Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1906-03-23
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 23 mars 1906 23 mars 1906
Description : 1906/03/23 (Numéro 82). 1906/03/23 (Numéro 82).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG63 Collection numérique : BIPFPIG63
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Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine commune
Description : Collection numérique : La Commune de Paris Collection numérique : La Commune de Paris
Description : Collection numérique : France-Brésil Collection numérique : France-Brésil
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
LE FIGARO VENDREDI 23 MARS 1908
contre la tuberculose, Me Henri-Robert, du
barreau de Paris.
Jugement à huitaine. S. • ̃
LE VIN DÉSILES
LE MEILLEUR TONIQUE
(Phot. Reuthnger.i
En représentations à. la Cigale.
Nouvelles Diverses
k PARIS
UN ACCIDENT A LA COMÉDIE-FRANÇAISE
Un déplorable accident est arrivé hier soir,
à dix heures, à la Comédie-Française. Le
troisième acte du 'Fils, naturel venait de com-
mencer quand un monsieur en habit noir
sortit de la loge de balcon n°'19 et vint s'ap-
puyer sur la balustrade en1 bronze dû grand
escalier, voisine du foyer. du public.
Je me trouve indisposé, dit-il à une ou-
vreuse, cela ne sera rien.
Mais au même instant, pris d'un étourdis-
sement, il tombait de l'autre côté de la ba-
lustrade' et, "après' avoir tbtir'noyé un' instant
dans le vide, venait s'abattre sur le tapis du
grand escalier et rebondissait jusque dans le
vestibule du théâtre.
Les inspecteurs du contrôle se précipité--
rerit, mais la victime de donnait plus signe
de vie et gisait dans une mare de sang, le
crâne fracassé.
On releva le cadavreet on le transporta au
cabinet médical, tandis qu'accouraient le mé-
decin et le commissaire'de police de service.
Quant au public, il ne s'était douté de rien,
et le spe.cja.cle avait continué. La femme de
la^yictimè," qui ise trouvait dans la. loge 19
a\%c deux amis, n'avait pas encore été aver-
tie,; Ce fut avec les plus grands ménagements
qu|pn vint, lftjpréyenir.
Ce CEi$a,VTé /à été. traripgrté onze heures
5,^juai Voltaire, au domicile de la victime,
qui n'est autre que M. Maurice 'Boullaire, le
notaire connu.
M. Maurice Boullaire, âgé de trente-cinq
ans; était marié et père de famille.
Ajoutons que M. etMme Jules Claretie sont
accourus au théâtre dus qu'on leur eut télé-
pliôl&é Taccidént, et qu'ils ont exprimé à
Mme Boullaire toute leur douloureuse sym-
pathie. ,̃̃•
M. Lefranc, l'un des amis de M. Maurice
Boullairë,qui se trouvait dans sa loge,, s'était
pendant 1 entr'actë attardé dans la loge de
M. Laugier. Il s'en désole, convaincu que
s'il se fût trouvé auprès de;son:ami, l'acci-
dent ne se fût pas produit.
.̃' LA MI-CARÊME s ̃'
lïl a fait très frais, on peut'même dire froid,
hier jour de la mi-carême. Mais il ne pleuvait
pas, et cela a suffi pour mettre en joie les
curieux; accourus en foule pour voir les
reines et assister au défilé du cortège.
Le cortège, précédé par des gardes munici-
paux à cheval, s'est engagé dans l'avenue des
Champs-Elysées et l'avenue de Màrigny. Le
groupe des marchés découverts était en tête,
avec le char du Printemps, sur lequel trônait
la reine, Mlle Bernadé. Puis venaient deux
chars comiques, celui de la Tortue,' sur le-
quel se pavanait le Carnaval, et celui du sup-
plice de Tantale le pittoresque char des Pé-
cheurs, portant la reine du Gourgain, Mlle
Louise Neuberger, entourée de ses demoisel-
les d'honneur et d'un groupe de sauveteurs
calaisiens le char de la Dentelle, sur lequel
était la reine des dentellières de Calais,
Mlle Germaine Derender, coiffée d'un dia-
dème, et à qui la foule a fait une ovation sur
tout le parcours.
Les acclamations sont plus vives encore
quand apparaît le char des Reines de l'Al-
liance latine, où sont réunies sous un portique
surmonté d'un groupe allégorique, la reine de
Feuilleton du FIGARO du 23 Mars
(34)
JOHN CHILCOTE
M. p. ••
,XXII._ ̃'̃̃.
buite
Lillian s'était redressée lentement, et,
comme il s'était rapproché d'elle, elle
lui tendit la main.̃
-Jack! dit-elle d'une voix douce,
comme c'est gentil à vous de vous être
souvenu!
La voix et les paroles paroles étaient
parvenues très distinctement à ses oreil-
les, et en même temps disparaissait à
tout jamais de son esprit l'incertitude
où, il était touchant la nature des rela-
tions qui régnaient entre elle et Chilcote.
La pensée d'Eve venait de s'associer à la
constatation de ce fait, et au milieu des
difficultés de sa propre situation sa face
avait pris une expression de dureté.
Lilhan ne parut pas s'en apercevoir.
Elle lui prit la main avec un sourire très
doux.
Vous êtes très ponctuel, dit-elle.
Mais vous avez les mains froides appro-
chez-vous du feu.
Loder ne s'était pas aperçu qu'il avait
froid aux mains, mais il se laissa entraî-
ner vers la cheminée..
L'une des extrémités du divan était en
pleine lumière, l'autre se trouvait dans
l'ombre. Mais, par un heureux hasard,
Lillian choisit pour elle le côté éclairé et
offrit -l'autre à son hôte. Il l'accepta avec
un vif sentiment de soulagement. Là,
du moins, il pouvait rester assis sans
crainte d'être démasqué, et cela lui per-
mettait de temporiser avec le destin. |
Tous droits de traduction et de reproduction
jréeejnrés pour tous pays.
Rome, la reine de Madrid, la reine de Lis-
bonne, qui envoient des baisers à la foule. La
Reine des reines de Paris, enveloppée d'un
grand manteau de velours bleu et assise au
sommet d'un grand char mécanique où sont
réunis tous les emblèmes de l'alimentation,
remporte également sa grande part de succès.
La belle « déesse de Vevey, Mlle Her-
mance Taverney, recueille, elle aussi, de vifs
applaudissements sur son passage.
Selon l'usage, le cortège s'arrête devant le
palais de l'Elysée, et les reines mettent pied
a terre. M. Jean Lanes; secrétaire général de
la Présidence, est chargé de les recevoir. Les
reines de Calais lui présentent la corbeille de
fleurs en dentelles, offerte à Mme Fallières
par les dentelliers de Calais la reine suisse
a apporté une magnifique gerbe de fleurs.
En échange; M. Lanes remet à chacune des
gracieuses visiteuses le bracelet d'or tradi-
tionnel.
A trois heures, le cortège reprerid sa mar-
che par le faubourg Saint-Honoré, la'rue
Royale, les grands boulevards, les rues du
Temple, Bal tard, du Pont-Neuf de Rivoli et
gagne l'Hôtel de Ville où l'attendent le Conseil
municipal et le préfet de la Seine. Un lunch
est offert aux remes et aux personnes qui les
accompagnent. Chaque reine reçoit un bou-
quet noué de rubans aux couleurs dé la Ville
de Paris.
La dernière réception a lieu à la Préfec-
ture de police où M. Lépine, en offrant le
Champagne, adresse aux reines une courte et
charmante allocution, « regrettant que les
reines latines n'aient pu nous apporter avec
elles un peu du beau soleil de leur pays » et
les assurant que Paris gardera longtemps le
souvenir de leur gracieuse visite.
Il est sept heures moins le quart, au mi-
lieu d'une foule joyeuse, la cavalcade ga-
gne la rive gauche par le quai du Mar-
ché-Neuf et le Pdnt-au-Double d'où, par la
rue Lagrange, elle gagne la rue Dante,
pour saluer au passage M. Loubet. De là, elle
suit les boulevards Saint-Germain et Saint-
Michel et arrive place du Panthéon où a lieu
la dislocation.
Le « Souvenir-Programme » vendu le long
du parcours au profit des victimes de Cour-
rières a obtenu un gros succès et la recette a
dû être fructueuse.
Il y a eu dans la journée 865 arrestations
dont très peu ont été maintenues.
L'AGITATION OUVRIÈRE
Les ouvriers ,jardiniers, maraîchers, fleu-
ristes, dont les syndicats respectifs forment
la « Fédération horticole », ont, dans un mee-
ting tenu hier soir à la Bourse du travail,
voté « la grève générale de tous les ouvriers
de la corporation ».
M. Jolliot, juge d'instruction, a ouvert
hier une enquête sur les incidents qui se sont
produits à l'usine d'électricité de Samt-Denis.
sept, ouvriers, qui ont détérioré les machines,
ont été arrêtés et inculpés d'infraction à l'ar-
ticle 448 du Code pénal. •
LE TERME D'AVRIL
II y a, au terme d'avril un grand nombre
de déménagements à Paris, et par la même
occasion de nombreuses modifications dans
les am.eublements, c'est aussi l'échéance
ou lés Parisiens commencent à se préoccuper
de la prochaine villégiature et des modi-
fications à apporter dans l'installation de leur
home estival. Pour toutes ces raisons, il est
utile do rappeler qu'il y a aux Grands Maga-
sins Dufayel une exposition de mobiliers
complets par milliers, au milieu desquels on
n'a, littéralement que l'embarras du choix.
De nombreuses attractions sont èn outre
offertes chaque jour aux visiteurs.
Y Jean de Paris.
DANS LES DÉPARTEMENTS
DOUBLE MEURTRE
̃~v~v«^ Etampes. M. Claude Bierne, âgé
de soixante-seize ans, rentier, ex-fabricant
de matrices et de moules pour le ruolz 'et
l'argenterie, et sa petite-nièce, Mme Coulon,
née Louise Quatrehomme, qui remplissait
auprès de ce vieillard hémiplégique les fonc-
tions de gouvernante, avaient été assassinés
à coups de couteau, dans leur maison de
Milly, dimanche, entre huit et neuf heures du
soir. Le chien n'avait pas aboyé et il n'y avait
pas trace de vol.
On constata le double meurtre hier matin
seulement. Son auteur présumé a été arrêté
aujourd'hui c'est le mari (le troisième mari)
de Mme Coulon, l'une des victimes.
