Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-01-06
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 06 janvier 1868 06 janvier 1868
Description : 1868/01/06 (A3,N627). 1868/01/06 (A3,N627).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717629g
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
LA PETITE PRESSE
1
& cent. le numéro x JOURN AL QUOTIDIEN.- - . V., * 1 5 cent. le numéro
ABONNEMENTS. — Trois mois. ^ Six mois. Un an.
Paris 5 fr. 9 fr. 18 fr. ~
Départements.. G Il ee
- Administrateur : E. DELSAUX.
3me année. — LUNDI 6 JANVIER 1868.' - K" 6É7 1
IHrejlcyr-Propriefair3 •: JANNIN.
■R-U-- cJcitr et c'icf : A. DE RALATHIEU BRAGELONNE.
BUN?.A *JX n A*R, ;IN M : '5. r:-se' H;!"nno¡.
ADMINISTRATION : 13, place Broda
PARIS, 5 JANVIER 1868.
LA LETTRE DE MGR D'ALGER
. V y
A sept cent soixante kilomètfts~jd^--Mar-
* ;rdle, au-delà de la Méditerranée, battue
d'un côté par les flots de la mer, de l'autre
. par les vagues de fiable du désert, s'étend une
région fa vr. risée. Son étendue est colle de
=uix."Litc-huit de nos départements, à pen,près
las trois quarts de celle de la France. Mais les
habitants y sont sept ou huit fois moins nom-
breux.
Deux grandes divisions du sol : le Tell-et
te Sahara. 1 *
Le Tell, ce sont les valléesNarrosées par des
rivières et les plaines coupées par des bois.
Là. 0:1 laboure, on sème, on récolte.
Le Sahara, ou Région des Palmiers, ne
produit que des pâturages. Ses plaines arides
30nt semées d'oasis. Au-delà,s'étend le Désert.
La population est mélangée à l'infini. Espa-
gnols, Maures, Juifs, Turcs, Nègres, Bédouins,
un amas de peuples de toutes les races et de
toutes les origines, couvre le sol.
Les Bédouins eux-mêmes se subdivisent en
Kabiles, tribus de sang Vandale, sédentaires
et agricoles, - ceux du Tell , et en Arabes-
.proprement, dits, nomades et pasteurs,— ceux
du Sahara.
Les Kabiles, logés dans desxmaisons de
pierres, représentent vaguement, en Afrique,
nos anciennes communes ayant leurs privilè-
ges et leurs lois, tandis que les Arabes, trans-
portant au gré du .maître-leurs tentes en
peaux de chameaux, rappellent l'organisation
aristocratique et paternelle des sociétés à leur
début. A eux les sables sans fin, les plainès
sans culture, les montagnes nues ; à eux aussi,
les grands horizons, les vertes oasis et les pâ-
turages abrités ; à eux , la vie de privations
et d'aventures, qui fait les po'étes et les sol-
dats...
%
Les livres, ies tableaux, les récits des voya-
geurs, les rapports officiels ont popularisé en
France ce pays et les mœurs .de ceux qui
l'habitent.
On sait qu'avant-1830, la suzeraineté tur-
que pesait sur la féodalité bédouine, qui
pesait à son tour sur la masse du peuple.
On sait encore que la conquête française
fut un bien pour ces malheureux livrés, aux
>deux ou trois tyrannies superposées des so-
piétés orientales.
| Les Français, lorsqu'ils envahissent et co-
lonisent, ne ressemblent en rien aux Saxons.
Ces dernier-, en eflet,. se substituent pure-
ment et simp'ement aux anciens tyrans, et
les vaincus ne gagnent, rien nu changement
de maître, — voyez l'Inde.; ou bien, ils re...
foulent et détruisent les premiers possesseurs
du sol, pour prendre leur placé, — voyez les
Etiits-Unis d'Amérique-
Les Français, au contraire, essayent d'amé-
liorer le sort des indigènes. l1s apportent avec
eux de mcil!eures lois, des coutumes plus
douces, et ce sentiment de fraternité, aussi
naturel chez eux dans la conquête que l'élan
dans la bataille.
