Titre : Le Pays : journal des volontés de la France
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1853-10-05
Contributeur : Alletz, Édouard (1798-1850). Directeur de publication
Contributeur : La Guéronnière, Arthur de (1816-1875). Directeur de publication
Contributeur : Granier de Cassagnac, Adolphe (1806-1880). Directeur de publication
Contributeur : Cassagnac, Paul de (1842-1904). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328343740
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 05 octobre 1853 05 octobre 1853
Description : 1853/10/05 (A5,N278). 1853/10/05 (A5,N278).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4651973x
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-180
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 27/03/2017
LE PAYS
»©URÏÏAL DE L EMPIRE.
Mercredi l) Octobre i8ë3
TROIS MOIS 12 ft 4
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Les abonnements partent des 1" et 16 de chaque moîl#^
r Atf.raMldt.) • ^
SOMMAIRE.
„« « StatbUquè.
P"fl Extraits des livrnaux, eor-
- dépêches.
^ * à l'Eropprft'T : Importation des céréale?.,
epirel'AIgMe et U. France.
^ i Mouvements des bâtlmtnus dei'Etat.
fl»r,l,ftU>n des produ Ils de l'industrie de l'asso-
allemande, il Munioh.
0>e,#1,?né 1 «€• de fer en-Espagne : Franchise de droits
POU r partie du-matérirl de construction.
i vis du consul générai de la Grande Breta-
.
lagDÇinoat, Espagne, ELaL5-Unil, C'JtbA, Mexique,
^ fÏÏli»® ' François Ara go. -
et départements s Nouvelles diverses,
fr*b",° ff.-.ni 1 Cour «'assises cw la. Seine ; Cour im-
dangers : Tribunal maritime de Nantes.
jjfgiie» parvienne» 1 Course» k Asnières, prix
i""" déttfairé impérial de la Légion d'honneur.
'rce et iadnsîrie: HaUes -et marcMa.
,o.r88 ; Jiouvemen,i des fonds. • .. ;
/ Le baron La Gazette, par M. A.
de Gonàreeourt. .
fe.ll.dous i ) J Notiee historique sur Pradier, par
, , — M. Raonl RocheHe<
Paris 4 Octobre.
Nous avons fait connaître dans un premier
jjicleie chiffre total du commerce français,
importations et exportations, montant à
Milliards 72 millions ; nous avons fait re-
marquer l'augmentation considérable du
mouvement commercial pendant la période
pnquennals qui finit ayec 4852. Ce mou-
lent s'est élevé à 13 milliards i92 millions,
,i,ri qu'il n'avait été pour la période de 1843
j i847 que de 11,997 millions, et pour celle
(161838 à 1842 que de 10,175 millions. Nous
allons suivre maintenant les faits spéciaux
qui résultent de la publication de l'adminis-
tration des douanes.
Une première et grande division qui se
présente à l'esprit est celle du commerce par
mer et dn commeree par terre.
Le commerce par mer et en valeurs ac-
tuelles s'est élevé, a l'importation, à 900 mil-
lions, et le commerce par terre à 493 mil-
lions. Les exportations par mer ont atteint
1,504 millions ; par terre 376 millions.
Sur la somme totale de 2,235 millions en
valeurs officielles que représente le mouve-
ment des transports par mer, en importa-
lions et exportations, la. part du pavillon
national est de 4,031 millions,, ou 46 p. 0)0.
C'est environ 2 p. 010 de moifis-qu'én'l^Sl,
ainsi que relativement à là période quin-
quennale.
Si on considère l'extension qu'acquièrent
chaque jour et notre commerce d'échange
elles transports sous pavillon étranger, on
aura à regretter cette situation sans progrès
suffisants de notre marine de commerce, qui
reste trop en arrière du mouvement général
de la prospérité. C'est là sans contredit un
objet essentiel bien digne d'appeler les étu-
des et la sollicitude du gouvernement.
L'ensemble des échanges de la France avec
les pays étrangers s'est accru partout en
1852, importations et exportations réunie?.
L'Angleterre est toujours à la tête des pays
avec lesquels nous entretenons les relations
commerciales les plus étendues. Le total en
1851 en avait été de 417 millions; il s'est- éle-
vé en 1852 à 485 millions. Viennent ensuite
les Etats-Unis, la Belgique, la Suisse, les
Etats-Sardes, l'Espagne, les Etats du Zollve-
rein, la Turquie, la Russie et les autres pays
avec lesquels l'augmentation a été considé-
rable. Il n'y a eu diminution qu'avec le Bré-
sil, 68 millions au lieu de 74; le Mexique 26
millions au lieu de 31, les villes Anséatiques
24 millions au lieu de 26, le Chili 19 millions
au lien de 26.
Si on examine maintenant le commerce
au point de vue des provenances et des des-
tinations, on voit que les pays importa-
* ♦
teurs sont surtout la Belgique, les Etats-
Unis, les Etats-Sardes, la Turquie et Rus-
sie. Il ressort aussi de cet examen que notre
marché intérieur a continué de fournil- à
quatre des:oprwcipalirfiiii;&aBce& avee lès-
quelles s'opèrent nos échanges, à l'Angle-
terre, à l'Espagne, à la Suisse et au Brésil,
une somme de marchandises d'une valeur
supérieure à la valeur des marchandises que
nous avons tirées de ce pftys; et enfin, en ce
qui concerne l'association àllfeôiande, que la
balance s'établit exactement. , .
L'administration des douanes fait rêmar-
I tjÙçr qoe ces observations Rappliquent aux
I valeurs of(icïeUés/ En gênant pour base de
rapprochement les valeurs actruèltés, 'la ba-
lance du compte avec les Elâjiî'Mfeif.feit ap-
i: pariittre au contraire une différence-de 51
i millions à l'avantage de 1"exportation ; à 1-é-
s gard de l'association allemande, il fàut paiï
! contre ajouter 6 millions au compte de no§
5 exportations pour les élever au niveau du
( chiffre des importations.
î Enfin et en réduisant les faits en chiffras
du commerce spécial et en valeurs actuelles
par rapport aux dix puissances av'ee lesque.,-
les les relations de la France ont ',eu lé pfus
s d'importance, on trouve que l'importation
de l'Ang!eierre a été en 1852 de 94 millions;
* l'exportation française, 296 millions ; les
Etats-Unis, importations, 138 imitions, ex-
portations de France, 187 millions; la Belgi-
gique, importations, 137 mil.; exportations
fr. 132 mit.; Etatt.-Sardes, imp., 100 mil.':
exp. fr. 70 mil.; Espagne, imp., 30 mil.,
exp. fr. 59 mil.; Suisse, import., 31 Juil.;
export. fr. 56 mill.; Association allefnânde,
import., 48 mil.; export. fr. 42 mil.; Tur-,
quie, import., 47 mil.; export. fr. 30 mil.;
Russie, import., 30 mil.; export. fr. 17 mil.
Dans la somme des produits-importés
1,438 millions (valeurs officielles) et 1,392
millions (valeurs actuelles), les matières né-
cessaires às l'industi-ie entrent aucomrnene
général pour 896 millions (valeurs oftlcielles)
et 902 millions (valeurs actuelles).
1 En ce qui concerne le commerce spécial,
les résultats sont les suivants : les matières
nécessaires à l'industrie (valeur actuelle) y fi-
gurent pour 777 mill. en 1852." Elles n'y figu-
raient en 1851 que pour 595 millions. Il y a
augmentation de 1$2 millions (31 010). Les
objets naturel* de consommation 161 mil-
lions ; en 1851129 millions seulement : aug-
mentation 32 millions (25 0$); les objets fa-
briqués, 52 millions ; en 1851 41 millions,
augmentation 1.1 millions (25 0[0).
En rapprochant par nature de produits les
résultats de l'exercice 1852, valeurs officiel-
les, de ceux obtenus en 1851, l'administra-
tion signale ce fait pour le commerce spécial,
qu'il s'est produit - une augmentation de 43
millions (46 0/0) sur les soies, de 30 mitions
(86 0/0) sur les laines, de 24 millions (23 0/0)
sur le coton, de 12 millions (46 0; 0) sur le ta-
bac en teuilles, de 10 millions (61 0/0) sur
l'indigo, de 7 millions (38 0/0) sur le lin, de
6 millions 1 /2 (41 0/0) sur les graines à ense-
mencer, et de 5 millions (39 0 / 0, sur le cuivre.
Or, toutes ces marchandises appartiennent
à la catégorie des matières nécessaires à
l'industrie, et cela prouve l'activité de nos
fabriques qu'alimentent les produits de l'A-
mérique, de l'Angleterre, de la Sardaigne, de
la Russie, de la Turquie.
Une diminution de 8 millions de francs
(33 °tÙ) dans les importations d'huile d'olive,
est la seule de quelque importance qui existe
pour cette catégorie.
Parmi les ob,,els naturels de consomma-
tion, le sucre colonial offre une augmenta-
tion de 11 millions ip2 (34 010), le café une
de 2 millions 112 (15 OlO), les arachides une
de 4 millions (32 010), et le sucre étranger
une de 2 millions (15 0[0) ; les tissus de lin,
ceux de soie et l'horlogerie sont les seuls
objets fabriqués à l'égard desquels on re-
marque des différences à citer; lis offrent
des augmentations de 2 millions 1\2, 3 mil-
lions et 1 million 112, correspondant à 23,57
et" 31 OlO.
La valeur des exportations en m.archan-
frisés de toute origine était (valeur officielle)
de 1,682 millions. Comme en. 1851 cette
somme se répartit dans la proportion de 32
contre 68 centièmes entre les produits na-
turels et les objets manufacturés.