En 1904, les Coulon étaient venus habiter
avec leur oncle; mais les deux hommes:ne
vivaient pas en bonne intelligence. Ou se
sépara. Les Coulon se retirèrent à Biennes,
près de Montereau, où ils possédaient quel-
que bien, et le vieillard prit une gouver-
nante, Mlle Marguerite Nardon. Puis celle-ci
tomba malade, et M. Bierne, il y a six se-
maines, décida sa petite-nièce à revenir,
seule cette fois, le soigner.
Selon toute probabilité, elle hériterait de
lui; mais elle menaçait son mari de divorcer,
et le Parquet est convaincu que cette menace
aura exaspéré Coulon et que, dans une 'dis-
cussion consécutive, il se sera laissé empor-
ter au meurtre. Probablement voit-on aussi
une relation entre la sûreté des coups de cou-
teau qui déterminèrent la mort et lé fait que
Coulon est, de son métier, étalier de bou-
cherie.
Ils restèrent un moment silencieux,
puis elle se tourna vers lui.
Vous ne voulez pas fumer? de-
manda-t-elle.
Tout dans la pièce-avait un aspect d'é-
nervante mollesse, la flamme adoucie
du feu, le parfum des roses, la voix
lente et caressante de Lillian. Loder se
sentait oppressé; il redressa les épaules
et s'assit plus droit sur le divan.
Non, dit-il, je n'ai pas envie de fu-
mer.
Lillian se rapprocha de lui.
Cher Jack, dit-elle d'une voix douce,
ne dites pas que vous êtes de mauvaise
humeur; ne dites pas que vous êtes.
obligé de remettre notre rendez-vous à
un autre jour.
Elle leva. les yeux sur lui et se mit à
rire légèrement.
Loder se sentait mal à l'aise.
Un autre silence suivit; Lillian atten-
dait qu'il répondît, puis elle fronça tout
à coup les sourcils et se leva du divan.
Comme beaucoup de gens indolents elle
était un peu obstinée, et maintenant
qu'elle avait assuré son triomphe sur
Chilcote, maintenant qu'elle avait affirmé
hautement son droit de disposer de lui,
son dessein primitif reprenait le dessus.
Qu'il se montrât froid ou intéressé,-in-
différent ou attentif, elle entendait se
servir de lui.
Elle s'approcha du feu et se tint un
instant immobile, les yeux fixés sur la
flamme; puis elle se retourna lentement
mais d'un air de décision vers le divan
et reprit sa place.
Jack, commença-t-elle gentiment,
il m'est arrivé une chose réellement
étonnante. J'ai besoin de vos lumières
pour l'éclaircir.
Il y eut un nouveau silence pendant
lequel Lillian se mit à lisser doucement
la broderie de soie qui garnissait sa robe.
Puis de nouveau elle leva les yeux sur
lui.
Vous ai-je jamais dit, reprit-elle
aussitôt, que j'avais eu une fois un acci-
dent de chemin de fer sur une drôle de
Il a été écroué, cet après-midi, à la prison
d'Etampes, où il continue à nier avoir eu
aucun rôle dans l'affaire.
DANS LES MILIEUX OUVRIERS
~« Angers. Devant la manufacture
du Mail, les grévistes avaient installé, ce
soir, des barricades. La gendarmerie chargea
à plusieurs reprises. A la suite de ces inci-
dents, M. Bessonneau a décidé de fermer ses
ateliers de ce fait, 4,000 ouvriers resteraient
sans travail.
Argus.
AVIS DIVBES
TjiNLEVEZ naturellement les points noirs de
votre nez avec l'ANTI-BOLBOS de la Par-
fumerie exotique,35,r.du 4-Septembre,qui res-
serrel'épiderme et luirend blancheur et netteté.
LES THÉÂTRES
Opéra municipal de Nice Manon
Lescaut, drame lyrique en quatre actes,
version française de M. Maurice Vaucaire,
musique de M. G. Puccini.
L'Opéra de Nice vient de représenter
une œuvre qui, connue et appréciée dé
longue date, était presque ignorée jus-
qu'ici en France. En vérité elle mérite
mieux que cette sorte d'indifférence qui
s'attachait à elle, et la représentation de
Nice vient très heureusement de la met-
tre en lumière.
M. Puccini est parmi les maîtres ita-
liens celui, sans contredit, qui s'est dé-
gagé le plus nettement de la contrainte
mélodique qui asservit presque ious ses
confrères. Je n'entends pas dire par là
qu'il s'est volontairement privé d'un des
plus merveilleux moyens d'expression
qui soient au théâtre: la mélodie; mais il
l'a soumise à une sorte d'examen, dont
le bon goût et la mise en oeuvre ingé-
nieuse sont les plus puissants facteurs.
La mélodie italienne, une des plus gra-
cieuses qui soient, une de celles en tous
cas qui ont sur le public l'action la plus
décisive, est chez lui comme assagie. Elle
s'éloigne de toute trivialité, et la façon
dont elle est présentée manifeste à la
fois d'un goût très sûr et d'une science
très raffinée.
Le sens du mouvement, qui se mani-
feste si intensément dans certaines pages
de la Pie de bohème, l'intensité drama-
tique qu'exprime parfois la Tosca, la
poésie qui se dégage abondamment de
miss Butterfly se retrouvent dans Manon
Lescaut.
Evidemment, la façon dont le carac-
tère de Manon nous est présenté, sa
mortquelque peu grandiloquente ne sont
pas sans nous surprendre mais le com-
positeur n'y est pour rien et M. Maurice
vaucaire qui nous a donné une fidèle et
très littéraire adaptation du livret, ne
pouvait que traduire la pensée de l'au-
teur.
De plus, le souvenir de la Maûon de
M. Massenet ne saurait s'effacer de la
mémoire. Il est difficile d'imaginer une
musique plus complètement appropriée
au sujet, que celle de la Manon française.
Quoi qu'on fasse, la poétique héroïne de
l'abbé Prévost se trouve immortalisée
par la partition du maître français et si
iSéduisante que soit en certaines"parties
la musique de M. Puccini, c'est pourtant
celle de M. Massenet qui chante toujours
dans nos mémoires.
L'invention, la grâce mélodique, le
charme irrésistible de notre Manon, en-
lèvent, quoi qu'on en ait, à sa sœur ca-
dette une partie de sa grâce et de sa
nouveauté.
Il serait puéril et injuste de négliger
les qualités de l'œuvre de M. Puccini:
elles sont éclatantes. Le premier acte,
consacré à la rencontre à Amiens, est d'un
remarquable mouvement, et le person-
nage de l'héroïne s'y dessine en traits
d'une grâce exquise. Le second se dé-
roule dans l'appartement de Manon.
L'amante de des Grieux s'occupe aux
soins de sa riche toilette, prend sa
leçon de danse, entend d'une oreille
distraite d'aimables madrigaux; c'est là
un prétexte à nombre de pastiches qui,
pour être agréablement traités, n'en sont
pas moins d'inutiles et trop nombreux
hors-d'œuvre. Le drame reprend avec
l'arrestation de Manon, scène courte et
violente et dont l'émotion a été assez mal
traduite par la véhémence exagérée des
interprètes.
Le troisième acte, le mieux venu, est
par contre rempli de beauté. Manon est
en prison; des Grieux et Lescaut veillent
petite ligne d'Italie, longtemps. avant de
vous connaître ?
Loder ne répondit pas, mais elle ne fit
pas attention a son silence.
Astrupp avait contracté une fièvre
à Florence, continua-t-elle, et je m'em-
pressais de fuir pour échapper à la con-
tagion, quand notre stupide petit train
dérailla près de Pistoria et se brisa dans
la catastrophe. Heureusement nous n'é-
tions qu'à un demi-mille d'un village, de
sorte que nous ne fûmes pas tout à fait
abandonnés. Le village était un vrai
joujou de village, et le logement ce qu'on
pouvait s'attendre à trouver dans une
Arche de Noé. Mais tout y était d'un pit-
toresque achevé. Je descendis dans la
petite auberge avec ma femme de cham-
bre et Coco; Coco était un petit chien
délicieux, un caniche blanc. J'avais la
folie des caniches cette année-là.
Elle se tut et regarda, pensive, dans
la direction du feu, puis lentement dans
celle de Loder.
Mais, pour en revenir à mon his-
toire, Jack, ce joujou de village avait sa
poupée! reprit-elle en riant doucement:
c'était un Anglais, et il fut le premier à
venir à mon secours après la catastro-
phe. Il était logé à l'auberge de l'Arche
de Noé, et après, cette première nuit, je.
il. nous. Elle hésitait. Oh! Jack, vous
ne parlerez donc pas ?
Elle avait baissé la voix, désappointée.
L'homme qui est indifférent au récit
d'une" histoire d'amour est le pire des
auditeurs.
-Je crois que cela ne vous intéresse
par, dit-elle d'un ton de reproche.
Pour la première fois Loder changea
de position; d'un mouvement brusque
il s'assit sur le devant de son siège.
Vous vous trompez, dit-il lente-
ment, cela m'intéresse profondément.
Elle le regarda de nouveau. Le ton de
sa voix la rassura, mais ses paroles la
laissaientdans l'incertitude. Chilcote était
parfois si empathique Avec une pointe
d'hésitation dans la voix, elle poursuivit
son récit
à la fenêtre de sa cellule tout est pré-
paré pour sa fuite les sentinelles sont
gagnées à la cause. Dans le petit jour qui
se lève, on perçoit au loin, dans le port,
le balancement du vaisseau qui doit em-
porter Manon en Amérique. Un bonheur
illusoire envahit l'âme des amants; déjà
ils chantent un avenir moins tragique,
lorsqu'un coup de fusil éclate le com-
plot est découvert: tous espoir est perdu.
C'est alors, parmi les propos ironiques ou
compatissants de la foule, le sinistre ap-
pel des condamnées. Manon paraît, et la
douleur de des Grieux s'exhale en phra-
ses émouvantes. Il supplie le comman-
dant du bord, qui se laisse toucher; et la
foule elle-même, gagnée à l'émotion,
s'apitoie sur le sort des amants malheu-
reux. C'en est fait, Manon et des Grieux
partiront ensemble vers ces contrées
dont la lointaine et mélancolique image
se mue pour eux en une douloureuse
consolation.
