Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-05-17
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 17 mai 1868 17 mai 1868
Description : 1868/05/17 (A3,N759). 1868/05/17 (A3,N759).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k47177611
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
LA PETITE PRESSE
1S cent. le numéro . JOURNAL QUOTIDIEN ' S cent. le numéro
ABONNEMENTS. — Trois mois; Six mois. Un an.
Paris 5 fr. 9 fr. 1 s fr.
- Départements.. G il 99
Administrateur : E. DELSAUX.
3me année. — DIMANCHE il MAI 1868. - Ne 159 .
, Directeur-Propriétaire : JAN NIN.
Rédacteur en chef: A. DE BALATHIER BRAGELONNE.-
BUREAUX D'ABONNEMENT : 9, Ii'ne D/I.'ODot.
ADMINISTRATION : 13, place Breda.
PARIS, 16 MAI 1868
LE SALON DE 1868
III
Deux mille cinq cent quatre-vingt-SBpffa-
bleaux, sans compter les refusés!... J'ai
fermé mon livret et je me suis mis à broyer
du noir, comme si j'eusse voulu peindre des
plaideurs à la Ribot ou des chevaux à la Ré-
gnmey.
Eh quoi! tant d'efforts et tant de toile, tant
de talent et tant de couleurs dépensés, sans
qu'une figure humaine soit sortie des mains
d'un créateur!... J'entends une figure où le
sentiment, la passion, la vie, toutes les for-
ces qui nous agitent soient exprimées. J'en-
tends l'art, enfin!....
Je saisis des tentatives. M. Alma-Tadema,
M. Feyen Perrin, M. Lefebvre, M. Mérino,
M. Ribot, d'autres encore, conçoivent et es-
sayent. Aucun n'expose une de ces toiles
devant lesquelles on s'arrête, on s'écrie, on
se répand en enthousiasmes ou en colères...
Non, le temps des élan? est passé. Celui
des jolies choses est venu.
Salut, César-Gérôme, les peintres de genre,
autour de toi, auront du pain et des jeux.
M. AUGUSTE TOULMOUCHE. - 2397, le Der-
nier Coup d'œil; 2398, Un Jour de Fête.
La même femme a posé pour les deux ta-
bleaux; seulement, dans le premier, elle a
une tête brune, qu'on a coupée dans lesecond,
pour la remplacer par une blonde. C'est une
belle fille, qui se cambre dans ses robes, en
ayant l'air de dire : — Je ferais tout craquer
si je voulais ! La peau brune, l'allure com-
mune, la tournure insolente, un vrai triom-
phe de la chair sous l'étoffe. Ce n'est pas le
miroir à la main, prête à partir pour le bal,
ou tenant un bouquet pour souhaiter une
fête, qu'il fallait représenter cette gaillarde,
mais bien sous les bougies de quelque caba-
ret élégant, disant aux petits ducs pâlis : —
C'est pas dans l'nez qu'çà me chatouille 1 .....
M. CÉLESTIN ALLARD. — 22, l1n fumeur es-
pagnol ; 23, Portrait de M. D...
M. Allard est un jeune peintre français éta-
bli à Madrid. Il aime l'Espagne, puisqu'il y
reste, mais il doit regretter la France, car je
trouve sur tous ces tableaux une teinte grise
- qi|i ressemble à un demi-deuil mélancoli-
1 ement porté. Je sais bien qu'il y a une Es-
pagne vêtue d'amadou dans l'ombre. Mais je
m'étonne toujours de la retrouver dans des
tableaux français. Ce n'est pas une cigarette,
mais un poignard qui serait à sa place dans
la main de votre fumeur, cher' monsieur
Allard. Croyez-en un ami inconnu et prome-
nez votre talent au soleil. On m'assure que
le soleil luit quelquefois à Madrid.
I M. RODOLPHE JULIAN. — 1,352, Portrait de
M. Millet député du département de Vaucluse.
— M. Julian est un artiste de talent et un
homme d'esprit. L'artiste fait d'excellents
portraits; l'homme a su faire fortune., Qui
ne se rappelle .l'arène athlétique de la rue
Lepeletier, les leveurs de poids, les lutteurs
masqués, les gens auxquels on tirait des
coups de pistolet et les mangeurs de feu?...
