'une'femme nommée Louise Guillo
cheau, âgée de quarante-trois ans, avait l'ha
bitude, — depuis que le petit-fils,de la veuve
Larmet était détenu 1 à Mazas,—: de prendre
ses repas .avec la brocanteuse, et de coucher
dans son logement pour lui tenir compagnie.
Il découvrit en outre que le mâtin même
du crime, la victime s'était rendue à Paris en
compagnie de cette fémme pour y recouvrer
une somme de 500 francs provenant de la
vente de chiffons.
Dès lors, sa conviction fut faite. La femme
Guillocheau devait être tout au moins l'indi
catrice du coup à faire.
D'ailleurs, détail accablant pour elle, le soir
de l'attentat commis sur sa vieille-amie, elle
né s'était présentée à la boutique du cours
Chabrol que vers huit heures, c'est-à-dire au
moment où, d'après ses prévisions, le crime
devait être commis et déjà connu du voisinage.
M. Rouquier se transporta au domicile de
cette femme, l,rueMargùerite-Pinson. L'ayant
intèrtogée sur. le motif de son absence; —
contraire à ses habitudes, — le soir où l'on
tentait d'assassiner la brocanteuse, elle répon
dit sans trop se troubler qu'un de ses amis lui
avait donné un rendez-vous pour ce soir-là et
qu'elle n'avait eu aucune raison pour ne pas
s'y rendre.
L'explication pouvait être fondée, étant
données les - mœurs douteuses de Louise
Guillocheau; néanmoins M. Rouquier procéda
à son arrestation et la fit conduire au com
missariat. !
La perquisition à laquelle il se livra alors
à son domicile amena la découverte d'une
ofifafnrtnm
-83-
FEUILLETON DU 6 MARS 1891
(O
TROIS MILLIONS DE DOT
PRKSIliaï PARTI*
LE CRIME OE JULIEH CLAUDE
LXXII ( Suite) '
Il tressaillit sans s'en rendre compte et vou-
ut détourner la tête, mais malgré lui son re
gard revint à l'inconnue, comme s'il subissait
• une influence magnétique irrésistible, ne pou
vant distinguer les traits de son visage, mais
admirant sa taille élancée et l'élégance dé sa
toilette sombre.
En ce moment le suisse fit retentir sur les
dalles de l'église la hampe ferrée de la halle
barde.
Le vieux et vénérable curé venait de sortir
.de la sacristie ot se dirigeait vers l'autel pour
'officier.
Jules do Lucenay dut se retourner du côté du
chœur, mais auparavant il regarda une der
nière fois l'inconnue, toujours debout, tou
jours les jeux rivés sur lui, et un frisson
effleura sa chair.
C'est qu'il venait brusquement de songer à
une autre femme dont l'inconnue avait la
taille et la tournure, à Madeleine Gallier,
qu'il croyait morte, tuée par lui I...
Le commencement de la messe de mariage
vint le distraire forcément de cette sinistre
pensée.
Bientôt arriva l'instant de la bénédiction
nuptiale et le prêtre passa au doigt d'Hen
riette l'anneau Symbolique.
Tout était terminé.
Mlle Dauray se trouvait maintenant, de
vant Dieu comme devant les hommes, l'épouse
légitime du comte Jules-Armand de Lucenay.
(1} TredocUon et reproduction interdites. -
Celui-ci, en se relevant, jeta un coup d'œil
furtif sur l'endroit où quelques minutes aupa
ravant se trouvait l'inconnue.
Elle avait disparu.
— C'est singulier... — se dit le jeune
homme,— quelle peut Stre cette femme? —
A coup sûr elle ne fait point partie des invi
tés de mon beau-père... On la croirait venue
pour moi...
Au moment où la cérémonie touchait à sa
fin, la dame voilée avait quitté l'église et re
gagné son coupé qui; nous le savons, l'atten-
dait-à une faible distance.
.. — Nous régagnons Paria... — dit-elle à
son cocher, et elle remonta dans sa voiture
qui partit aussitôt.
Laissons s'écouler un intervalle de près de
deux heures et retournons à la villa des Pla
tanes où venait de finir le déjeuner offert aux
témoins des deux époux et aux proches pa
rents de ia famille Dauray.
Le baron de Vervey n'oubliait point la pro
messe faite à Gabri.
Pour se conformer à l'engagement pris il
devait questionner Jules de Lucenay.
■ Celui-ci vint pour ainsi dire au-devant de
ses questions et entama l'entretien par ces
mots, prononcés en entraînant son ami un
peu à 1 écart :
— Franchement, le cœur sur la main,,
comment trouves-tu la comtesse de Luce
nay?...
— Tout à fait charmante F — réponbaron. — Elle est si jolie qu'elle aurait pres
que le droit de n'être pas riche... — Je ne
lui reproche qu'une chose...
— Laquelle ?
— Son air de tristesse...
— Je t'ai dit qu'elle était souffrante, mais
un séjour en Italie la remettra complète
ment... Elle a besoin d'un changement d air...