La colonisation marche moins vite; car on
civilise, au lieu d'exterminer. Mais l'humanité
trouve son compte à ce système, et les droits
de l'humanité, n'en déplaise à l'aristocratie
anglaise, sont supérieurs à la richesse de la
mère-patrie.
Aujourd'hui l'Algérie est une province
française. Tout ce qui à touche ses intérêts
nous intéresse. On se, félicite de ce qui reut
I lui arriver d'heureux; on s'attr.ste de-ses
1 désastres et de ses douleurs...
i . -
C'est donc avec un chagrin profond ,que
nous avons appris l'arrivée à Paris de Mon-
seigneur d'Alger, et la cause de son séjour.
Mgr d'Alger vient s'adresser à la mèriv
patrie et lui demander de secourir la colonie
désolée.
Son appel est navrant. -
« C'est la FAMINE, avec toutes ses horreurs,
qui décime-la population indigène déjà éprou-
vée par les ravages du choléra. Deux années
de sécheresse, l'invasion des sauterelles ont
épuisé toutes ses ressources. Depuis plusieurs
mois, un grand nombre d'Arabes ne vivent
plus que de l'herbe des champs ou des feuilles
des arbres,qu'ils broutent comme lesanimaux;
et maintenant, avec un h:vel' plus rigoureux
que d'habitude,leurs corps épuisés ne résistent
plus ; ils meurent littéralement de faim.
» On les voit presque nus, couverts de hail-
lons, errer pat troupes, sur les routes, dans
le voisinage des villes d'où on a été obligé de
Tes éconduire, pour éviter des désordres de
toute.espèce ; on les voit, attendant les tom-
bercaux qui- enlèvent les immondices, pour
se les disputer et les dévorer. Rien ne les '
rebute. Ils vont jusque déterrer, pour les'!
mang-r, les animaux morts de maladie. !!s [
enlèvent ceux de nos colons, qui sont obligés 1
de garder leurs fermes, le fusil il la main.
Chose affreuse à dire, plus .• tireuse encore ù
i voir, on-^n trouve, chaque matin sur les rou-
tes, da.ns'1es champs, étendus morts d'inani-
tion. On en a trouvé jusqu'à si-x, huit, d x et
douze ensemble, à côté les uns des autres.
» .., Lorsque ces pauvres gens sentent ve-
nir la mort. cette mort lente et affreuse
qu'amène la faim, ils ne se plaignent pas, ils
ne se révoltant pas, ils s'étendent sur la terre,
au bord-de quelque chemin, s'enveloppent de
leurs hanion:;, se couvrent la face et attendent
leuf dernière heure, en murmurant le nom
d'Allah.
» C'est ainsi qu'ils sont morts du choléra
durant tout-cet été, c'esLainsi qu'ils meurent
maintenant de faim, littéralement fauchés par
ces fléaux comme la moisson par la main du
moissonneur.
» Des calculs, qui ne sont pas exagérés, font
monter jusqu'à plus de cent mille le nombre
des victimes dans ces six derniers mois! Jugez
par-la, mes frères, du nombre des veuves, des '
orphelins, des- vieillards restés sans res-
sources.
» Ces malheureux se présentent en longues
troupes dans les cours des fermes, aux portes
des cites. On recueille les petits enfants sur les
chemin?, quelquefois suspendus encore au
sein df; leurs mères mortes, quelquefois aussi
eux-mêmes expirants.
il apporté que j'ai adoptés. Mgr l'é-
vêque d'Oran m'écrivait avant-hier qu'on lui
en avait apporté de même. 11 me disait que
près de lui, comme près de moi, on meurt de
faim, et je sais que la misère n'est pas moins
grande dans la province de Constantine.
» Dans ces tristes circonstances, le gouver-
nement de l'Algérie remplit admirablement
son devoir. Du travail est proposé à tous les
hommes valides, et il y en aura pour tous.
» Un secours extraordinaire est aussi de-
mandé au Corps législatif, et il sera sans doute
accordé.
-» Mais ce secours sera certainement bien
insuffisant pour les orphelins surtout, qu'il
s'agit d'adopter, d'élever. C'est donc pour
eux, pour ces pauvres enfants, cfbe je sollicite
la charité des âmes chrétiennes et généreu-
j ses. Il faudrait pouvoir tous les recueillir.