Au commerce spécial, 361 millions (va'eurs
officielles) constituent la part des objets na-
turels, et 872 minions la part des objets ma-
nufacturés. C'est une diminution de 6 p. 010
sur les produits naturels, et une augmenta-
tion 'de 2 p. 0i0 sur les fabrications. Mais au
point de vue des valeurs actuelles, les résúl-
tats*constatés cn 1852 sont plus favorables
.que ceux constatés en 1851, et pour les pro-
duits naturels et pour les produits manufac-
turés. Ici l'accroissement est de 26 et 73 mil-
lions (7 et 9 Ô[0}.\ \
Les. principales différences amenées dans
les valeurs totales dé- certains produits en-
tre les valeurs officielles et les valeurs actuel-
les par les différences soit en plus, soit en
moins, des taux d'évaluation, sont, ainsi que
le constate l'administration : 1° augmenta-
tion des valeurs actuelles sur les valeurs of-
ficielles : tissus de soie, 53 millions ; vins,
13 millions ; tabletterie, bimblotterie, etc.,
18 millions; peaux ouvrées, 12 millions;
eaux-de-vie, 33 "millions ; linge et habille-»
ment,.7 millions; ouvrages en métaux, 22
millions ; chevaux et bestiaux, 9 millions-,
peaux tannées, maroquinées, etc., 9 mil-
lions ; 2° diminution des valeurs acluelles sur
les valeurs officielles : tissus de coton, 85
muions ; tissus de laine, 9 millions ; tissus
de lin ou de chanvre, 10 millions ; pote-
rie, verres et cristaux, 15 million's; couleurs,
8 militons ; poils pour la filature et la cha-
pellerie, 10 millions.
Ces résultats prouvent combien il serait
désirable qu'une nouvelle enquête vint fixer-
d'une manière plus en harmonie avec l'état
actuel des choses la valeur moyenne des
marchandises, et permît de réviser l'ordon-
nance du 27 mars 1827 qui a fixé cette va-
leur. L'écart entre les' valeurs officielle" et
les valeurs actuelles rend évidemment facti-
ce l'action des tarifs dans beaucoup de cas,
et il en résulte en même temps une compli-,
cation des plus fâcheuses. pour les statisti-
ques de l'administration des douanes.
L'administration constate que les exporta-
tions de céréales en 1832 ont diminué de 38
millions (33 OjO); celles de-graines et de fruits
oléagineux de 6 millions (51 010), et celles
d'eau-de-vie, de vin, d'huiles volatiles et de
peaux brutes et pelleteries, chacune de 2
millions (7,24 et 81 010). Par contre, les ex- t
portations de vins, de peaux tannées, cor-
royées, etc., et de poils pour la filature, ont
augmenté de 5, 5 et 4 millions (7,48 et.
43 0[0).
Parmi les objets fabriqués, les tissus de
soie et de fleuret réunis offrent seuls une
augmentation de quelque importance ; eiîc
est de 22 millions (11 0,0). Il existe une di-
minution de 15 millions (9 0,0) sur les tissus
de coton, de 4 millions (37 OiO) sur les fils
de ceton et de laine et de 4 millions (9 0t0)
sur la tabletterie, la mercerie, etc.
Il nous reste à nous occuper des primes
à l'exportation, des transits, des percep-
tions de l'administration des douanes, du
mouvement de la nivigatiort et du com-
merce de l'Aigérie. Il y a là encore tout une
série de faits économiques importants qui
jettent d'utiles lumières sur la situation du
commerce de la France, de sa marine et de
sa colonie africaine.
P. DUPLAN.
Le- maréchal ministre de la guerre a adres-
sé à l'Empereur, à la date du 30 septembre,
un rapport dont nous n'avons pas besoin de
faire remarquer l'importance. En voici la te-
neur :
Sire, le décret rendu par Votre Majesté, le IS
août denier, autorise l'importation des céréales
au minimum des droits déterminés par la loi du
15 avril 1832 ; il accorde, en outre, dans tous
les ports de l'Empire, l'exemption des taxes de
tonnage aux navires importateurs, quel que soit
leur pavillon ; mais rien dans ses dispositions
n'implique la suspension de l'article 1er de l'or-
donnance du 16 décembre 1843, sanctionné par
l'article 8 de la loi du 11 janvier 18SI, d'après
lequel les transports entre l'Algérie et la Franèe
ne peuvent s'effectuer que par navires français,
sauf le cas d'urgence et de nécessité absolue
pour le service public.
En présence, d'une part, des approvisionne-
ments considérables de grains indigènes faits
par le commerce algérien pour être dirigés sur
la métropole, et, d'autre part, de l'absence mo-
mentanée dans les ports ie l'Algérie de navires
- français, dont un très gra ..d nombre ont été af-
frétés pour la mer Noire et les autres pays pro-
ducteurs de céréales, il m'a paru nécessaire,
Sire, après avoir pris l'avis de mes collègues aux
'départements des finances, de l'agricultut •• du
commerce et des travaux publics, de déférer à
1 approbation de Votre Majesté le projet de dé-
cret ci-après, lequel a pour but d'autoriser, jus-
qu'au 31 décembre 1853, les transports entre
l'Algérie et la France, par navires étrangers, de
grains et farines, de riz, de pommes 'de terre et
de légumes secs. >
Cette mesure, qui sera un nouveau témoignage
àela haute sollicitude de Votre Majesté pour l'a-
griculture algérienne, qui a fait les plus sérieux
efforts pour concourir à l'approvisionnement de
la métropole, exercera également, il Éft permis
de l'espérer, une heureuse influence sur le cours
des marchés français.
En suite de ce rapport, l'Empereur a ren-
du, à là même date, le décret suivant :
" Art. 1er. Jusqu'au 31 décembre 1853, Tes trans-
ports, entre l'Algétie et la France, de grains et
farines, de riz, de pommes de terre et delégu-
me»secs, pourront s'effectuer par navires étran-
gers.
Art. 2. Quelle que soit la date de leur arrivée
à destination, les navires étrangers ainsi char-
gés jouiront du bénéfice de l'autorisation concé-
dée par l'art. ler, pourvu qu'ils aient quitté leur
point de départ antérieurement au 31 décembre
1853.
Nous recevons, par la télégraphie privée,
la dépêche suivante :
i/.-f Vienne, lundi 3 octobre.
i > Les métalliques ont baissé d'un pour cent sur
( ïe bruit de l'arrivée dejiouvelles de Constantino-
? pie du 26, d'après lesquelles le'divan aurait pris
l des résolutions dans le sens de la guerre.
Une correspondance particulière de Vien-
ne, du 30 au soir, annonce qu'on avait reçu
des nouvelles de Constantinople.
; On assurait que M. le comte de Bruck avait
eu une conférence avec les membres les plus
influents du divan, mais que cette démarche
n'avait amené aucun résultat ni aucun chan-
gement dans les résolutions de la Porte. -
D'après la Correspondance autrichienne
du 2 octobre, il aurait été décidé, dans les
conférences d'Ollmutz, que l'on proposerait à
la Porte-Ottomane un nouveau moyen d'ar-
ranger le différend.
On lit dans la Nouvelle Gazette de Prusse,
sous la date de Berlin, le 1er octobre :
Les dernières nouvelles ' arrivées d'Ollmütz
nous apprennent que S. M. l'empereur Nicolas a
manifesté dans les conférences le plus vif désir
de maintenir la paix, et que l'empereur d'Autri-
che a partagé ce désir ainsi que les diplomates.
Tout indique donc que les souverains ne veulent
point la guerre. Une guerre générale européenne
est impossible, et dans le cas même où il y au
rait une déclaration de guerre entre la Turquie
et la Russie, l'effet n'en serait pas immédiat.
- La Gazette de Cologne, du 3 octobre, an-
nonce que, dans l'entrevue du général fran-
çais de Goyon avec l'empereur de Russie,
S. M. lui a dit :
Je regrette beaucoup de ne pas voir person-
nellement votre empereur et de ne pouvoir dire
à toute l'Europe combien j'aime et estime l'em-
pereur, votre maître. Je vous invite à me suivre
à Varsovie pour assister aux manœuvres de mes
troupes.
Le comte de Goyon, ajoute la Gazette de
Cologne, a envoyé immédiatement une dé-
pêche télégraphique à Paris, et quelques
heures aprè3 l'autorisation de suivre le czar
à Varsovie lui est parvenue.
Nous lisons dans la Gazette de Breslau,
sous la rubrique de Vienne, le 29 septembre :
L'empereur de Russie, étant à Ollmütz, s'est
rendu dans la chapelle des habitants des fron-
tières professant la religion grecque. En descen-
dant de voiture devant la chapelle, le czar s'est
découvert. Il a monté les degrés en s'inelinant,
et s'est agenouillé devant l'autel sur le parvis,
laissant de côté le coussin de velours qu'on lui
avait préparé. Il a prié avec une dévotion pro-
fonde.
Le Tîmes publie une correspondance d'oli-
mûtz, en date du 29 ; nous y lisons : -
L'empereur Nicolas et le comte de Nésselrode
ont donné à l'empereur d'Autriche et au comte
Buol Schauenstein les assurances les plus posi-
tives qu'il n'est ni ne sera pas question de la part
de la Russie d'agir isolément dans le but de
renverser l'empire ottoman. L'unique objet de
l'empereur ebt de terminer toute cette affaire
avec honneur et de mettre un terme à toute sus-
pension dans les marchés et bourses de l'Eu-
rope, aussi vite que possible. Dans ce but, c'est
le désir collectif et plein de sollicitude des cabi-
nets de Vienne et Saint-Pétersbourg, qu'avec le
concours des gouvernements de France, d'An-
gleterre et de Prusse, l'action combinée de la
conférence de Vienne soit renouvelée, et que son
résultat soit une formule d'assurance assez sa-
tisfaisante pour la Porte, pour que l'on puisse
compter sur son acceptai ion.
Le Morning Chronicle du 3 octobre ex-
prime la pensée que si une guerre venait à
éclater, l'Autriche maintiendrait une pru-
dente neutralité, commandée par ses plus
chers intérêts.
