Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1927-09-08
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 08 septembre 1927 08 septembre 1927
Description : 1927/09/08 (A21,N5359). 1927/09/08 (A21,N5359).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7651219b
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 25/05/2015
21* ANNEE. — N° 5359. 0 LE NUMÉRO: CINQUANTE CENTIMES 51, rue saint-Georges. -i. Tél.: Trudaïne 70-00, 01, 03 JEUDI 8 SEPTEMBRE 1927.
» Gabriel ALPHAUD
Directeur
.Une ample comédie à cent actes divers
Et dont la scène est l'univers
(LA FONTAINE.)
Tout lecteur de COMOEDIA
contractant ou renouvelant
• dès aujourd'hui
UN ABONNEMENT D'UN AN
aura droit à l'une des
PRIMES MAGNIFIQUES
dont nous donnerons bientôt le détail
Tout lecteur cle COMOEDIA
contractant ou renouvelant
dès aujourd'hui
UN ABONNEMENT D'UN AN
aura droit à rune des
PRIMES MAGNIfIQUES
dont nous donneront bientôt le détail
les mille et une nuits de l'Inde (1) 1
La nuit de Shah-Jahan
Perle de votre race, Shah- J ahan, les
tlUlts d'Agra et de Delhi sont vôtres;
piques miniatures immortalisent votre
visage oriental; sourcils nets, yeux
ru sés l, ,. t
rilsés, l èvres étroites qui s'entr'ouvrent
^°ur leur plaisir, ou se resserrent pour
::>;Iger leur volonté; la gloire de vos
^quêtes s'efface dans les ruines des
ks mortes, mais vos trois cris d'or-
jfteil éclatent dans la splendeur imma-
tI ee des marbres : Tadj-Mahal- Tour
u Jasmin — Tombe de Jeh an-Ara.
Le Tadj.
p On jardin, un caravansérail, une
d (Jrte de granit rouge, un long bassin
d (Jnt les ifs s'alignent dans l'axe des
eux voûtes; le mausolée : marbre blanr
et gris, que minuit rend plus inaccessi-
e qu'un mirage; nulle fenêtre, seule-
41ent l'ogive d'une porte, ourlée d'oro-
fes; un ensemble se reflète dans une
j^cette, et le Tadj-Mahal se résume
r a.ns chaque ornement; entrelacés, les
;'s florentins, et les lotus asiatiques,
fissent comme des plaintes jusqu'au
apiteau qui les couronne; les inscrip-
°ns arabes qui ceignent les portes écla-
(t}t comme des sanglots, et ces fleurs
tent comme des sang l ots, et ces f l eurs
c 'Selées au pied de parois hautaines rap-
?^ent le souvenir de Shah- J ahan, com-
e des pleureuses précédant un beau
davre.
'J'le lanterne maure éblouit le cénota-
e d'Ardjmande Banou, femme du
q rand Mogol; nous croyons que le Tadj
oUt. édifié pour elle. Mais les poètes
Q r-c'dentatix- ont tort, Shah-Jahan; si
vUs aviez pu prévoir telle légende, vous
vUrlez souri cruellement. Pour régner,
v f
t~ égorgeâtes vos frères, vos COUSInS
gêUS les beaux mâles de votre sang qui
paient votre gloire; pour payer les
mille gemmes aux noms précieux,
I{:l étoilent les voûtes de vos palais, et
t'lle t encore derrière le ruisselle-
nt d'eau de vos fontaines; pour orner
celles tiares le front de vos 300 fa-
ites, vous ordonnâtes d'atroces guer-
de pillage, n'exigeant, il est vrai,
de rançon personnelle, que la fille
tOI vaincu.
Vet 1 d ,..
tF't tre lourde épouse ne méritait pas
b e, sa seule gloire fut de vous
fu °!r inspiré le goût des somptuosités
(tlnebres, et c'est pourquoi, durant sept
tt l entouré d'artistes arabes, florentins
tt ïr;ânçais ous avez ordonné le Tad)
l'tli e cénotaphe d'Ardjmande Banou, si
t' si humble, qu'il semble une ex-
tt¡¡e, est placé dans l'axe d'ogives qui
Vent comme un écho le bassin étroit,
■/^u'au portail définitif où la vie re-
ence - à côté le vôtre, Shah- J ahan
v^riI*e, et sans lignes égales; il détruit
^°ntairement l'harmonie du sépulcre,
re osez, abrité du jour, et veillé
e esclave.
Voit" Comodia des 23, 29 août et Ie* septembre.
La Tour du Jasmin.
Le fort d'Agra fut la cité impériale
des Grands Mogols, Shah- J ahan sut le
fortifier et l'embellir; l'art musulman
qui exclut tout art visuel, y simplifie
la Renaissance.
Le marbre fut la pierre préférée du
Grand Mogol; le marbre qui se ciselle,
se perce, s'ouvrage comme une fine den-
telle, et qui, mieux que l'or, donne
l'éclat d'yeux vivants aux pierres pré-
cieuses qui s'enchâssent en lui : lapis,
ambre, ou glauques émeraudes. La Tour
du Jasmin domine la ville impériale,
kiosque léger, ouvert aux quatre hori-
zons, où Shah-J ahan reposait durant ces
nuits enflammées d'Asie qui. épuisent
mieux que le soleil; ce prince raffiné
apercevait, à sa gauche, un triste jardin
et d'humbles tombes ornées de gazon,
« le cimetière des Reines » et, en face
de lui, l'infranchissable fossé où ses ti-
gres et ses éléphants se battaient.
Quelques années plus tard, vaincu
par un fils, et captif dans son palais,
Shah-Jahan dormit encore dans la Tour
du Jasmin.
La Tombe de Shah-Jahan.
Les environs de Delhi : un portail
maure franchi, voici, mêlées selon la no-
ble coutume musulmane, les tombes et
les maisons des vivants. Le jour, de
petits enfants, en cafetans dorés, bleus
et verts, doivent s'asseoir, rire ou dan-
ser, autour de dalles, où reposent les
ossements vénérés, de grands saints et
de grands poètes.
Mais les petites demeures arabes sont
closes; la lune blêmit les marbres, et à
chaque -mosaïque suspend une paillette
livide; notre guide s'incline devant une
tombe, et y cueille une de ces fleurs plus
frêle qu'un brin d'herbe, que les indi-
gènes nomment si ioliment « le miel
rose >>.
D'Agra à Delhi, ces somptuosités rap-
pellent votre règle de despote et d'ar-
tiste; ici encore il faut se souvenir de
vous. Shah-J ahan. Cette dalle, entourée
d'herbe et de fleurs folles, recouvre le
corps de la morte vénérée des Hindous :
Dian Ahra; votre fille; sans doute, vous
sûtes éveiller en elle. ce trouble amour
sans désir, que tant de pères qui savent
vieillir avec charme, inspirent à une en-
f an Elle partagea votre captivité et.
perdue d'amour cérébral, mourut avec
vous.
Sept villes s'édifièrent et furent dé-
truites sur la terre sacrée ; des ruines
admirables s'écroulent pierre à pierre;
leur granit s'effrite sur le gazon de jar-
dins anglais, entretenus avec respect
comme des tombes d'aïeules aimées; le
'lierre drape son linceul autour des cha-
piteaux, et les arbres mauves, sous la
lune, pleurent les splendeurs de Shah-
Jahan.
Simone-Roger Joisson.
