Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1867-12-17
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 17 décembre 1867 17 décembre 1867
Description : 1867/12/17 (A2,N607). 1867/12/17 (A2,N607).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717609q
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
LA PETITE PRESSE
JOURNAL QUOTIDIEN
S ml le numéro
5 cent. le numéro 1
Abonnements. — Trois mois. six mois. • un an..
Paris.......... S fr. ^ 9 fr. 1 s fr.
. Départements.. 6 ' i 1
Administrateur : E. Delsaux. e Z,
2e année. — MARDI
DÜ'cctcur-Propriéiaire : Jannin.
Rédacteur en chef : A. DE Balathier. Bragelonne.
BUREAUX d'abonnement : S, rate Drouot.
A pministration -. 13, place Breda.
La Presse il1ustrle journal hobdomn-
duirc à -10 centimes, est vendus 5 cen-
tirïics seulement il. . toute personne qui
' achète la Petite Presse le samedi à Paris
; et le 'dimanche en province.
PARIS, 16 DÉCEMBRE 1867.
LES SALLES D'ASILE
Hier, à Saint-Sulpice, une assemblée re-
cueillie assistait au service funèbre de Ma-
dame Chevreau-Lemercier, inspectrice-géné-
rale des salles d'asile de France.
-Mme Chevreau avait eu le mérite de con-
sacrer sa vie à une de ces œuvres utiles qui
sont l'honneur d'une nation.
* *
Quelque partisan que je sois de l'Univer-
sité, je n'aime pas à voir enrégimenter les pe-
tits enfants.
L'éducation première doit être surtout l'œu-
vre de la famille. Quand l'enfant a reçu au
foyer les notions élémentaires de la justice et
du droit, il est plus apte à recevoir l'instruc-
tion publique et forcément uniforme de l'école
et du collège. Puis, le monde vient, dont il
reçoit l'enseignement pratique, dans la liberté
de sa conscience et de ses actes.
Ainsi, la mère au début ; ensuite, le maî-
tre; ensuite, les événements... De cette triple
éducation, le caractère de l'individu doit sor-
tir, non pas transformé, mais développé dans
le sens de la nature.
Qu'un des éléments fasse défaut, l'individu
sera incomplet, partant malheureux.
Il y a donc, dans le souci du sort des en-
fants, tout un problème social, et l'on com-
prend que ce problème ait tenu la place la
plus importante dans les préoccupations des
philosophes, des législateurs et des hommes
de bien.
La mère, au début. Mais, si la mère ne
peut s'occuper de son enfant !...
Certes, l'idéal serait que la femme put se
livrer tout entière à la famille, qu'elle n'eût
besoin de demander à aucun travail un gain
nécessaire, qu'elle pût donner tout son temps
à son ménage, à son mar,', à ses fils et à ses
filles.
Mais il ne s'agit, pas seulement d'idéal
dans la vie. La moyenne du salaire d'un ou-
vrier ne suffit pas à son entretien et a'ce!ni
des siens. Celte moyenne est de quatre francs
dans les grandes villes. La moyenne des fa-
milles est de quatre personnes. Les quatre
francs ne suffisent pas. La femme est donc
forcée de travailler de son côté,
Pendant que le père sera à- t'a.teiim', peu- |
dant que la mère coudra, lavera, se livrera
aux pratiques d'un métier, que deviendront
les enfants? Qui les surveillera ? Qui les diri-
gera dans le sens de leur nature ? Qui leur
donnera ces premières notions du juste et de
l'injuste, ineffaçables dans les esprits jeunes?
Qui suppléera aux impressions, aux enseigne-
ments qui résultent de l'exemple et des pa-
roles des parents ?...
Les salles d'asile ont le mérite de répondre,
dans une large mesure, à' ces diverses ques-
tions. ~ -
L'histoire des salles d'asile en France est,
il faut le dire bien haut, à la gloire de l'ini-
tiative privée, si rare chez nous. j
Dans la seconde mbitié du dix-huitième '
siècle, lé pasteur d'une petite commune des
Vos-ges fonda dans cinq villages des écoles de
petits enfants. -
On appelait ces écoles des écoles à tricoter. 1
Elles étaient dirigées par des femmes qu'on j
•nommait conductrices. i
Là venaient les petits enfants de la mon-
tagne, pendant que leurs parents étaient aux
champs. On leur apprenait à chanter, à lire,
et à faire des bas. t,
Qui sait aujourd'hui le nom du pasteur !