La Prusse, ajoute ce journal, ne prendrait cer-
tainement pas fait et cause pour une invasion
moscovite, sachant que le pîus grand danger
pour elle viendrait du Nord. L'Eglise catholique
romaine, dans toute l'Europe, s'est rangée du
côté de la liberté et de la justice.
L'Espagne, en voyant le général Prim en Tur-
quie, a manifesté de la disposition à adhérer à
la ligue européenne.
L'envoi de l'escadre hollandaise, qui resterait
neutre dans les Dardanelles, est un encourage-
^ ment donné au gouvernement ottoman.
Le Danemark et la Suède surveillent les évé-
nements ; ils se tiennent sur leurs gardes.
Nous lisons dans le Morning Post du 3
octobre :
La question d'Orient va prendre un caractère
tranché par les nouvelles qui, sous un ou deux
jours, vont arriver d'Ollmülz. Quoique, nous le
craignons, il n'y ait guère lieu de douter du ré-
sultat de cette conférence de souverains, il nous
reste encore à savoir si l'empereur d'Autriche a
obtenu que le czar adoptàt une politique plus
modérée ou si l'autocrate a déterminé l'empe-
reur François Joseph à se séparer des puissances
occidentales et à rester neutre, s'il ne se joint pas
ouvertement à la Russie dans le conflit qui est
sur le point d'éclater.
Quelque probable qu'il soit que l'Empereur
Nicolas persévérera dans sa politique agressive,
il est possible que les nouvelles qu'il reçoit sur
l'attitude résolue des puissances occidentales
aient plus d'effet sur lui que les arguments sug-
gérés par la peur àr l'Autriche, qui craint pour
ses possessions, ou que toute considération de
respect pour les traités existants et pour l'inté-
grité de l'empire; qu'il a garantie par sa signa-
ture. Il est difficile d'imaginer que l'empereur
de Russie ne voie pas que l'Angleterre et la Fran-
ce ne lui laisseront jamais subjuguer la Turquie,
V \ ^ s ,
et fl sera bien entêté s'il refuse -de céder à
influence morale, et s'engage dans une lutte ""
contre les immenses forces et ressources maté-
rielles dont d imposent les deux empires-, fun qttt
est le plus puissant du continent, l'autre maître
de la mer. On a dit tout ce qu'il y avait à dire
sur le droit et sur le tort dans cette affaire. Il
est certain que le bon droit est du. côté dis la
Turquie.
Est-il croyable que la Russie ne sente pas elle-
même qu'elle a tort? Tout dépendra de la déter-
minatiou qu'elle a prise aujourd'hui, de persé-
vérer ou de faire retraite. Sa retraite, si elle ne
porte pas remède aux maux déjà faits, épar-
gnera du moins à l'Europe une guerre désas-
treuse. Sa persévérance aura pour résultat un
couflit et, nous en sommes persuadés, une dé-
faite.
La politique de l'Angleterre doit être digne du
peuple qui a si souvent et si noblement sacrifié
son sang et ses trésors pour une cause juste. La
cause de .la liberté de l'Europe et du droit des
gens est une noble cause, et l'Angleterre la sou-
tiendra d'une manière digne de ses principes et
de ses précédents. Déjà des meetings publics*
ont eu lieu dans plusieurs villes importantes, et
il paraît que vendredi prochain un meeting d'ha-
bitants de la capitale aura lieu à la Taverne de
Londres.
.*
On lit dans. le Morning Advertiser du 3 oc-
tobre :
Aujourd'hui il y a eu une grande démonstra-
tion anti-russe à Heuley. Cette semaine, il y
aura des démonstrations semblables à Wolver-
' hampton, Manchester et Birmingham.
Le Morning-Herald annonce que le maire
de Leicester a convoqué un meeting pour
délibérer sur la situation actuelle des affai-
res en Orient. La convocation du maire a
été signée parle clergé et par un grand
nombre d'habitants notables.
Nous reproduisons les différentes versions
des journaux anglais sur la destination de,
l'escadre commandée par l'amiral Corry :
Morning Herald. — Les premiers ordres don- 1
nés pour la destination de la flotte de la Man-
che semblent avoir été remplacés par de nou-
velles instructions. Au lieu que l'amiral Corry
ait pris sous son commandement les deux divi-
sions pour aller faire une croisiène et exercer les
équipages, une grande,partie de la flotte a été
disséminée dans les ports de la Manche.
Morning Advertiser. — Après toutes les ru-
meurs qui ont circulé sur les mouvements et la
destination de l'escadre de l'amiral Corry, il se
trouve qu'au lieu d'aller. assister le grand-turc,
elle va être employée à un service beaucoup
moins belliqueux, entre la baie de Bantry et
PlymoUth. Elle croisera pendant quinze jours :
passé ce délai, l'on ne connaît pas la destination
de l'escadre.
Morning Chronicle. — Le bateau à vapeur
Bunshee est arrivé le 30 septembre, dans la soi-
rée, à Portsmouth, après avoir quitté l'escadre
du canal qui a mis en mer le même jour. Une
partie se rend à Lisbonne, et l'autre gagne les
ports du royaume. -fi'
P.-S. — Une lettre de Gibraltar annonçe
qu'une corvette à vapeur anglaise détachée
de l'escadre de l'amiral Corry venait de
mouiller dans le port.,
La Gazette de Triestepublie des nouvelles
d î Constantinople du 19 septembre, elles an-
noncent que la situation est plus menaçante
en apparence qu'eu réalité. Peut-être y aura-
t-il des manifestations, mais la guerre n'é-
clatera pas, surtout une guerre générale.
Si l'on en croit des lettres écrites des pro-
vinces danubiennes et publiées par le Globe
du 3 octobre, le prince Gortschakoff aurait
communiqué aux officiers commandant les
divers corps de l'armée d'occupation les ins-
tructions envoyées de Saint-Pétersbourg par
le ministre de la guerre pour l'adoption des
mesures nécessaires afin d'établir des quar-
tiers d'hiver pour l'armée russe dans la Va-
lachie et la Moldavie.
L'Impartial de Smyrne annonce que l'ar-
FEUILLETON DU PAYS, JOURNAL DE L'EMPIRE.
DU 4 OCTOBRE 1853.
LE BARON LA GAZETTE.
PAR A. DE GONDRECOURT.
PREMIERE PARTIE.
XIV.
EN HONNÊTE COQUIN.
Nrarrilî à cfTtes, fait un détour
bailli de et l'epiwde de la disparition du
mai3 où serait-il permis
J'etnIn aiml'n1 CG. n'est en compagnie d'une
Ral,lut'é'l'n'na - Jeui)e> charmante ? Or, le
torla "t ch ile- roi Navarre nous a
ne fut-cf,, reiS dames nous devions,
de ^ terni?6 par courtoisie; perdre un peu
âge; Ps qu'on aime à gaspiller à tout
1 la e) feu-qililavait.eritendu faire dans la
Paient m,;tUon s'en souvient, avait brus-
f°Ur COur Il Ài i',.SOn compagnon La Gazette
gaines m i l'appelaient le plctmement dès
!ei)ait de „ e clIquetis des ép{'es. Le bruit
^ Pavé cesser, ai lorsque Ctermont sauta sur
Nient' nrof,11 entendit des voix qui s'éloi-
2 %er d'énergiques jurons ; hâ-
î 0lîlmes'arrâfx^ S,01*' bientÔt un groupe
l'orle était d'une maison dont la
* de mil1»0Qverte* Ces hommes, au
ri-e^u'un >7nt,re' semblaient attendre que
êI*lre eu a eux de la maison, et deux
U rA soutenaient, par les bras et la
V^'«'So&®lta^dUe.
16 seplembre au 4 octobre.
taille, une femme vêtue d'une tunique blan-
che, la tète nue et les cheveux épars.
— Oh 1 oh ! qu'est ceci ? pensa Clermont
trop brave pour compter ses adversaires, et
disposé, mieux que jamais, à ramasser une
querelle, pour faire diversion aux trois
échecs qu'il avait subis de la rue de Nevers à
la Bastille en passant par l'Arsenal.
--Aurons-nous entin de la lumière ? dit
l'un des hommes; nous avons affaire près
du Louvre, et voilà bien du temps de perdu.
Clermont mit, tout doucement, l'épée à la
main, et il s'avança droit au groupe, en mar-
chant sur la pointe des pieds, si légèrement
qu'on ne l'en tendit pas. Il était superbe-
ment vêtu d'une casaque de satin gris,
chaussé de mules de velours, de sorte que,
grâce à cette toilette de bal, il effleurait le
sol en silence.
Au moment où le bailli allait joindre les
hommes qui lui tournaient le dos, la porte
de la maison s'ouvrit entièrement, et un
cinquième personnage se montra sur le seuil
tenant un flambeau d'une main et une épée
de l'autre. Occupé de la besogne qui fixait
toute son attention,..le nouveau venu ne
tourna pas les yeux du côté par où se pré-
sentait le bailli, mais il porta les rayons de
son flambeau sur le visage de la femme qui
se débattait avec épuisement entre les bras
de ses ravisseurs.
Ctermont poussa un cri mêlé de joie et de
rage; il venait de reconnaître la belle jeune
fille qu'il avait rencontrée chez la duchesse
de Nemours, et qu'il croyait sur la route
d'Italie. A ce cri les cinq compagnons firent
volte-face, et la jeuns fille apercevant le ca-
valier qui, déjà, lui avait fait baisser les
yeux avec trouble, dans une première entre-
vue dont le souvenir s'était gravé dans sa
mémoire, s'efforça de he dégager et mur-
mura ces mots :
— Monsieur de Clermont... sauvez-moi!
Clermont! répéta l'un des ravisseurs.
Tiens! c'est pardieu vrai! Parbleu! mes en-
fàms, nous avons bonne chance; l'expédi-
tion se terminera mieux qu'elle n'a com-
mencé.