Les entretiens de M. Emile Kabre
avec Gabriele d'Annunzio
~q Comédie-Française, pieuse gardienne
:c,rc belles et nobles traditions qui font sa
<':CLe et dont une des premières est de
t, ercher pour les présenter, les chefs-d'œu-
n s0^Ue's qu'ils soient, se devait d'inscrire
répertoire une œu\re du grand poète
1 riele d'Annunzio.
de e Puissant et lyrique auteur du Martyr
Sébastien, par l'entremise de son
eteur et adaptateur, M. Doderet, fit
\C,tr!. 1) y a quelque temps déjà, devant le
¡te de lecture de la- Comédie-Française,
Gabriele d'Annunzio
QI¡
J e a:-11
eil/I 00X1 vfe. nouvelle, La Torche sous le bOH-
{j ivii fut acceptée à l'unanimité.
j'ç i, mieux connaître les pensées intimes
-auteur et mieux sentir l'atmosphère qu'il
s' a donner à son œuvre, M. Emile Fa-
, est rendu à Gardone auprès du grand
11 et l'a en quelque sorte « interviewé Il.
)| e,taxt donc juste que nous lui fassions
'- a. son tour les mêmes tourments.
H-il la Comédie-Française, nous
iloecl, 5 doit monter l'hiver prochain La
°rcJ le. sous le boisseau et, comme nous igno-
%s Cabriele d'Annunzio pourrait assister
j'Ujc rÇP^étions, j'ai pensé qu'il était utile de
k r, car la mise en scène de ce très beau
'Clilà,e soulevait des questions assez délicates.
pourquoi je suis allé à Gardone.
j, Annunzio y habite toujours toute l'an-
0
t Q 1. Il a trouvé là une maison de pay-
pOç q "u !l a achetée, puis agrandie, transfor-
1, tiQ et qui est devenue maintenant, sous
~t des. c'e Vittorial », au milieu des fleurs
arres magnifiques, une sorte de rési-
Rrirç ron-a l e, où l'hospitalité est celle des
~~j où l'hospitalité est celle des
«iHcl15 SeIgneurs de jadis.
v^s ce n'est pas seulement l'extérieur
lçUr lttonal » qu'il faut \oir, c'est l'inté-
lue le poète a meublé, arrangé à son
t 1 tient beaucoup à son talent de tapis-
sier.) et dont il a fait une sorte de palais
des mille et une nuits. Les objets les plus
divers et les plus rares sont là, accumulés :
des orfèvreries, des étoffes, des pierres
sculptées, ces bouddhas et des saints, des
tableaux qu'il a acquis ou qui lui ont été
offerts par des admirateurs ou des gouver-
nements étrangers, enfin des souvenirs de
guerre : par exemple l'hélice de l'avion
avec lequel le poète fit son raid sur Vienne,
etc., enfin des volumes, plus de cinquante
mille volumes dans les éditions les plus
rares et notamment nos vieux poètes.
■— Le poète vous a-t-il parlé de la France ?
— A\ec la plus grande admiration et la
plus réelle sympathie. Il appelle toujours
notre pays « sa seconde patrie » : « Quelle
plus grande preuve d'amour, m'a-t,il dit,
peut-on donner à une nation, que d'écrire
dans sa langue ? C'est ce que j'ai fait à
plusieurs reprises en écrivant certains de mes
drames en français. »
- La popularité de d'Annunzio est-elle
toujours aussi grande en Italie ?
— Toujours. J'en ai éu une preuve sensi-
ble le jour où nous sommes partis à bord
du contre-torpil leur qu'il commandait pen-
dant la guerre et qu'il a fait transporter
sur le lac de Gardone, pour aller attendre
à Riva le ministre de l'Instructior.: publique
d'Italie, M. Fedele. A peine le bateau arri-
vait-il en vue de Riva que d'Annunzio, re-
connu de loin par les promeneurs, fut aussi-
tôt acclamé, et, descendu à terre, fut escorté
par toute la population de Riva qui ne
cessait de pousser en l'honneur de l'écrivain
des « Eia, Eia, Alala ! ». J
cc Malgré cette popularité et malgré sa
gloire mondiale, d'Annunzio est resté le plus
simple, le plus courtois et le plus accueil-
lant des hommes.
— Et qu'avez-vous dit à propos de La
Torche sous le boisseau ?
— Vous savez que l'œuvre est écrite en
vers. Dans son excellente et si fidèle traduc-
tion, M. Doderet a rendu de très heureuse
façon le texte italien, mais comme là tra-
duction est en prose fallait-il essayer de
retrouver, dans la diction, le rythme du
vers italien- ? Ne valait-il pas mieux, au
contraire, jouer l'œuvre directement, sim-
plement sans s'efforcer, et peut-être en vain,
de retrouver le rythme et la cadence de
l'original ? Le poète s'est prononcé de façon
catégorique : il demande que sa pièce soit
jouée humainement.
« Pour la mise en scène Gabriele d'An-
nunzio a bien voulu approuver tout le tra-
vail que j'avais préparé. Vous savez que
j'arrive toujours à l'avant-scène avec une
mise en scène écrite. C'est ainsi, par exem-
ple, que j'avais procédé pour Lorenzaccio.
« Le poète m'a dit sa très grande joie d'être
ioué à la Comédie-Française eL il m a promis
de venir aux dernières répétitions et d'assis-
ter à la répétition générale.
« J'espère, nous dit M. Emile Fabre en
terminant, que ce sera là une belle journée
pour le poète, pour la Comédie-Française et
pour l'amitié franco-italienne. »
Asté d'Espatia.
Albert Durer. — « La Grande Fortune »
La ville de Nuremberg, patrie d'Albert Durer, le génial Peintre des Quatre Tem-
péraments, le subtil graveur de La Melancholia et de La Grande Fortune, que nous
reproduisons ci-dessus, a décidé qu'en commémoration du quatrième centenaire de sa
mort, Vannée 1928 serait appelée, dans tous ses actes publics — et, sans doute, dans
toute VAllemagne, — l'Année Albert Durer (en allemand i « das Durerjahr »). De grandes
fêtes seront célébrées et toutes les Publications allemandes contiendront de nombreuses
études sur la vie et les œuvres de Dürer.
1 Une exposition lévéJatrjce l
Des Poètes par milliers
chantent en Amérique.
Ce que l'on accorde le plus communément
aux Américains, c'est l'esprit pratique, le
sens de l'organisation, le souci des affaires,
le business, le trust.
Tout cela est bien loin de la poésie. Aussi
n'est-ce point sans curiosité que je suis allé
rue de l'Elysée, où la bibliothèque améri-
caine à Paris vient d'installer une exposi-
tion de poésie.
Une exposition de poésie ? L'idée, à elle
seule, est ingénieuse, n'est-ce pas, et un
peu inattendue chez des Américains.
Inattendue ? Pourquoi ? Vous imaginez-
vous qu'il y ait si peu de poètes de 1 autre
côté de l'Atlantique ? A l'heure où l'Ameri-
can Légion va être notre hôte, il n'était pas
sans intérêt de s'en rendre compte.
Me voici dans la petite salle étroite. De
hauts rayons emplis de livres. Aux murs,
des portraits de poètes r Lew Sarett, Edgar
Lee Masters, James Branch Cahell, Edwin
Markham, etc. Tout est classé, étiqueté :
anthologies, poésie de terroir, poètes hu-
moristes, poètes enfants, poètes lyriques,
poètes didactiques, biographies et biblio-
graphies, essais critiques.
Sur une table, des revues de poésie, aux-
quelles ne collaborent que des jeunes :
Conrad Aiken, Willer Bynner. Kenneth
Fearing.
Des articles de journaux, coupés et collés
sur de grands cartons, renseignent sur les
derniers échos de la vie littéraire.
Et tout cela est en ordre, soigneusement
groupé. Et c'est tout un panorama de la
poésie américaine que j'ai sous les yeux.
Un gros volume attire mon regard. C'est
une anthologie de plus de 4.000 pages, con-
sacrée à la poésie américaine : The home
book of verses, par M. Burton E. Stevenson.
Qui est-ce ce M. Burton E. Stevenson ?