La musique qui commente cet acte est
d'une belle simplicité de longs et gra-
ves accords soulignent la tristesse de la
nuit qui décroît. Le souvenir de la grâce
et de la joie de Manon y passe fugitif et
rapide aucun éclat; seuls martelés, lour-
dement, les accords graves du début
et sur la fin de l'acte, toute la passion
éclate en un duo d'un lyrisme et d'une
éloquence que son contraste même avec
la simplicité du début rend encore plus
émouvants.
Le quatrième acte se passe en Amé-
rique Manon se meurt dons une lande
désolée aux bras de l'inconsolable des
Grieux. Cette fin, dont la poésie eût pu
être poignante, si elle eût été conforme
à la pensée de l'abbé Prévost, pèche par
là même qu'elle est l'opposé de cette
pensée. Manon qui fut jusque-là une
créature futile et charmante, se trans-
forme soudain en héroïne d'opéra et le
musicien, fidèle à son poète, a composé
un long duo dont les accents sont peut-
être plus mélodramatiques qu'il ne con-
viendrait.
Une des qualités les plus rares de cette
intéressante partition, est avec une in-
tention mélodique assez pure et un très
grand sens du mouvement, une écriture
harmonique souvent charmante et une
instrumentation d'une très heureuse per-
sonnalité.
L'Opéra de Nice qui a fait, en représen-
tant ManonLescaut,un très louable essai
de décentralisation, a monté l'œuvre avec
soin. Les deux rôles principaux étaient
tenus par Mlle Charlotte Wyns et par
M. Constantino. Le personnage de Manon
a permis à Mlle Wyns de déployer les
ressources de sa jolie voix et de sa
science scénique. Quant à M. Constan-
tino qui possède à Nice de très grands
admirateurs, si son jeu n'est ni très
varié ni très subtil, il a du moins prodi-
gué généreusement les éclats d'une voix
facile et d'un joli timbre. @
) M. Dutilloy a dessiné d'une façon très
'personnelle le personnage de Lescaut.
1 Les décors sont charmants et la mise
sen scène, particulièrement celle du pre-
jmier et du troisième acte, fort bien
îréglée.
•? L'orchestre a consciencieusement in-
terprété la partition de M. Puccini mais
j'imagine que le troisième acte eût at-
teint tout son effet, si le début et la fin
.eussent été plus complètement différen-
cibs par des jeux de sonorité plus minu-
tieusement ménagés. `
Le succès dé Manon Lescaut a été très
vif, et l'auteur, longuement acclamé, a
dû paraître après chaque acte devant un
public enthousiaste.
Robert Brussel.
COURRIER DES THEATRES
Ce soir
A l'Opéra, à 8 h. 1/4, Faust (Mlle Vix,
MM. Delmas et Muratore).
A la Comédie-Française, à'8 h. 1/2, le
Demi-Monde (Mlle Cécile Sorel).
-r A l'Opéra-Comique, à 8 h. 1/4, Mireille
(Mme Vàllandri, MM. de Poumaytac, Du-
franne, Mme Cocyte, M. Vieuille.)
A l'Odéon, à 8 h. 1/2, Glatigny.
Au théâtre Antoine, à 8 h. 3/4, dernières
de Vieil Heidelberg (MM. Antome, Clerget,
Signoret, Maupré, Mlle Sylvie, etc., etc.).
A la Renaissance, à 8 h. 3/4, Pécheresse
(Mmes Marthe Brandès, Juliette Margel,
Jenny Rose, MM. Lucien Guitry, Gémier,
Arquillière, H. Rousselle).
Aux Capucines, à 9 heures,pour les re-
présentations de Mmes Germaine Gallois,
Alice Bonheur, et de M. Charles Lamy
Pdris ou le Bon Juge (Mmes Germaine Gal;
Comme je vous le disais, il fut le
premier à nous trouver, à me trouver
devrais-je dire, car ma femme de cham-
bre était en train d'avoir une crise de
nerfs un peu plus loin dans son compar-
timent et Coco était perdu. Je me sou-
viens que la première chose que je fis
fut d'envoyer mon Anglais à la recher-
che du chien.
En dépit de sa situation, Loder trouva
moyen de sourire.
Réussit-il ? demanda-t-il sèchement.
S'il réussit? Oh oui, il réussit, dit-
elle en souriant aussi involontairement.
Le pauvre Coco était pris sous le four-
gon aux bagages et il eut beaucoup de
peine à l'en retirer. Lorsque tout fut ter-
miné,1 Coco se trouva sain et sauf et plus
vivant que jamais, mais l'Anglais avait
le doigt presque traversé. Coco était un
délicieux animal, mais il était très irri-
table et il avait la dent mauvaise
Elle se remit à rire avec une douce
gaieté.
Loder resta un instant silencieux, puis
il se mit aussi à rire, du rire bref et sar-
castique de Chilcote.
Et vous avez bandé sa blessure, je
suppose ? 9
Elle le regarda, à demi fâchée..
Nous étions tous les deux dans la
petite auberge, dit-elle, comme si toute
autre explication était superflue.
Puis elle changea de nouveau de ton.
Elle se rapprocha imperceptiblement de
lui et lui toucha la main droite. Sa main
gauche, qui était plus loin d'elle, se trou-
vait cachée à l'ombre des coussins.
Jack, dit-elle d'une voix caressante,
ce n'est pas pour vous raconter cette
vieille et stupide histoire que je vous ai
fait venir ici; c'est en réalité pour vous
en conter pour ainsi dire la suite.
Elle lui caressa doucement la main à
deux ou trois reprises:
Comme je vous l'ai dit, je rencontrai
cethomme, et nous. nous fîmes connais-
sance. Vous comprenez? Puis nous eû-
mes une querelle. une querelle très
grave. et je partis. Jéme suis souvenue
lois, Alice Bonheur, MM. Charles Lamy, Vic-
tor Henry, Mlles Renée Desprez, Jeanne Di-
rys) le Verrou (Mmes Martignac, Marie-
Louise Derval, M. Armand Bertnez) Un cas
de folie! `
Au théâtre du Grand-Guignol, à 9 heu-
res Baraterie, Une.Conquête, la Veuve, Dans
un fauteuil, le Cas de Mme Flan.
Au Théâtre-Royal, à 9 heures, le Minou,
Au plaisir, mesdames! revue (Mlle Debriège);
le Trait d'union (Mlles Lucy Gérard, Lan-
telme, Delphine Renot) la Leçon d'amour
(Mme Paulette Darty, M. Victor Boucher) la
Bonne Hôtelière Mme Régine Martial dans
ses œuvres.
A la Nouvelle-Comédie, 9 heures, pre-
mière représentation de AQ-HP, drame de
M. Andre de Lorde joué par Mlle Flore Ber-
geys, MM. Gouget, Schultz,'Hamelin.
LaDonation, pièce de M. Jean Larbel d'a-
près la nouvelle de M. Eugène Delard, jouée
par Mlle Flore Bergeys, MM. Gouget, Schultz,
Franck. Edgard l'est, comédie de M. Pierre
Montrel, jouée par Mmes Guéret; Mira Ceti,
Wilson, MM. Saint-Isles, Eynard, Franck.
Josiane Eymard, pièce do M. Jean Lorrain,
jouée par Mmes Flore Bergeys, Louise Willy,
Guéret, M. Schultz. La Victime ou l'affaire de
l'impasse des trois Paulette, comédie de MM.
Michel Carré et Marsèle, jouée par Mmes
Grandjean, Guéret, Mira Ceti, MM. Gouget,
Schultz, Saint-Isles, Eynard, Franck.
Au théâtre Déjazet, à 8 h- 1/2, II ?. ou
Elle ?. –9 h. 5, 583ê représentation de Tire-
au-flanc! (2« année).
La journée d'hier que devait tristement
terminer le pénible accident dont nos lec-
teurs ont lu plus haut le récit a été fort
brillante à la Comédie-Française. Monsieur
de Pourceaugnac joué en matinée avec
l'Avare, avait soulevé de longs éclats de rire
et des applaudissements sans fin. M. Coque-
lin cadet, notamment, s'était faitacclamer. Le
soir, le Fils naturel n'avait pas été moins
bien accueilli, et la recette de la journée dé-
passait 13,060 francs. o'
̃
Les spectacles de dimanche, de lundi et de
mardi, à l'Opéra-Comique, seront les sui-
vants
Dimanche, à 1 heure, matinée, laTraviata
Mlle Brozia, MM. Devriès, Delvoye), le Caïd
(Mlle Tiphaine, MM. Carbonne, Vieuille) le
soir, Carmen (Mmes Marié de l'Isle, Angèle
Pornot, M. Soubeyran (début), M. Allard)
lundi, à 8 h. 1/2, représentation populaire à
prix réduits avec location, Grisélidis (M. Fu-
gère, Mmes Vallandri, Tiphaine, MM. Du-
franne, Lucazeau) mardi, à 8 heures très
précises, première représentation d'Aphro-
dite.
Confirmons notre information d'hier rela-
tivement à Aphrodite. La répétition générale,
toujours.fixée à demain, commencera à une
heure très précise.̃
Il
A l'Odéon.
Glatigny, la très belle pièce de M. Catulle
Mendès, si amusante et si pathétique, s'était
pendant les premières représentations, en
raison de l'importance considérable de la
mise en scène, terminée un peu tard.
Glatigny, qui reçoit chaque soir des spec-
tateurs un accueil de plus en plus chaleu-
reux, finit maintenant avant minuit. Tel est
le succès de Glatigny devant le grand public
que, hier, malgré la fête et le soleil, la salle,
en matinée, était absolument pleine, et les
spectateurs, tout à fait emballés, ont fait l
relever deux fois le rideau.
L'abondance des matières nous oblige à ren-
voyer à demain le compte rendu de la pre-
mière représentation du Tasse, l'opéra de M.
Eugène d'Harcourt, au Théâtre royal d'An-
vers. Constatons cependant dès aujourd'hui
le très vif succès de cet ouvrage le public a
longuemei),t. applaudi l'œuvre il a rappelé
les interprètes et il a acclamé l'auteur.
Au théâtre Sarah-Bernhardt.
Dans le Frisson de l'Aigle, l'amusante
pièce de M..Paul Gavault, le rôle de l'impé-
ratrice Marie-Louise, vient d'être repris par
Mlle Gabrielle Bernard qui y a obtenu le
même succès que la créatrice, Mlle Maud
Gauthier. Ajoutons que M. André Calmettes
a engagé pour tenir le rôle- créé par Mlle
Yvonne de Rycke, une jeune artiste de talent,
Mlle Paule Evian, à qui le public a fait le
meilleur accueil. •
La matinée que nous avons'annoncée, hier,
au théâtre Antoine, pour après-demain di-
manche, sera irrévocablement la dernière de
Vieil Heidelberg.