Le bailli avait cinq épées tendues contre
la sienne; mais cette formidable inégalité
l'inquiétait peu; rompu aux exercices tfc
l'escrime, intrépide à outrance, exulté par
le bonheur de défendre une femme dont il
avait rêvé pendant huit jours, il ne pouvait -
que mépriser des bandits indignes du fer ha-
bile qui voltigeait dans sa main.
Sans dire un mot, san* se troubler, écar-
tant avec une merveilleuse adresse les ar-
mes qui l'enveloppaient, Clermont fondit sur
l'un de ses adversaires elle toucha en pleine
poitrine, avec tant de vigueur et de sourde
colère, que son épée se brisa dans la pro-
fonde blessure où elle avait disparu presque
en entier. Le brigand chancela et alla s'a-
battre au milieu de la rue, tué raide et sur
le coup.
Les quatre coquins qui restaient se jetè-
rent sur le bailli désarmé, et comme sa vi-
gueur ne répondait pas à son courage, ils se
saisirent de ses bras, le renversèrent, lui
fermèrent 'la bouche et le jinrent immobile,
quelques efforts qu'il tentât pour échapper à
leurs étreintes.
— A vous deux, dit le chef de la bande,
ce même homme que nous avons vu chez
Mme Bussy-Leclerc; conduisez la fili tte là-
haut, attachez-la, bâillounez-la et revenez...
Foi de Rifodé, je me charge de contenir ce
beau mignon... Dépêchons-nous, et rappor-
tez-moi une bonne corde.
Cet ordre fut exécuté sur-le-champ; la
jeune file disparut entraînée, emportée par
les deux bandits q....e le Rifodé avait désignés,
et qui revinrent bientôt u.unis d'une corde
solide.
Ce fut au moment où on voulait lui lier
les deux poignets, que le bailli dégageant, sa
bouche, poussa ce cri entendu "de La Ga-
zette :
-A moi, capitaine... à moi!... Main-forte.
— Ah! vous faites le récalcitrant! avait ré-
pondu le Rifodé, parb'eu! men gentilhom-
me, nous allons vous mener un peu plus
loin, pour ne pas vous exposer à éveiller le!
amis que vous pouvez avoir dans ce quartiers
Les quatre coquins portèrent le bailli dans
une rue voisine , lui serrèrent étroitement
les poignets, nouèrent leur corde à chacune
de ses jambes, de manière à le contraindre à
ne marcher qu'au pas, et le remirent sur
pieds. Alors, le Rifodé tirant son chapeau
au pauvre prisonnier avec une -politesse
railleuse, lui dit, après lui avoir rendu la li-
berté de la parole : '
— Monsieur le bailli de Clermont, je suis
bon diable, quoique je n'en aie pas exac'e-
ment la mine ; vous plaît-il d'écouter et de
- suivre un conseil?..
J
' — Voyons le conseil, répondit Clermont,
qui commençait à comprendre que ses af-
faires, loin d'aller bien, tournaient au plus,
mal. t »
— N'essayez pas de vous regimber ; l'épée
au poing, vous valez dix combattants ; les
mains désarmées, vous avez tout juste la
force d'un poulet. Si je vous serrais le cou
de mes dix doigts, je vous étranglerais le
plus joliment du inonde; et je vous étran-
glerai , parole d'honneur, pour peu que
vous vous défendiez, pour peu que vous
poussiez un cri, pour peu que vous vous
refusiez à me suivre...
— Et où vous suivre ? demanda Clermont ;
j'ai pour habitude d'aller où je veux, et non
pas où l'on veut.
— D'accord; mais vous n'avez pas non
plus l'habitude de vous faire serrer la gorge
de la façon dont il s'agit.
— Bref, que fera-t-on de moi ? ♦
- Je n'en sais rien... Moi, je ne vous ferai
aucun mal si vous êtes raisonnablè. Nous
allons nous promener pendant une heure
environ. La nuit est belle, elle est même su-
perbe : vous verrez que l'exercice vous fera
du bien.
— Auriez-vous d& l'esprit, par hasard?
demanda le bailli assez gaîment, car ce vail-
lant cœur ne savait jamais prendre au sé-
rieux les dangers les plus manifestes.
— Avec vous, mon gentilhomme, on a de
Tesprit ^ sans y penser... Je vous connais de
longue date.
— Bah vraiment, ceci me fait honneur et
joie... D'où nous connaissons-nous, s'il vous
plaît ?
— Marchons, et chemin faisant j'aurai le
plaisir de vous'répondre, j'ai toujours passé
pour bon compagnon de route.
— Eh bien ! soit, marchons.
— Ainsi vous ne crierez pas, vous n'ap-
pellerez point les passants au secours?...
songez...
— C'est bien, j'ai songé... partons.
— Monsieur le bailli, j'ai fait, dans un
temps, un métier plus honorable,mais moins
lucratif que celui-ci, reprit le Rilodé en se
mettant en marche après avoir ordonné à
deux de ses gens de retourner sur leurs pas,
de ramasser le camarade laissé mort sur le
s pavé, et de conduire au lieu convenu la
| jeune fille enfermée dans la maison mysté-
? rieuse.
— Permettez, interrompit Clermont, avant
de me parler de vos vertus anciennes, veuil-
lez me dire ce que vous comptez faire de
cette demoi'elle que...
— Désolé de nei pouvoir vous être agréa-
ble, mon cher seigneur ; je suis voleur de
profession ; j'assassine quelquefois, mais je.
ne trahis jamais qui me paie. La demoiselle
qui vous intéresse doit être menée, par mes
soins et secrètement, en un logis dont je ne
vous enseignerai pas l'adresse, tout déstreux
que je suis de vous être agréable.
— Très bien... contez-moi donc votre his-
toire.
— A l'époque où'j'avais quelque vergogne
au cœur, en ce temps-la, je n'avais pas une
pistole en poche, j'étais soldat et soldat dans
les piquiers à cheval du roi Henri troi-
sième...
, - Toi? ' ~
— Parfaitement... Vous , monsieur le
bailli, vous étiez capitaine des chasses de Sa
Majesté, un poste qui vous allait à merveille,
car votre belle mine...
— L'ami, à l'heure qu'il est, vos compli-
ments sont d'un grand luxe ; abrégez, s'il
vous plaît...
— Mon gentilhomme, je suis un peu versé
dans les belles-lettres, tout coquin que vous
me voyez ; j'ai pris de charmantes leçons de
maître Ambroise Bonifiic1, qui ne faisait ja-
mais un discours sans l'enjoliver detioritures,
et puisque j'ai plus de temps qu'il ne m'en
faut pour satisfaire votre curiosité, vous me
permettrez bien de jeter des fleurs dans
mon récit. Vous étiez donc, ce que vous êtes
encore, un très fringant seigneur, généreux
jusqu'à l'hyperbole et brave à tout venant.
Un jour, il y a de cela dix ans, vous vous
promeniez à cheval dans la forêt de Châtel-
lerault — le roi tenait sa cour à Amboise
et vous étiez, à ce que l'on m'a dit, venu
passer une semaine chez votre oncle le bâs,
ron de Tardieu...
— C'est vrai.
— Pardienne, si c'est vrai ! j'ai une mé-
moire d'ange et...
—Continuez, interrompit Clermont, qui
tout à coup prit grand intérêt à ce bava?**
dagé.
— Vous suiviez au pas l'une des longues
percées du bois, lorsqu'un cavalier vint à
vous, courant à bride abattue. Ce cavalier
portait un costume de paysan et tenait à la
main une large épée. Ne sachant ce qui
pourrait résulter de cette rencontre en
pareil lieu, vous vous mîtes sur la défen-
sive. Le cavalier vous aborda 'et vous de-
manda, tout haletant, si vous n'aviez pas été
croisé par une troupe de' bohêmes vaga-
bonds, ayant avec eux une petite fille, vêtue
d'une robe i-os(,...
— Ah ! mon Dieu ! quel souvenir me rap-
pelez-vous là ? ,
— Un souvenir étrange, laissez-moi ache-
ver. Vous répondîtes à ma question par un
signe de tête négatif. Voyant que vous vous
teniez toujours sur vos gardes, le cavalier
vous dit : — Mon capitaine, ne me soupçon-
nez pas de mauvaises intentions, je suis Da-
vid, piquier du roi, et je cours après des bri-
gands qui, ce matin, ont enlevé une jeune
fille du château de Tarare, où mon père est
garde-chasse. Comme j'achevais cette phra-
se, nous entendîmes un cri perçant, jeté par
une voix d'enfant, et à ce cri succédèrent
quelques gros éclats de rire.
— Ils sont là, vous dit le cavalier, là dans
ce fourré, venez à mon aide.
— C'était donc vous, ce cavalier ? demanda
le b-ailit.
— C'était moi... Vous mîtes sur-le-champ
pied à terre, je fis de même, nous attachâmes
nos chevaux à des arbres, et pousr âmes droit
au fourré. Bientôt nous aperçûmes la troupe
des bohèmes qui étaient as-jls en cercle, et
achevaient de remplacer les beaux habits de
la pauvre fillette par de sales haillons. Il y
avait là six bandits jeunes et vigoureux et
deux vieilles femmes horribles de visage.
Aussitôt que nous nous fûmes montrés, les
hommes s'armèrent de longs couteaux ca-
talans, et nous ordonnèrent, avec menaces,
de nous éloigner. La réponse que vous fîtes
à cette canaille m'est restée gravée dàns la
mémoire; vous tombâtes comme la foudre
dans le cercle des truands et' je n'avais pas
eu le temps d'en blesser un, que déjà vous
en aviez couché deux sur l'herbe. Le reste de
la troupe prit la fuite à toutes>jambes, nous
laissant pour trophée de victoire le char-
mant enfant qui, en m'apercevait, s'était ve.
nu jeter dans mes bras.