— Cene sera pas gai-pour toi ce déplacement
conjugal où tu joueras le rôle de garde-ma-
ladeî
— Je le sais parbleu bien, mais je me rat
traperai à mon retour à Paris... — Ce sera
le carnaval après le carême !
— Quelle partie de l'Italie comptes-tu vi
siter?
— Naples, d'abord...
— Et ensuite? r
— Rome... c'est indiqué, c'est classique,
puis Venise... entre nous c'est Venise qui
m'attire le plus, en souvenir peut-être d'Offen-
bach et du Pont des Soupirs.
. — Resterez-vous longtemps à Naples ?
— Cela dépendra de l'ennui venant plus ou
moins vite mais, selon toute apparence, huit
jours au moins, quinze au plus.
— Et quand partirez-vous ?
—Demain matin... — Une des voitures de
la villa nous conduira à la gare du P.-L.-M.,
où nous prendrons le rapide. — ■ Nos bagages
sont déjà au chemin de fer, ainsi que ceux de
M. et de Mme Dauray, qui nous 'accompa
gnent.
— Très patriarcal ! Très touchant l — Étà
quelle époque comptez-vous revenir?
— Oh! quant à cela, je n'en sais rien... —
Il faut que la santé de Mme de Lucenay soil
entièrement remise, et à cet égard on ne peut
rien préjuger... — Dans tous les cas, notre
absence durera plusieurs mois.
— Ça paraîtra long à tes amis qui ont hâte
de retrouver en toi un compagnon de fête.
— Moi aussi, je trouverai le temps long;
mais, je te le répète, je me dédommagerai
plus tard...
— Je sais quelqu'un qui ne prendra pas
volontiers son parti de ton éloignement.
— Quelqu'un 11 Qui donc î
— Une femme...
- —Tu plaisantes M
— Je parle sérieusement... »» Uoe femme
qui, j'en suis sûre, est folle de toi et ne de
mande qu'à te le "prou ver.,.
— Est-ce que je la connais, cette femme ?
— Non, mais elle te connaît et s'est toquée
de toi... .
Jules de Lucenay se mit à rire.
— Eh bien ! elle attendra mon retour... —
fit-il —Le devoir avant tout ! -»
Le tête-à-tête des deux amis ne pouvait se
prolonger indéfiniment.
L'entretien se termina là. .
Vers cinq du soir, les témoins du comte de
Lucenay reprirent ensemble le chemin de Pa
ris, laissant les nouveaux époux faire leurs
derniers préparatifs de départ.
Fidèle à l'engagement pris, le baron de
Vervey se rendit tout droit chez la maîtresse
abandonnée de Célestin/le Valandelle.
Gabri habitait dans la maison qui fait l'an
gle de la rue Caumartin et de la rue Basse-du-
Rempart, l'appartement occupé avant elle par
une de ses collègues, la belle Octavie, dont
nous avons, ici même, en un autre récit, mon
tré la fin tragique (1).
On introduisit sur-le-champ le visiteur.
• — Tout à l'heure, ma chère belle,— lui dit-
il,— j'ai parlé de vous...
— Parlé de moi ! — répéta Gabri, — à qui
donc?
— A l'un de mes amis...
— Quel ami?
— Le comte Jules de Lucenay. ..
— Qu'est-ce que c'est que le comte de Luce
nay? — fit la jeune femme, paraissjyjt inter
roger sa mémoire et l'interroger en vain.
M. de Vervey, tout abasourdi, la regarda.
— Est-il possible, —lui demanda-t-il, — que
vous ne vous souveniez pas des paroles échan
gées entre nous au dernier souper où nous
.étions voisins?
— Je me souviens à merveille du souper,
(i) Simone illiaYie,
mais voilà tout... — La mémoire des noms
me fait absolument défaut.
— Je vais donc venir en aide à cette mé
moire infidèle. — Vous m'aVez questionné
précisément au sujet de Jules de Lucenay que
vous veniez d'entendre nommer. • •
— Et vous m'avez répondu ?...
' — Que c'était un garçon charmant,. un
viveur de haute volée, ruiné une première fois
Ear ; mille - folies charmantes; mais redevenu
eaucoup plus riche qu'il ne l'avait jamais
été, et d autant mieux disposé à mener grand
train cette seconde fortune, qu'il a lanostalgie
de la fête, en ayant été privé pendant plus de
deux ans...
— Je commence à me souvenir... Conti
nuez...
— Je vous ai dit ensuite que Lucenay se
mariait, qu'il épousait l'héritière de nombreux
taillions, que j étais un de ses témoins et que
dès le lendemain du'mariage il partirait pour
l'Italie avec sa femme... —Alors vous m'a
vez prié de savoir quel serait en Italie son
itinéraire.
— Et vous l'avez su ?
t — Oui. — Demain matin le rapide l'empor
tera vers Marseille, d'où il se rendra à Na-
Eles... — Il y passera quinze jours au plus,
uit jours au moins... — Ensuite il visitera
Rome, Venise, et cœtera...
— Qu'est-ce que ça peut me faire ? — de
manda Gabri de l'air le plus délibéré.