Nos.bonnes sopurs se chargeraient volontiers
«le cette œuvre de miséricorde. Mais ce sont
les ressources qui leur manquent et qui me
manquent absolument à moi-même. Avant
de solliciter la charité des autres, j'ai doniaé
tout ce que j'avais ; maintenant, je recevrai
avec reconnaissance ce que, la charité m'en-
verra à Alger, où je vais rentrer demain... i
Je voudrais citer jusqu'au bout cette admi-
rable lettre :
« 'Ce n'est pas sans timidité, dit en --termi.
nant Mgr d'Alger, que j'adresse--cet appel
aux chrétiens de-France, mais s'ils ne peu-
vent nous secourir, ils comprendront, du
moins, le sentiment qui dicte ma démarche.
Je suis évêque, c'est-à-dire père, et, quoique
ceux pour lesquels je plaide ici ne me' don-
nent pas ce titre, je les aime comme mes fils,
et je cherche à, le leur prouver; heureux, si,
je ne puis leur communiquer ma foi, d'exer-
cer du moins la charité envers ces pauvres
créatures de Dieu !... »
Pourquoi de la timidité, Monseigneur?
Certes, l'hiver est rigoureux en France. Des
milliers et des milliers de malheureux, cher
nous, souffrent du froid, et, parfois de lé
faim. l'lais nous avons aussi .des milliers et
des milliers de riches. A défaut des riches,
qui prennent sur leur superflu, nous avons
les travailleurs, qui prélèvent sur leur néces-
saire, quand leurs frères sont dans le besoin.
« Les grandes infortunes sont éloquentes, D
a dit Lamartine.
Rappelez-vous, Monseigneur, les inonda-
. tions de la Loire et celles du llhône, la crise
cotonnière à Rouen. Partout s'ouvraient des
souscriptions, et, depuis le millionnaire jus-
qu'à l'ouvrier, depuis les sociétés jusqu'à l'in-
dividu, c'était à qui apporterait son billet de
banque ou son gros sou.
Il en sera de même aujourd'hui, Monsei-
gneur. Personne ne restera sourd à votfe
appel. Vous retournez bientôt, dites-vous,
à Alger. Eh ! bien, vous pourrez porter à la
colonie cette bonne nouvelle que la France
s'occupe d'elle, et qu'elle a le même cœur
pour tousses citoyens, qu'ils habitent en deçà
ou au-delà de la Méditerranée.
TONY RÉVILLON.
ROCAMBOLE
mess=""58 LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
PREMIÈRE PARTIE
L'ENFANT PERDU
XVIII
L'homme gris soulevait le marteau de la porte
d'entrée de la cour de police quelques minutes
après.
L'homme d'aspect misérable, qui n'était autre
qu'un des quatre qui avaient eu rendez-vous à
Saint-Gilles, le 26 octobre dernier, avait obéi.
ig îiuuiiro du S aevenabre.
Il avait dit à la servante de M. Thomas
Elgin qu'il reviendrait, et il s'en était allé.
Seulement, il avait suivi l'homme gris à dis-
tance.
La jolie miss Katt Bo-th avait donc un peu
dérangé le rideau de la croisée et regardé dans
la rue.
La tournure élégante du visiteur produisit sur
la curieuse jeune fille une telle impression,
qu'au Jieu d'appeler Tobby, le secrétaire de
M. Booth, elle alla ouvrir elle même.
— Bonjour,ma belle enfant, dit l'homme gris,
je crains bien de me tromper. Une aussi jolie
personne que vous ne saurait être une geôlière
et on m'a mal indiqué sans doute.
— Que cherchez-vous, mJ-Iord ? demanda mis
Katt.
— La cour de police de Kilburn.
— C'est bien ici.
L'homme gris entra.
— Et je désirerais parler à M. Booth, ajou-
ta-t-il.
— C'est mon père.
' - En vérité! par saint George, ma mignonne,
il doit être fier d'avoir une fille aussi jolie que |
vous.
Katt rougit jusqu'au blanc des yeux, elle ne
put s'empêcher de songer que -le le visiteur était
charmant.
L'homme gris poursuit :
— J'ai pour M, Booth une lettre....
— Ah 1
— De M. Thomas Elgin.
— Celui qu'on a failli assassiner la nuit der-
nière?