Remerciez monsieur le bailli de Cler- •
mont, disv-je à la fillette, il vient de rendre à
votre noble père,. ainsi qu'à vous, un signalé
service ; sans lui je n'aurais pu vous arra-
cher à vos ravisseurs ; ainsi, mademoiselle
»©URÏÏAL DE L EMPIRE.
Mercredi l) Octobre i8ë3
TROIS MOIS 12 ft 4
/
1.4
B£BUlJSt' : -\S
< j y x&
; pARlg} RUBDB ?AUB0URG-MQSTS?>EÎ'4'Si *>H \
06 Année. ^-N° 2781
&*
4
SH AH: 48 FR.
t
* " " •' - - '• à "
Les abonnements partent des 1" et 16 de chaque moîl#^
r Atf.raMldt.) • ^
SOMMAIRE.
„« « StatbUquè.
P"fl Extraits des livrnaux, eor-
- dépêches.
^ * à l'Eropprft'T : Importation des céréale?.,
epirel'AIgMe et U. France.
^ i Mouvements des bâtlmtnus dei'Etat.
fl»r,l,ftU>n des produ Ils de l'industrie de l'asso-
allemande, il Munioh.
0>e,#1,?né 1 «€• de fer en-Espagne : Franchise de droits
POU r partie du-matérirl de construction.
i vis du consul générai de la Grande Breta-
.
lagD
^ fÏÏli»® ' François Ara go. -
et départements s Nouvelles diverses,
fr*b",° ff.-.ni 1 Cour «'assises cw la. Seine ; Cour im-
dangers : Tribunal maritime de Nantes.
jjfgiie» parvienne» 1 Course» k Asnières, prix
i""" déttfairé impérial de la Légion d'honneur.
'rce et iadnsîrie: HaUes -et marcMa.
,o.r88 ; Jiouvemen,i des fonds. • .. ;
/ Le baron La Gazette, par M. A.
de Gonàreeourt. .
fe.ll.dous i ) J Notiee historique sur Pradier, par
, , — M. Raonl RocheHe<
Paris 4 Octobre.
Nous avons fait connaître dans un premier
jjicleie chiffre total du commerce français,
importations et exportations, montant à
Milliards 72 millions ; nous avons fait re-
marquer l'augmentation considérable du
mouvement commercial pendant la période
pnquennals qui finit ayec 4852. Ce mou-
lent s'est élevé à 13 milliards i92 millions,
,i,ri qu'il n'avait été pour la période de 1843
j i847 que de 11,997 millions, et pour celle
(161838 à 1842 que de 10,175 millions. Nous
allons suivre maintenant les faits spéciaux
qui résultent de la publication de l'adminis-
tration des douanes.
Une première et grande division qui se
présente à l'esprit est celle du commerce par
mer et dn commeree par terre.
Le commerce par mer et en valeurs ac-
tuelles s'est élevé, a l'importation, à 900 mil-
lions, et le commerce par terre à 493 mil-
lions. Les exportations par mer ont atteint
1,504 millions ; par terre 376 millions.
Sur la somme totale de 2,235 millions en
valeurs officielles que représente le mouve-
ment des transports par mer, en importa-
lions et exportations, la. part du pavillon
national est de 4,031 millions,, ou 46 p. 0)0.
C'est environ 2 p. 010 de moifis-qu'én'l^Sl,
ainsi que relativement à là période quin-
quennale.
Si on considère l'extension qu'acquièrent
chaque jour et notre commerce d'échange
elles transports sous pavillon étranger, on
aura à regretter cette situation sans progrès
suffisants de notre marine de commerce, qui
reste trop en arrière du mouvement général
de la prospérité. C'est là sans contredit un
objet essentiel bien digne d'appeler les étu-
des et la sollicitude du gouvernement.
L'ensemble des échanges de la France avec
les pays étrangers s'est accru partout en
1852, importations et exportations réunie?.
L'Angleterre est toujours à la tête des pays
avec lesquels nous entretenons les relations
commerciales les plus étendues. Le total en
1851 en avait été de 417 millions; il s'est- éle-
vé en 1852 à 485 millions. Viennent ensuite
les Etats-Unis, la Belgique, la Suisse, les
Etats-Sardes, l'Espagne, les Etats du Zollve-
rein, la Turquie, la Russie et les autres pays
avec lesquels l'augmentation a été considé-
rable. Il n'y a eu diminution qu'avec le Bré-
sil, 68 millions au lieu de 74; le Mexique 26
millions au lieu de 31, les villes Anséatiques
24 millions au lieu de 26, le Chili 19 millions
au lien de 26.
Si on examine maintenant le commerce
au point de vue des provenances et des des-
tinations, on voit que les pays importa-
* ♦
teurs sont surtout la Belgique, les Etats-
Unis, les Etats-Sardes, la Turquie et Rus-
sie. Il ressort aussi de cet examen que notre
marché intérieur a continué de fournil- à
quatre des:oprwcipalirfiiii;&aBce& avee lès-
quelles s'opèrent nos échanges, à l'Angle-
terre, à l'Espagne, à la Suisse et au Brésil,
une somme de marchandises d'une valeur
supérieure à la valeur des marchandises que
nous avons tirées de ce pftys; et enfin, en ce
qui concerne l'association àllfeôiande, que la
balance s'établit exactement. , .
L'administration des douanes fait rêmar-
I tjÙçr qoe ces observations Rappliquent aux
I valeurs of(icïeUés/ En gênant pour base de
rapprochement les valeurs actruèltés, 'la ba-
lance du compte avec les Elâjiî'Mfeif.feit ap-
i: pariittre au contraire une différence-de 51
i millions à l'avantage de 1"exportation ; à 1-é-
s gard de l'association allemande, il fàut paiï
! contre ajouter 6 millions au compte de no§
5 exportations pour les élever au niveau du
( chiffre des importations.
î Enfin et en réduisant les faits en chiffras
du commerce spécial et en valeurs actuelles
par rapport aux dix puissances av'ee lesque.,-
les les relations de la France ont ',eu lé pfus
s d'importance, on trouve que l'importation
de l'Ang!eierre a été en 1852 de 94 millions;
* l'exportation française, 296 millions ; les
Etats-Unis, importations, 138 imitions, ex-
portations de France, 187 millions; la Belgi-
gique, importations, 137 mil.; exportations
fr. 132 mit.; Etatt.-Sardes, imp., 100 mil.':
exp. fr. 70 mil.; Espagne, imp., 30 mil.,
exp. fr. 59 mil.; Suisse, import., 31 Juil.;
export. fr. 56 mill.; Association allefnânde,
import., 48 mil.; export. fr. 42 mil.; Tur-,
quie, import., 47 mil.; export. fr. 30 mil.;
Russie, import., 30 mil.; export. fr. 17 mil.
Dans la somme des produits-importés
1,438 millions (valeurs officielles) et 1,392
millions (valeurs actuelles), les matières né-
cessaires às l'industi-ie entrent aucomrnene
général pour 896 millions (valeurs oftlcielles)
et 902 millions (valeurs actuelles).
1 En ce qui concerne le commerce spécial,
les résultats sont les suivants : les matières
nécessaires à l'industrie (valeur actuelle) y fi-
gurent pour 777 mill. en 1852." Elles n'y figu-
raient en 1851 que pour 595 millions. Il y a
augmentation de 1$2 millions (31 010). Les
objets naturel* de consommation 161 mil-
lions ; en 1851129 millions seulement : aug-
mentation 32 millions (25 0$); les objets fa-
briqués, 52 millions ; en 1851 41 millions,
augmentation 1.1 millions (25 0[0).
En rapprochant par nature de produits les
résultats de l'exercice 1852, valeurs officiel-
les, de ceux obtenus en 1851, l'administra-
tion signale ce fait pour le commerce spécial,
qu'il s'est produit - une augmentation de 43
millions (46 0/0) sur les soies, de 30 mitions
(86 0/0) sur les laines, de 24 millions (23 0/0)
sur le coton, de 12 millions (46 0; 0) sur le ta-
bac en teuilles, de 10 millions (61 0/0) sur
l'indigo, de 7 millions (38 0/0) sur le lin, de
6 millions 1 /2 (41 0/0) sur les graines à ense-
mencer, et de 5 millions (39 0 / 0, sur le cuivre.
Or, toutes ces marchandises appartiennent
à la catégorie des matières nécessaires à
l'industrie, et cela prouve l'activité de nos
fabriques qu'alimentent les produits de l'A-
mérique, de l'Angleterre, de la Sardaigne, de
la Russie, de la Turquie.
Une diminution de 8 millions de francs
(33 °tÙ) dans les importations d'huile d'olive,
est la seule de quelque importance qui existe
pour cette catégorie.
Parmi les ob,,els naturels de consomma-
tion, le sucre colonial offre une augmenta-
tion de 11 millions ip2 (34 010), le café une
de 2 millions 112 (15 OlO), les arachides une
de 4 millions (32 010), et le sucre étranger
une de 2 millions (15 0[0) ; les tissus de lin,
ceux de soie et l'horlogerie sont les seuls
objets fabriqués à l'égard desquels on re-
marque des différences à citer; lis offrent
des augmentations de 2 millions 1\2, 3 mil-
lions et 1 million 112, correspondant à 23,57
et" 31 OlO.
La valeur des exportations en m.archan-
frisés de toute origine était (valeur officielle)
de 1,682 millions. Comme en. 1851 cette
somme se répartit dans la proportion de 32
contre 68 centièmes entre les produits na-
turels et les objets manufacturés.