Oberlin, et ceux de Sara Bauzet et de Louise
Echeppler, les deux femmes dévouées qui fu-
rent fières de le seconder dans son oeuvre ?...
Telle est la première tentative de salles
d'asiles en France. M. Auguste Cochin
nous a raconté la seconde : « En 1801, une
femme d'un haut mérite et d'un admirable
cœur madame la marquise de Pastoret,
n.ilait visiter une pauvre blanchisseuse; elle
la trouva revenant de son travail, après une
journée passée loin de ses enfants : le dernier
né était tombé de son berceau, et baignait
dans son sang. Un autre jour, madame de
Pastoret vit un enfant de quelques mois con-
fié à la garda d'une petite sœur do sept [
ans; on avait attaché la plus petite sur le I
dos de l'aînée,'et le» pauvres enfants restaient j
ainsi lies l'un à l'autre tout le jour. Mme de
Pastoret fit défaire les ions, et s'apeiçatque
le nouveau-né avait déjà la colonne dorsale
complètement contrefaite. Elle ressentit dans
son cœur une telle émotion de ces pitoyables
spçctacIes, qu'elle'se promit -de trouver un
moyen de garder et de protéger les pauvres
enfants que leurs mères ne pouvaient sur-
veiller elles-mêmes, et, bientôt elle satisfit sa
pitié en confiant à une sœur de la charité
douze berceaux établis dans une chambre de
la rue Miromesnil. Les mères des enfants qui
y furent admis les apportaient le matin, les
venaient allaiter deux fois dans le jour et les
emportaient le soir. C'était, on le voit, plutôt
une crèche qu'une salle d'asile. Celte fois,
rœuvre ne put se développer. Madame de
Pastoret éleva toutes les petites filles de ces
berceaux avec une charité toute maternelle ; '
mais la'salle d'hospitalité dût être transformée
en une écolo ordinaire » i
Un manufacturier écossais, M. Owen, de
; Newlanark, créa la prèmière salle d'asile ana-
logue à celles que nous possédons aujour-
d'hui.
} C'était en 18iT. M. Owen occupait, dans
ses ateliers, une masse d'ouvriers et d'ou-
vrières. Cent cinquante enfants, de deux à
sept ans, se trouvaient ainsi livrés à eux-,
mêmes pendant la journée. Le patron avisa
un' brave homme, un tisserand, nommé Ja-
mes Buchanan, doué de l'amour de l'enfance
poussé jusqu'à la passion. Il le 'charge de
réunir ces enfants et de veiller sur eux. La
chose fit du bruit. Lord Brougham et quel-
ques autres philanthropes s'intéressèrent aux
essais de M. Owen. Les infant's-s-schools fu-
rent organisées régulièrement.
En 18ï6, à Paris, Mme de Pastoret reprit
l'idée anglaise. Un comité de femmes du
monde, présidé par M. l'abbé Des Genettes,
curé des Missions, se forma dans le but d'é-
tablir à Paris des écoles pour les petits en-
fants. Quatre-vingts enfants, de deux à six
ans, furent réunis dans un local dépendant
de l'hospice des Ménages. Des sœurs de la
Providence de Portieux, dans les Vosges, eu-
rent la direction de l'établissement.
Essais infructueux encore, mais qui avaient
eu le mérite d'indiquer nettement la voie.
M. Coebin, maire du douzième arrondisse-
ment de Paris. un des" philanthropes légen-
daires de la vi!le, avait vu fonctionner l'asile
des Ménages. Toute création, s'était-il dit,
demande de sérieuses études préparatoires.