Précisément le directeur de la bibliothèque
américaine. Qui, mieux que lui, pourrait,
m'entretenir des poètes ae son pays ? Si
j'avais la chance de le joindre.
Cette chance, je l'ai
M. Burton Stevenson est un hommp cal-
me, flegmatique ; mais on devine, derrière
le pince-nez aux verres arrondis, un regard
très vif,' pétillant de vie et d'enthousiasme.
Des cheveux d'argent s'écrasent sur un
front large. Shake-hand. M. Stevenson
croise ses jambes, et parle :
— Jamais la poésie n'eut, en Amérique,
autant -4e vogue qu'aujourd'hui. Le début
de ce siècle marque un ralentissement dans
la production lyrique. Alors qu'en 1850
nous avions tous nos romantiques, nous ne
comptions plus, en 1900, que de rares poè-
tes. Mais nous nous sommes bien rattrappés
depuis !
« Des poètes ? Mais l'Amérique en compte
plus que la France ! Et des poètes d'une
réelle valeur : Vachel Lindsay, un de ceux
que je préfère, qui fut pauvre comme votre
Verlaine, qui fut quasi vagabond, et écrivit
des pages émouvantes, d'une sensibilité
neuve, profonde et humaine, comme Le
Rossignol chinois ; Edwin Arlington Robin-
son, qui, avec La Ville au bord du fleuve,
Les Enfants de la Nuit, nous ravit par son
âme musicale à la fois et tumultueuse ; Cari
Sandburg, l'auteur de Cor nhuskers.
Nous avons aussi des poétesses, Edna
Saint Vincent Millay, dont la Renasçence a,
en Amérique, la vogue que Le Cœur innom-
brable de la comtesse de Noailles a en
France ; Lizette Woodworth Reese, qui fut
professeur pendant 45 ans, et met tous les
parfums des fleurs, non seulement dans ses
vers, mais dans les titres de ses livres :
Une Branche de Mai, Une Poignée de La-
vande ; Amy Lowell aussi, qui écrivait sur-
tout en vers libres, et qui est morte il y
a deux ans, léguant sa fortune aux jeunes
poètes d'avenir, pour permettre chaque an-
née à deux ou trois d'entre eux de venir
à Paris, dont l'atmosphère est toute de
poésie.
« Amy Lowell fut critique aussi. Elle a
fait un essai sur John Keats, elle a publié
en 1915 une étude sur six poètes français et,
en 1917, un livre sur les tendances de la
poésie moderne en Amérique. s
Un livre dé cette Amy Lowell est juste-
ment sur la table de M. Stevenson. Je le
feuillette, et j'y trouve ce poème que je tra-
duis de mémoire :
Je me préparerai un cocktail d'étoiles,
De grandes étoiles aux couleurs vivés.
Je les arracherai du ciel,
Et les mélangerai dans une coupe d'argent.
Et, avant de boire,
J'y verserai, pour que la boisson soit "gla.cée,
Toute la froideur de ton amour.
N'est-ce pas moderne, subtil, et délicieu*
sement féminin ?
Mais M. Burton Stevenson poursuit : ,
— Vous voyez que la poésie est à l'hon-
neur ! Songez qu'il parafa en Amérique plus
de mille volumes de vers par an. Car les
poètes trouvent des éditeurs ! Et les librai-
res vendent autant les poèmes que les ro-
mans 1
« En Europe, quand on a nommé Fehi-
more Cooper et Edgar Poe, on croit avoir
tout dit sur notre littérature. Quelle erreur,
ou quel retard ! La vie d'un pays ne se me-
sure pas au passé, mais au présent. Et
c'est pour cela que nous sommes, justement
fiers de cet essor poétique. Et c'est pour le
prouver que j'ai organisé cette exposition.
Le théâtre aura son tour, le mois prochain
sans doute ; puis l'histoire, le voyage, etc.
« C'est une idée fausse de croire que les
Américains ne ., peuvent être que des busi-
nessmen. Il y en a sans doute plus que des
poètes. Mais. et en France?
« L'essentiel est que le goût de la poésie
soit aussi vivace, aussi caractérisé. Car le
goût de la poésie crée les poètes, comme le
goût de la peinture crée les peintres. Le
besoin crée l'organe !
« Il y, aurait bien d'autres poètes à ci-
ter/Il y en aurait trop. Mille noms me vien-
nent aux lèvres:* Alan Seeger, que vous
connaissez bien, Robert Frest, Erza Pound,
qui vient de publier ses Poèmes choisis et
prépare, pour dans quelque dix ans, un
grand poème héroïque en trente chants.
Erza Pound a beaucoup vécu en France, à
Paris surtout. Actuellement, il est en Ita-
lie. Mais je ne saurais, en quelques ins-
tants, vous nommer tout le monde. Je suis
sûr de faire de graves omissions. Mais vous
pouvez voir quand même, n'est-ce pas, par
ce succinct exposé, que la poésie a sa place
chez nous, et non la moindre. »
C'est sur ces paroles, pleines d'une juste
fierté, que j'ai quitté M. Stevenson. En re-
passant dans la salle d'exposition, j'ai ou-
vert un livre, un petit livre relié en toile
verte, et j'y ai trouvé cette phrase qui peut
servir d'épilogue à ma visite :
c Tant que les hommes savent chanter
leurs rêves, tant que les hommes savent
chanter leur âme, les peuples sont vivants
et libres ! s
Pierre Lagarde.
Ld-loùr penchée de Saint-Moritz
Au cours de l'assemblée communale, à
l'ordre du jour de laquelle figurait la ques-
tion de la démolition de la tour penchée,
une vive discussion s'est engagée. Tous les
orateurs se sont prononcés pour le maintien
de la tour. Une motion tendant au renvoi de
la question aux autorités municipales a été
prise à la quasi-unanimité.
L'église de Saint-Moritz existait déjà dans
la seconde moitié du XIIe siècle et fut réno-
vée en 1573. A cette occasion, la tour fut
légèrement élevée et elle reçut la forme
qu'on lui connaît encore aujourd'hui. L'église
fut démolie en 1893, mais la tour fut main-
tenue. Elle a 33 mètres de haut. Elle se
trouve sur la région des éboulements préhis-
toriques et son inclinaison ne cesse d'aug-
menter, tout en restant. cependant dans des
proportions modestes.
1 Porte de Versailles
L'exposition Ces Fondeurs
de l'Art et de l'Industrie
Hier, au P-arc des Expositions, l'Exposi-
tion internationale de fonderie a ouvert offi-
ciellement ses portes. Il semblerait, au pre,
mier abord, que seuls les techniciens y puis
sent trouver quelque plaisir, mais si d'aven-
tyre il vous advient de suivre mon exemple,
"ous ne regretterez pas votre visite.
Vous observerez avec joie que l'Exposition
des Arts décoratifs, si tardive qu'elle ait
été, porte ses fruits et qu'un plus grand soin
règne aujourd'hui, là, où d'ordinaire nous
étions habitués à nous contenter de rensei-
gnements techniques et souvent fort mal pré-
sentés.
On souhaiterait pourtant un effort plus
« actuel » de la part des fonderies U'art. 11
en est toutefois comme Barbedienne qui,
avec des sculpteurs nouveaux., comme La
femme accroupie de Cormier, le Carpentier
de Landowski et UHercule terrassant le Cen-
taure de Wlerich, marque ce désir, cette
orientation nouvelle et fait admirer des pie-
ces de choix.
Dès l'entrée, l'attention des visiteurs est
amusée et séduite par le travail de la fonte.
Elle ruisselle d'un four, filet de feu, liquide
pesant. Recueillie dans des seaux, elle est
immédiatement moulée devant vous et, en
souvenir, les ouvriers vous remettent des
cendriers.