Au commerce spécial, 361 millions (va'eurs
officielles) constituent la part des objets na-
turels, et 872 minions la part des objets ma-
nufacturés. C'est une diminution de 6 p. 010
sur les produits naturels, et une augmenta-
tion 'de 2 p. 0i0 sur les fabrications. Mais au
point de vue des valeurs actuelles, les résúl-
tats*constatés cn 1852 sont plus favorables
.que ceux constatés en 1851, et pour les pro-
duits naturels et pour les produits manufac-
turés. Ici l'accroissement est de 26 et 73 mil-
lions (7 et 9 Ô[0}.\ \
Les. principales différences amenées dans
les valeurs totales dé- certains produits en-
tre les valeurs officielles et les valeurs actuel-
les par les différences soit en plus, soit en
moins, des taux d'évaluation, sont, ainsi que
le constate l'administration : 1° augmenta-
tion des valeurs actuelles sur les valeurs of-
ficielles : tissus de soie, 53 millions ; vins,
13 millions ; tabletterie, bimblotterie, etc.,
18 millions; peaux ouvrées, 12 millions;
eaux-de-vie, 33 "millions ; linge et habille-»
ment,.7 millions; ouvrages en métaux, 22
millions ; chevaux et bestiaux, 9 millions-,
peaux tannées, maroquinées, etc., 9 mil-
lions ; 2° diminution des valeurs acluelles sur
les valeurs officielles : tissus de coton, 85
muions ; tissus de laine, 9 millions ; tissus
de lin ou de chanvre, 10 millions ; pote-
rie, verres et cristaux, 15 million's; couleurs,
8 militons ; poils pour la filature et la cha-
pellerie, 10 millions.
Ces résultats prouvent combien il serait
désirable qu'une nouvelle enquête vint fixer-
d'une manière plus en harmonie avec l'état
actuel des choses la valeur moyenne des
marchandises, et permît de réviser l'ordon-
nance du 27 mars 1827 qui a fixé cette va-
leur. L'écart entre les' valeurs officielle" et
les valeurs actuelles rend évidemment facti-
ce l'action des tarifs dans beaucoup de cas,
et il en résulte en même temps une compli-,
cation des plus fâcheuses. pour les statisti-
ques de l'administration des douanes.
L'administration constate que les exporta-
tions de céréales en 1832 ont diminué de 38
millions (33 OjO); celles de-graines et de fruits
oléagineux de 6 millions (51 010), et celles
d'eau-de-vie, de vin, d'huiles volatiles et de
peaux brutes et pelleteries, chacune de 2
millions (7,24 et 81 010). Par contre, les ex- t
portations de vins, de peaux tannées, cor-
royées, etc., et de poils pour la filature, ont
augmenté de 5, 5 et 4 millions (7,48 et.
43 0[0).
Parmi les objets fabriqués, les tissus de
soie et de fleuret réunis offrent seuls une
augmentation de quelque importance ; eiîc
est de 22 millions (11 0,0). Il existe une di-
minution de 15 millions (9 0,0) sur les tissus
de coton, de 4 millions (37 OiO) sur les fils
de ceton et de laine et de 4 millions (9 0t0)
sur la tabletterie, la mercerie, etc.
Il nous reste à nous occuper des primes
à l'exportation, des transits, des percep-
tions de l'administration des douanes, du
mouvement de la nivigatiort et du com-
merce de l'Aigérie. Il y a là encore tout une
série de faits économiques importants qui
jettent d'utiles lumières sur la situation du
commerce de la France, de sa marine et de
sa colonie africaine.
P. DUPLAN.
Le- maréchal ministre de la guerre a adres-
sé à l'Empereur, à la date du 30 septembre,
un rapport dont nous n'avons pas besoin de
faire remarquer l'importance. En voici la te-
neur :
Sire, le décret rendu par Votre Majesté, le IS
août denier, autorise l'importation des céréales
au minimum des droits déterminés par la loi du
15 avril 1832 ; il accorde, en outre, dans tous
les ports de l'Empire, l'exemption des taxes de
tonnage aux navires importateurs, quel que soit
leur pavillon ; mais rien dans ses dispositions
n'implique la suspension de l'article 1er de l'or-
donnance du 16 décembre 1843, sanctionné par
l'article 8 de la loi du 11 janvier 18SI, d'après
lequel les transports entre l'Algérie et la Franèe
ne peuvent s'effectuer que par navires français,
sauf le cas d'urgence et de nécessité absolue
pour le service public.
En présence, d'une part, des approvisionne-
ments considérables de grains indigènes faits
par le commerce algérien pour être dirigés sur
la métropole, et, d'autre part, de l'absence mo-
mentanée dans les ports ie l'Algérie de navires
- français, dont un très gra ..d nombre ont été af-
frétés pour la mer Noire et les autres pays pro-
ducteurs de céréales, il m'a paru nécessaire,
Sire, après avoir pris l'avis de mes collègues aux
'départements des finances, de l'agricultut •• du
commerce et des travaux publics, de déférer à
1 approbation de Votre Majesté le projet de dé-
cret ci-après, lequel a pour but d'autoriser, jus-
qu'au 31 décembre 1853, les transports entre
l'Algérie et la France, par navires étrangers, de
grains et farines, de riz, de pommes 'de terre et
de légumes secs. >
Cette mesure, qui sera un nouveau témoignage
àela haute sollicitude de Votre Majesté pour l'a-
griculture algérienne, qui a fait les plus sérieux
efforts pour concourir à l'approvisionnement de
la métropole, exercera également, il Éft permis
de l'espérer, une heureuse influence sur le cours
des marchés français.
En suite de ce rapport, l'Empereur a ren-
du, à là même date, le décret suivant :
" Art. 1er. Jusqu'au 31 décembre 1853, Tes trans-
ports, entre l'Algétie et la France, de grains et
farines, de riz, de pommes de terre et delégu-
me»secs, pourront s'effectuer par navires étran-
gers.
Art. 2. Quelle que soit la date de leur arrivée
à destination, les navires étrangers ainsi char-
gés jouiront du bénéfice de l'autorisation concé-
dée par l'art. ler, pourvu qu'ils aient quitté leur
point de départ antérieurement au 31 décembre
1853.
Nous recevons, par la télégraphie privée,
la dépêche suivante :
i/.-f Vienne, lundi 3 octobre.
i > Les métalliques ont baissé d'un pour cent sur
( ïe bruit de l'arrivée dejiouvelles de Constantino-
? pie du 26, d'après lesquelles le'divan aurait pris
l des résolutions dans le sens de la guerre.
Une correspondance particulière de Vien-
ne, du 30 au soir, annonce qu'on avait reçu
des nouvelles de Constantinople.
; On assurait que M. le comte de Bruck avait
eu une conférence avec les membres les plus
influents du divan, mais que cette démarche
n'avait amené aucun résultat ni aucun chan-
gement dans les résolutions de la Porte. -
D'après la Correspondance autrichienne
du 2 octobre, il aurait été décidé, dans les
conférences d'Ollmutz, que l'on proposerait à
la Porte-Ottomane un nouveau moyen d'ar-
ranger le différend.
On lit dans la Nouvelle Gazette de Prusse,
sous la date de Berlin, le 1er octobre :
Les dernières nouvelles ' arrivées d'Ollmütz
nous apprennent que S. M. l'empereur Nicolas a
manifesté dans les conférences le plus vif désir
de maintenir la paix, et que l'empereur d'Autri-
che a partagé ce désir ainsi que les diplomates.
Tout indique donc que les souverains ne veulent
point la guerre. Une guerre générale européenne
est impossible, et dans le cas même où il y au
rait une déclaration de guerre entre la Turquie
et la Russie, l'effet n'en serait pas immédiat.
- La Gazette de Cologne, du 3 octobre, an-
nonce que, dans l'entrevue du général fran-
çais de Goyon avec l'empereur de Russie,
S. M. lui a dit :
Je regrette beaucoup de ne pas voir person-
nellement votre empereur et de ne pouvoir dire
à toute l'Europe combien j'aime et estime l'em-
pereur, votre maître. Je vous invite à me suivre
à Varsovie pour assister aux manœuvres de mes
troupes.
Le comte de Goyon, ajoute la Gazette de
Cologne, a envoyé immédiatement une dé-
pêche télégraphique à Paris, et quelques
heures aprè3 l'autorisation de suivre le czar
à Varsovie lui est parvenue.
Nous lisons dans la Gazette de Breslau,
sous la rubrique de Vienne, le 29 septembre :
L'empereur de Russie, étant à Ollmütz, s'est
rendu dans la chapelle des habitants des fron-
tières professant la religion grecque. En descen-
dant de voiture devant la chapelle, le czar s'est
découvert. Il a monté les degrés en s'inelinant,
et s'est agenouillé devant l'autel sur le parvis,
laissant de côté le coussin de velours qu'on lui
avait préparé. Il a prié avec une dévotion pro-
fonde.
Le Tîmes publie une correspondance d'oli-
mûtz, en date du 29 ; nous y lisons : -
L'empereur Nicolas et le comte de Nésselrode
ont donné à l'empereur d'Autriche et au comte
Buol Schauenstein les assurances les plus posi-
tives qu'il n'est ni ne sera pas question de la part
de la Russie d'agir isolément dans le but de
renverser l'empire ottoman. L'unique objet de
l'empereur ebt de terminer toute cette affaire
avec honneur et de mettre un terme à toute sus-
pension dans les marchés et bourses de l'Eu-
rope, aussi vite que possible. Dans ce but, c'est
le désir collectif et plein de sollicitude des cabi-
nets de Vienne et Saint-Pétersbourg, qu'avec le
concours des gouvernements de France, d'An-
gleterre et de Prusse, l'action combinée de la
conférence de Vienne soit renouvelée, et que son
résultat soit une formule d'assurance assez sa-
tisfaisante pour la Porte, pour que l'on puisse
compter sur son acceptai ion.
Le Morning Chronicle du 3 octobre ex-
prime la pensée que si une guerre venait à
éclater, l'Autriche maintiendrait une pru-
dente neutralité, commandée par ses plus
chers intérêts.
La Prusse, ajoute ce journal, ne prendrait cer-
tainement pas fait et cause pour une invasion
moscovite, sachant que le pîus grand danger
pour elle viendrait du Nord. L'Eglise catholique
romaine, dans toute l'Europe, s'est rangée du
côté de la liberté et de la justice.