Quelques renseignements sur l'Enfant chérie,
la pièce nouvelle de M. Romain Coolus, an-
noncée pour dimanche et lundi en répétition
générale et en première représentation au
Gymnase.
Très nouveau et non sans quelque audace,
le sujet est de plus extrêmement parisien. Est-
ce pour cela que Coolus a pour l'Enfant chêne
une prédilection marquée, au point qu'il en ou-
blie les Amants de Sazy, son très gros succès
au Gymnase; Petite Peste et Antoinette Sa-
brier, ses deux dernières pièces en vogue au
Vaudeville.
Le premier et le quatrième acte se passent
dans une élégante garçonnière de 1 avenue
Montaigne, un peu sens dessus dessous au
de lui un peu plus longtemps que je ne
me souviens de la plupart des gens.
c'était un de ces caractères déterminés
dont le souvenir se fixe dans l'esprit, et
le sien est resté dans ma mémoire pour
une double raison.
Elle leva de nouveau les yeux: ï v
Il y est resté parce que vous avez
contribué à l'y fixer. Vous savez combien
de fois j'ai mis mes-mains sur votre bou-
che en vous disant. que vos yeux me rap-
pelaient ceux de quelqu'un. Eh bien, ce
quelqu'un était mon Anglais. Mais il ne
faut pas que vous soyez jaloux: c'était
un être affreux et obstiné! tandis que
vous. mais vous savez bien ce que je
pense de vous.
Elle lui pressa la main.
Mais, pour en venir à la fin de mon
histoire, je n'ai jamais revu cet homme
depuis cette époque éloignée jusqu'à.
jusqu'à la soirée de Blanche
Elle parlait lentement, pour faire pro-
duire à ses paroles tout leur effet; puis
elle attendit pour jouir de sa surprise.
Le résultat ne fut pas tout à fait celui
qu'elle attendait. Loder ne dit rien, mais
d'un mouvement brusque il retira sa
main de la sienne..
-Vous n'êtes pas surpris ? demanda-
t-elle d'un ton d'aimable reproche.
Il tressaillit légèrement, comme s'il
était brusquement rappelé à la nécessité
du moment.
-Surpris? dit-il.- Pourquoi serais-je
surpris ? Une personne de plus ou de
moins à une réunion aussi nombreuse
n'a rien d'étonnant. D'ailleurs vous vous
attendiez bien à ce que cet homme re-
vînt tôt ou tard dans son pays. Pourquoi
serais-je surpris ?
Lillian se renversa voluptueusement
sur le dossier du divan.
Parce que, mon cher ami, dit-elle
doucement, cela est plus qu'une sur-
prise. c'est un mystère un de ces mys-
tères qui vous fascinent et qui n'arrivent
qu'une fois dans la vie. `
Loder ne bougea cas.
premier acte, le maître de la maison débar-
quant d'un voyage idyllique en Italie.
L'action du deuxième acte se déroule sur la
terrasse d'une villa à Saint-Germain, d'où
l'on aperçoit Marly avec son viaduc et sa
forêt. (Décor d'Amable.)
Le troisième acte transporte le spectateur
en Alsace dans un décor très pittoresque et
peint par M. Ronsin d'après des documents
scrupuleusement exacts. Le paysage que l'on
découvre existe véritablement; l'auteur, Ro-
main Coolus, en a rapporté des photographies
l'été dernier après un voyage en Alsace.
L'Enfant chérie servira de rentrée à M. Fé-
lix Huguenet que l'on n'a pas eu la bonne
fortune d'applaudir cet hiver. Il créera un
rôle de papa encore très jeune en ce sens qu'il
a la soixantaine fort alerte. Ce rôle qui n'a
pas moins de 1,800 lignes est écrasant. Il
montrera M. Huguenet sous tous les aspects
de son beau talent; son fin comique s'alliera
à l'expression de toute une gamme de senti-
ments tour à tour la colère, la douleur, la
bonté. Au dernier acte, il fera verser de douces
larmes.
A côté de lui,Mme Marthe Régnier fera ses
débuts au Gymnase. La jeune et charmante
comédienne, que l'on applaudissait récem-
ment encore dans Jeunesse à l'Odéon, est en-
thousiamée de son rôle de l'Enfant chérie
elle y sera, nous dit-on, superbe. M. Dumàny,
le créateur de la Rafale,, contribuera aussi à
rendre l'interprétation tout à fait supérieure.
Ce trio hors de pair est complété par M.v
Henry Burguet, le précieux collaborateur .de.
M. Franck qui, par dévouement pour la mai-
son et pour donner à l'interprétation son
maximum d'éclat, s'est chargé d'un rôle de
second plan. Une nouvelle pensionnaire du
Gymnase, Mlle Madeleine Dolley, débutera
dans la pièce.
Détail qui a son importance la pièce ne,
comporte pas moins de douze toilettes qui-
rivaliseront d'élégance, de «chic» et d'éclat.
Et cela achèvera de faire de l'Enfant chérie,
une pièce plus que parisienne boulevardière.
Nous recevons de M. Alphonse Franck la
lettre suivante
Mon cher Basset,
La mi-carême a fait une victime, une seule je
l'espère, tout en regrettant que ce soit moi.
J'attendais aujourd'hui, à deux heures, le décor
auquel il était survenu un accident. L'encombre-
ment du boulevard et la consigne implacable
donnée à nos gardiens de la paix n'ont permis au
chariot d'aborder le théâtre qu'à huit heures du
soir I Résultat un nouveau retard de vingt-
quatre heures.
Je fixe donc à lundi la première représenta-
tion de t'Enfant chérie, et la répétition générale
à dimanche soir.
Je regrette infiniment de déranger la critique
le jour consacré au repos dominical et je lui
présente mes excuses.
Elle voudra bien les agréer, d'autant qu'elle
avait après-demain samedi déjà deux répétitions
générales, l'une à l'Opéra-Comique et 1 autre au
Palais-Royal.
Elle sait, au surplus, que j'ai le plus vif désir,
après cela, de ne plus la déranger avant la sai-
son prochaine. Elle me saura gré, j'en suis sûr
de cette excellente intention.
Bien cordialement à vous.
Alphonse Franck.'
Autour de la Renaissance.
M. Henry Bernstein a lu hier, chez M.
Guitry, la Griffe, sa pièce nouvelle, à Mmes
Marthe Brandôs, Henriette Roggers,'MM. Lu-
cien Guitry, Gémier, Arquillière, Rousselle, `
Coquet, etc.
Sous l'épaulette, le beau drame de M. Ar-
thur Bernôde, si chaleureusement applaudi •
chaque soir à la Porte.-Saint-Martin-r.pa4v,
rait in-extenso dans V Illustration de cette se-
maine.
Les Mousquetaires au couvent ont reparu
hier seulement, à la suite d'une indisposition
de M. Fugère, sur l'affiche des Boufles-Pari-
siens.
Le succès a été considérable pour l'œuvre <~
et pour les interprètes.
N
Notre confrère M. Franc-Nohain fera demain
samedi, à quatre heures, à l'Ecole des Hautes
Etudes sociales, rue de la Sorbonne, une con-
férenoe sur les « Revues de fin d'année ».
Nous allons voir, pendant une quinzaine
les reines de la mi-carême, dans la plupart
des théâtres de Paris. Elles ont tenu à corn-
mencer leur tournée par l'Athénée. Cinq lo-
ges ont été retenues pour ce soir à ce théâtre,
et les reines et leur cortège y pourront tout à
leur aise applaudir Iriplepatte, ses excel- o
lents, interprètes et, dans le nombre, deux sou-
veraines longtemps fêtées, Mmes Augustine ̃•>
Leriche et Duluc, toatesles deux naguère rei-.
nes de l'amusant royaume de Corcinie.
.§– *̃
Aux Capucines, demain 24 mars, à.deux
heures, première représentation anglaise des
<• matinées Berlitz », au profit des victimes
de Courrières, .4 Sensé of Humour, a play in
three acts. La pièce sera interprétée par le r
grand acteur Aubrey Smith et les artistes des 7.
principaux théâtres de Londres.
Madge Lessing apportera aussi la précieuse
collaboration de son beau talent à cette œu-
vre de charité et se fera entendre in selec- i(
tions from her repertoire.
Devant le très grand succès remporté par."
les trois premières matinées qu'il a données
au théâtre des Capucines, M. Pougaud a dé-t
cidé d'inaugurer une nouvelle série de trois
matinées encore, avec sa pimpante revue .'X
-Il faut vous expliquer, dit-il tran-v.
quillement.
Lillian sourit
C'est précisément ce que j'eveux'
faire. Comme j'étais dans ma tente le ̃
soir de la réception de Blanche, un ™
homme vint pour subir l'épreuve. de la'
boule de cristal. Il se. présenta comme
n'importe qui et posa ses mains, sur- la,
table. Il avait des mains très fines,
comme. oui, presque comme les vôtres,
et il portait deux bagues à l'annulaire de •
la main gauche, une grosse bague à eu-
chet et une alliance en or.
Loder déplaça sa main d'un mouve-.
ment imperceptible jusqu'à ce qu'elle fût
complètement cachée par les coussins.
Les paroles de Lillian ne lui causaient»-
aucune surprise; c'est à peine s'il en-
éprouvait une légère émotion. Il sentait
maintenant qu'il s'y était attendu, qu'il
les attendait inconsciemment depuis
longtemps.
-Je lui demandai d'ôter ses bagues.
continua-t-elle, et justement il hésita un
instant. j'eus la sensation qu'il hésitait.
puis il parut en prendre son parti et jl^
les retira. Il les retira, Jack, et devinez
ce que je vis! Devinez!
Pour la première fois Loder recula
involontairement dans le coin du divan.
Je ne devine jamais! dit-il brusque-
ment.
Alors je vais vous le dire. Ces
mains étaient les mains de mon Anglais!
Les bagues cachaient la cicatrice laissée"
par les dents de Coco c'était la même
cicatrice que j'avais bandée une douzaine
de fois, que j'avais vue se fermer avant
mon départ de Santasalare.
-Et vous. que fites-vous? dit Loder'
qui éprouvait une difficulté et un malaisé;;
singuliers à parler.