Et il envoya en Angleterre une femme d'une
rare intelligence, Mme Millet, chargée do
s'initier aux détails pratiques des iiif(iii,"s-
'schools. Lui-même alla la rejoindre. A son
retour, il fonda, rue des Martyrs, une salle
d'asile, qui, sous la direc'ion de Mme Millet,/
réussit parfaitement; puis un asile modèle, .
qui fut bientôt suivi d'autres, grâce fux ef-,
forts du comité présidé par M. l'abbé Des Ge-.
nettes. [
Quand il y eut cinq salies d'asile à Paris, 1
le Conseilles hospices adopta l'œuvre, qlIÍ
fut" reconnuA comme établissement d'utilité;
publique. Les progrès de l'institution furent'
rapides. Vingt-quatre asiles furent fondés ca;
onze ans. Madame Adélaïde, sœur de Louis-
Philippe, en devint protectrice. '
Nous sommes en 1833. La loi de M. Guizot
sur l'instruction primaire changea la juridic-
tion des salles-d'asile. C'étaient des établisse-
ments de charité. Désormais, elles durent être
considérées comme des écoles de premier
degré. ' - . i
Le Manuel des fondateurs et directeurs des
salles d'asile, de M. Cochin, est du même1
temps. Après la méthode, le journal ; et , de
1835 à 1840, parut l'Ami de l'enfance, hul-,
le tin des salles d'asile du monde entier.
On discute , on quête, on donne, l'œuvre
s'étend, elle prend une importance qui parfois
dégénère en conflits...
De qui dépendront les salles d'asile ?
L'administration des hospices,-l'adminis-
tration municipale , le gouvernement, s'en-
contestent la juridiction. On crée des 'pon- '.
voirs mixtes. On fait des ordonnances. L'ins-
titution est au-dessus des disputes humaines.
Elle grandit sans cesse et sans relâche... >
Aujourd'hui, elle est plus prospère que
jamais.
*
* *
Une autre fois , chers lecteurs, — le sujet
vaut qu'on y revienne ,— je vous dirai la
législation des salles d'asile , leur direction
leur méthode. Je me borne, pour aujourd'hui,:
à leur historique.
Raconter une œuvre de cette sorte , n'est-
ce pas la plus belle oraison funèbre qu'on'
puisse faire de ceux qui lui ont consacré leurs
1 forces et leur temps :
TONY RÉVILLON.
ROCAMBOLE.,
mess=""N° 38 LES
MISÈRES DE LONDRES PAR
PONSON DU TERRAIL
PROLOGUE
LA NOURRISSEUSE D'ENFANTS
XXXIX
Miss Ellen avait attendu le, secours de lord
Palmure son père, durant toute la nuit.
A minuit ce noble lord, n'était pas rentré,
néanmoins miss Ellen n'était pas très-inquiète)
et elle se disait que sans doute on avait emme-
né le petit Irlandais loin de Londres. ---
. Voir le numéro du 8 novembre.
Sur le derrière de l'hôtel Palmure s'étendait
un grand jardin planté de vieux arbres.
L'appartement de miss Ellen, situé au pre-
mier étage donnait sur ce jardin.
Après avoir vainement attendu son père, miss
Ellen prit le parti" de se mettre au'lit.
Mais, auparavant, fidèle à sa promesse, l'al-
tière jeune fille voulut s'assurer que l'Irlandaise
était toujours en son pouvoir.
Pour plus de sûreté, on avait donné à la pau-
vre mère une chambre qui n'avait pas d'autre
issue que la chambre de miss Ellen elle-même.
Mais toutes ces précautions étaient au moins
inutiles; car Jenny à qui l'on avait représenté
le portrait de sir Edmund, âgé de vingt ans, et
qui avait reconnu son époux, savait maintenant
qu'elle était dans sa famille, et, loin de se défie
de lord Palmure et de sa fille, avait au contraire
en eux une confiance aveugle.
Miss Ellen trouva la pauvre mère debout, les
yeux secs, mais en proie à une anxiété crois-
sait.
Envoyant entrer miss Ellen, elle vint à eller
les bras ouverts.
— Eh bien ! dit-elle, votre père est-il do re-
tour ?
— Pas encore.
— Mon Dieu ! s'il n'allait pas trouver mon
fils?
Un sourire plein d'assurance vint aux lèvres
de miss Ellen.
— Rassurez-vous, dit-elle, mon père tient
tout ce qu'il promet. Il est allé chercher votre
fils et il le ramènera.
— Mais quand ?
— Peut-être cette nuit... peut-être demain
matin seulement. Je vous le répète, l'enfant
était hors de Londres, à la campagne ; il faut le
temps matériel de faire le voyage.