Chemin faisant, en plein air ou dans les
stands, luisant sous la lumière grise et re-
flétant les multiples nuances du jour sur
les immenses verrières, le métal étincelle,
s'arrondit, s'étire, se lamine. Ici, ce sont
des pièces d'automobile aux arêtes vives,
des gargouilles, des bornes-fontaines, des ro-
binets, des vannes, des crépines, des ven-
touses, des siphons, des bondes de fond, la
des jets de sable noir croulent en cascades
de la bouche sifflante d'une machine avant
d'être livrés aux marteaux compresseurs.
De colonnes à laminoirs, nous passons à
des cylindres, à des carcasses de dynamos,
à des disques dentés, à des engrenages, à
des galets, à des cubilots.
Du cuivre, du fer, de l'acier, du bronze,
de la fonte, de l'aluminium.
- Au bruit des moteurs, vous ne vous las-
Se]; pas de suivre de box en box le dessin
multiforme des .machines.
Ici, j'attends les enfants : une maison
française des plus populaires. a exposé la
réduction « animée » de ses usines : action-
nés par l'électricité, de minuscules ouvriers
vont, s'empressent, emplissent des fours,
forgent le fer, vérifient des machines. C'est
très pittoresque et très ingénieux.
M. Queuille, notre sympathique ministre
de l'Agriculture, qui vint, hier, visiter les
divers stands, prit à cette composition un
plaisir extrême. Il en oublia ses hautes fonc-
tions pour se distraire quelques minutes en
simple visiteur amusé.
Autour de soi, on entend parler anglais,
allemand, italien (car il y a une très bril-
lante participation des grandes maisons d'I-
talie), espagnol. Et le métal, comme l'hor-
loge de Baudelaire, connaît toutes ces lan-
gues.
Jean-Pierre Liausu.
Un lecteur récompense
- Pour a"oir lu un livre oublié
il touchera huit millions de lires
La fortnne viendrait-elle, sinon en dor-
mant, du moins en bouquinant? Telle est du
moins la belle aventure — authentique, affir-
ment les Evening News de Londres — adve-
nue à un étudiant, Eugène Lacosta.
Habitué de la Bibliothèque vaticane, le
jeune homme, en feuilletant un livre d'Emile
Fabriîr de Revisa découvrit entre les fenil-
léts un papier sur lequel on pouvait lire :
« Celui qui trouvera ce billet le portera
chez mon notaire et le priera de se reporter
à son registre L. 1 N° 162. »
Suivaient l'adresse du notaire et la date :
Rome, 5 février 1784.
Ayant suivi ces prescriptions à la lettre,
Eugène Lacosta eut la surprise de toucher
effectivement un chèque de huit millions de
lire 1
Que s'était-il passé jadis ?
Emile Fabrier de Revisa, découragé par
l'accueil froid que la critique avait fait à son
livre, avait placé ce billet dans le volume
pour voir si le public lirait quand même
son œuvre. Il attendit. et mourut. Les an-
nées passèrent. Et l'ouvrage finit par trou-
ver néanmoins un lecteur imprévu. Il s'agi-
rait de savoir maintenant si le livre de cet
auteur oublié valait mieux que le silence dont
on l'entoura.
Des manuscrits inédits
de Claude Debussy
Mme Claude Debussy a retrouvé, parmi
les documents laissés par le compositeur
de Pelléas et Mélisande, plusieurs ouvrages
posthumes.
Ces compositions paraîtront incessam-
ment.
Nous croyons savoir que la maison Chou-
dens publiera prochainement le premier de
ces manuscrits. C'est une suite d'orchestre
intitulée Le Triomphe de Bacchus.
La Finlande et la Convention de Berne
Oslo, 4 septembre.
(De notre correspondant particulier)
Comoedia qui a été le premier à annon-
cer aux auteurs la bonne nouvelle, les pré-
vient aujourd'hui que l'accord est officielle-
ment ratifié et que l'application en a été
faite à partir du Ier août. - A. D.
1 Au Théâtre Michel
"Uoe charmante le"
Comédie en 3 actes de M. André Lang
C'est une pièce curieuse, d'une jolie quo4
lité littéraire, et où l'analyste du coeur
hardi et pénétrant qu'est M. André Lang
s'exerce avec bonheur sur un sujet qui,
lui, m'a paru moins heureux. L'œuvre est
moderne par son ton, et romantique par sa
conception, exacte dans la conduite des sen-
timents, mais moins vraie dans son point de
départ, du moins par rapport aux mœurs
d'aujourd'hui.
L'idée qui la domine, celle de la femme"
être de perdition, qui n'est que fausseté et
que mensonge, qui se joue des hommes, et
fait d'eux des dupes, des esclaves ou de$
lâches, cette idée est d'origine romantique.,
Dans le livre intéressant de M. Maingron
sur Le Romantisme et les moeurs, on trou-
verait de nombreux exemples où l'amour
est traité de la sorte et où de petits Sam-
sons éperdus sont trahis par des Dalilas
perfides. Notre époque est loin dè ces exa-
gérations de la passion, et de cette lutte des
sexes qui se termine par la déchéance de
l'homme. La génération actuelle n'est plus
soumise à cet empire absolu de la femme.
La pièce de M. André Lang est donc à cet
égard un peu livresque, du reste avec dis-
tinction. Et son héros, qui hait tout le genre
humain et qui fuit les femmes avec hor-
reur parce qu'il a été trompé par l'une d'el-
les, nous parait un peu étranger à nous. On
ne hait plus les femmes avec cette violence,
d'abord parce qu'on les aime moins, ensuite
parce que la religion a perdu de son pou-
voir. Et il n'est plus d'Alceste qui songe £
se réfugi,er au désert.
Mais il y a en même temps, dans la pièce
M. Debucourt (Dessin de F~~,)
(Dessin a~r~Y
de M. André Lang, un talent nerveux el
net, une intelligence aiguë, un cynisme
brusqué, une façon hardie et sûre à la fois
de traiter les sentiments, qui portent bien
la marque d'aujourd'hui, et aussi une sincé-
rité, une intensité d'accent qui corrigent ce
qu'il y a d'inactuel dans le point de dé-
part. Du reste, si M. Lang ne nons pré-
sente pas l'homme et la femme « du jour »,-
il est du moins dans les traditions de nos
meilleurs moralistes, qui ont presque tous
été misogynes. M. Lang est le dernier des
ennemis de la femme.
Jacques Varenne est un Jeune homme ri-
che, désœuvré, cultivé et intelligent (ces
épithètes vont parfois ensemble), qui sem-
ble rongé d'un mal secret. Il fuit le monde,
il n'aime pas dîner en ville, et il se croit
l'esprit malade. Il ricane avec mépris quand
il parle des femmes, et la seule idée d'en
approcher une le remplit d'horreur. Son
pessimisme, du reste, s'étend à tout. La
vie est mauvaise et stupide ; il a déjà songé
au suicide. Ainsi, certains disciples exaspé-
rés des romantiques avaient fondé le Sui<
cide. Club.
Sa mère et sa tante, pour l'apprivoiser,
et le retenir à une soirée, invitent une de
ses amies d'enfance, qu'il n'a pas revue
depuis cinq ans, Hélène Gérard, mariée au
consul de France à Turin. Hélène entre
dans le jeu, fait la coquette, sourit des sar-
casmes de Jacques, évoque le souvenir de
quelques baisers d'autrefois, et obtient en-
fin de lui la promesse d'un rendez-vous.
Et le lendemain le duel s'engage. Il est
conduit par M. Lang avec beaucoup de vi-
gueur, d'adresse et d'esprit. Chacun des
deux adversaires s'imagine qu'il va jouer
l'autre. Hélène a pour elle un art et une
audace du mensonge extrêmes. Et Jacques
a pour lui la sûreté de son mépris et sa iu-
cidité. Le jeu va loin. Hélène est décidée?