— Ah! ça, voyons, — répliqua le baron, ~
je ne vous comprénds, plus!... — Vous mo
quez-vous de moi? — Vous insistiez il y a
huit jours pour obtenir au plus vite ces ren
seignements, et quand je voua les apporte
vous me répondez : — Qu'est-ce que ça peut
mefairel—Je vous demande moi:—Qu'est -ce
que ça signifie ï
XAVIER DE MONTÉPIN.
•* {fM tuite i 4emàin). \
y
ADMMSTRAÎIOIs, RÉDACTION ET ANNONCES
61, rue Lafayette, 61
A PARIS
On reçoit aussi les Annonces rue Grange-Batelière, 15
ABONNEMENTS PARIS •
TROIS MOIS 5 FR.
SIX MOIS ...... 9 FR.
UN AN 18 FR.
UN NUMÉ RO: 5 C ENTIMES
Tous les vendredis
LE SUPPLÉMENT ILLUSTRÉ : 5 CENTIMES
ABONNEMENTS DEPARTEMENTS
TROIS MOIS 6 FR.
SIX MOIS 12 FR.
UH AN.. 24 FR.
VENDREDI 6 MARS 1891
300 SAINTE COLETTE— 65.
Numéro 10297
VINGT.NEUVIÈME ANNÉE
PERMgRE EDITION
société anonyme dïï Petit Journal
CAPITAL : VINGT-CINQ MILLIONS
AVIS AUX ACTIONNAIRES
MM. les actionnaires de la Société
anonyme du Petit Journal, propriétaires
de cinq actions au moins, sont Convoqués
en assemblée générale ordinaire pour le
mercredi 8 avril 1891, à trois heures de
relevée, à l'Hôtel Continental, à Paris.
Les actionnaires qui ne pourraient pas
assister à l'assemblée ont le droit de
s'y faire représenter par un de leurs
coactionnaires en lui donnant leur pou
voir à cet effet.
Les titres et les pouvoirs serontreçusen
dépôt, au siège social, 61, rue Lafayette,
à Paris, du 9 mars au 2 a,vril inclusive
ment, de dix heures à midi et de une
heure et demie à quatre heures.
IL sera délivré, en échange, un récépissé
et une carte d'entrée.
Afin de ne pas retarder l'ouverture de
la séance, les portes de la salle seront
ouvertes à deux heures.
Le retrait des actions, après l'assem
blée, s'effectuera aussi de dix heures à
midi et de une heure et demie à quatre
heures.
MURAILLE_DE CHINE
H semblerait, vraiment, à entendre certains
-de nos confrères, et non des moindres, que la
réforme préparée par notre Parlement, tou- 4
chant notre régime douanier, va mener notre
pays à la ruine, aux pires catastrophes. -
La passion s'en mêlant un peu plus que de
raison, on en vient presque aux injures; en
-tous cas on va jusqu'à dénier à la commisr
. sion des douanes et",à la Chambre elle-même
le pouvoir et l'autorité nécessaires à donner,
à ces questions, les solutions conformes aux
vœux manifestés par le pays lors des derniè-
. res élections.
L'un s'écrie: « Notre commission générale
des douanes, qui abat des tarifs comme une
corneille abat des noies, ne se doute pas que,
au dehors, son œuvre est surveillée, contrôlée
et que, le jour où nous voudrions en tirer des
conséquences pratiques nous rencontrerions
autre chose que des complicités dociles ou
d'ignorants enthousiasmes. »
Un autre, membre de L'Institut, s'il vous
plaît, va jusqu'à dire que cette œuvre de la
commission des douanes est extravagante et
sera, avant trois mois, jetée au panier.
Et quant à la Chambre, voici comment il la
drape : « De ce que six cents messieurs, les
uns en redingote, les autres en veston, cer
tains enfin en blouse, se mettent .à décider
qu'un grand pays va vivre isolé, replié sur
lui-même, à l'état d'ermite, il n'en résulte pas
le moins du monde que.cela va arriver ».
Et il prédit que la force des choses, c'est-à-
dire l'attitude des pays étrangers, infirmera
les lois votées par notre Parlement, en ma
tière économique.
Gomment veut-on que, quand on lit ces
choses-là, à l'étranger, ces appels à la résis
tance, ces accusations excessives ; quand on
y considère ce mépris des résolutions de nos
pouvoirs publics prêché par des Français, on
ne se sente pas, en effet, quelques velléités
de résister ?
Aussi les. mêmes feuilles que je viens de
citer triomphent-elles sans mesure de l'atti
tude que semblent vouloir prendre la Belgi
que et la Suisse et s'écrient-elles avec fracas :
Vous voyez bien, voilà déjà que cela com
mence. •
Pour bien juger du péril que cela peut faire
naître pour nous, un examen de quelques
instants suffira.
Je vais le faire en ce qui concerne la Belgi
que et ensuite pour la situation générale que
créera l'élévation projetée de nos tarifs doua
niers.
Nous professons, pour la Belgique, une
très profonde et très sincère amitié ; à vrai
dire la Belgique est plus qu'une amie pour la
France, c'est sa sœur cadette.