L'Espagne, en voyant le général Prim en Tur-
quie, a manifesté de la disposition à adhérer à
la ligue européenne.
L'envoi de l'escadre hollandaise, qui resterait
neutre dans les Dardanelles, est un encourage-
^ ment donné au gouvernement ottoman.
Le Danemark et la Suède surveillent les évé-
nements ; ils se tiennent sur leurs gardes.
Nous lisons dans le Morning Post du 3
octobre :
La question d'Orient va prendre un caractère
tranché par les nouvelles qui, sous un ou deux
jours, vont arriver d'Ollmülz. Quoique, nous le
craignons, il n'y ait guère lieu de douter du ré-
sultat de cette conférence de souverains, il nous
reste encore à savoir si l'empereur d'Autriche a
obtenu que le czar adoptàt une politique plus
modérée ou si l'autocrate a déterminé l'empe-
reur François Joseph à se séparer des puissances
occidentales et à rester neutre, s'il ne se joint pas
ouvertement à la Russie dans le conflit qui est
sur le point d'éclater.
Quelque probable qu'il soit que l'Empereur
Nicolas persévérera dans sa politique agressive,
il est possible que les nouvelles qu'il reçoit sur
l'attitude résolue des puissances occidentales
aient plus d'effet sur lui que les arguments sug-
gérés par la peur àr l'Autriche, qui craint pour
ses possessions, ou que toute considération de
respect pour les traités existants et pour l'inté-
grité de l'empire; qu'il a garantie par sa signa-
ture. Il est difficile d'imaginer que l'empereur
de Russie ne voie pas que l'Angleterre et la Fran-
ce ne lui laisseront jamais subjuguer la Turquie,
V \ ^ s ,
et fl sera bien entêté s'il refuse -de céder à
influence morale, et s'engage dans une lutte ""
contre les immenses forces et ressources maté-
rielles dont d imposent les deux empires-, fun qttt
est le plus puissant du continent, l'autre maître
de la mer. On a dit tout ce qu'il y avait à dire
sur le droit et sur le tort dans cette affaire. Il
est certain que le bon droit est du. côté dis la
Turquie.
Est-il croyable que la Russie ne sente pas elle-
même qu'elle a tort? Tout dépendra de la déter-
minatiou qu'elle a prise aujourd'hui, de persé-
vérer ou de faire retraite. Sa retraite, si elle ne
porte pas remède aux maux déjà faits, épar-
gnera du moins à l'Europe une guerre désas-
treuse. Sa persévérance aura pour résultat un
couflit et, nous en sommes persuadés, une dé-
faite.
La politique de l'Angleterre doit être digne du
peuple qui a si souvent et si noblement sacrifié
son sang et ses trésors pour une cause juste. La
cause de .la liberté de l'Europe et du droit des
gens est une noble cause, et l'Angleterre la sou-
tiendra d'une manière digne de ses principes et
de ses précédents. Déjà des meetings publics*
ont eu lieu dans plusieurs villes importantes, et
il paraît que vendredi prochain un meeting d'ha-
bitants de la capitale aura lieu à la Taverne de
Londres.
.*
On lit dans. le Morning Advertiser du 3 oc-
tobre :
Aujourd'hui il y a eu une grande démonstra-
tion anti-russe à Heuley. Cette semaine, il y
aura des démonstrations semblables à Wolver-
' hampton, Manchester et Birmingham.
Le Morning-Herald annonce que le maire
de Leicester a convoqué un meeting pour
délibérer sur la situation actuelle des affai-
res en Orient. La convocation du maire a
été signée parle clergé et par un grand
nombre d'habitants notables.
Nous reproduisons les différentes versions
des journaux anglais sur la destination de,
l'escadre commandée par l'amiral Corry :
Morning Herald. — Les premiers ordres don- 1
nés pour la destination de la flotte de la Man-
che semblent avoir été remplacés par de nou-
velles instructions. Au lieu que l'amiral Corry
ait pris sous son commandement les deux divi-
sions pour aller faire une croisiène et exercer les
équipages, une grande,partie de la flotte a été
disséminée dans les ports de la Manche.
Morning Advertiser. — Après toutes les ru-
meurs qui ont circulé sur les mouvements et la
destination de l'escadre de l'amiral Corry, il se
trouve qu'au lieu d'aller. assister le grand-turc,
elle va être employée à un service beaucoup
moins belliqueux, entre la baie de Bantry et
PlymoUth. Elle croisera pendant quinze jours :
passé ce délai, l'on ne connaît pas la destination
de l'escadre.
Morning Chronicle. — Le bateau à vapeur
Bunshee est arrivé le 30 septembre, dans la soi-
rée, à Portsmouth, après avoir quitté l'escadre
du canal qui a mis en mer le même jour. Une
partie se rend à Lisbonne, et l'autre gagne les
ports du royaume. -fi'
P.-S. — Une lettre de Gibraltar annonçe
qu'une corvette à vapeur anglaise détachée
de l'escadre de l'amiral Corry venait de
mouiller dans le port.,
La Gazette de Triestepublie des nouvelles
d î Constantinople du 19 septembre, elles an-
noncent que la situation est plus menaçante
en apparence qu'eu réalité. Peut-être y aura-
t-il des manifestations, mais la guerre n'é-
clatera pas, surtout une guerre générale.
Si l'on en croit des lettres écrites des pro-
vinces danubiennes et publiées par le Globe
du 3 octobre, le prince Gortschakoff aurait
communiqué aux officiers commandant les
divers corps de l'armée d'occupation les ins-
tructions envoyées de Saint-Pétersbourg par
le ministre de la guerre pour l'adoption des
mesures nécessaires afin d'établir des quar-
tiers d'hiver pour l'armée russe dans la Va-
lachie et la Moldavie.
L'Impartial de Smyrne annonce que l'ar-
FEUILLETON DU PAYS, JOURNAL DE L'EMPIRE.
DU 4 OCTOBRE 1853.
LE BARON LA GAZETTE.
PAR A. DE GONDRECOURT.
PREMIERE PARTIE.
XIV.
EN HONNÊTE COQUIN.
Nrarrilî à cfTtes, fait un détour
bailli de et l'epiwde de la disparition du
mai3 où serait-il permis
J'etnIn aiml'n1 CG. n'est en compagnie d'une
Ral,lut'é'l'n'na - Jeui)e> charmante ? Or, le
torla "t ch ile- roi Navarre nous a
ne fut-cf,, reiS dames nous devions,
de ^ terni?6 par courtoisie; perdre un peu
âge; Ps qu'on aime à gaspiller à tout
1 la e) feu-qililavait.eritendu faire dans la
Paient m,;tUon s'en souvient, avait brus-
f°Ur COur Il Ài i',.SOn compagnon La Gazette
gaines m i l'appelaient le plctmement dès
!ei)ait de „ e clIquetis des ép{'es. Le bruit
^ Pavé cesser, ai lorsque Ctermont sauta sur
Nient' nrof,11 entendit des voix qui s'éloi-
2 %er d'énergiques jurons ; hâ-
î 0lîlmes'arrâfx^ S,01*' bientÔt un groupe
l'orle était d'une maison dont la
* de mil1»0Qverte* Ces hommes, au
ri-e^u'un >7nt,re' semblaient attendre que
êI*lre eu a eux de la maison, et deux
U rA soutenaient, par les bras et la
V^'«'So&®lta^dUe.
16 seplembre au 4 octobre.
taille, une femme vêtue d'une tunique blan-
che, la tète nue et les cheveux épars.
— Oh 1 oh ! qu'est ceci ? pensa Clermont
trop brave pour compter ses adversaires, et
disposé, mieux que jamais, à ramasser une
querelle, pour faire diversion aux trois
échecs qu'il avait subis de la rue de Nevers à
la Bastille en passant par l'Arsenal.
--Aurons-nous entin de la lumière ? dit
l'un des hommes; nous avons affaire près
du Louvre, et voilà bien du temps de perdu.
Clermont mit, tout doucement, l'épée à la
main, et il s'avança droit au groupe, en mar-
chant sur la pointe des pieds, si légèrement
qu'on ne l'en tendit pas. Il était superbe-
ment vêtu d'une casaque de satin gris,
chaussé de mules de velours, de sorte que,
grâce à cette toilette de bal, il effleurait le
sol en silence.
Au moment où le bailli allait joindre les
hommes qui lui tournaient le dos, la porte
de la maison s'ouvrit entièrement, et un
cinquième personnage se montra sur le seuil
tenant un flambeau d'une main et une épée
de l'autre. Occupé de la besogne qui fixait
toute son attention,..le nouveau venu ne
tourna pas les yeux du côté par où se pré-
sentait le bailli, mais il porta les rayons de
son flambeau sur le visage de la femme qui
se débattait avec épuisement entre les bras
de ses ravisseurs.
Ctermont poussa un cri mêlé de joie et de
rage; il venait de reconnaître la belle jeune
fille qu'il avait rencontrée chez la duchesse
de Nemours, et qu'il croyait sur la route
d'Italie. A ce cri les cinq compagnons firent
volte-face, et la jeuns fille apercevant le ca-
valier qui, déjà, lui avait fait baisser les
yeux avec trouble, dans une première entre-
vue dont le souvenir s'était gravé dans sa
mémoire, s'efforça de he dégager et mur-
mura ces mots :
— Monsieur de Clermont... sauvez-moi!
Clermont! répéta l'un des ravisseurs.
Tiens! c'est pardieu vrai! Parbleu! mes en-
fàms, nous avons bonne chance; l'expédi-
tion se terminera mieux qu'elle n'a com-
mencé.
Le bailli avait cinq épées tendues contre
la sienne; mais cette formidable inégalité
l'inquiétait peu; rompu aux exercices tfc
l'escrime, intrépide à outrance, exulté par
le bonheur de défendre une femme dont il
avait rêvé pendant huit jours, il ne pouvait -
que mépriser des bandits indignes du fer ha-
bile qui voltigeait dans sa main.