à tout pour donner des preuves de sa sin
« UNE CHARMANTE JEUNE FILLE » AU THEATRE MICHEL
De gauche à droite ; M. Geoffroy, Mmes Jane Chevrel, Mariette Sully jet Paule Jtlinsa
» Gabriel ALPHAUD
Directeur
.Une ample comédie à cent actes divers
Et dont la scène est l'univers
(LA FONTAINE.)
Tout lecteur de COMOEDIA
contractant ou renouvelant
• dès aujourd'hui
UN ABONNEMENT D'UN AN
aura droit à l'une des
PRIMES MAGNIFIQUES
dont nous donnerons bientôt le détail
Tout lecteur cle COMOEDIA
contractant ou renouvelant
dès aujourd'hui
UN ABONNEMENT D'UN AN
aura droit à rune des
PRIMES MAGNIfIQUES
dont nous donneront bientôt le détail
les mille et une nuits de l'Inde (1) 1
La nuit de Shah-Jahan
Perle de votre race, Shah- J ahan, les
tlUlts d'Agra et de Delhi sont vôtres;
piques miniatures immortalisent votre
visage oriental; sourcils nets, yeux
ru sés l, ,. t
rilsés, l èvres étroites qui s'entr'ouvrent
^°ur leur plaisir, ou se resserrent pour
::>;Iger leur volonté; la gloire de vos
^quêtes s'efface dans les ruines des
ks mortes, mais vos trois cris d'or-
jfteil éclatent dans la splendeur imma-
tI ee des marbres : Tadj-Mahal- Tour
u Jasmin — Tombe de Jeh an-Ara.
Le Tadj.
p On jardin, un caravansérail, une
d (Jrte de granit rouge, un long bassin
d (Jnt les ifs s'alignent dans l'axe des
eux voûtes; le mausolée : marbre blanr
et gris, que minuit rend plus inaccessi-
e qu'un mirage; nulle fenêtre, seule-
41ent l'ogive d'une porte, ourlée d'oro-
fes; un ensemble se reflète dans une
j^cette, et le Tadj-Mahal se résume
r a.ns chaque ornement; entrelacés, les
;'s florentins, et les lotus asiatiques,
fissent comme des plaintes jusqu'au
apiteau qui les couronne; les inscrip-
°ns arabes qui ceignent les portes écla-
(t}t comme des sanglots, et ces fleurs
tent comme des sang l ots, et ces f l eurs
c 'Selées au pied de parois hautaines rap-
?^ent le souvenir de Shah- J ahan, com-
e des pleureuses précédant un beau
davre.
'J'le lanterne maure éblouit le cénota-
e d'Ardjmande Banou, femme du
q rand Mogol; nous croyons que le Tadj
oUt. édifié pour elle. Mais les poètes
Q r-c'dentatix- ont tort, Shah-Jahan; si
vUs aviez pu prévoir telle légende, vous
vUrlez souri cruellement. Pour régner,
v f
t~ égorgeâtes vos frères, vos COUSInS
gêUS les beaux mâles de votre sang qui
paient votre gloire; pour payer les
mille gemmes aux noms précieux,
I{:l étoilent les voûtes de vos palais, et
t'lle t encore derrière le ruisselle-
nt d'eau de vos fontaines; pour orner
celles tiares le front de vos 300 fa-
ites, vous ordonnâtes d'atroces guer-
de pillage, n'exigeant, il est vrai,
de rançon personnelle, que la fille
tOI vaincu.
Vet 1 d ,..
tF't tre lourde épouse ne méritait pas
b e, sa seule gloire fut de vous
fu °!r inspiré le goût des somptuosités
(tlnebres, et c'est pourquoi, durant sept
tt l entouré d'artistes arabes, florentins
tt ïr;ânçais ous avez ordonné le Tad)
l'tli e cénotaphe d'Ardjmande Banou, si
t' si humble, qu'il semble une ex-
tt¡¡e, est placé dans l'axe d'ogives qui
Vent comme un écho le bassin étroit,
■/^u'au portail définitif où la vie re-
ence - à côté le vôtre, Shah- J ahan
v^riI*e, et sans lignes égales; il détruit
^°ntairement l'harmonie du sépulcre,
re osez, abrité du jour, et veillé
e esclave.
Voit" Comodia des 23, 29 août et Ie* septembre.
La Tour du Jasmin.
Le fort d'Agra fut la cité impériale
des Grands Mogols, Shah- J ahan sut le
fortifier et l'embellir; l'art musulman
qui exclut tout art visuel, y simplifie
la Renaissance.
Le marbre fut la pierre préférée du
Grand Mogol; le marbre qui se ciselle,
se perce, s'ouvrage comme une fine den-
telle, et qui, mieux que l'or, donne
l'éclat d'yeux vivants aux pierres pré-
cieuses qui s'enchâssent en lui : lapis,
ambre, ou glauques émeraudes. La Tour
du Jasmin domine la ville impériale,
kiosque léger, ouvert aux quatre hori-
zons, où Shah-J ahan reposait durant ces
nuits enflammées d'Asie qui. épuisent
mieux que le soleil; ce prince raffiné
apercevait, à sa gauche, un triste jardin
et d'humbles tombes ornées de gazon,
« le cimetière des Reines » et, en face
de lui, l'infranchissable fossé où ses ti-
gres et ses éléphants se battaient.
Quelques années plus tard, vaincu
par un fils, et captif dans son palais,
Shah-Jahan dormit encore dans la Tour
du Jasmin.
La Tombe de Shah-Jahan.
Les environs de Delhi : un portail
maure franchi, voici, mêlées selon la no-
ble coutume musulmane, les tombes et
les maisons des vivants. Le jour, de
petits enfants, en cafetans dorés, bleus
et verts, doivent s'asseoir, rire ou dan-
ser, autour de dalles, où reposent les
ossements vénérés, de grands saints et
de grands poètes.
Mais les petites demeures arabes sont
closes; la lune blêmit les marbres, et à
chaque -mosaïque suspend une paillette
livide; notre guide s'incline devant une
tombe, et y cueille une de ces fleurs plus
frêle qu'un brin d'herbe, que les indi-
gènes nomment si ioliment « le miel
rose >>.
D'Agra à Delhi, ces somptuosités rap-
pellent votre règle de despote et d'ar-
tiste; ici encore il faut se souvenir de
vous. Shah-J ahan. Cette dalle, entourée
d'herbe et de fleurs folles, recouvre le
corps de la morte vénérée des Hindous :
Dian Ahra; votre fille; sans doute, vous
sûtes éveiller en elle. ce trouble amour
sans désir, que tant de pères qui savent
vieillir avec charme, inspirent à une en-
f an Elle partagea votre captivité et.
perdue d'amour cérébral, mourut avec
vous.
Sept villes s'édifièrent et furent dé-
truites sur la terre sacrée ; des ruines
admirables s'écroulent pierre à pierre;
leur granit s'effrite sur le gazon de jar-
dins anglais, entretenus avec respect
comme des tombes d'aïeules aimées; le
'lierre drape son linceul autour des cha-
piteaux, et les arbres mauves, sous la
lune, pleurent les splendeurs de Shah-
Jahan.
Simone-Roger Joisson.
Les entretiens de M. Emile Kabre
avec Gabriele d'Annunzio
~q Comédie-Française, pieuse gardienne
:c,rc belles et nobles traditions qui font sa
<':CLe et dont une des premières est de
t, ercher pour les présenter, les chefs-d'œu-
n s0^Ue's qu'ils soient, se devait d'inscrire
répertoire une œu\re du grand poète
1 riele d'Annunzio.
de e Puissant et lyrique auteur du Martyr
Sébastien, par l'entremise de son
eteur et adaptateur, M. Doderet, fit
\C,tr!. 1) y a quelque temps déjà, devant le
¡te de lecture de la- Comédie-Française,
Gabriele d'Annunzio
QI¡
J e a:-11
eil/I 00X1 vfe. nouvelle, La Torche sous le bOH-
{j ivii fut acceptée à l'unanimité.
j'ç i, mieux connaître les pensées intimes
-auteur et mieux sentir l'atmosphère qu'il
s' a donner à son œuvre, M. Emile Fa-
, est rendu à Gardone auprès du grand
11 et l'a en quelque sorte « interviewé Il.