- Oh ! puissiez-vous dire vrai ! murmura
l'Irlandaise en joignant les mains.
- Ma chère, reprit miss Ellen, croyez-moi,
toutes ces émotions que vous avez éprouvées
depuis deux jours vous ont brisée. Vous avez
besoin de repos, mettez-vous au lit et attendez
avec patience et courage le retour de mon
père.
— Je ferai ce que vous voudrez, ma belle de-
moiselle, répondit l'Irlandaise avec soumis-
sion.
— Vous me le promettez?
— Oui.
— Bonsoir donc, ma bonfie, et ayez foi en
nous...
Miss Ellen baisa l'Irlandaise au front.
Celle-ci se mit à genoux au pied de son lit
pour prier avant son coucher.
Miss Ellen sortit.
Elle revint dans sa chambre, songea un mo....
ment à sonner ses femmes pour se faire désha-
biller; puis, cédant à on ne sait quel capricé,'
elle s'approcha d'une fenêtre qu'elle ouvrit. v.
La nuit était sombre, mais elle n'était pas
très-froide. /
Quand le brouillard ne pèse pas sur Londres,
l'atmosphère est tiède, même en automne.
Miss Ellen se prit à rêver, la tête appuyée
dans ses mains et ses coudes sur l'entablement
de la croisée.
Tout à coup elle tressaillit.
Une ombre noire s'agitait dans le jardin,
Etait-ce un liomm§ ou un animal?
'Miss Ellen ne put d'abord s'en rendre
compte.
L'ombre s'approcha.
Alors, la fille du pair d'Angleterre vit briller
dans l'obscurité deux points lumineux. I
. On eût dit les yeux de quelque bête fauve au
fond du bois.
Chose bizarre ! miss Ellen ne se rejeta poin~ j'
en arrière; elle ne referma point la croisée ; elle !
ne courut pas à un cordon dé sonnette pour ap- j
i peler ses gens. - ;
Obéissant à une. mystérieuse fascination, elle
regardait ces deux yeux qui s'avançaient tou-
jours et vinrent s'arrêter au pied d'un arbre, qui ;
montait devant la croisée.
JOURNAL QUOTIDIEN
S ml le numéro
5 cent. le numéro 1
Abonnements. — Trois mois. six mois. • un an..
Paris.......... S fr. ^ 9 fr. 1 s fr.
. Départements.. 6 ' i 1
Administrateur : E. Delsaux. e Z,
2e année. — MARDI
DÜ'cctcur-Propriéiaire : Jannin.
Rédacteur en chef : A. DE Balathier. Bragelonne.
BUREAUX d'abonnement : S, rate Drouot.
A pministration -. 13, place Breda.
La Presse il1ustrle journal hobdomn-
duirc à -10 centimes, est vendus 5 cen-
tirïics seulement il. . toute personne qui
' achète la Petite Presse le samedi à Paris
; et le 'dimanche en province.
PARIS, 16 DÉCEMBRE 1867.
LES SALLES D'ASILE
Hier, à Saint-Sulpice, une assemblée re-
cueillie assistait au service funèbre de Ma-
dame Chevreau-Lemercier, inspectrice-géné-
rale des salles d'asile de France.
-Mme Chevreau avait eu le mérite de con-
sacrer sa vie à une de ces œuvres utiles qui
sont l'honneur d'une nation.
* *
Quelque partisan que je sois de l'Univer-
sité, je n'aime pas à voir enrégimenter les pe-
tits enfants.
L'éducation première doit être surtout l'œu-
vre de la famille. Quand l'enfant a reçu au
foyer les notions élémentaires de la justice et
du droit, il est plus apte à recevoir l'instruc-
tion publique et forcément uniforme de l'école
et du collège. Puis, le monde vient, dont il
reçoit l'enseignement pratique, dans la liberté
de sa conscience et de ses actes.
Ainsi, la mère au début ; ensuite, le maî-
tre; ensuite, les événements... De cette triple
éducation, le caractère de l'individu doit sor-
tir, non pas transformé, mais développé dans
le sens de la nature.
Qu'un des éléments fasse défaut, l'individu
sera incomplet, partant malheureux.