Il est donc malaisé de croire que ce pays
ami se portera à. quelque excès d'où pourrait
sortir une guerre de tarifs. Dans ce cas, j'ose
lui prédire qu'il ne serait pas le plus fort et
je le lui démontre.
Les économistes qui traitent ces questions
n'en semblent jamais envisager qu'un seul
côté ; ils disent : nous vendons à tel pays
pour tant de millions de marchandises. Ils
négligent la contre-partie qui consiste à savoir
ce que ce même pays nous vend.
Je parlais justement de la Belgique, ici
même, le 38 janvier dernier et je montrais à
quel chiffre se réduisent les 570 millions portés
à notre compte d'exportation dans ce pays,
en 1889. Ils se réduisent à 3.32 millions de
francs, le reste appartient au commerce gé
néral et de transit,, etc. :
Mais d'autre part, la Belgique nous a vendu
•pour 352 millions de francs de ses propres
produits, soit 30 millions de, plus. Elle nous
vend donc plus, en fait, qu'elle ne nous
achète.
Et en voici la preuve, d'après ses propres
statistiques.
Le petit tableau suivant établit le compte
de nos échanges avec la Belgique au com
merce spécial, pendant les cinq dernières
années :
IMPORTATIONS EXPORTATIONS
' BM FRANCS DE FRANCIS
Millions . : Millions
1885.........v 321 6 258 5 ,
1886.......... 329 5 251 »
1887.......... 335 . 2 282 8
1888 342 6 289 6
1889.;........ 352 7 322 7
Totaux... 1.681 8 1.404 6 *
Ainsi, pendant ces cinq années la Belgique
nqus a acheté pour1,404 millions 600,000 francs
de marchandises et nous a vendu pour 1,681
millions 800,000 francs des siennes*
D'où résulte, pour elle, un bénéfice de plus
de 277 millions dans cette période de cinq
ans, soit environ 55 millioiis et demi de francs
par an.
Voilà ce qu'on ne dit pas-et ce qu'il faut
pourtant qu'on sache.
Parmi les produits que nous vend la Belgi
que, il en est un qui tient, dans ce compte; la
plus grande, place : c'est la houille, avec le
coke.
Année moyenne, elle nous en envoie envi
ron 4 millions de tonnes pour une somme de
plus de 100 millions. f
Je vois, en 1889, figurer à notre compté
d'importation belge 2 millions 733,000 tonnes
de houille et 867,000 tonnes de coke, pour la
somme de 112 millions de francs. C'est quel
que chose, n'est-ce pas? .
Or, ce chiffre a encore été supérieur en 1890,
puisqu'il atteint pour la houille à 4 millions
100,000 tonnes, et pour le coke, à 825,000
tonnes.
Nous achetons donc à la Belgique le quart
environ de sa production houillère.
. Eh bien f reportons-nous à ce qui s'est
passé avec l'Italie pour ses vins. Les Italiens
étaient persuadés qu'on ne toucherait pas à
leurs vins, que la France en avait un impé
rieux besoin. Ils le croyaient et le disaient
tout haut. •
On les a frappés d'une taxe prohibitive, ces
vins, et cela ne nous a pas gênés du tout; les
vins nous sont arrivés d'ailleurs en plus
grande abondance et l'Italie se débat dans
d'inextricables embarras. Cependant, là aussi,
nos économistes nous prédisaient des embar
ras, des pertes énormes.
, v Or, si la Belgique venait, contre toute vrai
semblance, à faire ce que, chez nous, certains
semblent craindre,.. ou espérer, est-ce que la
France ne serait pas fondée à frapper d'une
taxe de 5 francs par 1,000 kilogrammes les
houilles au lieu de 1 fr. 20 ? Il n'en entrerait
plus une tonne.
Et croyez-vous que la France en pâtirait ?
Ah ! certes, nos houillères du Nord et de l'Est
se mettraient vite en état de suppléer à cette
perte. Puis il y a l'Angleterre, l'Angleterre,
qui nous fournit plus de quatre millions et demi
de tonnes et qui ne demanderait pas mieux
que de doubler cette fourniture.
Et qu'on tienne pour certain que nos em
barras ne seraient pas très grands, tandis
qu'en Belgique ?...
Que voudriez-vous que,fit la Belgique de ces
4 millions de tonnes et*"de» ouvriers qui en
opèrent l'extraction? Est-ce qué déjà «Hé n'a
pas assez d'embarras avec ces ouvriers et les
prétentions qu'ils affichent? Il ne manquerait
plus que d'en priver vingt-cinq mille de leur
travail. Ce aérait un joli toile là-bas !
Non, décidément, la Belgique ne tentera
rièn contre nous et toute chose, le premier
mouvement d'humeur passé, s'arrangera très
amicalement. Le risque, pour elle, serait trop
grand à se fâcher.
***
Au point de vue général je veux dire aussi
quelques mots.
.La France n'est pas la seule nation qui ait
effectué le relèvement de ses tarifs douaniers.
Deux grands pays, lés Etats-Unis et l'Allema
gne, l"ont fait avant elle. .
