Le serpent
Le serpent ne laisse pas indifférent. En effet, certaines espèces peuvent terrasser de gros mammifères grâce à leur puissant venin. Du serpent tentateur de la Genèse au naga protecteur, l’animal a une image ambivalente, et le calendrier asiatique lui consacre l’année qui commence.
Les serpents se reconnaissent à leur corps allongé dépourvu de pattes. Ils partagent ce caractère avec les orvets (des lézards sans pattes) et les amphisbènes. Tous font partie de ce que les naturalistes ont cessé d’appeler des reptiles. Les serpents sont apparus il y a 150 millions d’années et ont progressivement perdu leurs quatre membres. Le genre Titanoboa comptait des individus mesurant 13 mètres de long et pesant une tonne.
Animal à sang froid, le serpent s’abrite du froid en période hivernale, ou de la chaleur estivale en zone tropicale. Son squelette se compose de son crâne, de ses vertèbres (d’une à quatre centaines) et de ses côtes, dépourvues de sternum. Ses mâchoires possèdent une grande capacité d’ouverture. Cela lui permet d’avaler de grosses proies. Sa croissance est continue et il mue régulièrement. Pour se déplacer, il rampe, aidé de ses scutelles, grandes écailles ventrales ; il peut même grimper aux arbres.

Un redoutable prédateur
Pour se repérer, il utilise sa fameuse langue bifide qui capte les odeurs et les amène jusqu’à l’organe dit de Jacobson. Sa vision est bonne et il distingue les couleurs et les mouvements. Il détecte les rayonnements infrarouges grâce à ses thermorécepteurs. Ces organes lui permettent de repérer ses prédateurs comme la mangouste, le ratel, le circaète ou, occasionnellement, le blaireau et le hérisson. Pour attraper ses proies, le serpent les immobilise grâce au venin contenu dans ses glandes à venin et administré par ses crochets. Tous les serpents ne sont pas venimeux. Les boas entourent leur proie de leurs anneaux et coupent ainsi sa circulation sanguine tandis que les anacondas (les plus grands des serpents) noient leur proie.

Pourchassé
Les effectifs des serpents ont fortement diminué ces dernières décennies en raison de la dégradation de leur habitat et de la chasse qui leur est faite. Des populations consomment des serpents (python, œufs de couleuvre). Les Kalinas d’Amérique du Sud guérissent les fractures avec de la graisse d’anaconda. Au XIXe siècle en France, des primes préfectorales encouragent l’abattage des serpents, et des hommes comme Jean-Baptiste Courtol le vipéricide en abattent des milliers.

Le dieu serpent
Cette chasse implacable à l’image ambivalente qui entoure le serpent, dangereux à cause de son venin, mais aussi proche des divinités chtoniennes. Ainsi, dans l’Égypte antique, l’uraeus est le dieu serpent qui protège le pharaon et orne sa coiffe tandis qu’Apophis est le serpent géant, représentant des forces du chaos et qui tente, chaque nuit, d’attaquer la barque de Rê.

« Tu ramperas sur le ventre et tu mangeras de la poussière tous les jours »
Dans la Bible, le serpent tentateur de la Genèse persuade Ève de goûter au fruit de l’Arbre de la connaissance du bien et du mal. Pour son forfait, il est condamné à ramper et à être pourchassé par les hommes. L’Exode montre un autre visage du serpent. Pour convaincre le pharaon, Aaron, le frère de Moïse jette au sol son bâton qui se transforme en serpent et dévore les serpents produits de la même façon par les prêtres du pharaon. Quand les Hébreux errent dans le désert et s’en plaignent, ils sont assaillis par des serpents ; pour les soigner, Moïse dresse un serpent d’airain dont la vue guérit ceux qui le contemplent.

Les saints à la rescousse
Le Nouveau Testament fait du serpent un animal diabolique. Les saints leur mènent la vie dure : saint Patrick les chasse d’Irlande ; saint Paul les transforme en glossopètres à Malte, et sainte Hilda en ammonites. C’est ainsi qu’on expliquait la présence de fossiles de dents de requin ou de mollusques.

Tout un symbole
Les Grecs nous ont transmis trois symboles souvent confondus : -le bâton d’Asclépios : un serpent s’enroule autour du bâton d’Asclépios, le dieu de la médecine, fils d’Apollon. C’est le symbole des médecins, aussi connu sous le nom de caducée médical -le caducée d’Hermès : deux serpents s’entrelacent autour du bâton d’Hermès, dieu du commerce. Il est souvent surmonté de deux ailes et sert de symbole au commerce et à l’éloquence. -la coupe d’Hygie : un serpent s’enroule autour d’une coupe et y plonge la tête. C’est le symbole d’Hygie, fille d’Asclépios et déesse de la Santé, mais aussi celui des pharmaciens.

Une chevelure serpentine
La mythologie grecque abonde en serpents et figures serpentiformes. L’hydre de Lerne possède plusieurs têtes de serpent, qui repoussent quand on les coupe. Héraclès en viendra à bout en cautérisant les cous décapités. Gorgones et Erinyes disposent de serpents en guise de chevelure, ce qui nous vaut ce célèbre vers de Racine dans Andromaque : « pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes ? ». Les Géants, mais aussi Cécrops ou Erichtonios ont une queue de serpent à la place de leurs jambes.

Protecteur ou destructeur
Dans la mythologie scandinave, Jörmungand est un serpent monstrueux qui, de ses anneaux, enserre Midgard, le monde des hommes ; lors du Ragnarök, il succombe sous les coups de Thor qui périt lui-même terrassé par son venin. Chez les Aztèques, Quetzalcoatl est le serpent à plumes, divinité adorée par d’autres peuples d’Amérique centrale. En Inde, Vasuki est un naga qui permet le barattage de la mer de lait et, ainsi, la création de notre monde. Le dieu Vishnu se repose sous les mille têtes du serpent Ananta. De même, Muchalinda sauve Bouddha d’une inondation et l’abrite de ses sept têtes.

La figure du serpent se révèle complexe : tantôt adoré, tantôt redouté. La méconnaissance dont il fait l’objet explique en partie la baisse de ses effectifs. Or il joue un rôle dans la régulation d’espèces. Faudrait-il parler le fourchelang pour mieux les comprendre ?

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