M. Julian était l'imprésario de la compagnie.
C'est lui qui avait installé le cirque, qui si-r
gnait les engagements, payait les appointe*
ments, balançait la dépense et la recette. Il
collaborait même, assure-t-on, à ces affiches
sans rivales qui excitaient les cris J'admira.
tion des Parisiens. La presse tout entière fut
heureuse de contribuer à la popularité de
l'entreprise. Riche maintenant, M. Julian
tient à nous remercier en nous présentant
de bons tableaux.
Qu'il soit, cpmme toujours, le: bien
venu !...
Je passe devant une demi - douzaine de
tableaux que je mentionne avec plaisir :
M. CAPOUL. — 414 , Un jeune homme. —
Ce jeune homme est très-bien ; il a une
figure intelligente et me semble aimer le con-
fortable et les arts.
M. JOHN LEWIS BROWN.- 364, Régiment de
cuirassiers du roi pendant la guerre de sept
ans. — « Messieurs les Maîtres, assurez vos
chapeaux, nous avons l'honneur de charger ! »
— Ils les assurent ; les chevaux baissent ou
secouent la tête. C'est une vraie bataille...
M. ADOLPHE SCHREYER. — 2275, Chevaux
valaques effrayés par les loups. — Dans un '
paysage d'automne aux tons chauds et roux,
deux loups se tiennent à l'affût. Dans un coin
des chevaux s'eitarent ; les uns ruent ; les au-
tres se dressent; d'autres se secouent dans un
frisson. Tout cela forme un groupe plein de
mouvement et de vie. C'est excellent.
FTÀ. CHARLES VOILLEMOT. — 2528, Le Nid. —
Une? jeune fille rose et diaphane tient un nid
plein d'œufs. La mère des petits oiseaux à
venir voltige attristée dans un ciel vert tendre.
— On rêve ces sortes de choses, dirait un cri-
tique brutal, on ne les peint pas... Pourtant
c'est bien joli. Prononcez li Ii.
M. SCHENCK. — 2.254, Autour de l'auge.
Une demi.-douzaine de têtes d'ânes sont ali-
gnées, affectant des physionomies diverses.
Impossible de passer devant ce tableau sans
le voir. Les bêtes font: — hi! han!... On
s'arrête, et l'on répond — Heu ! heu!...
M. BLAISE DESGOFFES. — 755, Fruits et Bi-
joux ; 7â6, Bijoux et Fleurs. '— Je n'ai
jamais rien vu d'aussi bien imité.
Et j'en reviens à mes chers paysages.
C'est là qu'il faut chercher aujourd'hui la
note éclatante de la peinture française.
A défaut de l'inspiration virile qui se mani-
feste par l'étude de l'homme, nos artistes ont
du moins le sentiment de la nature propre
aux époques de transition. L'âme lassée s'a-
bandonne, les, yeux se fixent snr la campa-
gne, l'imagination Va...
Le Lever de Lune de DAUBIGNY est si beau
qu'on oublie le premier jour de regarder son
Printemps, 653. — Quelle poésie pourtant
dans cet éparpillement de toutes les choses
jeunes et gaies de la campagne, fleurs blan-
ches des pommiers, fleurs roses des pêchers,
vert pâle de l'herbe, contours indécis et bleuâ-
tres des côteaux !.. Au milieu delà floraison
universelle je vois une jeune fille et un jeune
homme qui marchent entrelacés. La jeune
fille a une robe blanche. Le jeune homme a
perdu son chapeau. Ils se parlent si bas que
les oiseaux oublient de s'envoler sur leur
passage... Pourtant ils pourraient parler
haut : leur voix ne détonnerait pas dans le
bourdonnement printanier qui monte vers le
ciel...
M. BERCHFTRE. — Nomades en marche au
milieu du jour, dans la presqu'He du Sinaï,
(Egypte.)— Nous sommes dans un désert de,
romance, qui est peut-être le vrai. Deux sensa-
tions, celle de la lumière et celle de l'étendue.
Les hommes et les bêtes ne souffrent pas as-
sez. Il fait bien beau là-bas, mais il fait bien
chaud aussi. Tout à l'heure j'admirais, je
voudrais avoir soif maintenant, et j'en veux
au peintre de ne pas m'altérer.