Et non seulement ils l'ont fait, mais ils ont
persévéré puisqu'on 1885 l'un et l'autre ont
opéré de nouveaux relèvements.
Je me souviens de ce qui s'est passé alors.
On-écrivait que ces deux nations allaient à
la ruine en s'isolant du reste du monde.
Bref, on disait d'elles ce qu'on dit de nous au
jourd'hui.
Ces prophéties sinistres se sont-elles réâli-
rées? La muraille de Chine élevée à leur
frontière par chacune d'elles a-t-elle arrêté le
courant commercial, empêché les produits des
autres pays de, franchir cette frontière ? Qu'on
en juge.
En 1885, l'importation des-produits étran
gers des Etats-Unis était de 2 milliards 887
millions de francs. En 1888, erï" dépit des ta
rifs rehaussés, cette importation a- atteint à
3 milliards 630 millions, soit en quatre ans
733 millions d'augmentation. Et . notez bien
que les ventes de toutes,, les nations euro
péennes aux Etats-Unis ont progressé dans
cette période : l'Angleterre de 683 millions à
839; l'Allemagne de 316 millions à 392; la
Belgique de 43 millions à 69; la France en
fin de 285 millions à' 356. ' .
Et voilà comment s'est trouvée fermée la
frontière.des Etats-Unis et ruiné le pays.
Passons à &Allemagne. Les tarifs surélevés
de 1885 devaient, là aussi, produire un effet
désastreux. „
Eh bien! j'en suis fâché pour les prophètes,
en 1885, l'importation des produits étrangers
en Allemagne était de 2 milliards 944 mil
lions de marks, soit 3 milliards 680 millions
de francs. Elle a décru, sans doute, sous l'em
pire de la protection?
"Vous n'y-êtes point. En 1888, cette importa
tion, èn dépit de la fameuse muraille de Chine,
s'est élevée à 3 milliards 290 millions de
marks, soit, en francs, à 4 milliards 112 mil
lions, c'est-à-dire qu'elle a progressé de 432
millions de francs en.quatre ans, soit 108 mil
lions de francs par an. *
: ***
Et voilà comment se réalisent les prédic
tions de nos économistes ; et voilà ce qu'il
advient des prétendues murailles de Chine;
des menaces dè représailles, des isolements et
autres visions connues qui les hantent.
Il en adviendra de même pour ce qui nous
concerne. La Belgique ne renouvellera pas la
faute de l'Italie; car la France,—et cela je ne
me lasserai pas de le crier très haut,— la
France est le pays qui a le moins à craindre
économiquement des mauvais vouloirs d'au-
trui.
Le monde continuera de tourner ^ le com
merce de progresser,celui de la Franée comme
les autres. Qu'on marche sur cette fameuse
muraille de Chine dont il est si fort question
dans tous les articles des économistes ët* l'on
verra que, comme celle dont ils .prétendaient
que l'Allemagne et les Etats-Unis s'étaient
enveloppés, cette muraille est en simple
baudruche.
Thomas Grimm.
lEîolxos de £ )a,rtoiJLt
Plus de deux mille personnes se pressaient
hier matin, à l'église Saint-Sulpice, où la
Société de secours aux blessé* militaires
faisait dire une messe de Requiem à la mé
moire des soldats et marins morts pour la
France.
Au fond de l'église, derrière l'autel, était
tendue une grande draperie noire surmontée
de trophées de drapeaux tricolores. et d'éten
dards de la Croix-Êougô.
De chaque côté de l'autel se trouvaient deux
grands éçussons avec des inscriptions rappe
lant le but de la cérémonie.
. M. le maréchal de Mac-Mahon, en grand
uniforme, se trouvait au premier rang avec
les représentants |du président de la Républi
que, des ministres de la. guerre et de la ma
nne et du gouverneur de Paris.
Pendant la messe, la maîtrise et des chœurs
ont fait entendre-de fort beaux chants reli
gieux. M. AVidor tenait l'orgue.
Après l'Evangile,- le P. Gardet, de' l'ordre
des Dominicains, a, dans une touchante allo
cution, - rappelé les services rendus par la
Société de secours aux blessés militaires, ,et
invité les assistants à aider cette œuvre si
éminemment patriotique.
A l'issue de la cérémonie que présidait l'ar
chevêque de Paris, une quête fructueuse a été
faite par les "dames patronnesses de l'œuvre
ayant à leur tête Mme la maréchale de Mac-
Mahon.
M. le comte d'Aubigny. ministre de France
à Alexandrie, a débarque hier à Marseille ve
nant d'Egypte. Il est mandé a Paris par
M. Piibot au sujet des affaires d'Egypte^
Fatale méprise.
Il en est arrivé une bien bonne, ces jours-ci,
aux soldats logés» à la, caserne Saint-Roch, à
Avignon. Ces bons -militaires, pour charmèr
leurs loisirs, n'avaient rien trouvé de mieux
quedebombarder, àl'aide de projectiles variés,
toutes les personnes qui passaient à proximité
de leurs fenêtres.