Il y a donc, dans le souci du sort des en-
fants, tout un problème social, et l'on com-
prend que ce problème ait tenu la place la
plus importante dans les préoccupations des
philosophes, des législateurs et des hommes
de bien.
La mère, au début. Mais, si la mère ne
peut s'occuper de son enfant !...
Certes, l'idéal serait que la femme put se
livrer tout entière à la famille, qu'elle n'eût
besoin de demander à aucun travail un gain
nécessaire, qu'elle pût donner tout son temps
à son ménage, à son mar,', à ses fils et à ses
filles.
Mais il ne s'agit, pas seulement d'idéal
dans la vie. La moyenne du salaire d'un ou-
vrier ne suffit pas à son entretien et a'ce!ni
des siens. Celte moyenne est de quatre francs
dans les grandes villes. La moyenne des fa-
milles est de quatre personnes. Les quatre
francs ne suffisent pas. La femme est donc
forcée de travailler de son côté,
Pendant que le père sera à- t'a.teiim', peu- |
dant que la mère coudra, lavera, se livrera
aux pratiques d'un métier, que deviendront
les enfants? Qui les surveillera ? Qui les diri-
gera dans le sens de leur nature ? Qui leur
donnera ces premières notions du juste et de
l'injuste, ineffaçables dans les esprits jeunes?
Qui suppléera aux impressions, aux enseigne-
ments qui résultent de l'exemple et des pa-
roles des parents ?...
Les salles d'asile ont le mérite de répondre,
dans une large mesure, à' ces diverses ques-
tions. ~ -
L'histoire des salles d'asile en France est,
il faut le dire bien haut, à la gloire de l'ini-
tiative privée, si rare chez nous. j
Dans la seconde mbitié du dix-huitième '
siècle, lé pasteur d'une petite commune des
Vos-ges fonda dans cinq villages des écoles de
petits enfants. -
On appelait ces écoles des écoles à tricoter. 1
Elles étaient dirigées par des femmes qu'on j
•nommait conductrices. i
Là venaient les petits enfants de la mon-
tagne, pendant que leurs parents étaient aux
champs. On leur apprenait à chanter, à lire,
et à faire des bas. t,
Qui sait aujourd'hui le nom du pasteur !
Oberlin, et ceux de Sara Bauzet et de Louise
Echeppler, les deux femmes dévouées qui fu-
rent fières de le seconder dans son oeuvre ?...
Telle est la première tentative de salles
d'asiles en France. M. Auguste Cochin
nous a raconté la seconde : « En 1801, une
femme d'un haut mérite et d'un admirable
cœur madame la marquise de Pastoret,
n.ilait visiter une pauvre blanchisseuse; elle
la trouva revenant de son travail, après une
journée passée loin de ses enfants : le dernier
né était tombé de son berceau, et baignait
dans son sang. Un autre jour, madame de
Pastoret vit un enfant de quelques mois con-
fié à la garda d'une petite sœur do sept [
ans; on avait attaché la plus petite sur le I
dos de l'aînée,'et le» pauvres enfants restaient j
ainsi lies l'un à l'autre tout le jour. Mme de
Pastoret fit défaire les ions, et s'apeiçatque
le nouveau-né avait déjà la colonne dorsale
complètement contrefaite. Elle ressentit dans
son cœur une telle émotion de ces pitoyables
spçctacIes, qu'elle'se promit -de trouver un
moyen de garder et de protéger les pauvres
enfants que leurs mères ne pouvaient sur-
veiller elles-mêmes, et, bientôt elle satisfit sa
pitié en confiant à une sœur de la charité
douze berceaux établis dans une chambre de
la rue Miromesnil. Les mères des enfants qui
y furent admis les apportaient le matin, les
venaient allaiter deux fois dans le jour et les
emportaient le soir. C'était, on le voit, plutôt
une crèche qu'une salle d'asile. Celte fois,
rœuvre ne put se développer. Madame de
Pastoret éleva toutes les petites filles de ces
berceaux avec une charité toute maternelle ; '
mais la'salle d'hospitalité dût être transformée
en une écolo ordinaire » i
Un manufacturier écossais, M. Owen, de
; Newlanark, créa la prèmière salle d'asile ana-
logue à celles que nous possédons aujour-
d'hui.