M. PAULHUET, — 1279, les Ruines du châ-
teau de Pierrefonds. — Vieillard, je te con-
nais !... Le vent de 1830 a passé jadis sur
tes cheveux ; il courba toujours tes arbres et
tes buissons ; c'est lui qui ébranle les ruines
de tes châteaux et qui souffle des paroles de .
mort à l'oreille de tes villageois épouvantés...
Vieillard, voici la nuit. Mais lanuit, pour ceux
de ta sorte, est remplie d'éclairs... Vieillard,
je te présente des jeunes gens :
M. HECTOR HANOTEAIf. — 1205, le garde
manger des renardeaux. — M. Hanoteau a
trouvé le secret. de faire éternellement le
même tableau sur les motifs les plus variés.
Premier plan humide, verdure noire, feuil-
lages savamment découpés, au fond une
échappée de lumière,—telle est l'économiede .
ce tableau, qui obtient depuis quatre ans un
succès d'autant plus indiscutable que la cause
en est moins imprévue.
M. CAMILLE BERNIER. — 208, Sentier dam
les genets, près Bannalec (Finistère). —Le
sentier finit dans-un horizon de soleil, vrai
peut-être, mais prétentieux à coup sûr. L'art,
c'est le choix, M. Bernier ne doit pas l'ou-
blier. Ce que je n'oublierai pas non plus,
c'est la sensation de nature que m'a fait éprou-
ver son tableau. Je voudrais passer une heure
étendu dans ces genets, sur le penchant de
ce coteau breton...
M. JULES HEREAU. — 1238. Les ramasseurs
de varech sur la plage de Bretagne; mer
descendante. — Je tiens à rester aujourd'hui
sur une bonne impression. L'exposition de
M. Héreau est presque d'un maître. Cette
charrette, cet attelage, ces pêcheurs, toutes
ces choses humbles et fortes des côtes, mises ^
en relief par une mer pâle sous un ciel da
nuées, forment un des spectacles les plus
saisissants qui soient. Il y a, dans ce tableau,
la sincérité d'une étude et la profondeur d'un
sentiment.
TONY RÉVILLON.
ROCAMBOLE
LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
QUATRIÈME PARTIE
UN DRAME DANS LE SOUTWARK
LI
No 194
L'abbé Samuel fut donc conduit à New.
gâte.
Le bon et jovial sous-directeur n'avait pas
revu le prêtre irlandais depuis l'exécution man-
quée de John Colden.
Il se montra donc fort étonné én voyant
Voir le numéro du 22 novembre.
l'abbé entrer dans le greffe, escorté par les trois
policemen. #
Ceux-ci montrèrent l'ordre d'arrestation.
Le sous-gouverneur n'en pouvait croire ses
yeux.
Outre que l'accusation lui paraissait absurde,
il n'avait pas reçu d'avis préalable» ce qui se
fait toujours.
Il jura donc qu'il y avait au moins méprise
sur ce dernier fait, et que c'était soit à Bath
square, soit à Mil banck, qu'on aurait dû con-
duire le prisonnier.
Mais l'ordre était formel; il ne portait aucune
mention particulière qui précisât le régime au-
quel il devait être soumis.
Le sous-gouverneur fit mettre l'abbé Samuel
dans la cellule la plus confortable de la prison,
et lui témoigna les plus grands égards.
Le jeune prêtre était résigné.
Il savait bien que son innocence serait dé-
montrée, mais il savait aussi qu'il avait désor-
mais un ennemi implacable dans le révérend
Peters Town, et il connaissait la puissance de
cet homme.
— Si on ne peut frapper l'assassin en moi,
se dit-il, on frappera l'Irlandais.
Et il se prit à soupirer en pensant à tous les
pauvres gens dont il était la consolation et qui
. ne le reverraient peut-être plus.
Cependant, son séjour à Newgate devait ê':re
de courte durée. % ê ■
Il y était à peine depuis trois heures que la
porte de sa cellule s'ouvrit livrant passage au
sous-directeur.
. Celui-ci était plus joyeux enc:re qu'à l'ordi-
naire, et il tendit les mains à l'abbé Samuel.
- J'ai de bonnes nouvelles à vous donner,
lui dit-il; on vient de me transmettre le dossier
et je suis au courant de votre affaire. qb
— Ah! dit l'abbé Samuel avec calme.