)| e,taxt donc juste que nous lui fassions
'- a. son tour les mêmes tourments.
H-il la Comédie-Française, nous
iloecl, 5 doit monter l'hiver prochain La
°rcJ le. sous le boisseau et, comme nous igno-
%s Cabriele d'Annunzio pourrait assister
j'Ujc rÇP^étions, j'ai pensé qu'il était utile de
k r, car la mise en scène de ce très beau
'Clilà,e soulevait des questions assez délicates.
pourquoi je suis allé à Gardone.
j, Annunzio y habite toujours toute l'an-
0
t Q 1. Il a trouvé là une maison de pay-
pOç q "u !l a achetée, puis agrandie, transfor-
1, tiQ et qui est devenue maintenant, sous
~t des. c'e Vittorial », au milieu des fleurs
arres magnifiques, une sorte de rési-
Rrirç ron-a l e, où l'hospitalité est celle des
~~j où l'hospitalité est celle des
«iHcl15 SeIgneurs de jadis.
v^s ce n'est pas seulement l'extérieur
lçUr lttonal » qu'il faut \oir, c'est l'inté-
lue le poète a meublé, arrangé à son
t 1 tient beaucoup à son talent de tapis-
sier.) et dont il a fait une sorte de palais
des mille et une nuits. Les objets les plus
divers et les plus rares sont là, accumulés :
des orfèvreries, des étoffes, des pierres
sculptées, ces bouddhas et des saints, des
tableaux qu'il a acquis ou qui lui ont été
offerts par des admirateurs ou des gouver-
nements étrangers, enfin des souvenirs de
guerre : par exemple l'hélice de l'avion
avec lequel le poète fit son raid sur Vienne,
etc., enfin des volumes, plus de cinquante
mille volumes dans les éditions les plus
rares et notamment nos vieux poètes.
■— Le poète vous a-t-il parlé de la France ?
— A\ec la plus grande admiration et la
plus réelle sympathie. Il appelle toujours
notre pays « sa seconde patrie » : « Quelle
plus grande preuve d'amour, m'a-t,il dit,
peut-on donner à une nation, que d'écrire
dans sa langue ? C'est ce que j'ai fait à
plusieurs reprises en écrivant certains de mes
drames en français. »
- La popularité de d'Annunzio est-elle
toujours aussi grande en Italie ?
— Toujours. J'en ai éu une preuve sensi-
ble le jour où nous sommes partis à bord
du contre-torpil leur qu'il commandait pen-
dant la guerre et qu'il a fait transporter
sur le lac de Gardone, pour aller attendre
à Riva le ministre de l'Instructior.: publique
d'Italie, M. Fedele. A peine le bateau arri-
vait-il en vue de Riva que d'Annunzio, re-
connu de loin par les promeneurs, fut aussi-
tôt acclamé, et, descendu à terre, fut escorté
par toute la population de Riva qui ne
cessait de pousser en l'honneur de l'écrivain
des « Eia, Eia, Alala ! ». J
cc Malgré cette popularité et malgré sa
gloire mondiale, d'Annunzio est resté le plus
simple, le plus courtois et le plus accueil-
lant des hommes.
— Et qu'avez-vous dit à propos de La
Torche sous le boisseau ?
— Vous savez que l'œuvre est écrite en
vers. Dans son excellente et si fidèle traduc-
tion, M. Doderet a rendu de très heureuse
façon le texte italien, mais comme là tra-
duction est en prose fallait-il essayer de
retrouver, dans la diction, le rythme du
vers italien- ? Ne valait-il pas mieux, au
contraire, jouer l'œuvre directement, sim-
plement sans s'efforcer, et peut-être en vain,
de retrouver le rythme et la cadence de
l'original ? Le poète s'est prononcé de façon
catégorique : il demande que sa pièce soit
jouée humainement.
« Pour la mise en scène Gabriele d'An-
nunzio a bien voulu approuver tout le tra-
vail que j'avais préparé. Vous savez que
j'arrive toujours à l'avant-scène avec une
mise en scène écrite. C'est ainsi, par exem-
ple, que j'avais procédé pour Lorenzaccio.
« Le poète m'a dit sa très grande joie d'être
ioué à la Comédie-Française eL il m a promis
de venir aux dernières répétitions et d'assis-
ter à la répétition générale.
« J'espère, nous dit M. Emile Fabre en
terminant, que ce sera là une belle journée
pour le poète, pour la Comédie-Française et
pour l'amitié franco-italienne. »
Asté d'Espatia.
Albert Durer. — « La Grande Fortune »
La ville de Nuremberg, patrie d'Albert Durer, le génial Peintre des Quatre Tem-
péraments, le subtil graveur de La Melancholia et de La Grande Fortune, que nous
reproduisons ci-dessus, a décidé qu'en commémoration du quatrième centenaire de sa
mort, Vannée 1928 serait appelée, dans tous ses actes publics — et, sans doute, dans
toute VAllemagne, — l'Année Albert Durer (en allemand i « das Durerjahr »). De grandes
fêtes seront célébrées et toutes les Publications allemandes contiendront de nombreuses
études sur la vie et les œuvres de Dürer.
1 Une exposition lévéJatrjce l
Des Poètes par milliers
chantent en Amérique.
Ce que l'on accorde le plus communément
aux Américains, c'est l'esprit pratique, le
sens de l'organisation, le souci des affaires,
le business, le trust.
Tout cela est bien loin de la poésie. Aussi
n'est-ce point sans curiosité que je suis allé
rue de l'Elysée, où la bibliothèque améri-
caine à Paris vient d'installer une exposi-
tion de poésie.
Une exposition de poésie ? L'idée, à elle
seule, est ingénieuse, n'est-ce pas, et un
peu inattendue chez des Américains.
Inattendue ? Pourquoi ? Vous imaginez-
vous qu'il y ait si peu de poètes de 1 autre
côté de l'Atlantique ? A l'heure où l'Ameri-
can Légion va être notre hôte, il n'était pas
sans intérêt de s'en rendre compte.
Me voici dans la petite salle étroite. De
hauts rayons emplis de livres. Aux murs,
des portraits de poètes r Lew Sarett, Edgar
Lee Masters, James Branch Cahell, Edwin
Markham, etc. Tout est classé, étiqueté :
anthologies, poésie de terroir, poètes hu-
moristes, poètes enfants, poètes lyriques,
poètes didactiques, biographies et biblio-
graphies, essais critiques.
Sur une table, des revues de poésie, aux-
quelles ne collaborent que des jeunes :
Conrad Aiken, Willer Bynner. Kenneth
Fearing.
Des articles de journaux, coupés et collés
sur de grands cartons, renseignent sur les
derniers échos de la vie littéraire.
Et tout cela est en ordre, soigneusement
groupé. Et c'est tout un panorama de la
poésie américaine que j'ai sous les yeux.
Un gros volume attire mon regard. C'est
une anthologie de plus de 4.000 pages, con-
sacrée à la poésie américaine : The home
book of verses, par M. Burton E. Stevenson.
Qui est-ce ce M. Burton E. Stevenson ?
Précisément le directeur de la bibliothèque
américaine. Qui, mieux que lui, pourrait,
m'entretenir des poètes ae son pays ? Si
j'avais la chance de le joindre.