Quand, ils avaient hien visé et qu'une pomine
de terre ou une. carotte lancée d'une main
sûre s'était écrasée sur le dos d'un passant,
une joie délirante éclatait parmi les tireurs.
Soudain vint à passer un monsieur fort
bien mis, coiffé d'un chapeau haut de forme,
tout reluisant neuf. Quelle cible, mes en
fants ! tous les militaires en écarquillaient les
yeux. L'un, d'eux saisit un énorme morceau
de pain de munition, visa quelques secondes,
et paf... le tube s'aplatissait comme un ac
cordéon. ' ;
Des éclats de rire formidables retentirent;
mais ils furent dè courte durée. Le monsieur
au tube se retourna pour voir d'où était venu
le projectile#t entra immédiatement au quar
tier. Cinq minutes après, les soldats très
penauds apprenaient que le , passant qu'ils
avaient si bien bombardé n'était autre que le
général Quenot, commandant la 30 e division
militaire. Celui-ci' a consigné tous les chefs
de chambrée jusqu'à ce que les coupables se
soient fait connaître.
On a fini dè rire à la caserne Saint-Roch,
L'Observatoire ne semble paà s'émouvoir du
projet de démolition présenté au conseil mu
nicipal par le représentant d'un quartier voi
sin, qui l'a dénoncé comme obstacle à la cir
culation. On y travaille activement en ce mo
ment au montage du grand équatorial coudé
dont nous avons donné la description com
plète il y a environ deux mois.
L'instrument doit , êt re présenté paf M. Mau
rice Lœwy à ses collègues lors du congrès
international astronomique qui se tiendra à
l'Observatoire le 31 mars prochain.
Mme Millière, veuve du membre de la Com
mune Millière qui fut tué sur les marches du
Panthéon en 1871, est morte hier à l'âge de
cinquante-six ans. Elle était directrice, de l'é
cole municipale de la rue Louis-Blanc.
Mme Millière a demandé que son corps fût
incinéré.
Louise Michel y pût* déployer à l'aise sa fié
vreuse activité. Aussi est-elle venue s'établir
à Londres, et, depuis son séjour ici, la Vierge
rouge a presque éclipsé le général Booth
comme bienfaitrice du genre humain.
*» Elle vient de fonderune école où quarante
enfants reçoivent gratuitement une instruc
tion comprenant l'anglais; le français, l'alle
mand, la musique, le* dessin, et autres bran
ches de connaissances,sans oublier une science
socialiste spéciale qui doit régénérer l'huma
nité. » ^ '
- ■ ■■ 1 ■ l 1
LA qUESnON DES COURSES
! On sè préoccupe toujours de cette question.
A la Chambre, on paraî t très embarrassé.
En dehors du Parlement, la décision de
M. Constans est approuvée de tous. La situa
tion du ministre de l'intérieur est, en effet,
inattaquable. Que voulait-on qu'il fit en pré
sence de la décision de - la Chambre ? Qu'il
tolérât le pari et les bookmakers de son auto
rité privée et pour répondre à des sentiments
cruiV paraît-il, n'osaient pas se manifester en
discussion publique. Que n'eùt-on pas dit
alors? . ; ~ ^
M. Constans n'avait et n'a encore qu'à faire
exécuterun vote très nettement .formulé. Où
le jeu est légal ou il ne l'est pas. La question
se pose ainsi nettement et sans détours. Or, à
maintes reprises, la Chambre a refusé de re
connaître le jeu. Elle l'a supprimé au Tonkin,
en Cochinchme, au Cambodge. Elle vient de
l'interdire en France. C'est une doctrine.Elle
pouvait accepter la doctrine contraire. Le jeu
est légal, en effet,.-en Espagne, en Italie,"en
Autriche. Elle ne : l'a pas voulu. On ne saurait
l'en blâmer. . ; '
Mais voudrait-on que ce qu'on condamne
par un vote existât par une tolérance admi
nistrative ? M. Constans ne pouvait pas accep
ter une semblable interprétation, qui n'était
pas assurément dans la pensée de la Chambre'.
Le ministre de l'intérieur a donc la mission
dé fairé - prévaloir là volon té du Parlement' ;
et ce serait douter de l'autorité du gouverne
ment de la République que de penser qu'il
puisse être-tenu en échec dans cette œuvre
par un petit nombre d'intéressés si puissants
qu'ils soient.
; r -«S» - *
Le' crime de Saint-ïî-ems
De notre correspondant de Londres :
« Paris était un théâtre trop étroit poUr que
L'enquête ouverte'au sujet de la tentative,
d'assassinat.dont.-laveuve Larmet a été vic
time a produit de rapides résultats, grâce à
la décision avec laquelle elle a été menée par
M. Rouquier, commissaire de police.
Dans la soirée de *■ mercredi; ce magistrat
apprit qu'une'femme nommée Louise Guillo
cheau, âgée de quarante-trois ans, avait l'ha
bitude, — depuis que le petit-fils,de la veuve
Larmet était détenu 1 à Mazas,—: de prendre
ses repas .avec la brocanteuse, et de coucher
dans son logement pour lui tenir compagnie.