— Vous êtes accusé dumeurtre d'un homme
du Soutwark, appelé Paddy, mais sa femme
seule vous accuse, et peu de gens croient à cette
accusation.
Par conséquent, il ne tous)!era probablement
pas difficile de vous disculper.
— Je l'espère, dit le prêtre.
— On va vous conduire devant le magistrat,
poursuivit le sous-gouverneur, et vous serez con-
fronté avec le cadavre.
Puis, il est probable que vous serez admis à
fournir caution, et qu'on vous remettra en li-
berté.
— Hélas ! dit le prêtre, pour fournir caution
il faut avoir de l'argent, et beaucoup.
— Bah ! on en trouve toujours dans ces cas-
là. Bon courage, et ne craignez rien.
k L'abbé Samuel fut donc extrait- de Newgate.
et conduit dans une voiture cellulaire jusque
dans le Stutwark.
Le magistrat avait tenu parole au prétendu
Conrad Haüser, le soi-digant médecin alle
mand.
Le corps de Paddy était demeuré dans sa
maison, couché sur le sol et gardé par une es-
couade de policemen. Seulement des voisins
charitables avaient emmené et recueilli les deux
enfants.
Quant à la femme, elle était demeurée là, ar-
dente, les yeux secs, ivre de fureur et altéréa
de vengeance.
La foule stationnait nombreuse toujours, dans
le passage et aux abords de la maison.
Quelques huées accueillirent l'abbé Samuel
quand il sortit de voiture, mais ces huées furent
aussitôt reprimées par des applaudissements.
Si l'abbé Samuel avait ses ennemis et ses
détracteurs, il avait aussi de chauds partisans.
Il entra donc calme et le front haut dans la
maison où était le corps et où on avait impro-
visé une sorte d'estrade pour le magistrat de
police.
A sa vue, Lisbeth se leva comme une furie:
— Assassin! dit-elle, assassin!
Et elle lui montra le poing; et il fallut que
dèux policemen s'emparassent d'elle pour l 'em-
pêcher de se ruer sur l'abbé Samuel.
1S cent. le numéro . JOURNAL QUOTIDIEN ' S cent. le numéro
ABONNEMENTS. — Trois mois; Six mois. Un an.
Paris 5 fr. 9 fr. 1 s fr.
- Départements.. G il 99
Administrateur : E. DELSAUX.
3me année. — DIMANCHE il MAI 1868. - Ne 159 .
, Directeur-Propriétaire : JAN NIN.
Rédacteur en chef: A. DE BALATHIER BRAGELONNE.-
BUREAUX D'ABONNEMENT : 9, Ii'ne D/I.'ODot.
ADMINISTRATION : 13, place Breda.
PARIS, 16 MAI 1868
LE SALON DE 1868
III
Deux mille cinq cent quatre-vingt-SBpffa-
bleaux, sans compter les refusés!... J'ai
fermé mon livret et je me suis mis à broyer
du noir, comme si j'eusse voulu peindre des
plaideurs à la Ribot ou des chevaux à la Ré-
gnmey.
Eh quoi! tant d'efforts et tant de toile, tant
de talent et tant de couleurs dépensés, sans
qu'une figure humaine soit sortie des mains
d'un créateur!... J'entends une figure où le
sentiment, la passion, la vie, toutes les for-
ces qui nous agitent soient exprimées. J'en-
tends l'art, enfin!....
Je saisis des tentatives. M. Alma-Tadema,
M. Feyen Perrin, M. Lefebvre, M. Mérino,
M. Ribot, d'autres encore, conçoivent et es-
sayent. Aucun n'expose une de ces toiles
devant lesquelles on s'arrête, on s'écrie, on
se répand en enthousiasmes ou en colères...
Non, le temps des élan? est passé. Celui
des jolies choses est venu.
Salut, César-Gérôme, les peintres de genre,
autour de toi, auront du pain et des jeux.
M. AUGUSTE TOULMOUCHE. - 2397, le Der-
nier Coup d'œil; 2398, Un Jour de Fête.