Sans dire un mot, san* se troubler, écar-
tant avec une merveilleuse adresse les ar-
mes qui l'enveloppaient, Clermont fondit sur
l'un de ses adversaires elle toucha en pleine
poitrine, avec tant de vigueur et de sourde
colère, que son épée se brisa dans la pro-
fonde blessure où elle avait disparu presque
en entier. Le brigand chancela et alla s'a-
battre au milieu de la rue, tué raide et sur
le coup.
Les quatre coquins qui restaient se jetè-
rent sur le bailli désarmé, et comme sa vi-
gueur ne répondait pas à son courage, ils se
saisirent de ses bras, le renversèrent, lui
fermèrent 'la bouche et le jinrent immobile,
quelques efforts qu'il tentât pour échapper à
leurs étreintes.
— A vous deux, dit le chef de la bande,
ce même homme que nous avons vu chez
Mme Bussy-Leclerc; conduisez la fili tte là-
haut, attachez-la, bâillounez-la et revenez...
Foi de Rifodé, je me charge de contenir ce
beau mignon... Dépêchons-nous, et rappor-
tez-moi une bonne corde.
Cet ordre fut exécuté sur-le-champ; la
jeune file disparut entraînée, emportée par
les deux bandits q....e le Rifodé avait désignés,
et qui revinrent bientôt u.unis d'une corde
solide.
Ce fut au moment où on voulait lui lier
les deux poignets, que le bailli dégageant, sa
bouche, poussa ce cri entendu "de La Ga-
zette :
-A moi, capitaine... à moi!... Main-forte.
— Ah! vous faites le récalcitrant! avait ré-
pondu le Rifodé, parb'eu! men gentilhom-
me, nous allons vous mener un peu plus
loin, pour ne pas vous exposer à éveiller le!
amis que vous pouvez avoir dans ce quartiers
Les quatre coquins portèrent le bailli dans
une rue voisine , lui serrèrent étroitement
les poignets, nouèrent leur corde à chacune
de ses jambes, de manière à le contraindre à
ne marcher qu'au pas, et le remirent sur
pieds. Alors, le Rifodé tirant son chapeau
au pauvre prisonnier avec une -politesse
railleuse, lui dit, après lui avoir rendu la li-
berté de la parole : '
— Monsieur le bailli de Clermont, je suis
bon diable, quoique je n'en aie pas exac'e-
ment la mine ; vous plaît-il d'écouter et de
- suivre un conseil?..
J
' — Voyons le conseil, répondit Clermont,
qui commençait à comprendre que ses af-
faires, loin d'aller bien, tournaient au plus,
mal. t »
— N'essayez pas de vous regimber ; l'épée
au poing, vous valez dix combattants ; les
mains désarmées, vous avez tout juste la
force d'un poulet. Si je vous serrais le cou
de mes dix doigts, je vous étranglerais le
plus joliment du inonde; et je vous étran-
glerai , parole d'honneur, pour peu que
vous vous défendiez, pour peu que vous
poussiez un cri, pour peu que vous vous
refusiez à me suivre...
— Et où vous suivre ? demanda Clermont ;
j'ai pour habitude d'aller où je veux, et non
pas où l'on veut.
— D'accord; mais vous n'avez pas non
plus l'habitude de vous faire serrer la gorge
de la façon dont il s'agit.
— Bref, que fera-t-on de moi ? ♦
- Je n'en sais rien... Moi, je ne vous ferai
aucun mal si vous êtes raisonnablè. Nous
allons nous promener pendant une heure
environ. La nuit est belle, elle est même su-
perbe : vous verrez que l'exercice vous fera
du bien.
— Auriez-vous d& l'esprit, par hasard?
demanda le bailli assez gaîment, car ce vail-
lant cœur ne savait jamais prendre au sé-
rieux les dangers les plus manifestes.
— Avec vous, mon gentilhomme, on a de
Tesprit ^ sans y penser... Je vous connais de
longue date.
— Bah vraiment, ceci me fait honneur et
joie... D'où nous connaissons-nous, s'il vous
plaît ?
— Marchons, et chemin faisant j'aurai le
plaisir de vous'répondre, j'ai toujours passé
pour bon compagnon de route.
— Eh bien ! soit, marchons.
— Ainsi vous ne crierez pas, vous n'ap-
pellerez point les passants au secours?...
songez...
— C'est bien, j'ai songé... partons.
— Monsieur le bailli, j'ai fait, dans un
temps, un métier plus honorable,mais moins
lucratif que celui-ci, reprit le Rilodé en se
mettant en marche après avoir ordonné à
deux de ses gens de retourner sur leurs pas,
de ramasser le camarade laissé mort sur le
s pavé, et de conduire au lieu convenu la
| jeune fille enfermée dans la maison mysté-
? rieuse.
— Permettez, interrompit Clermont, avant
de me parler de vos vertus anciennes, veuil-
lez me dire ce que vous comptez faire de
cette demoi'elle que...
— Désolé de nei pouvoir vous être agréa-
ble, mon cher seigneur ; je suis voleur de
profession ; j'assassine quelquefois, mais je.
ne trahis jamais qui me paie. La demoiselle
qui vous intéresse doit être menée, par mes
soins et secrètement, en un logis dont je ne
vous enseignerai pas l'adresse, tout déstreux
que je suis de vous être agréable.
— Très bien... contez-moi donc votre his-
toire.
— A l'époque où'j'avais quelque vergogne
au cœur, en ce temps-la, je n'avais pas une
pistole en poche, j'étais soldat et soldat dans
les piquiers à cheval du roi Henri troi-
sième...
, - Toi? ' ~
— Parfaitement... Vous , monsieur le
bailli, vous étiez capitaine des chasses de Sa
Majesté, un poste qui vous allait à merveille,
car votre belle mine...
— L'ami, à l'heure qu'il est, vos compli-
ments sont d'un grand luxe ; abrégez, s'il
vous plaît...
— Mon gentilhomme, je suis un peu versé
dans les belles-lettres, tout coquin que vous
me voyez ; j'ai pris de charmantes leçons de
maître Ambroise Bonifiic1, qui ne faisait ja-
mais un discours sans l'enjoliver detioritures,
et puisque j'ai plus de temps qu'il ne m'en
faut pour satisfaire votre curiosité, vous me
permettrez bien de jeter des fleurs dans
mon récit. Vous étiez donc, ce que vous êtes
encore, un très fringant seigneur, généreux
jusqu'à l'hyperbole et brave à tout venant.
Un jour, il y a de cela dix ans, vous vous
promeniez à cheval dans la forêt de Châtel-
lerault — le roi tenait sa cour à Amboise
et vous étiez, à ce que l'on m'a dit, venu
passer une semaine chez votre oncle le bâs,
ron de Tardieu...
— C'est vrai.
— Pardienne, si c'est vrai ! j'ai une mé-
moire d'ange et...
—Continuez, interrompit Clermont, qui
tout à coup prit grand intérêt à ce bava?**
dagé.
— Vous suiviez au pas l'une des longues
percées du bois, lorsqu'un cavalier vint à
vous, courant à bride abattue. Ce cavalier
portait un costume de paysan et tenait à la
main une large épée. Ne sachant ce qui
pourrait résulter de cette rencontre en
pareil lieu, vous vous mîtes sur la défen-
sive. Le cavalier vous aborda 'et vous de-
manda, tout haletant, si vous n'aviez pas été
croisé par une troupe de' bohêmes vaga-
bonds, ayant avec eux une petite fille, vêtue
d'une robe i-os(,...
— Ah ! mon Dieu ! quel souvenir me rap-
pelez-vous là ? ,
— Un souvenir étrange, laissez-moi ache-
ver. Vous répondîtes à ma question par un
signe de tête négatif. Voyant que vous vous
teniez toujours sur vos gardes, le cavalier
vous dit : — Mon capitaine, ne me soupçon-
nez pas de mauvaises intentions, je suis Da-
vid, piquier du roi, et je cours après des bri-
gands qui, ce matin, ont enlevé une jeune
fille du château de Tarare, où mon père est
garde-chasse. Comme j'achevais cette phra-
se, nous entendîmes un cri perçant, jeté par
une voix d'enfant, et à ce cri succédèrent
quelques gros éclats de rire.
— Ils sont là, vous dit le cavalier, là dans
ce fourré, venez à mon aide.
— C'était donc vous, ce cavalier ? demanda
le b-ailit.
— C'était moi... Vous mîtes sur-le-champ
pied à terre, je fis de même, nous attachâmes
nos chevaux à des arbres, et pousr âmes droit
au fourré. Bientôt nous aperçûmes la troupe
des bohèmes qui étaient as-jls en cercle, et
achevaient de remplacer les beaux habits de
la pauvre fillette par de sales haillons. Il y
avait là six bandits jeunes et vigoureux et
deux vieilles femmes horribles de visage.
Aussitôt que nous nous fûmes montrés, les
hommes s'armèrent de longs couteaux ca-
talans, et nous ordonnèrent, avec menaces,
de nous éloigner. La réponse que vous fîtes
à cette canaille m'est restée gravée dàns la
mémoire; vous tombâtes comme la foudre
dans le cercle des truands et' je n'avais pas
eu le temps d'en blesser un, que déjà vous
en aviez couché deux sur l'herbe. Le reste de
la troupe prit la fuite à toutes>jambes, nous
laissant pour trophée de victoire le char-
mant enfant qui, en m'apercevait, s'était ve.
nu jeter dans mes bras.
Remerciez monsieur le bailli de Cler- •
mont, disv-je à la fillette, il vient de rendre à
votre noble père,. ainsi qu'à vous, un signalé
service ; sans lui je n'aurais pu vous arra-
cher à vos ravisseurs ; ainsi, mademoiselle
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