Cette chance, je l'ai
M. Burton Stevenson est un hommp cal-
me, flegmatique ; mais on devine, derrière
le pince-nez aux verres arrondis, un regard
très vif,' pétillant de vie et d'enthousiasme.
Des cheveux d'argent s'écrasent sur un
front large. Shake-hand. M. Stevenson
croise ses jambes, et parle :
— Jamais la poésie n'eut, en Amérique,
autant -4e vogue qu'aujourd'hui. Le début
de ce siècle marque un ralentissement dans
la production lyrique. Alors qu'en 1850
nous avions tous nos romantiques, nous ne
comptions plus, en 1900, que de rares poè-
tes. Mais nous nous sommes bien rattrappés
depuis !
« Des poètes ? Mais l'Amérique en compte
plus que la France ! Et des poètes d'une
réelle valeur : Vachel Lindsay, un de ceux
que je préfère, qui fut pauvre comme votre
Verlaine, qui fut quasi vagabond, et écrivit
des pages émouvantes, d'une sensibilité
neuve, profonde et humaine, comme Le
Rossignol chinois ; Edwin Arlington Robin-
son, qui, avec La Ville au bord du fleuve,
Les Enfants de la Nuit, nous ravit par son
âme musicale à la fois et tumultueuse ; Cari
Sandburg, l'auteur de Cor nhuskers.
Nous avons aussi des poétesses, Edna
Saint Vincent Millay, dont la Renasçence a,
en Amérique, la vogue que Le Cœur innom-
brable de la comtesse de Noailles a en
France ; Lizette Woodworth Reese, qui fut
professeur pendant 45 ans, et met tous les
parfums des fleurs, non seulement dans ses
vers, mais dans les titres de ses livres :
Une Branche de Mai, Une Poignée de La-
vande ; Amy Lowell aussi, qui écrivait sur-
tout en vers libres, et qui est morte il y
a deux ans, léguant sa fortune aux jeunes
poètes d'avenir, pour permettre chaque an-
née à deux ou trois d'entre eux de venir
à Paris, dont l'atmosphère est toute de
poésie.
« Amy Lowell fut critique aussi. Elle a
fait un essai sur John Keats, elle a publié
en 1915 une étude sur six poètes français et,
en 1917, un livre sur les tendances de la
poésie moderne en Amérique. s
Un livre dé cette Amy Lowell est juste-
ment sur la table de M. Stevenson. Je le
feuillette, et j'y trouve ce poème que je tra-
duis de mémoire :
Je me préparerai un cocktail d'étoiles,
De grandes étoiles aux couleurs vivés.
Je les arracherai du ciel,
Et les mélangerai dans une coupe d'argent.
Et, avant de boire,
J'y verserai, pour que la boisson soit "gla.cée,
Toute la froideur de ton amour.
N'est-ce pas moderne, subtil, et délicieu*
sement féminin ?
Mais M. Burton Stevenson poursuit : ,
— Vous voyez que la poésie est à l'hon-
neur ! Songez qu'il parafa en Amérique plus
de mille volumes de vers par an. Car les
poètes trouvent des éditeurs ! Et les librai-
res vendent autant les poèmes que les ro-
mans 1
« En Europe, quand on a nommé Fehi-
more Cooper et Edgar Poe, on croit avoir
tout dit sur notre littérature. Quelle erreur,
ou quel retard ! La vie d'un pays ne se me-
sure pas au passé, mais au présent. Et
c'est pour cela que nous sommes, justement
fiers de cet essor poétique. Et c'est pour le
prouver que j'ai organisé cette exposition.
Le théâtre aura son tour, le mois prochain
sans doute ; puis l'histoire, le voyage, etc.
« C'est une idée fausse de croire que les
Américains ne ., peuvent être que des busi-
nessmen. Il y en a sans doute plus que des
poètes. Mais. et en France?
« L'essentiel est que le goût de la poésie
soit aussi vivace, aussi caractérisé. Car le
goût de la poésie crée les poètes, comme le
goût de la peinture crée les peintres. Le
besoin crée l'organe !
« Il y, aurait bien d'autres poètes à ci-
ter/Il y en aurait trop. Mille noms me vien-
nent aux lèvres:* Alan Seeger, que vous
connaissez bien, Robert Frest, Erza Pound,
qui vient de publier ses Poèmes choisis et
prépare, pour dans quelque dix ans, un
grand poème héroïque en trente chants.
Erza Pound a beaucoup vécu en France, à
Paris surtout. Actuellement, il est en Ita-
lie. Mais je ne saurais, en quelques ins-
tants, vous nommer tout le monde. Je suis
sûr de faire de graves omissions. Mais vous
pouvez voir quand même, n'est-ce pas, par
ce succinct exposé, que la poésie a sa place
chez nous, et non la moindre. »
C'est sur ces paroles, pleines d'une juste
fierté, que j'ai quitté M. Stevenson. En re-
passant dans la salle d'exposition, j'ai ou-
vert un livre, un petit livre relié en toile
verte, et j'y ai trouvé cette phrase qui peut
servir d'épilogue à ma visite :
c Tant que les hommes savent chanter
leurs rêves, tant que les hommes savent
chanter leur âme, les peuples sont vivants
et libres ! s
Pierre Lagarde.
Ld-loùr penchée de Saint-Moritz
Au cours de l'assemblée communale, à
l'ordre du jour de laquelle figurait la ques-
tion de la démolition de la tour penchée,
une vive discussion s'est engagée. Tous les
orateurs se sont prononcés pour le maintien
de la tour. Une motion tendant au renvoi de
la question aux autorités municipales a été
prise à la quasi-unanimité.
L'église de Saint-Moritz existait déjà dans
la seconde moitié du XIIe siècle et fut réno-
vée en 1573. A cette occasion, la tour fut
légèrement élevée et elle reçut la forme
qu'on lui connaît encore aujourd'hui. L'église
fut démolie en 1893, mais la tour fut main-
tenue. Elle a 33 mètres de haut. Elle se
trouve sur la région des éboulements préhis-
toriques et son inclinaison ne cesse d'aug-
menter, tout en restant. cependant dans des
proportions modestes.
1 Porte de Versailles
L'exposition Ces Fondeurs
de l'Art et de l'Industrie
Hier, au P-arc des Expositions, l'Exposi-
tion internationale de fonderie a ouvert offi-
ciellement ses portes. Il semblerait, au pre,
mier abord, que seuls les techniciens y puis
sent trouver quelque plaisir, mais si d'aven-
tyre il vous advient de suivre mon exemple,
"ous ne regretterez pas votre visite.
Vous observerez avec joie que l'Exposition
des Arts décoratifs, si tardive qu'elle ait
été, porte ses fruits et qu'un plus grand soin
règne aujourd'hui, là, où d'ordinaire nous
étions habitués à nous contenter de rensei-
gnements techniques et souvent fort mal pré-
sentés.
On souhaiterait pourtant un effort plus
« actuel » de la part des fonderies U'art. 11
en est toutefois comme Barbedienne qui,
avec des sculpteurs nouveaux., comme La
femme accroupie de Cormier, le Carpentier
de Landowski et UHercule terrassant le Cen-
taure de Wlerich, marque ce désir, cette
orientation nouvelle et fait admirer des pie-
ces de choix.
Dès l'entrée, l'attention des visiteurs est
amusée et séduite par le travail de la fonte.
Elle ruisselle d'un four, filet de feu, liquide
pesant. Recueillie dans des seaux, elle est
immédiatement moulée devant vous et, en
souvenir, les ouvriers vous remettent des
cendriers.
Chemin faisant, en plein air ou dans les
stands, luisant sous la lumière grise et re-
flétant les multiples nuances du jour sur
les immenses verrières, le métal étincelle,
s'arrondit, s'étire, se lamine. Ici, ce sont
des pièces d'automobile aux arêtes vives,
des gargouilles, des bornes-fontaines, des ro-
binets, des vannes, des crépines, des ven-
touses, des siphons, des bondes de fond, la
des jets de sable noir croulent en cascades
de la bouche sifflante d'une machine avant
d'être livrés aux marteaux compresseurs.