Ah c'est là le point important;
c'est là que je fus stupide et que je com-
mis une bévue. J'aurais dû lui parler sur'
le moment, mais je n'en fis rien. Vous;
savez comme on est hésitant quelque-
fois. Après, il était trop tard.
(A suivre.) Katherine Cecil Thurston. ̃•
contre la tuberculose, Me Henri-Robert, du
barreau de Paris.
Jugement à huitaine. S. • ̃
LE VIN DÉSILES
LE MEILLEUR TONIQUE
(Phot. Reuthnger.i
En représentations à. la Cigale.
Nouvelles Diverses
k PARIS
UN ACCIDENT A LA COMÉDIE-FRANÇAISE
Un déplorable accident est arrivé hier soir,
à dix heures, à la Comédie-Française. Le
troisième acte du 'Fils, naturel venait de com-
mencer quand un monsieur en habit noir
sortit de la loge de balcon n°'19 et vint s'ap-
puyer sur la balustrade en1 bronze dû grand
escalier, voisine du foyer. du public.
Je me trouve indisposé, dit-il à une ou-
vreuse, cela ne sera rien.
Mais au même instant, pris d'un étourdis-
sement, il tombait de l'autre côté de la ba-
lustrade' et, "après' avoir tbtir'noyé un' instant
dans le vide, venait s'abattre sur le tapis du
grand escalier et rebondissait jusque dans le
vestibule du théâtre.
Les inspecteurs du contrôle se précipité--
rerit, mais la victime de donnait plus signe
de vie et gisait dans une mare de sang, le
crâne fracassé.
On releva le cadavreet on le transporta au
cabinet médical, tandis qu'accouraient le mé-
decin et le commissaire'de police de service.
Quant au public, il ne s'était douté de rien,
et le spe.cja.cle avait continué. La femme de
la^yictimè," qui ise trouvait dans la. loge 19
a\%c deux amis, n'avait pas encore été aver-
tie,; Ce fut avec les plus grands ménagements
qu|pn vint, lftjpréyenir.
Ce CEi$a,VTé /à été. traripgrté onze heures
5,^juai Voltaire, au domicile de la victime,
qui n'est autre que M. Maurice 'Boullaire, le
notaire connu.
M. Maurice Boullaire, âgé de trente-cinq
ans; était marié et père de famille.
Ajoutons que M. etMme Jules Claretie sont
accourus au théâtre dus qu'on leur eut télé-
pliôl&é Taccidént, et qu'ils ont exprimé à
Mme Boullaire toute leur douloureuse sym-
pathie. ,̃̃•
M. Lefranc, l'un des amis de M. Maurice
Boullairë,qui se trouvait dans sa loge,, s'était
pendant 1 entr'actë attardé dans la loge de
M. Laugier. Il s'en désole, convaincu que
s'il se fût trouvé auprès de;son:ami, l'acci-
dent ne se fût pas produit.
.̃' LA MI-CARÊME s ̃'
lïl a fait très frais, on peut'même dire froid,
hier jour de la mi-carême. Mais il ne pleuvait
pas, et cela a suffi pour mettre en joie les
curieux; accourus en foule pour voir les
reines et assister au défilé du cortège.
Le cortège, précédé par des gardes munici-
paux à cheval, s'est engagé dans l'avenue des
Champs-Elysées et l'avenue de Màrigny. Le
groupe des marchés découverts était en tête,
avec le char du Printemps, sur lequel trônait
la reine, Mlle Bernadé. Puis venaient deux
chars comiques, celui de la Tortue,' sur le-
quel se pavanait le Carnaval, et celui du sup-
plice de Tantale le pittoresque char des Pé-
cheurs, portant la reine du Gourgain, Mlle
Louise Neuberger, entourée de ses demoisel-
les d'honneur et d'un groupe de sauveteurs
calaisiens le char de la Dentelle, sur lequel
était la reine des dentellières de Calais,
Mlle Germaine Derender, coiffée d'un dia-
dème, et à qui la foule a fait une ovation sur
tout le parcours.
Les acclamations sont plus vives encore
quand apparaît le char des Reines de l'Al-
liance latine, où sont réunies sous un portique
surmonté d'un groupe allégorique, la reine de
Feuilleton du FIGARO du 23 Mars
(34)
JOHN CHILCOTE
M. p. ••
,XXII._ ̃'̃̃.
buite
Lillian s'était redressée lentement, et,
comme il s'était rapproché d'elle, elle
lui tendit la main.̃
-Jack! dit-elle d'une voix douce,
comme c'est gentil à vous de vous être
souvenu!
La voix et les paroles paroles étaient
parvenues très distinctement à ses oreil-
les, et en même temps disparaissait à
tout jamais de son esprit l'incertitude
où, il était touchant la nature des rela-
tions qui régnaient entre elle et Chilcote.
La pensée d'Eve venait de s'associer à la
constatation de ce fait, et au milieu des
difficultés de sa propre situation sa face
avait pris une expression de dureté.
Lilhan ne parut pas s'en apercevoir.
Elle lui prit la main avec un sourire très
doux.
Vous êtes très ponctuel, dit-elle.
Mais vous avez les mains froides appro-
chez-vous du feu.
Loder ne s'était pas aperçu qu'il avait
froid aux mains, mais il se laissa entraî-
ner vers la cheminée..
L'une des extrémités du divan était en
pleine lumière, l'autre se trouvait dans
l'ombre. Mais, par un heureux hasard,
Lillian choisit pour elle le côté éclairé et
offrit -l'autre à son hôte. Il l'accepta avec
un vif sentiment de soulagement. Là,
du moins, il pouvait rester assis sans
crainte d'être démasqué, et cela lui per-
mettait de temporiser avec le destin. |
Tous droits de traduction et de reproduction
jréeejnrés pour tous pays.
Rome, la reine de Madrid, la reine de Lis-
bonne, qui envoient des baisers à la foule. La
Reine des reines de Paris, enveloppée d'un
grand manteau de velours bleu et assise au
sommet d'un grand char mécanique où sont
réunis tous les emblèmes de l'alimentation,
remporte également sa grande part de succès.
La belle « déesse de Vevey, Mlle Her-
mance Taverney, recueille, elle aussi, de vifs
applaudissements sur son passage.
Selon l'usage, le cortège s'arrête devant le
palais de l'Elysée, et les reines mettent pied
a terre. M. Jean Lanes; secrétaire général de
la Présidence, est chargé de les recevoir. Les
reines de Calais lui présentent la corbeille de
fleurs en dentelles, offerte à Mme Fallières
par les dentelliers de Calais la reine suisse
a apporté une magnifique gerbe de fleurs.
En échange; M. Lanes remet à chacune des
gracieuses visiteuses le bracelet d'or tradi-
tionnel.
A trois heures, le cortège reprerid sa mar-
che par le faubourg Saint-Honoré, la'rue
Royale, les grands boulevards, les rues du
Temple, Bal tard, du Pont-Neuf de Rivoli et
gagne l'Hôtel de Ville où l'attendent le Conseil
municipal et le préfet de la Seine. Un lunch
est offert aux remes et aux personnes qui les
accompagnent. Chaque reine reçoit un bou-
quet noué de rubans aux couleurs dé la Ville
de Paris.
La dernière réception a lieu à la Préfec-
ture de police où M. Lépine, en offrant le
Champagne, adresse aux reines une courte et
charmante allocution, « regrettant que les
reines latines n'aient pu nous apporter avec
elles un peu du beau soleil de leur pays » et
les assurant que Paris gardera longtemps le
souvenir de leur gracieuse visite.
Il est sept heures moins le quart, au mi-
lieu d'une foule joyeuse, la cavalcade ga-
gne la rive gauche par le quai du Mar-
ché-Neuf et le Pdnt-au-Double d'où, par la
rue Lagrange, elle gagne la rue Dante,
pour saluer au passage M. Loubet. De là, elle
suit les boulevards Saint-Germain et Saint-
Michel et arrive place du Panthéon où a lieu
la dislocation.
Le « Souvenir-Programme » vendu le long
du parcours au profit des victimes de Cour-
rières a obtenu un gros succès et la recette a
dû être fructueuse.
Il y a eu dans la journée 865 arrestations
dont très peu ont été maintenues.
L'AGITATION OUVRIÈRE
Les ouvriers ,jardiniers, maraîchers, fleu-
ristes, dont les syndicats respectifs forment
la « Fédération horticole », ont, dans un mee-
ting tenu hier soir à la Bourse du travail,
voté « la grève générale de tous les ouvriers
de la corporation ».
M. Jolliot, juge d'instruction, a ouvert
hier une enquête sur les incidents qui se sont
produits à l'usine d'électricité de Samt-Denis.
sept, ouvriers, qui ont détérioré les machines,
ont été arrêtés et inculpés d'infraction à l'ar-
ticle 448 du Code pénal. •
LE TERME D'AVRIL
II y a, au terme d'avril un grand nombre
de déménagements à Paris, et par la même
occasion de nombreuses modifications dans
les am.eublements, c'est aussi l'échéance
ou lés Parisiens commencent à se préoccuper
de la prochaine villégiature et des modi-
fications à apporter dans l'installation de leur
home estival. Pour toutes ces raisons, il est
utile do rappeler qu'il y a aux Grands Maga-
sins Dufayel une exposition de mobiliers
complets par milliers, au milieu desquels on
n'a, littéralement que l'embarras du choix.
De nombreuses attractions sont èn outre
offertes chaque jour aux visiteurs.
Y Jean de Paris.
DANS LES DÉPARTEMENTS
DOUBLE MEURTRE
̃~v~v«^ Etampes. M. Claude Bierne, âgé
de soixante-seize ans, rentier, ex-fabricant
de matrices et de moules pour le ruolz 'et
l'argenterie, et sa petite-nièce, Mme Coulon,
née Louise Quatrehomme, qui remplissait
auprès de ce vieillard hémiplégique les fonc-
tions de gouvernante, avaient été assassinés
à coups de couteau, dans leur maison de
Milly, dimanche, entre huit et neuf heures du
soir. Le chien n'avait pas aboyé et il n'y avait
pas trace de vol.
On constata le double meurtre hier matin
seulement. Son auteur présumé a été arrêté
aujourd'hui c'est le mari (le troisième mari)
de Mme Coulon, l'une des victimes.
En 1904, les Coulon étaient venus habiter
avec leur oncle; mais les deux hommes:ne
vivaient pas en bonne intelligence. Ou se
sépara. Les Coulon se retirèrent à Biennes,
près de Montereau, où ils possédaient quel-
que bien, et le vieillard prit une gouver-
nante, Mlle Marguerite Nardon. Puis celle-ci
tomba malade, et M. Bierne, il y a six se-
maines, décida sa petite-nièce à revenir,
seule cette fois, le soigner.