— Précisément.
Et l'homme gris suivit Katt, qui avait poussé
une porte et était entrée dans le bureau parti-
culier de M Booth.
Là-dessus, il recommença son petit dis-
cours.
— J p. suis un lord excentrique, fit-il, je collec-
tionne des crimes curieux, et j'ai un album que
le lord chancelier de l'échiquier payerait vingt-
cinq mille livres, si je voulais m 'en défaire.
— Mais c'est que mon père est absent, dit
miss Katt.
— Ah ! fit l'homme gris qui parut visiblement
désappointé.
-— Cependant, reprit la jolie fille, j'ai pouvoir
d'ouvrir ses lettres.
L'homme gris tendit le billet de M. Thomas
Eigin.
Miss Katt en prit connaissance.
Puis, comme si elle eût en besoin de prendre
conseil de quelqu'un, elle dit:
— Je vais appeler Tobby.
— Qu'est-ce aue Tobby? .
— Le secrétaire de mon père.
Elle avança un siège au gentleman, alla se
placer en bas de la rampe de l'escalier et
cria :
Tobby ! laissez votre bible descendez au
bureau, on a besoin de vous.
Puis, revenant vers l'homme gris :
— Ah! mylord, ditel!ef si vous saviez comme
il est intéressant et joli, ce pauvre et petit mal-
heureux !
— -Vraiment?
| — Et beau comme un petit 1nge t
— Ah ! '
M. Thomas Elgin a eu beau dire. Ce n'est
~ pas un voleur, poursuivit mis? Katt, et je croii
à son histoire.
— Il a donc raconté son histoire ?
— Oui, mylord. Une histoire bien touchante,
— Je vais,en prendre note, dit l homme gris;
qui lira-de nouveau son calepin.
Alors miss Katt ne se fit pa-s prier; el!e
raconta tout ce que l'homnn gris ne savait que
trop bien; et celui-ci- ne t,-,rit pas en exclama.
tions de surprise et de contentement.
— Oh! très-c-rleux, di;,ait-il, trèS-cu deux
— Mais, continua miss Katt, je ne vous dis
pas tout encore, mylord, et je crois bien que le
pauvre petit sera sauvé demain.
1
& cent. le numéro x JOURN AL QUOTIDIEN.- - . V., * 1 5 cent. le numéro
ABONNEMENTS. — Trois mois. ^ Six mois. Un an.
Paris 5 fr. 9 fr. 18 fr. ~
Départements.. G Il ee
- Administrateur : E. DELSAUX.
3me année. — LUNDI 6 JANVIER 1868.' - K" 6É7 1
IHrejlcyr-Propriefair3 •: JANNIN.
■R-U-- cJcitr et c'icf : A. DE RALATHIEU BRAGELONNE.
BUN?.A *JX n A*R, ;IN M : '5. r:-se' H;!"nno¡.
ADMINISTRATION : 13, place Broda
PARIS, 5 JANVIER 1868.
LA LETTRE DE MGR D'ALGER
. V y
A sept cent soixante kilomètfts~jd^--Mar-
* ;rdle, au-delà de la Méditerranée, battue
d'un côté par les flots de la mer, de l'autre
. par les vagues de fiable du désert, s'étend une
région fa vr. risée. Son étendue est colle de
=uix."Litc-huit de nos départements, à pen,près
las trois quarts de celle de la France. Mais les
habitants y sont sept ou huit fois moins nom-
breux.
Deux grandes divisions du sol : le Tell-et
te Sahara. 1 *
Le Tell, ce sont les valléesNarrosées par des
rivières et les plaines coupées par des bois.
Là. 0:1 laboure, on sème, on récolte.
Le Sahara, ou Région des Palmiers, ne
produit que des pâturages. Ses plaines arides
30nt semées d'oasis. Au-delà,s'étend le Désert.
La population est mélangée à l'infini. Espa-
gnols, Maures, Juifs, Turcs, Nègres, Bédouins,
un amas de peuples de toutes les races et de
toutes les origines, couvre le sol.
Les Bédouins eux-mêmes se subdivisent en
Kabiles, tribus de sang Vandale, sédentaires
et agricoles, - ceux du Tell , et en Arabes-
.proprement, dits, nomades et pasteurs,— ceux
du Sahara.