} C'était en 18iT. M. Owen occupait, dans
ses ateliers, une masse d'ouvriers et d'ou-
vrières. Cent cinquante enfants, de deux à
sept ans, se trouvaient ainsi livrés à eux-,
mêmes pendant la journée. Le patron avisa
un' brave homme, un tisserand, nommé Ja-
mes Buchanan, doué de l'amour de l'enfance
poussé jusqu'à la passion. Il le 'charge de
réunir ces enfants et de veiller sur eux. La
chose fit du bruit. Lord Brougham et quel-
ques autres philanthropes s'intéressèrent aux
essais de M. Owen. Les infant's-s-schools fu-
rent organisées régulièrement.
En 18ï6, à Paris, Mme de Pastoret reprit
l'idée anglaise. Un comité de femmes du
monde, présidé par M. l'abbé Des Genettes,
curé des Missions, se forma dans le but d'é-
tablir à Paris des écoles pour les petits en-
fants. Quatre-vingts enfants, de deux à six
ans, furent réunis dans un local dépendant
de l'hospice des Ménages. Des sœurs de la
Providence de Portieux, dans les Vosges, eu-
rent la direction de l'établissement.
Essais infructueux encore, mais qui avaient
eu le mérite d'indiquer nettement la voie.
M. Coebin, maire du douzième arrondisse-
ment de Paris. un des" philanthropes légen-
daires de la vi!le, avait vu fonctionner l'asile
des Ménages. Toute création, s'était-il dit,
demande de sérieuses études préparatoires.
Et il envoya en Angleterre une femme d'une
rare intelligence, Mme Millet, chargée do
s'initier aux détails pratiques des iiif(iii,"s-
'schools. Lui-même alla la rejoindre. A son
retour, il fonda, rue des Martyrs, une salle
d'asile, qui, sous la direc'ion de Mme Millet,/
réussit parfaitement; puis un asile modèle, .
qui fut bientôt suivi d'autres, grâce fux ef-,
forts du comité présidé par M. l'abbé Des Ge-.
nettes. [
Quand il y eut cinq salies d'asile à Paris, 1
le Conseilles hospices adopta l'œuvre, qlIÍ
fut" reconnuA comme établissement d'utilité;
publique. Les progrès de l'institution furent'
rapides. Vingt-quatre asiles furent fondés ca;
onze ans. Madame Adélaïde, sœur de Louis-
Philippe, en devint protectrice. '
Nous sommes en 1833. La loi de M. Guizot
sur l'instruction primaire changea la juridic-
tion des salles-d'asile. C'étaient des établisse-
ments de charité. Désormais, elles durent être
considérées comme des écoles de premier
degré. ' - . i
Le Manuel des fondateurs et directeurs des
salles d'asile, de M. Cochin, est du même1
temps. Après la méthode, le journal ; et , de
1835 à 1840, parut l'Ami de l'enfance, hul-,
le tin des salles d'asile du monde entier.
On discute , on quête, on donne, l'œuvre
s'étend, elle prend une importance qui parfois
dégénère en conflits...
De qui dépendront les salles d'asile ?
L'administration des hospices,-l'adminis-
tration municipale , le gouvernement, s'en-
contestent la juridiction. On crée des 'pon- '.
voirs mixtes. On fait des ordonnances. L'ins-
titution est au-dessus des disputes humaines.
Elle grandit sans cesse et sans relâche... >
Aujourd'hui, elle est plus prospère que
jamais.
*
* *
Une autre fois , chers lecteurs, — le sujet
vaut qu'on y revienne ,— je vous dirai la
législation des salles d'asile , leur direction
leur méthode. Je me borne, pour aujourd'hui,:
à leur historique.
Raconter une œuvre de cette sorte , n'est-
ce pas la plus belle oraison funèbre qu'on'
puisse faire de ceux qui lui ont consacré leurs
1 forces et leur temps :
TONY RÉVILLON.
ROCAMBOLE.,
mess=""N° 38 LES
MISÈRES DE LONDRES PAR
PONSON DU TERRAIL
PROLOGUE
LA NOURRISSEUSE D'ENFANTS
XXXIX
Miss Ellen avait attendu le, secours de lord
Palmure son père, durant toute la nuit.