La même femme a posé pour les deux ta-
bleaux; seulement, dans le premier, elle a
une tête brune, qu'on a coupée dans lesecond,
pour la remplacer par une blonde. C'est une
belle fille, qui se cambre dans ses robes, en
ayant l'air de dire : — Je ferais tout craquer
si je voulais ! La peau brune, l'allure com-
mune, la tournure insolente, un vrai triom-
phe de la chair sous l'étoffe. Ce n'est pas le
miroir à la main, prête à partir pour le bal,
ou tenant un bouquet pour souhaiter une
fête, qu'il fallait représenter cette gaillarde,
mais bien sous les bougies de quelque caba-
ret élégant, disant aux petits ducs pâlis : —
C'est pas dans l'nez qu'çà me chatouille 1 .....
M. CÉLESTIN ALLARD. — 22, l1n fumeur es-
pagnol ; 23, Portrait de M. D...
M. Allard est un jeune peintre français éta-
bli à Madrid. Il aime l'Espagne, puisqu'il y
reste, mais il doit regretter la France, car je
trouve sur tous ces tableaux une teinte grise
- qi|i ressemble à un demi-deuil mélancoli-
1 ement porté. Je sais bien qu'il y a une Es-
pagne vêtue d'amadou dans l'ombre. Mais je
m'étonne toujours de la retrouver dans des
tableaux français. Ce n'est pas une cigarette,
mais un poignard qui serait à sa place dans
la main de votre fumeur, cher' monsieur
Allard. Croyez-en un ami inconnu et prome-
nez votre talent au soleil. On m'assure que
le soleil luit quelquefois à Madrid.
I M. RODOLPHE JULIAN. — 1,352, Portrait de
M. Millet député du département de Vaucluse.
— M. Julian est un artiste de talent et un
homme d'esprit. L'artiste fait d'excellents
portraits; l'homme a su faire fortune., Qui
ne se rappelle .l'arène athlétique de la rue
Lepeletier, les leveurs de poids, les lutteurs
masqués, les gens auxquels on tirait des
coups de pistolet et les mangeurs de feu?...
M. Julian était l'imprésario de la compagnie.
C'est lui qui avait installé le cirque, qui si-r
gnait les engagements, payait les appointe*
ments, balançait la dépense et la recette. Il
collaborait même, assure-t-on, à ces affiches
sans rivales qui excitaient les cris J'admira.
tion des Parisiens. La presse tout entière fut
heureuse de contribuer à la popularité de
l'entreprise. Riche maintenant, M. Julian
tient à nous remercier en nous présentant
de bons tableaux.
Qu'il soit, cpmme toujours, le: bien
venu !...
Je passe devant une demi - douzaine de
tableaux que je mentionne avec plaisir :
M. CAPOUL. — 414 , Un jeune homme. —
Ce jeune homme est très-bien ; il a une
figure intelligente et me semble aimer le con-
fortable et les arts.
M. JOHN LEWIS BROWN.- 364, Régiment de
cuirassiers du roi pendant la guerre de sept
ans. — « Messieurs les Maîtres, assurez vos
chapeaux, nous avons l'honneur de charger ! »
— Ils les assurent ; les chevaux baissent ou
secouent la tête. C'est une vraie bataille...
M. ADOLPHE SCHREYER. — 2275, Chevaux
valaques effrayés par les loups. — Dans un '
paysage d'automne aux tons chauds et roux,
deux loups se tiennent à l'affût. Dans un coin
des chevaux s'eitarent ; les uns ruent ; les au-
tres se dressent; d'autres se secouent dans un
frisson. Tout cela forme un groupe plein de
mouvement et de vie. C'est excellent.
FTÀ. CHARLES VOILLEMOT. — 2528, Le Nid. —
Une? jeune fille rose et diaphane tient un nid
plein d'œufs. La mère des petits oiseaux à
venir voltige attristée dans un ciel vert tendre.
— On rêve ces sortes de choses, dirait un cri-
tique brutal, on ne les peint pas... Pourtant
c'est bien joli. Prononcez li Ii.
M. SCHENCK. — 2.254, Autour de l'auge.
Une demi.-douzaine de têtes d'ânes sont ali-
gnées, affectant des physionomies diverses.
Impossible de passer devant ce tableau sans
le voir. Les bêtes font: — hi! han!... On
s'arrête, et l'on répond — Heu ! heu!...
M. BLAISE DESGOFFES. — 755, Fruits et Bi-
joux ; 7â6, Bijoux et Fleurs. '— Je n'ai
jamais rien vu d'aussi bien imité.