Les Kabiles, logés dans desxmaisons de
pierres, représentent vaguement, en Afrique,
nos anciennes communes ayant leurs privilè-
ges et leurs lois, tandis que les Arabes, trans-
portant au gré du .maître-leurs tentes en
peaux de chameaux, rappellent l'organisation
aristocratique et paternelle des sociétés à leur
début. A eux les sables sans fin, les plainès
sans culture, les montagnes nues ; à eux aussi,
les grands horizons, les vertes oasis et les pâ-
turages abrités ; à eux , la vie de privations
et d'aventures, qui fait les po'étes et les sol-
dats...
%
Les livres, ies tableaux, les récits des voya-
geurs, les rapports officiels ont popularisé en
France ce pays et les mœurs .de ceux qui
l'habitent.
On sait qu'avant-1830, la suzeraineté tur-
que pesait sur la féodalité bédouine, qui
pesait à son tour sur la masse du peuple.
On sait encore que la conquête française
fut un bien pour ces malheureux livrés, aux
>deux ou trois tyrannies superposées des so-
piétés orientales.
| Les Français, lorsqu'ils envahissent et co-
lonisent, ne ressemblent en rien aux Saxons.
Ces dernier-, en eflet,. se substituent pure-
ment et simp'ement aux anciens tyrans, et
les vaincus ne gagnent, rien nu changement
de maître, — voyez l'Inde.; ou bien, ils re...
foulent et détruisent les premiers possesseurs
du sol, pour prendre leur placé, — voyez les
Etiits-Unis d'Amérique-
Les Français, au contraire, essayent d'amé-
liorer le sort des indigènes. l1s apportent avec
eux de mcil!eures lois, des coutumes plus
douces, et ce sentiment de fraternité, aussi
naturel chez eux dans la conquête que l'élan
dans la bataille.
La colonisation marche moins vite; car on
civilise, au lieu d'exterminer. Mais l'humanité
trouve son compte à ce système, et les droits
de l'humanité, n'en déplaise à l'aristocratie
anglaise, sont supérieurs à la richesse de la
mère-patrie.
Aujourd'hui l'Algérie est une province
française. Tout ce qui à touche ses intérêts
nous intéresse. On se, félicite de ce qui reut
I lui arriver d'heureux; on s'attr.ste de-ses
1 désastres et de ses douleurs...
i . -
C'est donc avec un chagrin profond ,que
nous avons appris l'arrivée à Paris de Mon-
seigneur d'Alger, et la cause de son séjour.
Mgr d'Alger vient s'adresser à la mèriv
patrie et lui demander de secourir la colonie
désolée.
Son appel est navrant. -
« C'est la FAMINE, avec toutes ses horreurs,
qui décime-la population indigène déjà éprou-
vée par les ravages du choléra. Deux années
de sécheresse, l'invasion des sauterelles ont
épuisé toutes ses ressources. Depuis plusieurs
mois, un grand nombre d'Arabes ne vivent
plus que de l'herbe des champs ou des feuilles
des arbres,qu'ils broutent comme lesanimaux;
et maintenant, avec un h:vel' plus rigoureux
que d'habitude,leurs corps épuisés ne résistent
plus ; ils meurent littéralement de faim.
» On les voit presque nus, couverts de hail-
lons, errer pat troupes, sur les routes, dans
le voisinage des villes d'où on a été obligé de
Tes éconduire, pour éviter des désordres de
toute.espèce ; on les voit, attendant les tom-
bercaux qui- enlèvent les immondices, pour
se les disputer et les dévorer. Rien ne les '
rebute. Ils vont jusque déterrer, pour les'!
mang-r, les animaux morts de maladie. !!s [
enlèvent ceux de nos colons, qui sont obligés 1
de garder leurs fermes, le fusil il la main.
Chose affreuse à dire, plus .• tireuse encore ù
i voir, on-^n trouve, chaque matin sur les rou-
tes, da.ns'1es champs, étendus morts d'inani-
tion. On en a trouvé jusqu'à si-x, huit, d x et
douze ensemble, à côté les uns des autres.
