La Fontaine à l'école
La Fontaine fait partie de la culture populaire, mais son œuvre est-elle vraiment connue ?
Michel Schmitt observe la place du fabuliste dans les manuels scolaires. Il démontre que l'école primaire utilise plus le « label » La Fontaine que les textes mêmes de l'écrivain, dont la langue constitue un obstacle pour de jeunes élèves. Les fables sont donc souvent adaptées, amputées, paraphrasées oralement ; l'histoire seule en est conservée à travers livres illustrés et jeux divers, dès la maternelle. La Cigale et la Fourmi, La Colombe et la Fourmi, Le Corbeau et le Renard sont les plus fréquemment cités. C'est sur cette base que s'édifie le mythe de « l'écrivain le plus méconnu de notre littérature » que l'on trouve formulé au niveau universitaire.
Si l'école primaire ne retient de La Fontaine que l'écrivain animalier, au collège c'est l'image du peintre de la comédie humaine qui s'impose, à travers les mêmes fables (ou presque Le Loup et le Chien, Le Coq et le Renard, La Grenouille qui veut..., Le Lion et le Moucheron, Le Loup et l'Agneau, Le Chêne et le Roseau, etc.), dont le propos éducatif est immédiatement lisible. L'enseignement du lycée préfère en revanche des fables beaucoup moins connues et réputées plus « profondes » (Les deux Pigeons, Les Animaux malades de la peste, Le Juge arbitre, l'Hospitalier et le Solitaire, Le Jardinier et son Seigneur, La Mort et le Bûcheron, etc.), ainsi que d'autres œuvres, lettres, épîtres ou contes. Cependant, on s'aperçoit que ce nouveau corpus proposé par les manuels n'est pas assimilé par les élèves lorsqu'on demande à des lycéens en fin de classe de seconde quelles sont les fables dont ils connaissent le contenu, la plupart des réponses s'inscrivent dans un corpus de seulement onze fables. Les cinq premières le plus souvent citées sont également celles retenues par n'importe quel public interrogé Le Corbeau et le Renard, La Cigale et la Fourmi, Le Lièvre et la Tortue, Le Loup et l'Agneau, La Laitière et le Pot au lait.
La présence de La Fontaine dans l'imaginaire collectif aujourd'hui semble tenir de la transmission orale – de laquelle se rapproche l'école primaire – plus que de l'enseignement secondaire.
> Référence : Michel P. Schmitt, « La place et l'image de La Fontaine dans l'enseignement durant la décennie », dans Le Fablier, 1991.