Et j'en reviens à mes chers paysages.
C'est là qu'il faut chercher aujourd'hui la
note éclatante de la peinture française.
A défaut de l'inspiration virile qui se mani-
feste par l'étude de l'homme, nos artistes ont
du moins le sentiment de la nature propre
aux époques de transition. L'âme lassée s'a-
bandonne, les, yeux se fixent snr la campa-
gne, l'imagination Va...
Le Lever de Lune de DAUBIGNY est si beau
qu'on oublie le premier jour de regarder son
Printemps, 653. — Quelle poésie pourtant
dans cet éparpillement de toutes les choses
jeunes et gaies de la campagne, fleurs blan-
ches des pommiers, fleurs roses des pêchers,
vert pâle de l'herbe, contours indécis et bleuâ-
tres des côteaux !.. Au milieu delà floraison
universelle je vois une jeune fille et un jeune
homme qui marchent entrelacés. La jeune
fille a une robe blanche. Le jeune homme a
perdu son chapeau. Ils se parlent si bas que
les oiseaux oublient de s'envoler sur leur
passage... Pourtant ils pourraient parler
haut : leur voix ne détonnerait pas dans le
bourdonnement printanier qui monte vers le
ciel...
M. BERCHFTRE. — Nomades en marche au
milieu du jour, dans la presqu'He du Sinaï,
(Egypte.)— Nous sommes dans un désert de,
romance, qui est peut-être le vrai. Deux sensa-
tions, celle de la lumière et celle de l'étendue.
Les hommes et les bêtes ne souffrent pas as-
sez. Il fait bien beau là-bas, mais il fait bien
chaud aussi. Tout à l'heure j'admirais, je
voudrais avoir soif maintenant, et j'en veux
au peintre de ne pas m'altérer.
M. PAULHUET, — 1279, les Ruines du châ-
teau de Pierrefonds. — Vieillard, je te con-
nais !... Le vent de 1830 a passé jadis sur
tes cheveux ; il courba toujours tes arbres et
tes buissons ; c'est lui qui ébranle les ruines
de tes châteaux et qui souffle des paroles de .
mort à l'oreille de tes villageois épouvantés...
Vieillard, voici la nuit. Mais lanuit, pour ceux
de ta sorte, est remplie d'éclairs... Vieillard,
je te présente des jeunes gens :
M. HECTOR HANOTEAIf. — 1205, le garde
manger des renardeaux. — M. Hanoteau a
trouvé le secret. de faire éternellement le
même tableau sur les motifs les plus variés.
Premier plan humide, verdure noire, feuil-
lages savamment découpés, au fond une
échappée de lumière,—telle est l'économiede .
ce tableau, qui obtient depuis quatre ans un
succès d'autant plus indiscutable que la cause
en est moins imprévue.
M. CAMILLE BERNIER. — 208, Sentier dam
les genets, près Bannalec (Finistère). —Le
sentier finit dans-un horizon de soleil, vrai
peut-être, mais prétentieux à coup sûr. L'art,
c'est le choix, M. Bernier ne doit pas l'ou-
blier. Ce que je n'oublierai pas non plus,
c'est la sensation de nature que m'a fait éprou-
ver son tableau. Je voudrais passer une heure
étendu dans ces genets, sur le penchant de
ce coteau breton...
M. JULES HEREAU. — 1238. Les ramasseurs
de varech sur la plage de Bretagne; mer
descendante. — Je tiens à rester aujourd'hui
sur une bonne impression. L'exposition de
M. Héreau est presque d'un maître. Cette
charrette, cet attelage, ces pêcheurs, toutes
ces choses humbles et fortes des côtes, mises ^
en relief par une mer pâle sous un ciel da
nuées, forment un des spectacles les plus
saisissants qui soient. Il y a, dans ce tableau,
la sincérité d'une étude et la profondeur d'un
sentiment.
TONY RÉVILLON.
ROCAMBOLE
LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
QUATRIÈME PARTIE
UN DRAME DANS LE SOUTWARK
LI
No 194
L'abbé Samuel fut donc conduit à New.
gâte.
Le bon et jovial sous-directeur n'avait pas
revu le prêtre irlandais depuis l'exécution man-
quée de John Colden.