» .., Lorsque ces pauvres gens sentent ve-
nir la mort. cette mort lente et affreuse
qu'amène la faim, ils ne se plaignent pas, ils
ne se révoltant pas, ils s'étendent sur la terre,
au bord-de quelque chemin, s'enveloppent de
leurs hanion:;, se couvrent la face et attendent
leuf dernière heure, en murmurant le nom
d'Allah.
» C'est ainsi qu'ils sont morts du choléra
durant tout-cet été, c'esLainsi qu'ils meurent
maintenant de faim, littéralement fauchés par
ces fléaux comme la moisson par la main du
moissonneur.
» Des calculs, qui ne sont pas exagérés, font
monter jusqu'à plus de cent mille le nombre
des victimes dans ces six derniers mois! Jugez
par-la, mes frères, du nombre des veuves, des '
orphelins, des- vieillards restés sans res-
sources.
» Ces malheureux se présentent en longues
troupes dans les cours des fermes, aux portes
des cites. On recueille les petits enfants sur les
chemin?, quelquefois suspendus encore au
sein df; leurs mères mortes, quelquefois aussi
eux-mêmes expirants.
il apporté que j'ai adoptés. Mgr l'é-
vêque d'Oran m'écrivait avant-hier qu'on lui
en avait apporté de même. 11 me disait que
près de lui, comme près de moi, on meurt de
faim, et je sais que la misère n'est pas moins
grande dans la province de Constantine.
» Dans ces tristes circonstances, le gouver-
nement de l'Algérie remplit admirablement
son devoir. Du travail est proposé à tous les
hommes valides, et il y en aura pour tous.
» Un secours extraordinaire est aussi de-
mandé au Corps législatif, et il sera sans doute
accordé.
-» Mais ce secours sera certainement bien
insuffisant pour les orphelins surtout, qu'il
s'agit d'adopter, d'élever. C'est donc pour
eux, pour ces pauvres enfants, cfbe je sollicite
la charité des âmes chrétiennes et généreu-
j ses. Il faudrait pouvoir tous les recueillir.
Nos.bonnes sopurs se chargeraient volontiers
«le cette œuvre de miséricorde. Mais ce sont
les ressources qui leur manquent et qui me
manquent absolument à moi-même. Avant
de solliciter la charité des autres, j'ai doniaé
tout ce que j'avais ; maintenant, je recevrai
avec reconnaissance ce que, la charité m'en-
verra à Alger, où je vais rentrer demain... i
Je voudrais citer jusqu'au bout cette admi-
rable lettre :
« 'Ce n'est pas sans timidité, dit en --termi.
nant Mgr d'Alger, que j'adresse--cet appel
aux chrétiens de-France, mais s'ils ne peu-
vent nous secourir, ils comprendront, du
moins, le sentiment qui dicte ma démarche.
Je suis évêque, c'est-à-dire père, et, quoique
ceux pour lesquels je plaide ici ne me' don-
nent pas ce titre, je les aime comme mes fils,
et je cherche à, le leur prouver; heureux, si,
je ne puis leur communiquer ma foi, d'exer-
cer du moins la charité envers ces pauvres
créatures de Dieu !... »
Pourquoi de la timidité, Monseigneur?
Certes, l'hiver est rigoureux en France. Des
milliers et des milliers de malheureux, cher
nous, souffrent du froid, et, parfois de lé
faim. l'lais nous avons aussi .des milliers et
des milliers de riches. A défaut des riches,
qui prennent sur leur superflu, nous avons
les travailleurs, qui prélèvent sur leur néces-
saire, quand leurs frères sont dans le besoin.
« Les grandes infortunes sont éloquentes, D
a dit Lamartine.
Rappelez-vous, Monseigneur, les inonda-
. tions de la Loire et celles du llhône, la crise
cotonnière à Rouen. Partout s'ouvraient des
souscriptions, et, depuis le millionnaire jus-
qu'à l'ouvrier, depuis les sociétés jusqu'à l'in-
dividu, c'était à qui apporterait son billet de
banque ou son gros sou.
Il en sera de même aujourd'hui, Monsei-
gneur. Personne ne restera sourd à votfe
appel. Vous retournez bientôt, dites-vous,
à Alger. Eh ! bien, vous pourrez porter à la
colonie cette bonne nouvelle que la France
s'occupe d'elle, et qu'elle a le même cœur
pour tousses citoyens, qu'ils habitent en deçà
ou au-delà de la Méditerranée.