A minuit ce noble lord, n'était pas rentré,
néanmoins miss Ellen n'était pas très-inquiète)
et elle se disait que sans doute on avait emme-
né le petit Irlandais loin de Londres. ---
. Voir le numéro du 8 novembre.
Sur le derrière de l'hôtel Palmure s'étendait
un grand jardin planté de vieux arbres.
L'appartement de miss Ellen, situé au pre-
mier étage donnait sur ce jardin.
Après avoir vainement attendu son père, miss
Ellen prit le parti" de se mettre au'lit.
Mais, auparavant, fidèle à sa promesse, l'al-
tière jeune fille voulut s'assurer que l'Irlandaise
était toujours en son pouvoir.
Pour plus de sûreté, on avait donné à la pau-
vre mère une chambre qui n'avait pas d'autre
issue que la chambre de miss Ellen elle-même.
Mais toutes ces précautions étaient au moins
inutiles; car Jenny à qui l'on avait représenté
le portrait de sir Edmund, âgé de vingt ans, et
qui avait reconnu son époux, savait maintenant
qu'elle était dans sa famille, et, loin de se défie
de lord Palmure et de sa fille, avait au contraire
en eux une confiance aveugle.
Miss Ellen trouva la pauvre mère debout, les
yeux secs, mais en proie à une anxiété crois-
sait.
Envoyant entrer miss Ellen, elle vint à eller
les bras ouverts.
— Eh bien ! dit-elle, votre père est-il do re-
tour ?
— Pas encore.
— Mon Dieu ! s'il n'allait pas trouver mon
fils?
Un sourire plein d'assurance vint aux lèvres
de miss Ellen.
— Rassurez-vous, dit-elle, mon père tient
tout ce qu'il promet. Il est allé chercher votre
fils et il le ramènera.
— Mais quand ?
— Peut-être cette nuit... peut-être demain
matin seulement. Je vous le répète, l'enfant
était hors de Londres, à la campagne ; il faut le
temps matériel de faire le voyage.
- Oh ! puissiez-vous dire vrai ! murmura
l'Irlandaise en joignant les mains.
- Ma chère, reprit miss Ellen, croyez-moi,
toutes ces émotions que vous avez éprouvées
depuis deux jours vous ont brisée. Vous avez
besoin de repos, mettez-vous au lit et attendez
avec patience et courage le retour de mon
père.
— Je ferai ce que vous voudrez, ma belle de-
moiselle, répondit l'Irlandaise avec soumis-
sion.
— Vous me le promettez?
— Oui.
— Bonsoir donc, ma bonfie, et ayez foi en
nous...
Miss Ellen baisa l'Irlandaise au front.
Celle-ci se mit à genoux au pied de son lit
pour prier avant son coucher.
Miss Ellen sortit.
Elle revint dans sa chambre, songea un mo....
ment à sonner ses femmes pour se faire désha-
biller; puis, cédant à on ne sait quel capricé,'
elle s'approcha d'une fenêtre qu'elle ouvrit. v.
La nuit était sombre, mais elle n'était pas
très-froide. /
Quand le brouillard ne pèse pas sur Londres,
l'atmosphère est tiède, même en automne.
Miss Ellen se prit à rêver, la tête appuyée
dans ses mains et ses coudes sur l'entablement
de la croisée.
Tout à coup elle tressaillit.
Une ombre noire s'agitait dans le jardin,
Etait-ce un liomm§ ou un animal?
'Miss Ellen ne put d'abord s'en rendre
compte.
L'ombre s'approcha.
Alors, la fille du pair d'Angleterre vit briller
dans l'obscurité deux points lumineux. I
. On eût dit les yeux de quelque bête fauve au
fond du bois.
Chose bizarre ! miss Ellen ne se rejeta poin~ j'
en arrière; elle ne referma point la croisée ; elle !
ne courut pas à un cordon dé sonnette pour ap- j
i peler ses gens. - ;
Obéissant à une. mystérieuse fascination, elle
regardait ces deux yeux qui s'avançaient tou-
jours et vinrent s'arrêter au pied d'un arbre, qui ;
montait devant la croisée.
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