Selon toute probabilité, elle hériterait de
lui; mais elle menaçait son mari de divorcer,
et le Parquet est convaincu que cette menace
aura exaspéré Coulon et que, dans une 'dis-
cussion consécutive, il se sera laissé empor-
ter au meurtre. Probablement voit-on aussi
une relation entre la sûreté des coups de cou-
teau qui déterminèrent la mort et lé fait que
Coulon est, de son métier, étalier de bou-
cherie.
Ils restèrent un moment silencieux,
puis elle se tourna vers lui.
Vous ne voulez pas fumer? de-
manda-t-elle.
Tout dans la pièce-avait un aspect d'é-
nervante mollesse, la flamme adoucie
du feu, le parfum des roses, la voix
lente et caressante de Lillian. Loder se
sentait oppressé; il redressa les épaules
et s'assit plus droit sur le divan.
Non, dit-il, je n'ai pas envie de fu-
mer.
Lillian se rapprocha de lui.
Cher Jack, dit-elle d'une voix douce,
ne dites pas que vous êtes de mauvaise
humeur; ne dites pas que vous êtes.
obligé de remettre notre rendez-vous à
un autre jour.
Elle leva. les yeux sur lui et se mit à
rire légèrement.
Loder se sentait mal à l'aise.
Un autre silence suivit; Lillian atten-
dait qu'il répondît, puis elle fronça tout
à coup les sourcils et se leva du divan.
Comme beaucoup de gens indolents elle
était un peu obstinée, et maintenant
qu'elle avait assuré son triomphe sur
Chilcote, maintenant qu'elle avait affirmé
hautement son droit de disposer de lui,
son dessein primitif reprenait le dessus.
Qu'il se montrât froid ou intéressé,-in-
différent ou attentif, elle entendait se
servir de lui.
Elle s'approcha du feu et se tint un
instant immobile, les yeux fixés sur la
flamme; puis elle se retourna lentement
mais d'un air de décision vers le divan
et reprit sa place.
Jack, commença-t-elle gentiment,
il m'est arrivé une chose réellement
étonnante. J'ai besoin de vos lumières
pour l'éclaircir.
Il y eut un nouveau silence pendant
lequel Lillian se mit à lisser doucement
la broderie de soie qui garnissait sa robe.
Puis de nouveau elle leva les yeux sur
lui.
Vous ai-je jamais dit, reprit-elle
aussitôt, que j'avais eu une fois un acci-
dent de chemin de fer sur une drôle de
Il a été écroué, cet après-midi, à la prison
d'Etampes, où il continue à nier avoir eu
aucun rôle dans l'affaire.
DANS LES MILIEUX OUVRIERS
~« Angers. Devant la manufacture
du Mail, les grévistes avaient installé, ce
soir, des barricades. La gendarmerie chargea
à plusieurs reprises. A la suite de ces inci-
dents, M. Bessonneau a décidé de fermer ses
ateliers de ce fait, 4,000 ouvriers resteraient
sans travail.
Argus.
AVIS DIVBES
TjiNLEVEZ naturellement les points noirs de
votre nez avec l'ANTI-BOLBOS de la Par-
fumerie exotique,35,r.du 4-Septembre,qui res-
serrel'épiderme et luirend blancheur et netteté.
LES THÉÂTRES
Opéra municipal de Nice Manon
Lescaut, drame lyrique en quatre actes,
version française de M. Maurice Vaucaire,
musique de M. G. Puccini.
L'Opéra de Nice vient de représenter
une œuvre qui, connue et appréciée dé
longue date, était presque ignorée jus-
qu'ici en France. En vérité elle mérite
mieux que cette sorte d'indifférence qui
s'attachait à elle, et la représentation de
Nice vient très heureusement de la met-
tre en lumière.
M. Puccini est parmi les maîtres ita-
liens celui, sans contredit, qui s'est dé-
gagé le plus nettement de la contrainte
mélodique qui asservit presque ious ses
confrères. Je n'entends pas dire par là
qu'il s'est volontairement privé d'un des
plus merveilleux moyens d'expression
qui soient au théâtre: la mélodie; mais il
l'a soumise à une sorte d'examen, dont
le bon goût et la mise en oeuvre ingé-
nieuse sont les plus puissants facteurs.
La mélodie italienne, une des plus gra-
cieuses qui soient, une de celles en tous
cas qui ont sur le public l'action la plus
décisive, est chez lui comme assagie. Elle
s'éloigne de toute trivialité, et la façon
dont elle est présentée manifeste à la
fois d'un goût très sûr et d'une science
très raffinée.
Le sens du mouvement, qui se mani-
feste si intensément dans certaines pages
de la Pie de bohème, l'intensité drama-
tique qu'exprime parfois la Tosca, la
poésie qui se dégage abondamment de
miss Butterfly se retrouvent dans Manon
Lescaut.
Evidemment, la façon dont le carac-
tère de Manon nous est présenté, sa
mortquelque peu grandiloquente ne sont
pas sans nous surprendre mais le com-
positeur n'y est pour rien et M. Maurice
vaucaire qui nous a donné une fidèle et
très littéraire adaptation du livret, ne
pouvait que traduire la pensée de l'au-
teur.
De plus, le souvenir de la Maûon de
M. Massenet ne saurait s'effacer de la
mémoire. Il est difficile d'imaginer une
musique plus complètement appropriée
au sujet, que celle de la Manon française.
Quoi qu'on fasse, la poétique héroïne de
l'abbé Prévost se trouve immortalisée
par la partition du maître français et si
iSéduisante que soit en certaines"parties
la musique de M. Puccini, c'est pourtant
celle de M. Massenet qui chante toujours
dans nos mémoires.
L'invention, la grâce mélodique, le
charme irrésistible de notre Manon, en-
lèvent, quoi qu'on en ait, à sa sœur ca-
dette une partie de sa grâce et de sa
nouveauté.
Il serait puéril et injuste de négliger
les qualités de l'œuvre de M. Puccini:
elles sont éclatantes. Le premier acte,
consacré à la rencontre à Amiens, est d'un
remarquable mouvement, et le person-
nage de l'héroïne s'y dessine en traits
d'une grâce exquise. Le second se dé-
roule dans l'appartement de Manon.
L'amante de des Grieux s'occupe aux
soins de sa riche toilette, prend sa
leçon de danse, entend d'une oreille
distraite d'aimables madrigaux; c'est là
un prétexte à nombre de pastiches qui,
pour être agréablement traités, n'en sont
pas moins d'inutiles et trop nombreux
hors-d'œuvre. Le drame reprend avec
l'arrestation de Manon, scène courte et
violente et dont l'émotion a été assez mal
traduite par la véhémence exagérée des
interprètes.
Le troisième acte, le mieux venu, est
par contre rempli de beauté. Manon est
en prison; des Grieux et Lescaut veillent
petite ligne d'Italie, longtemps. avant de
vous connaître ?
Loder ne répondit pas, mais elle ne fit
pas attention a son silence.
Astrupp avait contracté une fièvre
à Florence, continua-t-elle, et je m'em-
pressais de fuir pour échapper à la con-
tagion, quand notre stupide petit train
dérailla près de Pistoria et se brisa dans
la catastrophe. Heureusement nous n'é-
tions qu'à un demi-mille d'un village, de
sorte que nous ne fûmes pas tout à fait
abandonnés. Le village était un vrai
joujou de village, et le logement ce qu'on
pouvait s'attendre à trouver dans une
Arche de Noé. Mais tout y était d'un pit-
toresque achevé. Je descendis dans la
petite auberge avec ma femme de cham-
bre et Coco; Coco était un petit chien
délicieux, un caniche blanc. J'avais la
folie des caniches cette année-là.
Elle se tut et regarda, pensive, dans
la direction du feu, puis lentement dans
celle de Loder.
Mais, pour en revenir à mon his-
toire, Jack, ce joujou de village avait sa
poupée! reprit-elle en riant doucement:
c'était un Anglais, et il fut le premier à
venir à mon secours après la catastro-
phe. Il était logé à l'auberge de l'Arche
de Noé, et après, cette première nuit, je.
il. nous. Elle hésitait. Oh! Jack, vous
ne parlerez donc pas ?
Elle avait baissé la voix, désappointée.
L'homme qui est indifférent au récit
d'une" histoire d'amour est le pire des
auditeurs.
-Je crois que cela ne vous intéresse
par, dit-elle d'un ton de reproche.
Pour la première fois Loder changea
de position; d'un mouvement brusque
il s'assit sur le devant de son siège.
Vous vous trompez, dit-il lente-
ment, cela m'intéresse profondément.
Elle le regarda de nouveau. Le ton de
sa voix la rassura, mais ses paroles la
laissaientdans l'incertitude. Chilcote était
parfois si empathique Avec une pointe
d'hésitation dans la voix, elle poursuivit
son récit
à la fenêtre de sa cellule tout est pré-
paré pour sa fuite les sentinelles sont
gagnées à la cause. Dans le petit jour qui
se lève, on perçoit au loin, dans le port,
le balancement du vaisseau qui doit em-
porter Manon en Amérique. Un bonheur
illusoire envahit l'âme des amants; déjà
ils chantent un avenir moins tragique,
lorsqu'un coup de fusil éclate le com-
plot est découvert: tous espoir est perdu.
C'est alors, parmi les propos ironiques ou
compatissants de la foule, le sinistre ap-
pel des condamnées. Manon paraît, et la
douleur de des Grieux s'exhale en phra-
ses émouvantes. Il supplie le comman-
dant du bord, qui se laisse toucher; et la
foule elle-même, gagnée à l'émotion,
s'apitoie sur le sort des amants malheu-
reux. C'en est fait, Manon et des Grieux
partiront ensemble vers ces contrées
dont la lointaine et mélancolique image
se mue pour eux en une douloureuse
consolation.
La musique qui commente cet acte est
d'une belle simplicité de longs et gra-
ves accords soulignent la tristesse de la
nuit qui décroît. Le souvenir de la grâce
et de la joie de Manon y passe fugitif et
rapide aucun éclat; seuls martelés, lour-
dement, les accords graves du début
et sur la fin de l'acte, toute la passion
éclate en un duo d'un lyrisme et d'une
éloquence que son contraste même avec
la simplicité du début rend encore plus
émouvants.
Le quatrième acte se passe en Amé-
rique Manon se meurt dons une lande
désolée aux bras de l'inconsolable des
Grieux. Cette fin, dont la poésie eût pu
être poignante, si elle eût été conforme
à la pensée de l'abbé Prévost, pèche par
là même qu'elle est l'opposé de cette
pensée. Manon qui fut jusque-là une
créature futile et charmante, se trans-
forme soudain en héroïne d'opéra et le
musicien, fidèle à son poète, a composé
un long duo dont les accents sont peut-
être plus mélodramatiques qu'il ne con-
viendrait.
Une des qualités les plus rares de cette
intéressante partition, est avec une in-
tention mélodique assez pure et un très
grand sens du mouvement, une écriture
harmonique souvent charmante et une
instrumentation d'une très heureuse per-
sonnalité.
L'Opéra de Nice qui a fait, en représen-
tant ManonLescaut,un très louable essai
de décentralisation, a monté l'œuvre avec
soin. Les deux rôles principaux étaient
tenus par Mlle Charlotte Wyns et par
M. Constantino. Le personnage de Manon
a permis à Mlle Wyns de déployer les
ressources de sa jolie voix et de sa
science scénique. Quant à M. Constan-
tino qui possède à Nice de très grands
admirateurs, si son jeu n'est ni très
varié ni très subtil, il a du moins prodi-
gué généreusement les éclats d'une voix
facile et d'un joli timbre. @
) M. Dutilloy a dessiné d'une façon très
'personnelle le personnage de Lescaut.
1 Les décors sont charmants et la mise
sen scène, particulièrement celle du pre-
jmier et du troisième acte, fort bien
îréglée.
•? L'orchestre a consciencieusement in-
terprété la partition de M. Puccini mais
j'imagine que le troisième acte eût at-
teint tout son effet, si le début et la fin
.eussent été plus complètement différen-
cibs par des jeux de sonorité plus minu-
tieusement ménagés. `
Le succès dé Manon Lescaut a été très
vif, et l'auteur, longuement acclamé, a
dû paraître après chaque acte devant un
public enthousiaste.
Robert Brussel.
COURRIER DES THEATRES
Ce soir
A l'Opéra, à 8 h. 1/4, Faust (Mlle Vix,
MM. Delmas et Muratore).
A la Comédie-Française, à'8 h. 1/2, le
Demi-Monde (Mlle Cécile Sorel).
-r A l'Opéra-Comique, à 8 h. 1/4, Mireille
(Mme Vàllandri, MM. de Poumaytac, Du-
franne, Mme Cocyte, M. Vieuille.)
A l'Odéon, à 8 h. 1/2, Glatigny.
Au théâtre Antoine, à 8 h. 3/4, dernières
de Vieil Heidelberg (MM. Antome, Clerget,
Signoret, Maupré, Mlle Sylvie, etc., etc.).
A la Renaissance, à 8 h. 3/4, Pécheresse
(Mmes Marthe Brandès, Juliette Margel,
Jenny Rose, MM. Lucien Guitry, Gémier,
Arquillière, H. Rousselle).
Aux Capucines, à 9 heures,pour les re-
présentations de Mmes Germaine Gallois,
Alice Bonheur, et de M. Charles Lamy
Pdris ou le Bon Juge (Mmes Germaine Gal;
Comme je vous le disais, il fut le
premier à nous trouver, à me trouver
devrais-je dire, car ma femme de cham-
bre était en train d'avoir une crise de
nerfs un peu plus loin dans son compar-
timent et Coco était perdu. Je me sou-
viens que la première chose que je fis
fut d'envoyer mon Anglais à la recher-
che du chien.
En dépit de sa situation, Loder trouva
moyen de sourire.
Réussit-il ? demanda-t-il sèchement.
S'il réussit? Oh oui, il réussit, dit-
elle en souriant aussi involontairement.
Le pauvre Coco était pris sous le four-
gon aux bagages et il eut beaucoup de
peine à l'en retirer. Lorsque tout fut ter-
miné,1 Coco se trouva sain et sauf et plus
vivant que jamais, mais l'Anglais avait
le doigt presque traversé. Coco était un
délicieux animal, mais il était très irri-
table et il avait la dent mauvaise
Elle se remit à rire avec une douce
gaieté.
Loder resta un instant silencieux, puis
il se mit aussi à rire, du rire bref et sar-
castique de Chilcote.
Et vous avez bandé sa blessure, je
suppose ? 9
Elle le regarda, à demi fâchée..
Nous étions tous les deux dans la
petite auberge, dit-elle, comme si toute
autre explication était superflue.
Puis elle changea de nouveau de ton.
Elle se rapprocha imperceptiblement de
lui et lui toucha la main droite. Sa main
gauche, qui était plus loin d'elle, se trou-
vait cachée à l'ombre des coussins.
Jack, dit-elle d'une voix caressante,
ce n'est pas pour vous raconter cette
vieille et stupide histoire que je vous ai
fait venir ici; c'est en réalité pour vous
en conter pour ainsi dire la suite.
Elle lui caressa doucement la main à
deux ou trois reprises:
Comme je vous l'ai dit, je rencontrai
cethomme, et nous. nous fîmes connais-
sance. Vous comprenez? Puis nous eû-
mes une querelle. une querelle très
grave. et je partis. Jéme suis souvenue
lois, Alice Bonheur, MM. Charles Lamy, Vic-
tor Henry, Mlles Renée Desprez, Jeanne Di-
rys) le Verrou (Mmes Martignac, Marie-
Louise Derval, M. Armand Bertnez) Un cas
de folie! `
Au théâtre du Grand-Guignol, à 9 heu-
res Baraterie, Une.Conquête, la Veuve, Dans
un fauteuil, le Cas de Mme Flan.
Au Théâtre-Royal, à 9 heures, le Minou,
Au plaisir, mesdames! revue (Mlle Debriège);
le Trait d'union (Mlles Lucy Gérard, Lan-
telme, Delphine Renot) la Leçon d'amour
(Mme Paulette Darty, M. Victor Boucher) la
Bonne Hôtelière Mme Régine Martial dans
ses œuvres.
A la Nouvelle-Comédie, 9 heures, pre-
mière représentation de AQ-HP, drame de
M. Andre de Lorde joué par Mlle Flore Ber-
geys, MM. Gouget, Schultz,'Hamelin.
LaDonation, pièce de M. Jean Larbel d'a-
près la nouvelle de M. Eugène Delard, jouée
par Mlle Flore Bergeys, MM. Gouget, Schultz,
Franck. Edgard l'est, comédie de M. Pierre
Montrel, jouée par Mmes Guéret; Mira Ceti,
Wilson, MM. Saint-Isles, Eynard, Franck.
Josiane Eymard, pièce do M. Jean Lorrain,
jouée par Mmes Flore Bergeys, Louise Willy,
Guéret, M. Schultz. La Victime ou l'affaire de
l'impasse des trois Paulette, comédie de MM.
Michel Carré et Marsèle, jouée par Mmes
Grandjean, Guéret, Mira Ceti, MM. Gouget,
Schultz, Saint-Isles, Eynard, Franck.
Au théâtre Déjazet, à 8 h- 1/2, II ?. ou
Elle ?. –9 h. 5, 583ê représentation de Tire-
au-flanc! (2« année).
La journée d'hier que devait tristement
terminer le pénible accident dont nos lec-
teurs ont lu plus haut le récit a été fort
brillante à la Comédie-Française. Monsieur
de Pourceaugnac joué en matinée avec
l'Avare, avait soulevé de longs éclats de rire
et des applaudissements sans fin. M. Coque-
lin cadet, notamment, s'était faitacclamer. Le
soir, le Fils naturel n'avait pas été moins
bien accueilli, et la recette de la journée dé-
passait 13,060 francs. o'
̃
Les spectacles de dimanche, de lundi et de
mardi, à l'Opéra-Comique, seront les sui-
vants
Dimanche, à 1 heure, matinée, laTraviata
Mlle Brozia, MM. Devriès, Delvoye), le Caïd
(Mlle Tiphaine, MM. Carbonne, Vieuille) le
soir, Carmen (Mmes Marié de l'Isle, Angèle
Pornot, M. Soubeyran (début), M. Allard)
lundi, à 8 h. 1/2, représentation populaire à
prix réduits avec location, Grisélidis (M. Fu-
gère, Mmes Vallandri, Tiphaine, MM. Du-
franne, Lucazeau) mardi, à 8 heures très
précises, première représentation d'Aphro-
dite.
Confirmons notre information d'hier rela-
tivement à Aphrodite. La répétition générale,
toujours.fixée à demain, commencera à une
heure très précise.̃
Il
A l'Odéon.
Glatigny, la très belle pièce de M. Catulle
Mendès, si amusante et si pathétique, s'était
pendant les premières représentations, en
raison de l'importance considérable de la
mise en scène, terminée un peu tard.
Glatigny, qui reçoit chaque soir des spec-
tateurs un accueil de plus en plus chaleu-
reux, finit maintenant avant minuit. Tel est
le succès de Glatigny devant le grand public
que, hier, malgré la fête et le soleil, la salle,
en matinée, était absolument pleine, et les
spectateurs, tout à fait emballés, ont fait l
relever deux fois le rideau.
L'abondance des matières nous oblige à ren-
voyer à demain le compte rendu de la pre-
mière représentation du Tasse, l'opéra de M.
Eugène d'Harcourt, au Théâtre royal d'An-
vers. Constatons cependant dès aujourd'hui
le très vif succès de cet ouvrage le public a
longuemei),t. applaudi l'œuvre il a rappelé
les interprètes et il a acclamé l'auteur.
Au théâtre Sarah-Bernhardt.
Dans le Frisson de l'Aigle, l'amusante
pièce de M..Paul Gavault, le rôle de l'impé-
ratrice Marie-Louise, vient d'être repris par
Mlle Gabrielle Bernard qui y a obtenu le
même succès que la créatrice, Mlle Maud
Gauthier. Ajoutons que M. André Calmettes
a engagé pour tenir le rôle- créé par Mlle
Yvonne de Rycke, une jeune artiste de talent,
Mlle Paule Evian, à qui le public a fait le
meilleur accueil. •
La matinée que nous avons'annoncée, hier,
au théâtre Antoine, pour après-demain di-
manche, sera irrévocablement la dernière de
Vieil Heidelberg.