TONY RÉVILLON.
ROCAMBOLE
mess=""58 LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
PREMIÈRE PARTIE
L'ENFANT PERDU
XVIII
L'homme gris soulevait le marteau de la porte
d'entrée de la cour de police quelques minutes
après.
L'homme d'aspect misérable, qui n'était autre
qu'un des quatre qui avaient eu rendez-vous à
Saint-Gilles, le 26 octobre dernier, avait obéi.
ig îiuuiiro du S aevenabre.
Il avait dit à la servante de M. Thomas
Elgin qu'il reviendrait, et il s'en était allé.
Seulement, il avait suivi l'homme gris à dis-
tance.
La jolie miss Katt Bo-th avait donc un peu
dérangé le rideau de la croisée et regardé dans
la rue.
La tournure élégante du visiteur produisit sur
la curieuse jeune fille une telle impression,
qu'au Jieu d'appeler Tobby, le secrétaire de
M. Booth, elle alla ouvrir elle même.
— Bonjour,ma belle enfant, dit l'homme gris,
je crains bien de me tromper. Une aussi jolie
personne que vous ne saurait être une geôlière
et on m'a mal indiqué sans doute.
— Que cherchez-vous, mJ-Iord ? demanda mis
Katt.
— La cour de police de Kilburn.
— C'est bien ici.
L'homme gris entra.
— Et je désirerais parler à M. Booth, ajou-
ta-t-il.
— C'est mon père.
' - En vérité! par saint George, ma mignonne,
il doit être fier d'avoir une fille aussi jolie que |
vous.
Katt rougit jusqu'au blanc des yeux, elle ne
put s'empêcher de songer que -le le visiteur était
charmant.
L'homme gris poursuit :
— J'ai pour M, Booth une lettre....
— Ah 1
— De M. Thomas Elgin.
— Celui qu'on a failli assassiner la nuit der-
nière?
— Précisément.
Et l'homme gris suivit Katt, qui avait poussé
une porte et était entrée dans le bureau parti-
culier de M Booth.
Là-dessus, il recommença son petit dis-
cours.
— J p. suis un lord excentrique, fit-il, je collec-
tionne des crimes curieux, et j'ai un album que
le lord chancelier de l'échiquier payerait vingt-
cinq mille livres, si je voulais m 'en défaire.
— Mais c'est que mon père est absent, dit
miss Katt.
— Ah ! fit l'homme gris qui parut visiblement
désappointé.
-— Cependant, reprit la jolie fille, j'ai pouvoir
d'ouvrir ses lettres.
L'homme gris tendit le billet de M. Thomas
Eigin.
Miss Katt en prit connaissance.
Puis, comme si elle eût en besoin de prendre
conseil de quelqu'un, elle dit:
— Je vais appeler Tobby.
— Qu'est-ce aue Tobby? .
— Le secrétaire de mon père.
Elle avança un siège au gentleman, alla se
placer en bas de la rampe de l'escalier et
cria :
Tobby ! laissez votre bible descendez au
bureau, on a besoin de vous.
Puis, revenant vers l'homme gris :
— Ah! mylord, ditel!ef si vous saviez comme
il est intéressant et joli, ce pauvre et petit mal-
heureux !
— -Vraiment?
| — Et beau comme un petit 1nge t
— Ah ! '
M. Thomas Elgin a eu beau dire. Ce n'est
~ pas un voleur, poursuivit mis? Katt, et je croii
à son histoire.
— Il a donc raconté son histoire ?
— Oui, mylord. Une histoire bien touchante,
— Je vais,en prendre note, dit l homme gris;
qui lira-de nouveau son calepin.
Alors miss Katt ne se fit pa-s prier; el!e
raconta tout ce que l'homnn gris ne savait que
trop bien; et celui-ci- ne t,-,rit pas en exclama.
tions de surprise et de contentement.
— Oh! très-c-rleux, di;,ait-il, trèS-cu deux
— Mais, continua miss Katt, je ne vous dis
pas tout encore, mylord, et je crois bien que le
pauvre petit sera sauvé demain.
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