De colonnes à laminoirs, nous passons à
des cylindres, à des carcasses de dynamos,
à des disques dentés, à des engrenages, à
des galets, à des cubilots.
Du cuivre, du fer, de l'acier, du bronze,
de la fonte, de l'aluminium.
- Au bruit des moteurs, vous ne vous las-
Se]; pas de suivre de box en box le dessin
multiforme des .machines.
Ici, j'attends les enfants : une maison
française des plus populaires. a exposé la
réduction « animée » de ses usines : action-
nés par l'électricité, de minuscules ouvriers
vont, s'empressent, emplissent des fours,
forgent le fer, vérifient des machines. C'est
très pittoresque et très ingénieux.
M. Queuille, notre sympathique ministre
de l'Agriculture, qui vint, hier, visiter les
divers stands, prit à cette composition un
plaisir extrême. Il en oublia ses hautes fonc-
tions pour se distraire quelques minutes en
simple visiteur amusé.
Autour de soi, on entend parler anglais,
allemand, italien (car il y a une très bril-
lante participation des grandes maisons d'I-
talie), espagnol. Et le métal, comme l'hor-
loge de Baudelaire, connaît toutes ces lan-
gues.
Jean-Pierre Liausu.
Un lecteur récompense
- Pour a"oir lu un livre oublié
il touchera huit millions de lires
La fortnne viendrait-elle, sinon en dor-
mant, du moins en bouquinant? Telle est du
moins la belle aventure — authentique, affir-
ment les Evening News de Londres — adve-
nue à un étudiant, Eugène Lacosta.
Habitué de la Bibliothèque vaticane, le
jeune homme, en feuilletant un livre d'Emile
Fabriîr de Revisa découvrit entre les fenil-
léts un papier sur lequel on pouvait lire :
« Celui qui trouvera ce billet le portera
chez mon notaire et le priera de se reporter
à son registre L. 1 N° 162. »
Suivaient l'adresse du notaire et la date :
Rome, 5 février 1784.
Ayant suivi ces prescriptions à la lettre,
Eugène Lacosta eut la surprise de toucher
effectivement un chèque de huit millions de
lire 1
Que s'était-il passé jadis ?
Emile Fabrier de Revisa, découragé par
l'accueil froid que la critique avait fait à son
livre, avait placé ce billet dans le volume
pour voir si le public lirait quand même
son œuvre. Il attendit. et mourut. Les an-
nées passèrent. Et l'ouvrage finit par trou-
ver néanmoins un lecteur imprévu. Il s'agi-
rait de savoir maintenant si le livre de cet
auteur oublié valait mieux que le silence dont
on l'entoura.
Des manuscrits inédits
de Claude Debussy
Mme Claude Debussy a retrouvé, parmi
les documents laissés par le compositeur
de Pelléas et Mélisande, plusieurs ouvrages
posthumes.
Ces compositions paraîtront incessam-
ment.
Nous croyons savoir que la maison Chou-
dens publiera prochainement le premier de
ces manuscrits. C'est une suite d'orchestre
intitulée Le Triomphe de Bacchus.
La Finlande et la Convention de Berne
Oslo, 4 septembre.
(De notre correspondant particulier)
Comoedia qui a été le premier à annon-
cer aux auteurs la bonne nouvelle, les pré-
vient aujourd'hui que l'accord est officielle-
ment ratifié et que l'application en a été
faite à partir du Ier août. - A. D.
1 Au Théâtre Michel
"Uoe charmante le"
Comédie en 3 actes de M. André Lang
C'est une pièce curieuse, d'une jolie quo4
lité littéraire, et où l'analyste du coeur
hardi et pénétrant qu'est M. André Lang
s'exerce avec bonheur sur un sujet qui,
lui, m'a paru moins heureux. L'œuvre est
moderne par son ton, et romantique par sa
conception, exacte dans la conduite des sen-
timents, mais moins vraie dans son point de
départ, du moins par rapport aux mœurs
d'aujourd'hui.
L'idée qui la domine, celle de la femme"
être de perdition, qui n'est que fausseté et
que mensonge, qui se joue des hommes, et
fait d'eux des dupes, des esclaves ou de$
lâches, cette idée est d'origine romantique.,
Dans le livre intéressant de M. Maingron
sur Le Romantisme et les moeurs, on trou-
verait de nombreux exemples où l'amour
est traité de la sorte et où de petits Sam-
sons éperdus sont trahis par des Dalilas
perfides. Notre époque est loin dè ces exa-
gérations de la passion, et de cette lutte des
sexes qui se termine par la déchéance de
l'homme. La génération actuelle n'est plus
soumise à cet empire absolu de la femme.
La pièce de M. André Lang est donc à cet
égard un peu livresque, du reste avec dis-
tinction. Et son héros, qui hait tout le genre
humain et qui fuit les femmes avec hor-
reur parce qu'il a été trompé par l'une d'el-
les, nous parait un peu étranger à nous. On
ne hait plus les femmes avec cette violence,
d'abord parce qu'on les aime moins, ensuite
parce que la religion a perdu de son pou-
voir. Et il n'est plus d'Alceste qui songe £
se réfugi,er au désert.
Mais il y a en même temps, dans la pièce
M. Debucourt (Dessin de F~~,)
(Dessin a~r~Y
de M. André Lang, un talent nerveux el
net, une intelligence aiguë, un cynisme
brusqué, une façon hardie et sûre à la fois
de traiter les sentiments, qui portent bien
la marque d'aujourd'hui, et aussi une sincé-
rité, une intensité d'accent qui corrigent ce
qu'il y a d'inactuel dans le point de dé-
part. Du reste, si M. Lang ne nons pré-
sente pas l'homme et la femme « du jour »,-
il est du moins dans les traditions de nos
meilleurs moralistes, qui ont presque tous
été misogynes. M. Lang est le dernier des
ennemis de la femme.
Jacques Varenne est un Jeune homme ri-
che, désœuvré, cultivé et intelligent (ces
épithètes vont parfois ensemble), qui sem-
ble rongé d'un mal secret. Il fuit le monde,
il n'aime pas dîner en ville, et il se croit
l'esprit malade. Il ricane avec mépris quand
il parle des femmes, et la seule idée d'en
approcher une le remplit d'horreur. Son
pessimisme, du reste, s'étend à tout. La
vie est mauvaise et stupide ; il a déjà songé
au suicide. Ainsi, certains disciples exaspé-
rés des romantiques avaient fondé le Sui<
cide. Club.
Sa mère et sa tante, pour l'apprivoiser,
et le retenir à une soirée, invitent une de
ses amies d'enfance, qu'il n'a pas revue
depuis cinq ans, Hélène Gérard, mariée au
consul de France à Turin. Hélène entre
dans le jeu, fait la coquette, sourit des sar-
casmes de Jacques, évoque le souvenir de
quelques baisers d'autrefois, et obtient en-
fin de lui la promesse d'un rendez-vous.
Et le lendemain le duel s'engage. Il est
conduit par M. Lang avec beaucoup de vi-
gueur, d'adresse et d'esprit. Chacun des
deux adversaires s'imagine qu'il va jouer
l'autre. Hélène a pour elle un art et une
audace du mensonge extrêmes. Et Jacques
a pour lui la sûreté de son mépris et sa iu-
cidité. Le jeu va loin. Hélène est décidée?
à tout pour donner des preuves de sa sin
« UNE CHARMANTE JEUNE FILLE » AU THEATRE MICHEL
De gauche à droite ; M. Geoffroy, Mmes Jane Chevrel, Mariette Sully jet Paule Jtlinsa
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