Quelques renseignements sur l'Enfant chérie,
la pièce nouvelle de M. Romain Coolus, an-
noncée pour dimanche et lundi en répétition
générale et en première représentation au
Gymnase.
Très nouveau et non sans quelque audace,
le sujet est de plus extrêmement parisien. Est-
ce pour cela que Coolus a pour l'Enfant chêne
une prédilection marquée, au point qu'il en ou-
blie les Amants de Sazy, son très gros succès
au Gymnase; Petite Peste et Antoinette Sa-
brier, ses deux dernières pièces en vogue au
Vaudeville.
Le premier et le quatrième acte se passent
dans une élégante garçonnière de 1 avenue
Montaigne, un peu sens dessus dessous au
de lui un peu plus longtemps que je ne
me souviens de la plupart des gens.
c'était un de ces caractères déterminés
dont le souvenir se fixe dans l'esprit, et
le sien est resté dans ma mémoire pour
une double raison.
Elle leva de nouveau les yeux: ï v
Il y est resté parce que vous avez
contribué à l'y fixer. Vous savez combien
de fois j'ai mis mes-mains sur votre bou-
che en vous disant. que vos yeux me rap-
pelaient ceux de quelqu'un. Eh bien, ce
quelqu'un était mon Anglais. Mais il ne
faut pas que vous soyez jaloux: c'était
un être affreux et obstiné! tandis que
vous. mais vous savez bien ce que je
pense de vous.
Elle lui pressa la main.
Mais, pour en venir à la fin de mon
histoire, je n'ai jamais revu cet homme
depuis cette époque éloignée jusqu'à.
jusqu'à la soirée de Blanche
Elle parlait lentement, pour faire pro-
duire à ses paroles tout leur effet; puis
elle attendit pour jouir de sa surprise.
Le résultat ne fut pas tout à fait celui
qu'elle attendait. Loder ne dit rien, mais
d'un mouvement brusque il retira sa
main de la sienne..
-Vous n'êtes pas surpris ? demanda-
t-elle d'un ton d'aimable reproche.
Il tressaillit légèrement, comme s'il
était brusquement rappelé à la nécessité
du moment.
-Surpris? dit-il.- Pourquoi serais-je
surpris ? Une personne de plus ou de
moins à une réunion aussi nombreuse
n'a rien d'étonnant. D'ailleurs vous vous
attendiez bien à ce que cet homme re-
vînt tôt ou tard dans son pays. Pourquoi
serais-je surpris ?
Lillian se renversa voluptueusement
sur le dossier du divan.
Parce que, mon cher ami, dit-elle
doucement, cela est plus qu'une sur-
prise. c'est un mystère un de ces mys-
tères qui vous fascinent et qui n'arrivent
qu'une fois dans la vie. `
Loder ne bougea cas.
premier acte, le maître de la maison débar-
quant d'un voyage idyllique en Italie.
L'action du deuxième acte se déroule sur la
terrasse d'une villa à Saint-Germain, d'où
l'on aperçoit Marly avec son viaduc et sa
forêt. (Décor d'Amable.)
Le troisième acte transporte le spectateur
en Alsace dans un décor très pittoresque et
peint par M. Ronsin d'après des documents
scrupuleusement exacts. Le paysage que l'on
découvre existe véritablement; l'auteur, Ro-
main Coolus, en a rapporté des photographies
l'été dernier après un voyage en Alsace.
L'Enfant chérie servira de rentrée à M. Fé-
lix Huguenet que l'on n'a pas eu la bonne
fortune d'applaudir cet hiver. Il créera un
rôle de papa encore très jeune en ce sens qu'il
a la soixantaine fort alerte. Ce rôle qui n'a
pas moins de 1,800 lignes est écrasant. Il
montrera M. Huguenet sous tous les aspects
de son beau talent; son fin comique s'alliera
à l'expression de toute une gamme de senti-
ments tour à tour la colère, la douleur, la
bonté. Au dernier acte, il fera verser de douces
larmes.
A côté de lui,Mme Marthe Régnier fera ses
débuts au Gymnase. La jeune et charmante
comédienne, que l'on applaudissait récem-
ment encore dans Jeunesse à l'Odéon, est en-
thousiamée de son rôle de l'Enfant chérie
elle y sera, nous dit-on, superbe. M. Dumàny,
le créateur de la Rafale,, contribuera aussi à
rendre l'interprétation tout à fait supérieure.
Ce trio hors de pair est complété par M.v
Henry Burguet, le précieux collaborateur .de.
M. Franck qui, par dévouement pour la mai-
son et pour donner à l'interprétation son
maximum d'éclat, s'est chargé d'un rôle de
second plan. Une nouvelle pensionnaire du
Gymnase, Mlle Madeleine Dolley, débutera
dans la pièce.
Détail qui a son importance la pièce ne,
comporte pas moins de douze toilettes qui-
rivaliseront d'élégance, de «chic» et d'éclat.
Et cela achèvera de faire de l'Enfant chérie,
une pièce plus que parisienne boulevardière.
Nous recevons de M. Alphonse Franck la
lettre suivante
Mon cher Basset,
La mi-carême a fait une victime, une seule je
l'espère, tout en regrettant que ce soit moi.
J'attendais aujourd'hui, à deux heures, le décor
auquel il était survenu un accident. L'encombre-
ment du boulevard et la consigne implacable
donnée à nos gardiens de la paix n'ont permis au
chariot d'aborder le théâtre qu'à huit heures du
soir I Résultat un nouveau retard de vingt-
quatre heures.
Je fixe donc à lundi la première représenta-
tion de t'Enfant chérie, et la répétition générale
à dimanche soir.
Je regrette infiniment de déranger la critique
le jour consacré au repos dominical et je lui
présente mes excuses.
Elle voudra bien les agréer, d'autant qu'elle
avait après-demain samedi déjà deux répétitions
générales, l'une à l'Opéra-Comique et 1 autre au
Palais-Royal.
Elle sait, au surplus, que j'ai le plus vif désir,
après cela, de ne plus la déranger avant la sai-
son prochaine. Elle me saura gré, j'en suis sûr
de cette excellente intention.
Bien cordialement à vous.
Alphonse Franck.'
Autour de la Renaissance.
M. Henry Bernstein a lu hier, chez M.
Guitry, la Griffe, sa pièce nouvelle, à Mmes
Marthe Brandôs, Henriette Roggers,'MM. Lu-
cien Guitry, Gémier, Arquillière, Rousselle, `
Coquet, etc.
Sous l'épaulette, le beau drame de M. Ar-
thur Bernôde, si chaleureusement applaudi •
chaque soir à la Porte.-Saint-Martin-r.pa4v,
rait in-extenso dans V Illustration de cette se-
maine.
Les Mousquetaires au couvent ont reparu
hier seulement, à la suite d'une indisposition
de M. Fugère, sur l'affiche des Boufles-Pari-
siens.
Le succès a été considérable pour l'œuvre <~
et pour les interprètes.
N
Notre confrère M. Franc-Nohain fera demain
samedi, à quatre heures, à l'Ecole des Hautes
Etudes sociales, rue de la Sorbonne, une con-
férenoe sur les « Revues de fin d'année ».
Nous allons voir, pendant une quinzaine
les reines de la mi-carême, dans la plupart
des théâtres de Paris. Elles ont tenu à corn-
mencer leur tournée par l'Athénée. Cinq lo-
ges ont été retenues pour ce soir à ce théâtre,
et les reines et leur cortège y pourront tout à
leur aise applaudir Iriplepatte, ses excel- o
lents, interprètes et, dans le nombre, deux sou-
veraines longtemps fêtées, Mmes Augustine ̃•>
Leriche et Duluc, toatesles deux naguère rei-.
nes de l'amusant royaume de Corcinie.
.§– *̃
Aux Capucines, demain 24 mars, à.deux
heures, première représentation anglaise des
<• matinées Berlitz », au profit des victimes
de Courrières, .4 Sensé of Humour, a play in
three acts. La pièce sera interprétée par le r
grand acteur Aubrey Smith et les artistes des 7.
principaux théâtres de Londres.
Madge Lessing apportera aussi la précieuse
collaboration de son beau talent à cette œu-
vre de charité et se fera entendre in selec- i(
tions from her repertoire.
Devant le très grand succès remporté par."
les trois premières matinées qu'il a données
au théâtre des Capucines, M. Pougaud a dé-t
cidé d'inaugurer une nouvelle série de trois
matinées encore, avec sa pimpante revue .'X
-Il faut vous expliquer, dit-il tran-v.
quillement.
Lillian sourit
C'est précisément ce que j'eveux'
faire. Comme j'étais dans ma tente le ̃
soir de la réception de Blanche, un ™
homme vint pour subir l'épreuve. de la'
boule de cristal. Il se. présenta comme
n'importe qui et posa ses mains, sur- la,
table. Il avait des mains très fines,
comme. oui, presque comme les vôtres,
et il portait deux bagues à l'annulaire de •
la main gauche, une grosse bague à eu-
chet et une alliance en or.
Loder déplaça sa main d'un mouve-.
ment imperceptible jusqu'à ce qu'elle fût
complètement cachée par les coussins.
Les paroles de Lillian ne lui causaient»-
aucune surprise; c'est à peine s'il en-
éprouvait une légère émotion. Il sentait
maintenant qu'il s'y était attendu, qu'il
les attendait inconsciemment depuis
longtemps.
-Je lui demandai d'ôter ses bagues.
continua-t-elle, et justement il hésita un
instant. j'eus la sensation qu'il hésitait.
puis il parut en prendre son parti et jl^
les retira. Il les retira, Jack, et devinez
ce que je vis! Devinez!
Pour la première fois Loder recula
involontairement dans le coin du divan.
Je ne devine jamais! dit-il brusque-
ment.
Alors je vais vous le dire. Ces
mains étaient les mains de mon Anglais!
Les bagues cachaient la cicatrice laissée"
par les dents de Coco c'était la même
cicatrice que j'avais bandée une douzaine
de fois, que j'avais vue se fermer avant
mon départ de Santasalare.
-Et vous. que fites-vous? dit Loder'
qui éprouvait une difficulté et un malaisé;;
singuliers à parler.
Ah c'est là le point important;
c'est là que je fus stupide et que je com-
mis une bévue. J'aurais dû lui parler sur'
le moment, mais je n'en fis rien. Vous;
savez comme on est hésitant quelque-
fois. Après, il était trop tard.
(A suivre.) Katherine Cecil Thurston. ̃•
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