Il se montra donc fort étonné én voyant
Voir le numéro du 22 novembre.
l'abbé entrer dans le greffe, escorté par les trois
policemen. #
Ceux-ci montrèrent l'ordre d'arrestation.
Le sous-gouverneur n'en pouvait croire ses
yeux.
Outre que l'accusation lui paraissait absurde,
il n'avait pas reçu d'avis préalable» ce qui se
fait toujours.
Il jura donc qu'il y avait au moins méprise
sur ce dernier fait, et que c'était soit à Bath
square, soit à Mil banck, qu'on aurait dû con-
duire le prisonnier.
Mais l'ordre était formel; il ne portait aucune
mention particulière qui précisât le régime au-
quel il devait être soumis.
Le sous-gouverneur fit mettre l'abbé Samuel
dans la cellule la plus confortable de la prison,
et lui témoigna les plus grands égards.
Le jeune prêtre était résigné.
Il savait bien que son innocence serait dé-
montrée, mais il savait aussi qu'il avait désor-
mais un ennemi implacable dans le révérend
Peters Town, et il connaissait la puissance de
cet homme.
— Si on ne peut frapper l'assassin en moi,
se dit-il, on frappera l'Irlandais.
Et il se prit à soupirer en pensant à tous les
pauvres gens dont il était la consolation et qui
. ne le reverraient peut-être plus.
Cependant, son séjour à Newgate devait ê':re
de courte durée. % ê ■
Il y était à peine depuis trois heures que la
porte de sa cellule s'ouvrit livrant passage au
sous-directeur.
. Celui-ci était plus joyeux enc:re qu'à l'ordi-
naire, et il tendit les mains à l'abbé Samuel.
- J'ai de bonnes nouvelles à vous donner,
lui dit-il; on vient de me transmettre le dossier
et je suis au courant de votre affaire. qb
— Ah! dit l'abbé Samuel avec calme.
— Vous êtes accusé dumeurtre d'un homme
du Soutwark, appelé Paddy, mais sa femme
seule vous accuse, et peu de gens croient à cette
accusation.
Par conséquent, il ne tous)!era probablement
pas difficile de vous disculper.
— Je l'espère, dit le prêtre.
— On va vous conduire devant le magistrat,
poursuivit le sous-gouverneur, et vous serez con-
fronté avec le cadavre.
Puis, il est probable que vous serez admis à
fournir caution, et qu'on vous remettra en li-
berté.
— Hélas ! dit le prêtre, pour fournir caution
il faut avoir de l'argent, et beaucoup.
— Bah ! on en trouve toujours dans ces cas-
là. Bon courage, et ne craignez rien.
k L'abbé Samuel fut donc extrait- de Newgate.
et conduit dans une voiture cellulaire jusque
dans le Stutwark.
Le magistrat avait tenu parole au prétendu
Conrad Haüser, le soi-digant médecin alle
mand.
Le corps de Paddy était demeuré dans sa
maison, couché sur le sol et gardé par une es-
couade de policemen. Seulement des voisins
charitables avaient emmené et recueilli les deux
enfants.
Quant à la femme, elle était demeurée là, ar-
dente, les yeux secs, ivre de fureur et altéréa
de vengeance.
La foule stationnait nombreuse toujours, dans
le passage et aux abords de la maison.
Quelques huées accueillirent l'abbé Samuel
quand il sortit de voiture, mais ces huées furent
aussitôt reprimées par des applaudissements.
Si l'abbé Samuel avait ses ennemis et ses
détracteurs, il avait aussi de chauds partisans.
Il entra donc calme et le front haut dans la
maison où était le corps et où on avait impro-
visé une sorte d'estrade pour le magistrat de
police.
A sa vue, Lisbeth se leva comme une furie:
— Assassin! dit-elle, assassin!
Et elle lui montra le poing; et il fallut que
dèux policemen s'emparassent d'elle pour l 'em-
pêcher de se ruer sur l'abbé Samuel.
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 96.03%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 96.03%.
- Collections numériques similaires Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "BnPlCo00"
- Auteurs similaires Balathier Bragelonne Adolphe de Balathier Bragelonne Adolphe de /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Balathier Bragelonne Adolphe de" or dc.contributor adj "Balathier Bragelonne Adolphe de")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k47177611/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k47177611/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k47177611/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k47177611/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k47177611
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k47177611
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k47177611/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest