Titre : Le Pays : journal des volontés de la France
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1853-10-04
Contributeur : Alletz, Édouard (1798-1850). Directeur de publication
Contributeur : La Guéronnière, Arthur de (1816-1875). Directeur de publication
Contributeur : Granier de Cassagnac, Adolphe (1806-1880). Directeur de publication
Contributeur : Cassagnac, Paul de (1842-1904). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328343740
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 04 octobre 1853 04 octobre 1853
Description : 1853/10/04 (A5,N277). 1853/10/04 (A5,N277).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4651972h
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-180
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 27/03/2017
LE PAYS
fOUE^AL ©E I/EMM&E,
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Mardi 4 Octobre f803
TROIS MOIS- : 12 FRA
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SOMMAIRE.
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for
G^JAAREWA^TA%IÉI»L,« MIWT
nirrtt du gouvernement espagnol sur l'admission
géeret Ilentrée des bâtiments étrangers. -
i o,OXU,ratieu dû chemin db fer de Bruchsal Ik
Jit de NcWrYork (huitième article), par
i Aifred îîusquet'
.lii-rfe : Expositions agricoles, industrielles et
JnBmerciâles.
ser i EUtSrKomains, Espagne, grand dnché
de Toscane, Etats-Sardes, Deux -Si-ciles, Wurtem-
Jsru et départements t Nouvelle» diverses.
fLlifftoa » Troisième synode du diocèse de Reims.
Ss Canaries : Navigation à vapeur.
iradéinie des sciences : Séance du 19 septem-
bre, compte-readu par M. Moigno.
Cbrontque.
Archéologie i Découverte d'une grotte dans les
pyrènées., "
C,é,gmerce et indaatrle: Halles et marchés.
goaffie : mouvement des fonds.
Feuilleton Le baron La Gazette, par M. A. de
Gondrecourt.
Paris 3 Octobre.
Les relations diplomatiques des gouver-
nements peuvent bien se modifier au gré
des sympathies, des antipathies, des inté-
rètsf,u des caprices de ceux qui les dirigent;
niais les .intérêt?, permanents des naiioji^|jp
des États J»é^
convenances personnelles, et tôt ou tard ils.
reprennent leur autorité et leur légitime
prépondérance.
Il existe incontestablement aujourd'hui
une politique européenne, politique de soli-
darité que, depuis plus de trente ans, les
grandes puissances de l'Europe ont fait d'im-
menses efforts pour fonder, et qu'un long
intervalle de paix consécutive a raffermie
en créant, par les mille liens du crédit, de
l'industrie, du commerce, des chemins de
fer, par la similitude des mœurs, des idées
et presque du langage, une sorte d'unité
morale et matérielle parmi les nations ci-
vilisées de notre continent. Cette politique
générale domine, quoi que l'on puisse faire,
lei questions privées ; elle leur dicte sa loi ;
elle les juge et les résout ; elle ne tolère plus
les combinaisons exclusives, elle se porte
partout où un désordre quelconque, qu'il
vienne d'une révolution ou d'une ambition,
menace de compromettre l¥quilibredes Etats
modernes. Nos trente dernières années ont vu
de nombreuses manitestations de cette poli-
tique conservatrice, puissante pour conci-
lièr, puissante pour réprimer au besoin. La
Grèce, l'Espagne, la question d'Orient en
1840, ont successivement prouvé que l'Eu-
rope avait des intérêts permanents, similai-
res, qui imposaient à ses gouvernements leur
ligne de conduite chaque fois qu'un fait con-
sidérable se produisait parmi les nations qui
la composent.
Mais jamais cet intérêt commun n'a éclaté
plus saisissant, plus visible que dans la crise
que subit aujourd'hui la Turquie. La confé-
rence de Vienne, formée en quelque sorte
spontanément, née de la nature même des
choses et de la force des circonstances, l'ar-
bitrage, pris par les grandes puissances plu-
tôt qu'il ne leur a été donné, entre l'ambi-
tion imprudente du czar et les droits de la
Porte-Ottomane, ont mis en relief et dans
toute sa lumière cette vérité : que les Etats
importants considèrent eomme une ques-
tion personnelle tout ce qui intéresse la
cause du droit européen, et, unanimes pour
ls protéger, ne peuvent différer tout au plus
que sur les moyens à employer pour pré-
server la paix du monde et l'équilibre de
l'Europe.
Lorsque la conférence de Vienne a résolu
de régler amiablement le fâcheux conflit
•qui s'élait élevé entre la cour de Saint-Pé?-
tersbourg et celle de Constantinople, lors-
qu'elle a interposé sa médiation entre les
prétention? çtoires ï|érs de l'ambas-
laite regrettable du prince Merschikoff, nous
avons dit que ce qui faisait l'autorité de cette
conférence arbitrale et la garantie de son
union persévérante, c'était l'intérêt supé-
rieur qu'elle représentait, c'était le droit eu-
ropéen dont elle devenait l'organe et le pro-
tecteur.
Nous n'avons pas hésité alors à reconnaî-
tre que ce n'était pas une sympathie de sen-
timent ou une confiance absolue qui avaient
rapproché dans un même but ces souverai-
netés d'origine, de natu're et de tendances
si différentes, quand on les examine à leur
point de vue particulier. Qu'est-ce donc qui
avait ainsi réuni dans une sorte de coalition
morale, l'Autriche si naturellement attirée
vers la Russie par le souvenir des services
rendus et par tant de liens moins apparents;
la Prusse, qui sèmblait devoir suivre si faci-
lement l'impulsion qui lui viendrait de Saint-
Pétersbourg, en même temps que l'Angle-
terre, rivale naturelle de ce colosse du Nord
qui s'avance d'un pas si obstiné vers les
bords du golfe Persique et les riches con-
trées de l'Inde, et la France qui, naguère en-
core, excitait de si injustes- défiances de la
part des Etats Européens ? Qui donc avait ef-
facé tout d'un coup ces situations spéciales,
fait taire tous les préjugés, apaisé tous les
► dissentiments, annihilé toutes les répulsions
"originaires 2 - - <•;
, ^ La conscience de l'intérêt européen, dont
la France et l'Angleterre avaient les pre-
mières,' par des actes énergiques, pris géné-
reusement la défense, et à l'évidence duquel
il était impossible de fermer les yeux;
L'intérêt européen, qui disait hautement
que laisser violer par la Russie les traités qui
la lient à la Turquie et au reste de l'Europe,
c'était jeter le trouble dans tous les actes di-
plomatiques dont -l'ensemble constitue le
droit public des nations civilisées, et autori-
ser d'avance toutes les violations inspirées
par un mobile privé ; q
L'intérêt européen, qui ne veut pas qu'une
seule nation agrandisse démesurément son
influence ou son territoire, et qui se concen-
tre et se raffermit toujours pour faire con-
tre-poids à tout développement exagéré ou
illégitime ; .
L'intérêt européen, qui a pris la Turquie
sous son égide, qui en a fait comme la clet
de voûte de l'équilibre moderne, parce qu'il
sait bien que, le jour où l'empire ottoman
disparaîtrait ou risquerait de disparaître de la
carte du monde, la politique internationale
serait livrée à un désordre d'ambitions op-
posée?, à une analchie'de rivalités, qu'il se-
rait impossible de contenir, de réprimer, et
même de satisfaire ; parce qu'il a, d'ailleurs,
inspiré des traités positifs, dont la loyale '
exécution est placée sous ,la tutelle et la res-
ponsabilité , en quelque sorte, de l'Europe
entière.
Voilà ce qui a motivé le rapprochement,
l'union et les efforts des plénipotentiaires
assemblés à Vienne ; voilà ce qui leur a fait
rechercher avec droiture tous les moyens
honorables et efficaces de terminer pacili-
quement le grave débat qui a surgi entre le
czar et le sultan.
Or, parce que la conférence de Vienne n'a
pas complètement réussi dans une première
tentative de conciliation, parce que le projet
qu'elle a formulé n'a pas rencontré à Cons-
tantinople l'adhésion qu'elle espérait et à
Saint-Pétersbourg l'interprétation qu'elle lui
avait donnée, est-ce à dire que les hommes
d'Etat qui constituaient ce tribunal pacifica-
teur aient pu abandonner tout à coup l'œu-
vre entreprise, interrompre le cours des né-
gociations, déclarer toute autre combinai-
son impossible, toute espérance de paix per-
1 due et livrer le sort des Etals en cause aux
> hasards et aux périls d'une guerre sanglante?
- Ce serait se faire une étrange idée de la di-
s plomatie moderne que de le croire» ;;i
*• ? l'intérêt européen qtfd nous venons, c'a- -*
s natyscr n'a point encore disparu de la scène
e où s'agite cette grave question, et, faut qu'il
1 subsistera, on peut être certain que la diplo-
" matie n'abandonnera pas son œuvré de mo-
dération et de concorde et qu'elle recher-
chera la formule qui doit satisfaire tous les
intérêts.
Sans doute depuis le lotir où la conférence
- de Vienne a vu sa proposition conciliatrice
t repoussée par le divan, mal interprétée par
' le czar, il est survenu quelques incidents
5 qui ont ému l'opinion et fait croire à. des
■' complications nouvelles...
1 L'entrée d'une partie des flottes 'anglû-
| françaises a pu être considérée comme un
' fait de guerre par ceux qui n'ont pas con-
' senti à y voit, comme nous, un acte de pru-
denèô et de dignité commandé par les né-
^ cessités de la situation et par la possibilité
de. collisions entre les armées turques et
^ russes ou de soulèvements à Constantinople.,
L'arrivée de l'empereur Nicolas à O,Iniiilz
a pu être l'indice d'une alliance plus étroite
entre la Russie et l'Autriche, et l'abandon
de la conférence de Vienne, pour ceux qui
Il-c songent pas que l'Autriche est bien plus
intéressée encore que la France, l'Angleterre
et la Prusse, au règlement pacifique des af-
faires d'Orient, et que sa position, son orga-
nisation intérieure elle-mêmi, aussi bien,
lwtonâ!rfiou8;deleJdira».q\ie la Aoyauichabile
de sa politique, l'engagent à employer son
influence pour amener une conciliation qui
garantisse l'intégrité de l'empire ottoman.
Mais, quelle que soit la signification que
l'on donne à ces faits, ils ne changent sous
aucun rapport la question européenne que-,
le débat domine.
Après comme avant ces divers actes, l'Eu-
rope veut la paix qui est la condition essen-
tielle de sa civilisation et de ses progrès; elle
veut le respect des traités qui est la base de
sa sécurité et de son droit public; elle veut
l'indépendance de la Turquie, qui est la pier-
re angulaire de son équilibre.
Or, cet intérêt vital, supérieur à toutes les
«combinaisons privées et à tous les incidents
particuliers, rien ne l'a encore fait disparaî-
tre, de même que rien ne l'a encore satisfait.
Nous disons, avec une foi entière, que tant
qu'il subsistera, tant qu'un fait brutal.ou une
déclaration positive ne l'aura pas foulé aux ^
pieds au risque de le voir se redresser ter-
rible et de toute sa hauteur, il ne faut déses-
pérer ni de la pjyx, ni des efforts de la diplo-
matie.
Une conférence peut bien suspendre pen-
dant quelques jours ses réunions, sauf à les
reprendre ensuite au moment opportun:
. qu'en faiidra-t-il donc conclure et que pourrait " ~
faire cela à la question fondamentale ? Lors-
qu'un problème de conciliation est posé à la
diplomatie dans des termes, qui intéressent
la paix et l'avenir de l'Europe entière, elle
ne considère jamais ce problème comme in-
soluble, et elle s'en occupe loyalement jus- |
qu'au jour où arrive enfin lOEtl1pe qui S
le résout. g
J. COHEN.
On lisait ce matin dans l'Assemblée natio-
nale, sous la signature de M. Amédée Pel-
lier :
Nous ne pouvons encore entrer dans aucun
détail sur ce qui s'est passé dans l'entrevue
d'Ollmùîz. Nos renseignements ne sont pas assez 'j
complets.
Mais nous pouvons positivement annoncer dès
à présent un grand résultat.
La conférence de Vienne est rétablie entre les
quatre puissances. Le fil des négociations, un
moment abandonné, est repris, et une solution
, 1 t
| heureuse et plus prompte qu'on ne pouvait l'es-
pérer hier et ee matin même7 est probable: *
Tous les bruits d'une coalition offensive et
défensive entre les trois puissances du Nord sont
iïa^sonj/ers.
L'em perenr Nicolas a, comme %ïf Isaît*
quitté Oîlmutz. S. M. est partie le 28 au soir, av-ec
sa suite ordinale.
S. 11. l'empereur François-Joseph a accepté
l'invitation courtoise qui lui a étéf?£te par l'erri-
Pereuoe de Russie de venir passer un ou deux
jours p. Varsovie.. ;
^ M. le marquis de Lansdowne qui, comme nous
l'avons annoncé, était arrivé mercredi à Paris,
part ce soir pour assister'à un conseil de cabi-
net qui doit avoir lieu demain à Londres. Tous
les membres du cabinet sont convoqués à cet
effet.
S. M. la reine Victoria quitte sa résidence dé
Balmi)ral et sera mercredi à Londres.
An kojtt de cet article de Y Assemblée na-
iionaUr nous lisons ce soir dans la Patrie,
sous Jb. signature de M. Charles Schiller :
L'Assemblée n tionaPe 'annonce aujourd'hui
que, « ^ conférence de- Vienne est rétablie, que
le fil d~s négociations, un moment abandonné,'
est repris et qu'une solution heureuse plus'
prompte qu'on ne. pouvait l'espérer hier est pro-
bable. a
Elle ajoute que « tous les bruits d'une coali-
tion offensive et défensive entre les trois puis-
sances 4u Nord sont mensongers. »
i A voir le ton absolu et le cachet presque offi-
ciel qu'elle donne à ses affirmations, il semble-
rait que l'Assemblée nationale, a par devers elle
des renseignements qui là mettent en mesure de
rassurer complétement l'opinion sur l'is8ue de
cette question d'Orient qui a le privilège, depuis
t pluide six-moi#, de iemi; l'EurGpe en suspens.
Or, jusqu a ce que ce journal ait fait ses preu-
ves, nous avons tout lieu de croire qu'il.ne sait
de la situation rien de plus, rien de moins que
ce qui a été dit et répété depuis quelque temps
par toutes les feuilles politiques.
^ La conférence de Vienne n'avait pas besoin
d'être rétablie, le fil des négociations n'a jamais
été abandonné.
La conférence a eu à résoudre des difficultés
de diverses natures-, elle les a attaquées les unes
aprè.s les autres.
- La première a consisté dans la rédaction de la
note primitive; la seconde dans les modifications
apportées par le divan, et la troisième dans l'in-
terprétation que la Russie a déclaré vouloir don-
ner à cette note et qui en changeait l'esprit et le
but. •
Aujourd'hui la diplomatie redouble d'efforts
pour dénouer pacifiquement la situation. Nous
: faisons des vœux pour quelle réussisse, mais
- elle doit se hâter, car la force des circonstances
peut amener, telle complication qu'il ne serait
plus possible de surmonter.
Quant à l'idée de l'Assemblée nationale, d'une
coalition des trois puissances du Nurd, elle n'a
jamais existé sérieusement dans l'esprit de per-
sonne.
.L'Autriche et la Prusse connaissent leur véri-
table intérêt, et sont jalouses de leur prépondé-
/ rame. Pas plus que la France et l'Angleterre,
elles ne peuvent voir de bon œil les empiéte-
v-ments deU-itussie en-Orient. - -
Nous ne craignons rien. de ce prétendu. con-
cert des puissances du Nord. Si jamais il doit y-
avoir une coalition, à coup &ûr ce ne sera pas
contre la France.
On lit dans la Nouvelle Gazette de Ham-
bourg, sous la date de Vienne, le 27 septem-
bre: ^
Il n'est pas vrai que la conférence de Vienne
soit dissoute. Les quatre grandes puissances
sont d'accord et, elles unissent leurs efforts pour
déterminer la Porte ottomane à accepter le projet
de note de Vienne, mais les deux puissances oc-
cidentales ne veulent pas contraindre le Divan.
L'Autriche, au contraire, insiste avec force.
, Les puissances occidentales demandent tou-
jours qu'une note collective soit envoyée au Di-
van pour garantir l'intégrité de la Turquie.
Nous lisons dans la Gazette nationale de
Pruise, sous la rubrique de Vienne, le 28
septembre :
Le résultat des conférences d'Ollmûtz est an-
noncé commç favorable au maintien de la paix
générale.
\ diLqi^lngletçrre ne conseillera pas à la
Ottomane .d'accepter la note de
V fenneiTrtai^qU'élië ne l'en dissuadera pas. Si
la;gmrré"■ éofotait; l'Angleterre .conserverait"une
position d'observation et ne,seconderait point la "
- auti^ cMé, OB -ditque $!l
c^BTOérBÈÉf-pSs>'l<êtitréè.''dans.' les Dardanelles
des flottes française et anglaise comme une Vio-
lation des traités, si cette démarche n'a d'autre.
but que de protéger au besoin la population
■ chrétienne de Constantinople. / . ^ " f
On lit dans la Gazettexde Cologne, sous
la date de Berlin, le 30 septembre :
On assure dans les cercles bien informés que
les nouvelles d'Ollmfilz sont très pacifiques. La
Russie est disposée à faire des concessiqrs. *. '
Nous lisons dans t-Deuls>ch Patt, $p\is
la date de Vienne, le J29 sçptenibrè :
Les conférences d'Oihriûtz/sonf. terminées,
L Empereur arrivera demain, et-Si. k comte de
Nesselrode ce soir.
On ne sait absolument rien de positif au sujet
des résolutions qui ont été adoptées.
On écrit de Cracovie, le 29 septembre :
S. M. l'empereur de Russie est arrivé ce matin
- à Szezlikowa, où il a été complimenté par les au-
torités civiles et militaires. S. M., après un sé-
jours de sept minutes, a continué son voyage
pour Varsovie.
Des nouvelles de Saint-Pétersbourg du 24
septembre, publiées par la Bœrsenhalû,
annoncent que la flotte russebde la Baltique
avait reçu l'ordre de rentrer à Cronstadt et
de s 'y tenir à la disposition du gouverne-
ment. La semaine dernière un vaisseau était
parti de Cronstadt avec cet ordre.
" -■ * > v''f ' .Cf. u
Nous recevons par la télégraphie privée la-
dépêche suivante, datée de Vienne, diman-
che 2 octobre :
Un article de la Correspondatice autrichienne
assure que les conférences d'Ollmütz ont été
d'une nature pacifique. ' .
L empereur d'Autriche part ce soir pour Var-
sovie.
Une autre dépêché privée datée de Berlin,
2 octobre, annonce que le roi de Prusse est
pàrti ce même jour pour Varsovie avec deux
aides de camp.
On ht dans la Gazette des Postes de Franc-
fort, sous la rubrique de Berlin, le 30 sep-
tembre : •
Il ne faudrait point croire que l'affaire Costa
soit abandonnée. Le gouvernement autrichien
s'en occupe au contraire avec beaucoup d'ar-
i eleur, et la diplomatie d'autres gouvernements
| l'appuie très énergiquement. Le gouvernement
russe, notamment a envoyé au chargé d'affai-
. res il Washington une note qui sera remise - au
secrétaire' d Etat des affaires étrangères, note
dans laquelle les prétentions de l'Autriche sont
vivement appuyées, et leur admission est consi-
dérée comme la condition sine quà non de la con-
| tinuation des relations internationales.
On écrit de Constantinople, le 19 septem-
bre, à la Presse de Vienne :
La fête de Kurbam-Baïram s'est passée dans
le plus grand calme. L'attitude énergique du
gouvernement vis-à-vis du parti de la guerre a
beaucoup contribué a ce résultat. On avait pris -
des mesures de sûreté dans les quartiers habités
par if s chrétiens. Le slieik Ul-I&ïam et eu une
audience du sultan, dont Wssue a beaucoup con-
tribué à calmer la disposition de l'esprit de la
j population et le désir dont elle était animée en
j faveur de la croyance. Le sultan aurait déclaré
i dans cette audience qu'il se mettrait lui-même
à la tète de la nation, si la religion se trouvait en
danger; mais il a ajouté qu'il ne la voyait pas
encore en péril. Le sbeik Ul-Islam s'était rendu
i chez le sultan après l'arrivée de la nouvelle du
rejet des modifications de la note de Vienne par
Ja Russie, pour lui représenter encore une fois
que la querelle était toujours politique et qu'aussi
longtemps que les choses resteraient dans cet
état il ferait tous ses efforts ppur arranger le dif-
férend d'une manière compatible avec les inté-
» rêts de son trône.
A la suite de cet entretien, un arrangement a t
été C"Ctu entre le. parti de ia gaérre et celui de ;
l&paix, jetil a été décidé que l'en attendrait Far- !
tivée de nouvelles dépêches quelles a&bassa- ^
àeuFs'devaieût recevoir Je 23. ;. u -..5
souvent en coafépênce avec *
Ïiesclnd- Pacha, ej 6B le toît;airssi fréquei»mént:
avec te grand séraslder. It travaille, dit-on, a'
amener une concilkation entre les deui hommes
d'Etat. ; ; , -
On annonce que les envois dei renfort à l'ar- ;
mée du Danube sont suspendue > ',( «
Les troupes égyptiennes sont parties pour
Varna. On croit que l'armée turque de la RQu-
mélie est assez fone pour défendre les Balkans, '
mais on envoie des renforts à l'çrmé© d'Asie; ii
y a 100,000 hommes sur les frontières. Ils guêt
Commandés par des réfugiés.. » . :
Voici un extrait délai pétition que les ulémas
ont présentée au sultan;
S. H. le sultan ne -s'abaissera pas au point de re-
connaître les giaours comme maîtres des croyants
dans la vaste étendue de l'Etape j-le pâdi,%i-tah,
descendant, du Pfophet-e, a seul le droit décomman-
der. Les ulémas, gardiens fidèles du Coran, att.&;Lent
qu'ils sont dévoués de ecçur au sultan et qu'ils sont
prêts à lui sacrifier leur vie et leurs biens, et em-
ployer tous les moyens pour exciter les croyants h
combattre pour leur maître, leur prophète, leur dieu
et leur empereur, contre les giaours orgueilleux, et
ils espèrent que Dieu et son- Prophète leur donne-
ront la victoire. Que le sultan considère que, plein
de confiance dans Dieu et son Prophète, il ne lui est
permis de montrer aucune faiblesse au moment où
des escadrons armés se réunissent autour de lui, de
toutes les parties de l'Empire, pour le défendre. S'il
consentait à céder aux chiens de chrétiens, il en se-
rait responsable devant Dieu et son Prophète. Que le
%udishah éloigne de sa personne le& lâches et garde
autour de lui les braves, qui, comme le lion, ne con-
naissent pas le danger, et marche à leur tête, contre
/ennemi, £4 rendra l£fiiUe.comme î&nuit.devant»
le jour, et comme la paille se disperse a soufâe du
vent. Courage, sultan ! .
Ainsi finit l'adresse :
Dieu nous assiste et le Prophète ! Son étendarà
nous précède et ses serviteurs vivent encore. Dieu
soit loué jusque dans son septième çlelü ainsi que
son Prophète! f
Cette adresse avait causé de grandes inquié-
tudes. On avait même fait des préparatifs pour «
que, dans le cas d'un soulèvement, le sultan se
rendit à Andrinople ; mais tout s'est calmé.
L'Empereur a reçu hier, en audience particu-
lière, M. Firmin Rogier, en.oyé extraordinaire et
ministre plénipotentiaire de S. M. le roi des Bel-
ges, qui lui a remis une lettre de son souverain,
portant notification du mariage de S, A. R." le
prince Léopold, duc de Brabant, avec S. A. I.
Mme f archiduchesse Marie-Henriette d'Autri-
che.
L'Empereur a également reçu llâ'amiràl don •
Manuel BJanco Encelada, envoyé extraordinaire
et ministre plénipotentiaire du Chili, chargé de.
rerne.tre à S. M. la réponse de S. E. M. le prési-
dent de la république du Chni aux lettres de
notification du mariage de Sa Majesté Impériale.
S. E. M. le duc de Casigliano, ministre des af-
faires étrangères de S. A. I. et R. i'arcl^duc
grand- duc de Toscane, ainsi que son fiis, ont eu
l'honneur d'être reçus aujourd'hui par i'Empe-
*reur.
Un décret rendu par le gouvernement espa-
gnol, le 18 août, porte : . (
Vu l'enquête sur l'admission -à l'entrée des bâti-
ments à vapeur étrangers, en bois, du port de moins
de 400 tonneaux, mais qui atteignent ce tonnage en
y comprenant l'espace occupe par la machine ;
Considérant quel'art. 455 du tarif des douanes en
vigueur ne désigne que les embarcations de 400 ton-
neaux et au-dessus;
Yu le rapport du ministère
La reine a, sur la proposition de la direction gé-
nérale, ordonné ce qui suit :
1° Seront soumis-au droit inscrit à l'art. 45) du
tarif (i), les bâtiments à vapeur étrangers , en bois,
de 400 tonnea uxet au-dessus, y compris l'espace oc-
cupé par la machine; -
2° Ce droit sera perçu sur le nombre total des ton-
neaux: résultant du jaugeage;
3° Pour la prime accordée, en Espagne, aux. con-
structeurs de bâtiments, il sera également tenu
compte du nombre de tonneaux que jaugera l'espace
occupé par la machine.
Un autre décret, à la date du 20 du même
mois, porte : *
Vu le rapport fait k la reine concernant la fixation
des droits à percevoir sur les vins étrangers autres
que de Champagne, importés en demi-bouteilles;
FEUILLETON DU PAYS, JOURNAL DE L'EMPIRE.
DU 4 OCTOBRE 1853.
LE BARON LA GAZETTE.
PAR A. DE GONDRECOURT.
PREMIERE PARTIE.
XIII.
DANGERS QUE COURT UN HOMME QUE TROIS JOLIES
FEMMES ONT MENACÉ DU DOIGT.
' les redoutables colèrçs de h
^Uch È(;„^sse d@ Nemours, de la comtesse d<
et madame Bussy-Leclerc s'amas
sai'onfC contre le bailli de Clermont, l'intré-
Pid@ \1 galant diplomate menait la vie douci
adonnait du bon temps. Loin de soup
catastrophe quelconque, Cler
iïiontv-Un-e ai* Partolit des roses, et «'émerveil
lait du îuc rès de ses intrigues. Le gf1iCIeU-;
visa2 cette jeune fiancée rencontrée che:
Uduch SSe apparaissait souvent à notre cou
reiir gueil ij 8,:entures, mais la dépit, mais l'or
aussi de cette têt
^apor^ f fais.aient que l'amertume du !Sou\'(:
! ûir lVm6' ^ sur Je rêve d'amour. Il fallail
hélas ! h
D'don nn Ufie* flèche du carquois de Ct
l'eu on selIlent POUf que a ^11 ^u. jour où les trois dame
a> a i e n t ^ Celt,e^uante conférence dor
^savonnUf valM'aiia'yse dressé le procès
« * Verbal le ^nln de Clermont écrivit en et
terrI' .es ' au roi de Navarre :
est interdile. s
03 16 au 30 septembre.
,
« Sire, nous avons appris ici, tout de tra-
» vers, les valeureux et glorieux combats que
» vous avez livrés à Mayenne, sous votre
» camp d'Arqués, aux premiers jours du
» présent mois. Je serais désolé de n'avoir
» point pris part à ces rudes affaires, si je ne
a bataillais pas, dans Paris, d'une façon peut-
» être encore plus rude, pour le triomphe de
» votre couronne. Décidément, Sire, vous
» êtes un grand capitaine et un homme heu-
» reux; vous venez de conquérir la Norman-
» .die, et moi, votre lieutenant, je viens de
» conquérir la Bastille, d'emporter l'Arse-
» nal et de canonner à outrance l'hôtel de
» Nemours, dont la garnison capitulera
» avant peu.
» Les ligueurs affectent de montrer des
» visages riants, et je ris tout le premier de
» leur fausse jubilation. Avant-hier, j'étais
» chez la duchesse de Nemours et l'on vint y
» annoncer l'arrivée à Paris de plusieurs
» drapeaux enlevés par Mayenne sur vos
» troupes. Comme je m'effrayais de cette
» mauvaise nouvelle, la duchesse me dit
» tout bas : Rassurez-vous, ces drapeaux ont
» été fabriqués à l'hôtel Montpensier. Pour
» que ce mot consolant m'ait été glissé à
» l'oreille, il faut que la duchesse soit des
» vôtres, en attendant qu'elle soit des mien-
» nes, ce qui, le diable aidant, ne tardera
» pas. De l'hôtel de Nemours s j'ai couru
» à l'Arsenal, où Brissac m'a dit, avec em-
» phase, que Mayenne vous conduisait à Pa-
» ris en triomphe, lié et garrotté ; à quoi la
» comtesse répondit en ordonnant qu'on al-
» lât. lui louer une maison rue St-Honoré,
» afin qu'elle pût vous voir passer. Pais elle
» ajouta, en me serrant la main : Celte mai-
» son nous servira, car il est juste de raire
» payer à M. de Brissac les soties inventions
» qu'il colporte; le roi de Navarre n'est pas
» plus le prisonnier de Mayenne que nous
» ne sommes, vous et moi, républicains. En-
» fin, j'ai quitté l'Arsenal pour aller à la
», Bastille , où Bussy-beclerc, le plus grand
» cuistre qui soit au monde, fait préparer
» une cage de 1er pour Votre Majesté. Ma-
» dame Bussy, pour écarter cette image
» aussi cruelle que grotesque, m'a raconté
» vos derniers exploits et m'a dit que, si son
» mari ne devenait pas un jour moins bête
» qu'il n'est depuis Ta naissance, elle vous
» prierait de le faire enfermer tout un mois,
» au pain sec et à l'eau fraîche, dans cette
» cage don t il avait parlé.
» Voilà donc trois femmes, et .trois fem- .
» mes charmantes , qui nous donnent la
» main. « Ce que femme veut, Dieu le veut, »
» dit le proverbe ; ce que trois fe mmes veu-
J) lent, Dieu ne le voudrait-il pas ?
» Sire, j'engage fortement Votre Majesté,à
» se rapprocher de Paris, car mes batteries
f vont ouvrir leur feu. Daignez calculer que
» le duc de Nemours aime peu Mayenne et
» que j'aime beaucoup la duchesse ; que M.
ï- de Brissac, en sa qualité de républicain,
» est, avant tout, dévoué à ses intérêts, et
» que la comtesse est fort de nos amies ; que
» Bussy-fceclerc ne voit que par sa femme,
» laquelle me chérit : calculez que M. de Ne-
» mours est gouverneur de Paris, M. de
» Brissac gouverneur de l'Arsenal, et Bussy
» gouverneur de la Bastille ; calculez que là
» où règne un mari, sa femme gouverne,
» lorsque, surtout, elle a l'amour en tête,
» et concluez qu'il vous sera, d'ici à huit
» jours, aussi l.acile d'entrer dans votie ca- I
» pitale par la porte Saint-Antoine ou par j
» les fossés de l'Arsenal, qu'il me sera CQlU- |
iD mode et agréable, à lHOi, d'entrer dans le f
» boudoir de l'une de nos trois belles ai- [
» liées. ' f
» Le chevalier de Pampelonne est-il re-
» venu de Londres ? je lui fais mes compli-
» ments. Le Normand La Gazette est tou-
» jours à la recherche de quelque ingénieux
» stratagème, mais je gage que nous aurons
» pris Paris avant que la lumière ne se fasse
» dans cet honorable cerveau, beaucoup
s moins profond que brave. Je dois vous
» dire, cependant, que le futur baron est s
» assez bien vu an quartier Saint-Jacques; j
» il pourra vous aider de ce côté, etc., etc. » I
Clermont confia cette lettre au fidèle La- j
prairie, et sè fit conduire en litière chez la I
duchesse de Nemours. 1
Madame de Nemours avait passé une nuit J
affreuse; le moins diable des, démons de la S
jalousie s'était emparé de ce cœur désiliu- ]
sionné, pour le blesser à. coups d'épingle.
La duchesse, pour se tenir parole, s'était
longtemps occupée, mais en vain, du meil-
leur moyen de se venger des trahisons de
son adorateur. C'était une femme froide qui,
pour la première fois, s'était laissé prendre
au charme de la tentation; elle aimait le
bailli, mais le sentiment qu'elle éprouvait
était plutôt tendre que passionné; son amour-
propre de grande dame avait plus souffert
que son âme de l'ingrate perfidie d'un
homme heureusement encore prosterné à
,ses pieds : quelques jours plus tard, et la du-
chesse eût appris, par une cruelle expé-
rience, quelles tortures de l'enfer la jalousie
véritable sait inventer pour le supplice de
ses victimes.
La colère de Mme de Nemours était certai-
nement violente, mais elle ne pouvait con-
seiller une vengeance barbare. Le beau ca-
valier trouvait encore une sorte de miséri-
corde devant son juge irrite ; ses yeux avaient
tant de langueur, et souvent dè si nobles
étincelles ! sa bouche avait menti, mais le
mensonge, en passant sur ses lèvres, s'y ar-
rêtait d'une grâce si éloquente ; toute sa per-
sonne avait un air si noble, tant de modestie
brave et spirituelle, qu'on n'osait châtier
trop vertement ce grand coupable égaré
dans un péché dont il eût été bien doux de le
purifier! Mme de Nemours penchait à la clé-
mence, puis elle se reprochait sa faiblesse ;
sou œil bleu s'animait, son beau front se
chargeait d'un nuage, et elle cherchait sans
relâche quelque punition exemplaire qu'elle
ne savait pas trouver.
Lorsque le laquais chargé d'introduire les
visites annonça le bailli de Clermont, la du-
chesse était perdue dans un dédale de ré-
flexions qui n'aboutissaient pas. La vue du
perfide exaspéra d'abord cette femme char-
mante, mais elle ne tarda pas à succomber
aux émotions de., son cœur, et, quoique ré-
solue à tenter des prodiges de coquetterie,
elle ne put dissimuler un sourire que Cler-
mont interpréta tout de travers, selon l'exé-
crable fatuité des amoureux en général.
Le bailli ne fut ni moins tendre, ni moins
pressant, ni moins habile que de coutume,
et la duchesse, quoique enivrée par ce par-
fum de galanterie, sut se défendre avec un
art, avec une tactique dont le traité fatal',
mais savant, sera toujours écrit dans le cer-
veau féminin. L'entretien dura- près d'une
heure, et Clermont s'avoua franchement
que, s'il n Vivait pas perdu de terrain dans
cet assaut de finesses, il n'avait pas non plus
fait reculer son adversaire :'aussi s'écria-t-il
en remontant dans sa litière :
— Cette femme-là aurait-elle plus que de
la vertu, c'est-à-dire de l'esprit, plus que du
cœur, c'est-à-dire de la tète? Dans ce cas,
gare à moi ! ou, mieux, tant pis pour le roi !
car le siège de Paris pourrait traîner long- f
temps. Hum ! est-ce que je me piquerais au
jeu! Bath ! les places qui se défendent sont
les meilleures à prendre... Allons à l'Ar-
senal.
La duchesse, de son côté, avait étouffé un
soupir sitôt après le départ du bailli, car une
idée pénible lui était venue. La vengeance
qu'elle cherchait, elle l'avait trouvée, et en
la trouvant elle avait murmuré tout bas :
— Quel dommage 1
Ce mot disait beaucoup comme on va s'en
assurer. Madame de Nemours ne pouvait dé-
noncer à la Ligue le partisan du Béarnais ;
jamais elle n'eût pu se résoudre à faire tom-
ber cette têto, charmante de noblesse et de
grâce, sous le glaive du bourreau ; elle ima-
gina donc de faire de ce volage royaliste un
véritable ligueur, de payer sa r.mçon au ca-
pitaine La Gazette, et de profiter du zèle ar-
dent qu'il avait étalé en présence du duc de
Nemours, pour lui faire donner un régiment
à l'armée de Mayenne, et l'obliger, bon gré
mal gré, à servir hors de Par is J11 cause de la
sainte Union.
Ce châtiment, ou plutôt cette malice, ven-
geait complètement et vengeait noblement
la duchesse, car il retombait sur deux ri-
vales détestées, et ruinât les espérances de
l'infidèle sans "Cornproiwtre sa vie.
Sa résolution bien prise, madame de Ne-
mours se mit en devoir de l'exécuter, avec
cette fiévreuse impatience qui donne des
ailes aux volontés des jolies-femmes ; mais,
tout en travaillant -à son projet, elle murmu-
rait sans cesse :
— Quel dommage !... ne plus le voir !
La comtesse de Brissac était beaucoup
plus outrée que madame de Nemours. Si la
jalousie avait des nuances bien tranchées
' dans ces deux cœurs et ces deux têtes, on
ne s'en étonnera pas, en songeant que ma-
dame de Brissac avait infiniment plus d'ex-
périence que la duchesse en ces sortes de
mésaventures ; elle était moins jeune de dix
années, par conséquent, plus avare de son
trésor, et, disons enfin le grand mot, elle
avait, plus que sa rivale, le droit de maudire
l'ingratitude du bailli, en ce qu'elle lui avait
sacrifié bien autre chose que la république
du gouverneur de l'Arsenal.
Mais la comtesse était une excellente,
femme, d'un esprit léger, d'un cœur qui-
restait toujours bon, quelle que fût son in- »
constance ; elle pouvait souffrir à la fois dans
son orgueil et son amour, sans être, pour
cela, capable d'une lâcheté. Le galant qui
trahissait les serments jurés à ses pieds était
sur-le-champ dédaigné, mais sa colère r e le
condamnait pas à morj. Toutefois, le bailli
de Clermont ne pouvait partager un sort
commun aux cavaliers vulgaires ; il était
trop séduisant, trop aimable, trop aimé pour
que le dédain seul lui fût infligé. Quant à ^
l'oublier, c'était chose impossible; il fallait
qu'il se souvînt de son crime par une expia-
tion digne de lui. ^
Mme de Brissac venait de combiner un
plan de vengeance tout coquet, tout mignon,
lorsque le bailli entra dans ce boudoir où
l 'avant-veiUe encore il avait pris du comte
des leçons de .libii-lé, et reçu de la comtesse
des serments d'esclavage. Mme de Brissac
avait un petit air dolent qui lui seyait à mer-
veille ; elle était emmitouflée dans des coif-'
fes de satin rose, roulée comme une chatte
dans une robe de chambre à grandes fleurs,
chaussée de petites pantoufles de velours
bien chaudes, l'œil vague et languissant, les
lèvres un ptues, quoique légèrement animées.
— Ah ! vous voilà, bailli, dit-elle en traî- '
nant sur les mots, je vous attendais... Vous
devenez rare.
— Chère comtesse, M. de Brissac m'avait
menacé d'une harangue, et, hier, je n'ai pas
osé...
— Ainsi, ce grand courage, ce beau dé-
voûment que vous faisiez sonner si haut, vous
abandonnent dès qu'il s'agit de les mon-
trer...
— Comtesse, une bataille, un duel, une „
conspiration, à la bonne heure, me voilà*
prêt... Je-porterais ma tête en Grève pour vos
beaux yeux, mais une harangue renouvelée
du grec de Sparte ou du latin de Rome,
avouez...
— J'avoue... bailli, je suis malade, bien
malade, très malade.
— Quoi ! vraiment !
Clermont s'approcha du fauteuil où se
dorlotait l'habile et charmante femme, et il
voulut baiser une main qu'on lui retira brus- ■
quement.
.., Oh! ! ne me touchez pas .'....♦j'ai les
nerfs dans un état pitoyable, le moindre
mouvement me crispe... %
— Eh 1 mon Dieu ! avez-vous fait appeler
fOUE^AL ©E I/EMM&E,
.. - . 1 w: .. *■- v r"1' "* * ^ *■ - ** '-"*
Mardi 4 Octobre f803
TROIS MOIS- : 12 FRA
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^ pàSlâ> aUB DU r AU80tfS.G-MONT:(.\RTRf. ii.
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SOMMAIRE.
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Action "Orie.t. < .
c,trait> d*joorru._s.
for
G^JAAREWA^TA%IÉI»L,« MIWT
nirrtt du gouvernement espagnol sur l'admission
géeret Ilentrée des bâtiments étrangers. -
i o,OXU,ratieu dû chemin db fer de Bruchsal Ik
Jit de NcWrYork (huitième article), par
i Aifred îîusquet'
.lii-rfe : Expositions agricoles, industrielles et
JnBmerciâles.
ser i EUtSrKomains, Espagne, grand dnché
de Toscane, Etats-Sardes, Deux -Si-ciles, Wurtem-
Jsru et départements t Nouvelle» diverses.
fLlifftoa » Troisième synode du diocèse de Reims.
Ss Canaries : Navigation à vapeur.
iradéinie des sciences : Séance du 19 septem-
bre, compte-readu par M. Moigno.
Cbrontque.
Archéologie i Découverte d'une grotte dans les
pyrènées., "
C,é,gmerce et indaatrle: Halles et marchés.
goaffie : mouvement des fonds.
Feuilleton Le baron La Gazette, par M. A. de
Gondrecourt.
Paris 3 Octobre.
Les relations diplomatiques des gouver-
nements peuvent bien se modifier au gré
des sympathies, des antipathies, des inté-
rètsf,u des caprices de ceux qui les dirigent;
niais les .intérêt?, permanents des naiioji^|jp
des États J»é^
convenances personnelles, et tôt ou tard ils.
reprennent leur autorité et leur légitime
prépondérance.
Il existe incontestablement aujourd'hui
une politique européenne, politique de soli-
darité que, depuis plus de trente ans, les
grandes puissances de l'Europe ont fait d'im-
menses efforts pour fonder, et qu'un long
intervalle de paix consécutive a raffermie
en créant, par les mille liens du crédit, de
l'industrie, du commerce, des chemins de
fer, par la similitude des mœurs, des idées
et presque du langage, une sorte d'unité
morale et matérielle parmi les nations ci-
vilisées de notre continent. Cette politique
générale domine, quoi que l'on puisse faire,
lei questions privées ; elle leur dicte sa loi ;
elle les juge et les résout ; elle ne tolère plus
les combinaisons exclusives, elle se porte
partout où un désordre quelconque, qu'il
vienne d'une révolution ou d'une ambition,
menace de compromettre l¥quilibredes Etats
modernes. Nos trente dernières années ont vu
de nombreuses manitestations de cette poli-
tique conservatrice, puissante pour conci-
lièr, puissante pour réprimer au besoin. La
Grèce, l'Espagne, la question d'Orient en
1840, ont successivement prouvé que l'Eu-
rope avait des intérêts permanents, similai-
res, qui imposaient à ses gouvernements leur
ligne de conduite chaque fois qu'un fait con-
sidérable se produisait parmi les nations qui
la composent.
Mais jamais cet intérêt commun n'a éclaté
plus saisissant, plus visible que dans la crise
que subit aujourd'hui la Turquie. La confé-
rence de Vienne, formée en quelque sorte
spontanément, née de la nature même des
choses et de la force des circonstances, l'ar-
bitrage, pris par les grandes puissances plu-
tôt qu'il ne leur a été donné, entre l'ambi-
tion imprudente du czar et les droits de la
Porte-Ottomane, ont mis en relief et dans
toute sa lumière cette vérité : que les Etats
importants considèrent eomme une ques-
tion personnelle tout ce qui intéresse la
cause du droit européen, et, unanimes pour
ls protéger, ne peuvent différer tout au plus
que sur les moyens à employer pour pré-
server la paix du monde et l'équilibre de
l'Europe.
Lorsque la conférence de Vienne a résolu
de régler amiablement le fâcheux conflit
•qui s'élait élevé entre la cour de Saint-Pé?-
tersbourg et celle de Constantinople, lors-
qu'elle a interposé sa médiation entre les
prétention? çtoires ï|érs de l'ambas-
laite regrettable du prince Merschikoff, nous
avons dit que ce qui faisait l'autorité de cette
conférence arbitrale et la garantie de son
union persévérante, c'était l'intérêt supé-
rieur qu'elle représentait, c'était le droit eu-
ropéen dont elle devenait l'organe et le pro-
tecteur.
Nous n'avons pas hésité alors à reconnaî-
tre que ce n'était pas une sympathie de sen-
timent ou une confiance absolue qui avaient
rapproché dans un même but ces souverai-
netés d'origine, de natu're et de tendances
si différentes, quand on les examine à leur
point de vue particulier. Qu'est-ce donc qui
avait ainsi réuni dans une sorte de coalition
morale, l'Autriche si naturellement attirée
vers la Russie par le souvenir des services
rendus et par tant de liens moins apparents;
la Prusse, qui sèmblait devoir suivre si faci-
lement l'impulsion qui lui viendrait de Saint-
Pétersbourg, en même temps que l'Angle-
terre, rivale naturelle de ce colosse du Nord
qui s'avance d'un pas si obstiné vers les
bords du golfe Persique et les riches con-
trées de l'Inde, et la France qui, naguère en-
core, excitait de si injustes- défiances de la
part des Etats Européens ? Qui donc avait ef-
facé tout d'un coup ces situations spéciales,
fait taire tous les préjugés, apaisé tous les
► dissentiments, annihilé toutes les répulsions
"originaires 2 - - <•;
, ^ La conscience de l'intérêt européen, dont
la France et l'Angleterre avaient les pre-
mières,' par des actes énergiques, pris géné-
reusement la défense, et à l'évidence duquel
il était impossible de fermer les yeux;
L'intérêt européen, qui disait hautement
que laisser violer par la Russie les traités qui
la lient à la Turquie et au reste de l'Europe,
c'était jeter le trouble dans tous les actes di-
plomatiques dont -l'ensemble constitue le
droit public des nations civilisées, et autori-
ser d'avance toutes les violations inspirées
par un mobile privé ; q
L'intérêt européen, qui ne veut pas qu'une
seule nation agrandisse démesurément son
influence ou son territoire, et qui se concen-
tre et se raffermit toujours pour faire con-
tre-poids à tout développement exagéré ou
illégitime ; .
L'intérêt européen, qui a pris la Turquie
sous son égide, qui en a fait comme la clet
de voûte de l'équilibre moderne, parce qu'il
sait bien que, le jour où l'empire ottoman
disparaîtrait ou risquerait de disparaître de la
carte du monde, la politique internationale
serait livrée à un désordre d'ambitions op-
posée?, à une analchie'de rivalités, qu'il se-
rait impossible de contenir, de réprimer, et
même de satisfaire ; parce qu'il a, d'ailleurs,
inspiré des traités positifs, dont la loyale '
exécution est placée sous ,la tutelle et la res-
ponsabilité , en quelque sorte, de l'Europe
entière.
Voilà ce qui a motivé le rapprochement,
l'union et les efforts des plénipotentiaires
assemblés à Vienne ; voilà ce qui leur a fait
rechercher avec droiture tous les moyens
honorables et efficaces de terminer pacili-
quement le grave débat qui a surgi entre le
czar et le sultan.
Or, parce que la conférence de Vienne n'a
pas complètement réussi dans une première
tentative de conciliation, parce que le projet
qu'elle a formulé n'a pas rencontré à Cons-
tantinople l'adhésion qu'elle espérait et à
Saint-Pétersbourg l'interprétation qu'elle lui
avait donnée, est-ce à dire que les hommes
d'Etat qui constituaient ce tribunal pacifica-
teur aient pu abandonner tout à coup l'œu-
vre entreprise, interrompre le cours des né-
gociations, déclarer toute autre combinai-
son impossible, toute espérance de paix per-
1 due et livrer le sort des Etals en cause aux
> hasards et aux périls d'une guerre sanglante?
- Ce serait se faire une étrange idée de la di-
s plomatie moderne que de le croire» ;;i
*• ? l'intérêt européen qtfd nous venons, c'a- -*
s natyscr n'a point encore disparu de la scène
e où s'agite cette grave question, et, faut qu'il
1 subsistera, on peut être certain que la diplo-
" matie n'abandonnera pas son œuvré de mo-
dération et de concorde et qu'elle recher-
chera la formule qui doit satisfaire tous les
intérêts.
Sans doute depuis le lotir où la conférence
- de Vienne a vu sa proposition conciliatrice
t repoussée par le divan, mal interprétée par
' le czar, il est survenu quelques incidents
5 qui ont ému l'opinion et fait croire à. des
■' complications nouvelles...
1 L'entrée d'une partie des flottes 'anglû-
| françaises a pu être considérée comme un
' fait de guerre par ceux qui n'ont pas con-
' senti à y voit, comme nous, un acte de pru-
denèô et de dignité commandé par les né-
^ cessités de la situation et par la possibilité
de. collisions entre les armées turques et
^ russes ou de soulèvements à Constantinople.,
L'arrivée de l'empereur Nicolas à O,Iniiilz
a pu être l'indice d'une alliance plus étroite
entre la Russie et l'Autriche, et l'abandon
de la conférence de Vienne, pour ceux qui
Il-c songent pas que l'Autriche est bien plus
intéressée encore que la France, l'Angleterre
et la Prusse, au règlement pacifique des af-
faires d'Orient, et que sa position, son orga-
nisation intérieure elle-mêmi, aussi bien,
lwtonâ!rfiou8;deleJdira».q\ie la Aoyauichabile
de sa politique, l'engagent à employer son
influence pour amener une conciliation qui
garantisse l'intégrité de l'empire ottoman.
Mais, quelle que soit la signification que
l'on donne à ces faits, ils ne changent sous
aucun rapport la question européenne que-,
le débat domine.
Après comme avant ces divers actes, l'Eu-
rope veut la paix qui est la condition essen-
tielle de sa civilisation et de ses progrès; elle
veut le respect des traités qui est la base de
sa sécurité et de son droit public; elle veut
l'indépendance de la Turquie, qui est la pier-
re angulaire de son équilibre.
Or, cet intérêt vital, supérieur à toutes les
«combinaisons privées et à tous les incidents
particuliers, rien ne l'a encore fait disparaî-
tre, de même que rien ne l'a encore satisfait.
Nous disons, avec une foi entière, que tant
qu'il subsistera, tant qu'un fait brutal.ou une
déclaration positive ne l'aura pas foulé aux ^
pieds au risque de le voir se redresser ter-
rible et de toute sa hauteur, il ne faut déses-
pérer ni de la pjyx, ni des efforts de la diplo-
matie.
Une conférence peut bien suspendre pen-
dant quelques jours ses réunions, sauf à les
reprendre ensuite au moment opportun:
. qu'en faiidra-t-il donc conclure et que pourrait " ~
faire cela à la question fondamentale ? Lors-
qu'un problème de conciliation est posé à la
diplomatie dans des termes, qui intéressent
la paix et l'avenir de l'Europe entière, elle
ne considère jamais ce problème comme in-
soluble, et elle s'en occupe loyalement jus- |
qu'au jour où arrive enfin lOEtl1pe qui S
le résout. g
J. COHEN.
On lisait ce matin dans l'Assemblée natio-
nale, sous la signature de M. Amédée Pel-
lier :
Nous ne pouvons encore entrer dans aucun
détail sur ce qui s'est passé dans l'entrevue
d'Ollmùîz. Nos renseignements ne sont pas assez 'j
complets.
Mais nous pouvons positivement annoncer dès
à présent un grand résultat.
La conférence de Vienne est rétablie entre les
quatre puissances. Le fil des négociations, un
moment abandonné, est repris, et une solution
, 1 t
| heureuse et plus prompte qu'on ne pouvait l'es-
pérer hier et ee matin même7 est probable: *
Tous les bruits d'une coalition offensive et
défensive entre les trois puissances du Nord sont
iïa^sonj/ers.
L'em perenr Nicolas a, comme %ïf Isaît*
quitté Oîlmutz. S. M. est partie le 28 au soir, av-ec
sa suite ordinale.
S. 11. l'empereur François-Joseph a accepté
l'invitation courtoise qui lui a étéf?£te par l'erri-
Pereuoe de Russie de venir passer un ou deux
jours p. Varsovie.. ;
^ M. le marquis de Lansdowne qui, comme nous
l'avons annoncé, était arrivé mercredi à Paris,
part ce soir pour assister'à un conseil de cabi-
net qui doit avoir lieu demain à Londres. Tous
les membres du cabinet sont convoqués à cet
effet.
S. M. la reine Victoria quitte sa résidence dé
Balmi)ral et sera mercredi à Londres.
An kojtt de cet article de Y Assemblée na-
iionaUr nous lisons ce soir dans la Patrie,
sous Jb. signature de M. Charles Schiller :
L'Assemblée n tionaPe 'annonce aujourd'hui
que, « ^ conférence de- Vienne est rétablie, que
le fil d~s négociations, un moment abandonné,'
est repris et qu'une solution heureuse plus'
prompte qu'on ne. pouvait l'espérer hier est pro-
bable. a
Elle ajoute que « tous les bruits d'une coali-
tion offensive et défensive entre les trois puis-
sances 4u Nord sont mensongers. »
i A voir le ton absolu et le cachet presque offi-
ciel qu'elle donne à ses affirmations, il semble-
rait que l'Assemblée nationale, a par devers elle
des renseignements qui là mettent en mesure de
rassurer complétement l'opinion sur l'is8ue de
cette question d'Orient qui a le privilège, depuis
t pluide six-moi#, de iemi; l'EurGpe en suspens.
Or, jusqu a ce que ce journal ait fait ses preu-
ves, nous avons tout lieu de croire qu'il.ne sait
de la situation rien de plus, rien de moins que
ce qui a été dit et répété depuis quelque temps
par toutes les feuilles politiques.
^ La conférence de Vienne n'avait pas besoin
d'être rétablie, le fil des négociations n'a jamais
été abandonné.
La conférence a eu à résoudre des difficultés
de diverses natures-, elle les a attaquées les unes
aprè.s les autres.
- La première a consisté dans la rédaction de la
note primitive; la seconde dans les modifications
apportées par le divan, et la troisième dans l'in-
terprétation que la Russie a déclaré vouloir don-
ner à cette note et qui en changeait l'esprit et le
but. •
Aujourd'hui la diplomatie redouble d'efforts
pour dénouer pacifiquement la situation. Nous
: faisons des vœux pour quelle réussisse, mais
- elle doit se hâter, car la force des circonstances
peut amener, telle complication qu'il ne serait
plus possible de surmonter.
Quant à l'idée de l'Assemblée nationale, d'une
coalition des trois puissances du Nurd, elle n'a
jamais existé sérieusement dans l'esprit de per-
sonne.
.L'Autriche et la Prusse connaissent leur véri-
table intérêt, et sont jalouses de leur prépondé-
/ rame. Pas plus que la France et l'Angleterre,
elles ne peuvent voir de bon œil les empiéte-
v-ments deU-itussie en-Orient. - -
Nous ne craignons rien. de ce prétendu. con-
cert des puissances du Nord. Si jamais il doit y-
avoir une coalition, à coup &ûr ce ne sera pas
contre la France.
On lit dans la Nouvelle Gazette de Ham-
bourg, sous la date de Vienne, le 27 septem-
bre: ^
Il n'est pas vrai que la conférence de Vienne
soit dissoute. Les quatre grandes puissances
sont d'accord et, elles unissent leurs efforts pour
déterminer la Porte ottomane à accepter le projet
de note de Vienne, mais les deux puissances oc-
cidentales ne veulent pas contraindre le Divan.
L'Autriche, au contraire, insiste avec force.
, Les puissances occidentales demandent tou-
jours qu'une note collective soit envoyée au Di-
van pour garantir l'intégrité de la Turquie.
Nous lisons dans la Gazette nationale de
Pruise, sous la rubrique de Vienne, le 28
septembre :
Le résultat des conférences d'Ollmûtz est an-
noncé commç favorable au maintien de la paix
générale.
\ diLqi^lngletçrre ne conseillera pas à la
Ottomane .d'accepter la note de
V fenneiTrtai^qU'élië ne l'en dissuadera pas. Si
la;gmrré"■ éofotait; l'Angleterre .conserverait"une
position d'observation et ne,seconderait point la "
- auti^ cMé, OB -ditque $!l
c^BTOérBÈÉf-pSs>'l<êtitréè.''dans.' les Dardanelles
des flottes française et anglaise comme une Vio-
lation des traités, si cette démarche n'a d'autre.
but que de protéger au besoin la population
■ chrétienne de Constantinople. / . ^ " f
On lit dans la Gazettexde Cologne, sous
la date de Berlin, le 30 septembre :
On assure dans les cercles bien informés que
les nouvelles d'Ollmfilz sont très pacifiques. La
Russie est disposée à faire des concessiqrs. *. '
Nous lisons dans t-Deuls>ch Patt, $p\is
la date de Vienne, le J29 sçptenibrè :
Les conférences d'Oihriûtz/sonf. terminées,
L Empereur arrivera demain, et-Si. k comte de
Nesselrode ce soir.
On ne sait absolument rien de positif au sujet
des résolutions qui ont été adoptées.
On écrit de Cracovie, le 29 septembre :
S. M. l'empereur de Russie est arrivé ce matin
- à Szezlikowa, où il a été complimenté par les au-
torités civiles et militaires. S. M., après un sé-
jours de sept minutes, a continué son voyage
pour Varsovie.
Des nouvelles de Saint-Pétersbourg du 24
septembre, publiées par la Bœrsenhalû,
annoncent que la flotte russebde la Baltique
avait reçu l'ordre de rentrer à Cronstadt et
de s 'y tenir à la disposition du gouverne-
ment. La semaine dernière un vaisseau était
parti de Cronstadt avec cet ordre.
" -■ * > v''f ' .Cf. u
Nous recevons par la télégraphie privée la-
dépêche suivante, datée de Vienne, diman-
che 2 octobre :
Un article de la Correspondatice autrichienne
assure que les conférences d'Ollmütz ont été
d'une nature pacifique. ' .
L empereur d'Autriche part ce soir pour Var-
sovie.
Une autre dépêché privée datée de Berlin,
2 octobre, annonce que le roi de Prusse est
pàrti ce même jour pour Varsovie avec deux
aides de camp.
On ht dans la Gazette des Postes de Franc-
fort, sous la rubrique de Berlin, le 30 sep-
tembre : •
Il ne faudrait point croire que l'affaire Costa
soit abandonnée. Le gouvernement autrichien
s'en occupe au contraire avec beaucoup d'ar-
i eleur, et la diplomatie d'autres gouvernements
| l'appuie très énergiquement. Le gouvernement
russe, notamment a envoyé au chargé d'affai-
. res il Washington une note qui sera remise - au
secrétaire' d Etat des affaires étrangères, note
dans laquelle les prétentions de l'Autriche sont
vivement appuyées, et leur admission est consi-
dérée comme la condition sine quà non de la con-
| tinuation des relations internationales.
On écrit de Constantinople, le 19 septem-
bre, à la Presse de Vienne :
La fête de Kurbam-Baïram s'est passée dans
le plus grand calme. L'attitude énergique du
gouvernement vis-à-vis du parti de la guerre a
beaucoup contribué a ce résultat. On avait pris -
des mesures de sûreté dans les quartiers habités
par if s chrétiens. Le slieik Ul-I&ïam et eu une
audience du sultan, dont Wssue a beaucoup con-
tribué à calmer la disposition de l'esprit de la
j population et le désir dont elle était animée en
j faveur de la croyance. Le sultan aurait déclaré
i dans cette audience qu'il se mettrait lui-même
à la tète de la nation, si la religion se trouvait en
danger; mais il a ajouté qu'il ne la voyait pas
encore en péril. Le sbeik Ul-Islam s'était rendu
i chez le sultan après l'arrivée de la nouvelle du
rejet des modifications de la note de Vienne par
Ja Russie, pour lui représenter encore une fois
que la querelle était toujours politique et qu'aussi
longtemps que les choses resteraient dans cet
état il ferait tous ses efforts ppur arranger le dif-
férend d'une manière compatible avec les inté-
» rêts de son trône.
A la suite de cet entretien, un arrangement a t
été C"Ctu entre le. parti de ia gaérre et celui de ;
l&paix, jetil a été décidé que l'en attendrait Far- !
tivée de nouvelles dépêches quelles a&bassa- ^
àeuFs'devaieût recevoir Je 23. ;. u -..5
souvent en coafépênce avec *
Ïiesclnd- Pacha, ej 6B le toît;airssi fréquei»mént:
avec te grand séraslder. It travaille, dit-on, a'
amener une concilkation entre les deui hommes
d'Etat. ; ; , -
On annonce que les envois dei renfort à l'ar- ;
mée du Danube sont suspendue > ',( «
Les troupes égyptiennes sont parties pour
Varna. On croit que l'armée turque de la RQu-
mélie est assez fone pour défendre les Balkans, '
mais on envoie des renforts à l'çrmé© d'Asie; ii
y a 100,000 hommes sur les frontières. Ils guêt
Commandés par des réfugiés.. » . :
Voici un extrait délai pétition que les ulémas
ont présentée au sultan;
S. H. le sultan ne -s'abaissera pas au point de re-
connaître les giaours comme maîtres des croyants
dans la vaste étendue de l'Etape j-le pâdi,%i-tah,
descendant, du Pfophet-e, a seul le droit décomman-
der. Les ulémas, gardiens fidèles du Coran, att.&;Lent
qu'ils sont dévoués de ecçur au sultan et qu'ils sont
prêts à lui sacrifier leur vie et leurs biens, et em-
ployer tous les moyens pour exciter les croyants h
combattre pour leur maître, leur prophète, leur dieu
et leur empereur, contre les giaours orgueilleux, et
ils espèrent que Dieu et son- Prophète leur donne-
ront la victoire. Que le sultan considère que, plein
de confiance dans Dieu et son Prophète, il ne lui est
permis de montrer aucune faiblesse au moment où
des escadrons armés se réunissent autour de lui, de
toutes les parties de l'Empire, pour le défendre. S'il
consentait à céder aux chiens de chrétiens, il en se-
rait responsable devant Dieu et son Prophète. Que le
%udishah éloigne de sa personne le& lâches et garde
autour de lui les braves, qui, comme le lion, ne con-
naissent pas le danger, et marche à leur tête, contre
/ennemi, £4 rendra l£fiiUe.comme î&nuit.devant»
le jour, et comme la paille se disperse a soufâe du
vent. Courage, sultan ! .
Ainsi finit l'adresse :
Dieu nous assiste et le Prophète ! Son étendarà
nous précède et ses serviteurs vivent encore. Dieu
soit loué jusque dans son septième çlelü ainsi que
son Prophète! f
Cette adresse avait causé de grandes inquié-
tudes. On avait même fait des préparatifs pour «
que, dans le cas d'un soulèvement, le sultan se
rendit à Andrinople ; mais tout s'est calmé.
L'Empereur a reçu hier, en audience particu-
lière, M. Firmin Rogier, en.oyé extraordinaire et
ministre plénipotentiaire de S. M. le roi des Bel-
ges, qui lui a remis une lettre de son souverain,
portant notification du mariage de S, A. R." le
prince Léopold, duc de Brabant, avec S. A. I.
Mme f archiduchesse Marie-Henriette d'Autri-
che.
L'Empereur a également reçu llâ'amiràl don •
Manuel BJanco Encelada, envoyé extraordinaire
et ministre plénipotentiaire du Chili, chargé de.
rerne.tre à S. M. la réponse de S. E. M. le prési-
dent de la république du Chni aux lettres de
notification du mariage de Sa Majesté Impériale.
S. E. M. le duc de Casigliano, ministre des af-
faires étrangères de S. A. I. et R. i'arcl^duc
grand- duc de Toscane, ainsi que son fiis, ont eu
l'honneur d'être reçus aujourd'hui par i'Empe-
*reur.
Un décret rendu par le gouvernement espa-
gnol, le 18 août, porte : . (
Vu l'enquête sur l'admission -à l'entrée des bâti-
ments à vapeur étrangers, en bois, du port de moins
de 400 tonneaux, mais qui atteignent ce tonnage en
y comprenant l'espace occupe par la machine ;
Considérant quel'art. 455 du tarif des douanes en
vigueur ne désigne que les embarcations de 400 ton-
neaux et au-dessus;
Yu le rapport du ministère
La reine a, sur la proposition de la direction gé-
nérale, ordonné ce qui suit :
1° Seront soumis-au droit inscrit à l'art. 45) du
tarif (i), les bâtiments à vapeur étrangers , en bois,
de 400 tonnea uxet au-dessus, y compris l'espace oc-
cupé par la machine; -
2° Ce droit sera perçu sur le nombre total des ton-
neaux: résultant du jaugeage;
3° Pour la prime accordée, en Espagne, aux. con-
structeurs de bâtiments, il sera également tenu
compte du nombre de tonneaux que jaugera l'espace
occupé par la machine.
Un autre décret, à la date du 20 du même
mois, porte : *
Vu le rapport fait k la reine concernant la fixation
des droits à percevoir sur les vins étrangers autres
que de Champagne, importés en demi-bouteilles;
FEUILLETON DU PAYS, JOURNAL DE L'EMPIRE.
DU 4 OCTOBRE 1853.
LE BARON LA GAZETTE.
PAR A. DE GONDRECOURT.
PREMIERE PARTIE.
XIII.
DANGERS QUE COURT UN HOMME QUE TROIS JOLIES
FEMMES ONT MENACÉ DU DOIGT.
' les redoutables colèrçs de h
^Uch È(;„^sse d@ Nemours, de la comtesse d<
et madame Bussy-Leclerc s'amas
sai'onfC contre le bailli de Clermont, l'intré-
Pid@ \1 galant diplomate menait la vie douci
adonnait du bon temps. Loin de soup
catastrophe quelconque, Cler
iïiontv-Un-e ai* Partolit des roses, et «'émerveil
lait du îuc rès de ses intrigues. Le gf1iCIeU-;
visa2 cette jeune fiancée rencontrée che:
Uduch SSe apparaissait souvent à notre cou
reiir gueil ij 8,:entures, mais la dépit, mais l'or
aussi de cette têt
^apor^ f fais.aient que l'amertume du !Sou\'(:
! ûir lVm6' ^ sur Je rêve d'amour. Il fallail
hélas ! h
D'don nn Ufie* flèche du carquois de Ct
l'eu on selIlent POUf que
a> a i e n t ^ Celt,e^uante conférence dor
^savonnUf valM'aiia'yse dressé le procès
« * Verbal le ^nln de Clermont écrivit en et
terrI' .es ' au roi de Navarre :
est interdile. s
03 16 au 30 septembre.
,
« Sire, nous avons appris ici, tout de tra-
» vers, les valeureux et glorieux combats que
» vous avez livrés à Mayenne, sous votre
» camp d'Arqués, aux premiers jours du
» présent mois. Je serais désolé de n'avoir
» point pris part à ces rudes affaires, si je ne
a bataillais pas, dans Paris, d'une façon peut-
» être encore plus rude, pour le triomphe de
» votre couronne. Décidément, Sire, vous
» êtes un grand capitaine et un homme heu-
» reux; vous venez de conquérir la Norman-
» .die, et moi, votre lieutenant, je viens de
» conquérir la Bastille, d'emporter l'Arse-
» nal et de canonner à outrance l'hôtel de
» Nemours, dont la garnison capitulera
» avant peu.
» Les ligueurs affectent de montrer des
» visages riants, et je ris tout le premier de
» leur fausse jubilation. Avant-hier, j'étais
» chez la duchesse de Nemours et l'on vint y
» annoncer l'arrivée à Paris de plusieurs
» drapeaux enlevés par Mayenne sur vos
» troupes. Comme je m'effrayais de cette
» mauvaise nouvelle, la duchesse me dit
» tout bas : Rassurez-vous, ces drapeaux ont
» été fabriqués à l'hôtel Montpensier. Pour
» que ce mot consolant m'ait été glissé à
» l'oreille, il faut que la duchesse soit des
» vôtres, en attendant qu'elle soit des mien-
» nes, ce qui, le diable aidant, ne tardera
» pas. De l'hôtel de Nemours s j'ai couru
» à l'Arsenal, où Brissac m'a dit, avec em-
» phase, que Mayenne vous conduisait à Pa-
» ris en triomphe, lié et garrotté ; à quoi la
» comtesse répondit en ordonnant qu'on al-
» lât. lui louer une maison rue St-Honoré,
» afin qu'elle pût vous voir passer. Pais elle
» ajouta, en me serrant la main : Celte mai-
» son nous servira, car il est juste de raire
» payer à M. de Brissac les soties inventions
» qu'il colporte; le roi de Navarre n'est pas
» plus le prisonnier de Mayenne que nous
» ne sommes, vous et moi, républicains. En-
» fin, j'ai quitté l'Arsenal pour aller à la
», Bastille , où Bussy-beclerc, le plus grand
» cuistre qui soit au monde, fait préparer
» une cage de 1er pour Votre Majesté. Ma-
» dame Bussy, pour écarter cette image
» aussi cruelle que grotesque, m'a raconté
» vos derniers exploits et m'a dit que, si son
» mari ne devenait pas un jour moins bête
» qu'il n'est depuis Ta naissance, elle vous
» prierait de le faire enfermer tout un mois,
» au pain sec et à l'eau fraîche, dans cette
» cage don t il avait parlé.
» Voilà donc trois femmes, et .trois fem- .
» mes charmantes , qui nous donnent la
» main. « Ce que femme veut, Dieu le veut, »
» dit le proverbe ; ce que trois fe mmes veu-
J) lent, Dieu ne le voudrait-il pas ?
» Sire, j'engage fortement Votre Majesté,à
» se rapprocher de Paris, car mes batteries
f vont ouvrir leur feu. Daignez calculer que
» le duc de Nemours aime peu Mayenne et
» que j'aime beaucoup la duchesse ; que M.
ï- de Brissac, en sa qualité de républicain,
» est, avant tout, dévoué à ses intérêts, et
» que la comtesse est fort de nos amies ; que
» Bussy-fceclerc ne voit que par sa femme,
» laquelle me chérit : calculez que M. de Ne-
» mours est gouverneur de Paris, M. de
» Brissac gouverneur de l'Arsenal, et Bussy
» gouverneur de la Bastille ; calculez que là
» où règne un mari, sa femme gouverne,
» lorsque, surtout, elle a l'amour en tête,
» et concluez qu'il vous sera, d'ici à huit
» jours, aussi l.acile d'entrer dans votie ca- I
» pitale par la porte Saint-Antoine ou par j
» les fossés de l'Arsenal, qu'il me sera CQlU- |
iD mode et agréable, à lHOi, d'entrer dans le f
» boudoir de l'une de nos trois belles ai- [
» liées. ' f
» Le chevalier de Pampelonne est-il re-
» venu de Londres ? je lui fais mes compli-
» ments. Le Normand La Gazette est tou-
» jours à la recherche de quelque ingénieux
» stratagème, mais je gage que nous aurons
» pris Paris avant que la lumière ne se fasse
» dans cet honorable cerveau, beaucoup
s moins profond que brave. Je dois vous
» dire, cependant, que le futur baron est s
» assez bien vu an quartier Saint-Jacques; j
» il pourra vous aider de ce côté, etc., etc. » I
Clermont confia cette lettre au fidèle La- j
prairie, et sè fit conduire en litière chez la I
duchesse de Nemours. 1
Madame de Nemours avait passé une nuit J
affreuse; le moins diable des, démons de la S
jalousie s'était emparé de ce cœur désiliu- ]
sionné, pour le blesser à. coups d'épingle.
La duchesse, pour se tenir parole, s'était
longtemps occupée, mais en vain, du meil-
leur moyen de se venger des trahisons de
son adorateur. C'était une femme froide qui,
pour la première fois, s'était laissé prendre
au charme de la tentation; elle aimait le
bailli, mais le sentiment qu'elle éprouvait
était plutôt tendre que passionné; son amour-
propre de grande dame avait plus souffert
que son âme de l'ingrate perfidie d'un
homme heureusement encore prosterné à
,ses pieds : quelques jours plus tard, et la du-
chesse eût appris, par une cruelle expé-
rience, quelles tortures de l'enfer la jalousie
véritable sait inventer pour le supplice de
ses victimes.
La colère de Mme de Nemours était certai-
nement violente, mais elle ne pouvait con-
seiller une vengeance barbare. Le beau ca-
valier trouvait encore une sorte de miséri-
corde devant son juge irrite ; ses yeux avaient
tant de langueur, et souvent dè si nobles
étincelles ! sa bouche avait menti, mais le
mensonge, en passant sur ses lèvres, s'y ar-
rêtait d'une grâce si éloquente ; toute sa per-
sonne avait un air si noble, tant de modestie
brave et spirituelle, qu'on n'osait châtier
trop vertement ce grand coupable égaré
dans un péché dont il eût été bien doux de le
purifier! Mme de Nemours penchait à la clé-
mence, puis elle se reprochait sa faiblesse ;
sou œil bleu s'animait, son beau front se
chargeait d'un nuage, et elle cherchait sans
relâche quelque punition exemplaire qu'elle
ne savait pas trouver.
Lorsque le laquais chargé d'introduire les
visites annonça le bailli de Clermont, la du-
chesse était perdue dans un dédale de ré-
flexions qui n'aboutissaient pas. La vue du
perfide exaspéra d'abord cette femme char-
mante, mais elle ne tarda pas à succomber
aux émotions de., son cœur, et, quoique ré-
solue à tenter des prodiges de coquetterie,
elle ne put dissimuler un sourire que Cler-
mont interpréta tout de travers, selon l'exé-
crable fatuité des amoureux en général.
Le bailli ne fut ni moins tendre, ni moins
pressant, ni moins habile que de coutume,
et la duchesse, quoique enivrée par ce par-
fum de galanterie, sut se défendre avec un
art, avec une tactique dont le traité fatal',
mais savant, sera toujours écrit dans le cer-
veau féminin. L'entretien dura- près d'une
heure, et Clermont s'avoua franchement
que, s'il n Vivait pas perdu de terrain dans
cet assaut de finesses, il n'avait pas non plus
fait reculer son adversaire :'aussi s'écria-t-il
en remontant dans sa litière :
— Cette femme-là aurait-elle plus que de
la vertu, c'est-à-dire de l'esprit, plus que du
cœur, c'est-à-dire de la tète? Dans ce cas,
gare à moi ! ou, mieux, tant pis pour le roi !
car le siège de Paris pourrait traîner long- f
temps. Hum ! est-ce que je me piquerais au
jeu! Bath ! les places qui se défendent sont
les meilleures à prendre... Allons à l'Ar-
senal.
La duchesse, de son côté, avait étouffé un
soupir sitôt après le départ du bailli, car une
idée pénible lui était venue. La vengeance
qu'elle cherchait, elle l'avait trouvée, et en
la trouvant elle avait murmuré tout bas :
— Quel dommage 1
Ce mot disait beaucoup comme on va s'en
assurer. Madame de Nemours ne pouvait dé-
noncer à la Ligue le partisan du Béarnais ;
jamais elle n'eût pu se résoudre à faire tom-
ber cette têto, charmante de noblesse et de
grâce, sous le glaive du bourreau ; elle ima-
gina donc de faire de ce volage royaliste un
véritable ligueur, de payer sa r.mçon au ca-
pitaine La Gazette, et de profiter du zèle ar-
dent qu'il avait étalé en présence du duc de
Nemours, pour lui faire donner un régiment
à l'armée de Mayenne, et l'obliger, bon gré
mal gré, à servir hors de Par is J11 cause de la
sainte Union.
Ce châtiment, ou plutôt cette malice, ven-
geait complètement et vengeait noblement
la duchesse, car il retombait sur deux ri-
vales détestées, et ruinât les espérances de
l'infidèle sans "Cornproiwtre sa vie.
Sa résolution bien prise, madame de Ne-
mours se mit en devoir de l'exécuter, avec
cette fiévreuse impatience qui donne des
ailes aux volontés des jolies-femmes ; mais,
tout en travaillant -à son projet, elle murmu-
rait sans cesse :
— Quel dommage !... ne plus le voir !
La comtesse de Brissac était beaucoup
plus outrée que madame de Nemours. Si la
jalousie avait des nuances bien tranchées
' dans ces deux cœurs et ces deux têtes, on
ne s'en étonnera pas, en songeant que ma-
dame de Brissac avait infiniment plus d'ex-
périence que la duchesse en ces sortes de
mésaventures ; elle était moins jeune de dix
années, par conséquent, plus avare de son
trésor, et, disons enfin le grand mot, elle
avait, plus que sa rivale, le droit de maudire
l'ingratitude du bailli, en ce qu'elle lui avait
sacrifié bien autre chose que la république
du gouverneur de l'Arsenal.
Mais la comtesse était une excellente,
femme, d'un esprit léger, d'un cœur qui-
restait toujours bon, quelle que fût son in- »
constance ; elle pouvait souffrir à la fois dans
son orgueil et son amour, sans être, pour
cela, capable d'une lâcheté. Le galant qui
trahissait les serments jurés à ses pieds était
sur-le-champ dédaigné, mais sa colère r e le
condamnait pas à morj. Toutefois, le bailli
de Clermont ne pouvait partager un sort
commun aux cavaliers vulgaires ; il était
trop séduisant, trop aimable, trop aimé pour
que le dédain seul lui fût infligé. Quant à ^
l'oublier, c'était chose impossible; il fallait
qu'il se souvînt de son crime par une expia-
tion digne de lui. ^
Mme de Brissac venait de combiner un
plan de vengeance tout coquet, tout mignon,
lorsque le bailli entra dans ce boudoir où
l 'avant-veiUe encore il avait pris du comte
des leçons de .libii-lé, et reçu de la comtesse
des serments d'esclavage. Mme de Brissac
avait un petit air dolent qui lui seyait à mer-
veille ; elle était emmitouflée dans des coif-'
fes de satin rose, roulée comme une chatte
dans une robe de chambre à grandes fleurs,
chaussée de petites pantoufles de velours
bien chaudes, l'œil vague et languissant, les
lèvres un ptues, quoique légèrement animées.
— Ah ! vous voilà, bailli, dit-elle en traî- '
nant sur les mots, je vous attendais... Vous
devenez rare.
— Chère comtesse, M. de Brissac m'avait
menacé d'une harangue, et, hier, je n'ai pas
osé...
— Ainsi, ce grand courage, ce beau dé-
voûment que vous faisiez sonner si haut, vous
abandonnent dès qu'il s'agit de les mon-
trer...
— Comtesse, une bataille, un duel, une „
conspiration, à la bonne heure, me voilà*
prêt... Je-porterais ma tête en Grève pour vos
beaux yeux, mais une harangue renouvelée
du grec de Sparte ou du latin de Rome,
avouez...
— J'avoue... bailli, je suis malade, bien
malade, très malade.
— Quoi ! vraiment !
Clermont s'approcha du fauteuil où se
dorlotait l'habile et charmante femme, et il
voulut baiser une main qu'on lui retira brus- ■
quement.
.., Oh! ! ne me touchez pas .'....♦j'ai les
nerfs dans un état pitoyable, le moindre
mouvement me crispe... %
— Eh 1 mon Dieu ! avez-vous fait appeler
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