Il découvrit en outre que le mâtin même
du crime, la victime s'était rendue à Paris en
compagnie de cette fémme pour y recouvrer
une somme de 500 francs provenant de la
vente de chiffons.
Dès lors, sa conviction fut faite. La femme
Guillocheau devait être tout au moins l'indi
catrice du coup à faire.
D'ailleurs, détail accablant pour elle, le soir
de l'attentat commis sur sa vieille-amie, elle
né s'était présentée à la boutique du cours
Chabrol que vers huit heures, c'est-à-dire au
moment où, d'après ses prévisions, le crime
devait être commis et déjà connu du voisinage.
M. Rouquier se transporta au domicile de
cette femme, l,rueMargùerite-Pinson. L'ayant
intèrtogée sur. le motif de son absence; —
contraire à ses habitudes, — le soir où l'on
tentait d'assassiner la brocanteuse, elle répon
dit sans trop se troubler qu'un de ses amis lui
avait donné un rendez-vous pour ce soir-là et
qu'elle n'avait eu aucune raison pour ne pas
s'y rendre.
L'explication pouvait être fondée, étant
données les - mœurs douteuses de Louise
Guillocheau; néanmoins M. Rouquier procéda
à son arrestation et la fit conduire au com
missariat. !
La perquisition à laquelle il se livra alors
à son domicile amena la découverte d'une
ofifafnrtnm
-83-
FEUILLETON DU 6 MARS 1891
(O
TROIS MILLIONS DE DOT
PRKSIliaï PARTI*
LE CRIME OE JULIEH CLAUDE
LXXII ( Suite) '
Il tressaillit sans s'en rendre compte et vou-
ut détourner la tête, mais malgré lui son re
gard revint à l'inconnue, comme s'il subissait
• une influence magnétique irrésistible, ne pou
vant distinguer les traits de son visage, mais
admirant sa taille élancée et l'élégance dé sa
toilette sombre.
En ce moment le suisse fit retentir sur les
dalles de l'église la hampe ferrée de la halle
barde.
Le vieux et vénérable curé venait de sortir
.de la sacristie ot se dirigeait vers l'autel pour
'officier.
Jules do Lucenay dut se retourner du côté du
chœur, mais auparavant il regarda une der
nière fois l'inconnue, toujours debout, tou
jours les jeux rivés sur lui, et un frisson
effleura sa chair.
C'est qu'il venait brusquement de songer à
une autre femme dont l'inconnue avait la
taille et la tournure, à Madeleine Gallier,
qu'il croyait morte, tuée par lui I...
Le commencement de la messe de mariage
vint le distraire forcément de cette sinistre
pensée.
Bientôt arriva l'instant de la bénédiction
nuptiale et le prêtre passa au doigt d'Hen
riette l'anneau Symbolique.
Tout était terminé.
Mlle Dauray se trouvait maintenant, de
vant Dieu comme devant les hommes, l'épouse
légitime du comte Jules-Armand de Lucenay.
(1} TredocUon et reproduction interdites. -
Celui-ci, en se relevant, jeta un coup d'œil
furtif sur l'endroit où quelques minutes aupa
ravant se trouvait l'inconnue.
Elle avait disparu.
— C'est singulier... — se dit le jeune
homme,— quelle peut Stre cette femme? —
A coup sûr elle ne fait point partie des invi
tés de mon beau-père... On la croirait venue
pour moi...
Au moment où la cérémonie touchait à sa
fin, la dame voilée avait quitté l'église et re
gagné son coupé qui; nous le savons, l'atten-
dait-à une faible distance.
.. — Nous régagnons Paria... — dit-elle à
son cocher, et elle remonta dans sa voiture
qui partit aussitôt.
Laissons s'écouler un intervalle de près de
deux heures et retournons à la villa des Pla
tanes où venait de finir le déjeuner offert aux
témoins des deux époux et aux proches pa
rents de ia famille Dauray.
Le baron de Vervey n'oubliait point la pro
messe faite à Gabri.
Pour se conformer à l'engagement pris il
devait questionner Jules de Lucenay.
■ Celui-ci vint pour ainsi dire au-devant de
ses questions et entama l'entretien par ces
mots, prononcés en entraînant son ami un
peu à 1 écart :
— Franchement, le cœur sur la main,,
comment trouves-tu la comtesse de Luce
nay?...
— Tout à fait charmante F — répon
que le droit de n'être pas riche... — Je ne
lui reproche qu'une chose...
— Laquelle ?
— Son air de tristesse...
— Je t'ai dit qu'elle était souffrante, mais
un séjour en Italie la remettra complète
ment... Elle a besoin d'un changement d air...
— Cene sera pas gai-pour toi ce déplacement
conjugal où tu joueras le rôle de garde-ma-
ladeî
— Je le sais parbleu bien, mais je me rat
traperai à mon retour à Paris... — Ce sera
le carnaval après le carême !
— Quelle partie de l'Italie comptes-tu vi
siter?
— Naples, d'abord...
— Et ensuite? r
— Rome... c'est indiqué, c'est classique,
puis Venise... entre nous c'est Venise qui
m'attire le plus, en souvenir peut-être d'Offen-
bach et du Pont des Soupirs.
. — Resterez-vous longtemps à Naples ?
— Cela dépendra de l'ennui venant plus ou
moins vite mais, selon toute apparence, huit
jours au moins, quinze au plus.
— Et quand partirez-vous ?
—Demain matin... — Une des voitures de
la villa nous conduira à la gare du P.-L.-M.,
où nous prendrons le rapide. — ■ Nos bagages
sont déjà au chemin de fer, ainsi que ceux de
M. et de Mme Dauray, qui nous 'accompa
gnent.
— Très patriarcal ! Très touchant l — Étà
quelle époque comptez-vous revenir?
— Oh! quant à cela, je n'en sais rien... —
Il faut que la santé de Mme de Lucenay soil
entièrement remise, et à cet égard on ne peut
rien préjuger... — Dans tous les cas, notre
absence durera plusieurs mois.
— Ça paraîtra long à tes amis qui ont hâte
de retrouver en toi un compagnon de fête.
— Moi aussi, je trouverai le temps long;
mais, je te le répète, je me dédommagerai
plus tard...
— Je sais quelqu'un qui ne prendra pas
volontiers son parti de ton éloignement.
— Quelqu'un 11 Qui donc î
— Une femme...
- —Tu plaisantes M
— Je parle sérieusement... »» Uoe femme
qui, j'en suis sûre, est folle de toi et ne de
mande qu'à te le "prou ver.,.
— Est-ce que je la connais, cette femme ?
— Non, mais elle te connaît et s'est toquée
de toi... .
Jules de Lucenay se mit à rire.
— Eh bien ! elle attendra mon retour... —
fit-il —Le devoir avant tout ! -»
Le tête-à-tête des deux amis ne pouvait se
prolonger indéfiniment.
L'entretien se termina là. .
Vers cinq du soir, les témoins du comte de
Lucenay reprirent ensemble le chemin de Pa
ris, laissant les nouveaux époux faire leurs
derniers préparatifs de départ.
Fidèle à l'engagement pris, le baron de
Vervey se rendit tout droit chez la maîtresse
abandonnée de Célestin/le Valandelle.
Gabri habitait dans la maison qui fait l'an
gle de la rue Caumartin et de la rue Basse-du-
Rempart, l'appartement occupé avant elle par
une de ses collègues, la belle Octavie, dont
nous avons, ici même, en un autre récit, mon
tré la fin tragique (1).
On introduisit sur-le-champ le visiteur.
• — Tout à l'heure, ma chère belle,— lui dit-
il,— j'ai parlé de vous...
— Parlé de moi ! — répéta Gabri, — à qui
donc?
— A l'un de mes amis...
— Quel ami?
— Le comte Jules de Lucenay. ..
— Qu'est-ce que c'est que le comte de Luce
nay? — fit la jeune femme, paraissjyjt inter
roger sa mémoire et l'interroger en vain.
M. de Vervey, tout abasourdi, la regarda.
— Est-il possible, —lui demanda-t-il, — que
vous ne vous souveniez pas des paroles échan
gées entre nous au dernier souper où nous
.étions voisins?
— Je me souviens à merveille du souper,
(i) Simone illiaYie,
mais voilà tout... — La mémoire des noms
me fait absolument défaut.
— Je vais donc venir en aide à cette mé
moire infidèle. — Vous m'aVez questionné
précisément au sujet de Jules de Lucenay que
vous veniez d'entendre nommer. • •
— Et vous m'avez répondu ?...
' — Que c'était un garçon charmant,. un
viveur de haute volée, ruiné une première fois
Ear ; mille - folies charmantes; mais redevenu
eaucoup plus riche qu'il ne l'avait jamais
été, et d autant mieux disposé à mener grand
train cette seconde fortune, qu'il a lanostalgie
de la fête, en ayant été privé pendant plus de
deux ans...
— Je commence à me souvenir... Conti
nuez...
— Je vous ai dit ensuite que Lucenay se
mariait, qu'il épousait l'héritière de nombreux
taillions, que j étais un de ses témoins et que
dès le lendemain du'mariage il partirait pour
l'Italie avec sa femme... —Alors vous m'a
vez prié de savoir quel serait en Italie son
itinéraire.
— Et vous l'avez su ?
t — Oui. — Demain matin le rapide l'empor
tera vers Marseille, d'où il se rendra à Na-
Eles... — Il y passera quinze jours au plus,
uit jours au moins... — Ensuite il visitera
Rome, Venise, et cœtera...
— Qu'est-ce que ça peut me faire ? — de
manda Gabri de l'air le plus délibéré.
— Ah! ça, voyons, — répliqua le baron, ~
je ne vous comprénds, plus!... — Vous mo
quez-vous de moi? — Vous insistiez il y a
huit jours pour obtenir au plus vite ces ren
seignements, et quand je voua les apporte
vous me répondez : — Qu'est-ce que ça peut
mefairel—Je vous demande moi:—Qu'est -ce
que ça signifie ï
XAVIER DE MONTÉPIN.
•* {fM tuite i 4emàin). \
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