Les techniques de fabrication des chaussures
Avant la révolution industrielle, la confection des chaussures est l’affaire des cordonniers-bottiers. Au milieu du XIXe siècle, les manufactures de chaussures connaissent un fort développement en France du fait de la demande du gouvernement pour fournir les armées ainsi que des innovations techniques.
La fabrication d’une paire de chaussures est très complexe et nécessite un savoir-faire. Selon les modèles et la méthode de fabrication choisie, de nombreuses étapes sont nécessaires pour fabriquer une paire de chaussures : le modélisme, le patronnage, la coupe, la piqûre, la fabrication de la tige (dessus de la chaussure), le montage (assemblage de la tige, de la semelle et du talon) et la finition.
Concevoir un modèle, choisir la matière
La première étape avant la fabrication de la chaussure est de concevoir un modèle. C’est le styliste qui le crée en dessinant une chaussure sur papier. Il choisit la forme, la matière, la couleur. Ensuite, on fait le patron qui servira de base à toutes les autres étapes de fabrication. C’est le travail du modéliste. Il doit faire un moule ou une coquille à partir du dessin. Il doit tenir compte du volume, de la forme. Il découpe les différentes parties de la chaussure. Un moule, en forme de pied, est utilisé pour chaque taille et chaque modèle. Les artisans utilisaient des moules en bois mais aujourd’hui ils sont majoritairement en plastique. Le brevet du moule à chaussures a été déposé par Jean-Baptiste Vouillot demeurant boulevard des Batignolles à Paris en 1851.
Les chaussures peuvent être faites de matériaux divers, le plus souvent, elles sont en cuir mais aussi en tissu, en bois, en paille, en caoutchouc ou en matière synthétique.
Chaussures des Anglais prisonniers en Allemagne : [photographie de presse] / [Agence Rol], 1918
Les chaussures en cuir existent depuis la nuit des temps. La peau des animaux a toujours été utilisée pour la fabrication des chaussures. C’est au Moyen Âge que les Ottomans et les Arabes ont introduit le tannage du cuir en Europe et notamment en Espagne. Le mot cordonnier a pour origine la ville de Cordoue. Les tanneries se développent alors pour la préparation des peaux issues principalement des troupeaux de bétail. Le cuir est tanné à partir de tannins d’origine végétale, animale ou chimique qui lui donne sa couleur. Aujourd’hui, le tannage végétal est réhabilité pour des questions environnementales.
C’est au Pays Basque, dans le Sud-Ouest de la France, que fut inventée, au XIIe siècle, une chaussure en toile de lin et semelle en corde de chanvre, nommée espadrille, espardenya en catalan. Au XIXe siècle, elle est surtout portée par les ouvriers et les paysans. Des manufactures sont alors nombreuses dans les Pyrénées- Atlantiques. Le magazine Vogue la décrit comme un objet de mode estival dès le début des années 1920. Elle est depuis synonyme de vacances d’été et de plage.
Les sabots en bois sont creusés d’une pièce en général dans le bois de hêtre ou de noyer. Ils protègent de l’humidité et du froid; l’hiver, ils étaient fourrés avec du foin ou de la paille. Ainsi, les pieds sont au chaud et au sec. Ils sont utilisés par les paysans mais aussi les écoliers jusqu’à la fin de la guerre 1939-45 dans certaines régions du fait d'une pénurie de chaussures en cuir pendant cette période. Existent aussi les galoches dont seule la semelle est en bois et le dessus en cuir. Les souliers de cuir sont réservés pour le dimanche.
Jusqu’au XIXe siècle, ils sont fabriqués à la main. Ils peuvent être sculptés ou décorés. Ensuite, la fabrication s’est industrialisée. La ville de Limoges est réputée pour la fabrication des sabots. Depuis les années 1970, les sabots suédois, avec la semelle en bois et la tige en cuir cloutée, connaissent un grand succès auprès d’un public jeune et dans la mouvance du retour à la nature. Il existe aussi des sabots en paille tressée, réservés aux jardiniers.
Au milieu du XIXe siècle, apparaît un nouveau matériau qui va entrer dans la composition de certaines chaussures, le caoutchouc. Ce matériau est produit à partir de latex issu de l’hévéa, arbre originaire d’Amérique du Sud. A la fin du XIXe siècle les Anglais plantent des graines d’hévéas dans leurs colonies. Les Français et les Belges font de même quelques années plus tard.
En 1853, l'Américain Hiram Hutchinson achète les brevets de Charles Goodyear portant notamment sur la vulcanisation, procédée qui rend le caoutchouc élastique et imperméable. Commence, alors, la confection de bottes, chaussures et souliers en caoutchouc. Il démarre la fabrication dans l’ancienne filature de Langlée à Châlette-sur-Loing dans le Loiret. La Compagnie du caoutchouc souple commence alors à produire des chaussures et des vêtements imperméables. La marque À l'Aigle est déposée en 1853 et existe toujours sous le nom Aigle avec un certain succès.
Buvards - Á l'Aigle Hutchinson, 1930, Bn-R
Après 1945, de nombreux modèles de chaussures adoptent les semelles en caoutchouc, particulièrement les chaussures de sport.
Dans les années 1920, un autre matériau fait son apparition : le cuir synthétique ou cuir artificiel. Lié à l’industrie pétrochimique, il est nommé « Fabrikoïd » par la société Du Pont de Nemours and C°. Si la société est américaine, elle a été fondée, en 1802, par un chimiste français disciple de Lavoisier, Éleuthère Irénée du Pont de Nemours, réfugié aux États-Unis après la Révolution de 1789.
Le Fabrikoïd, dont le brevet est déposé en 1921, est composé de coton et enduit de pyroxyline qui, après traitement, ressemble à du cuir. L’avantage est surtout économique.
Malgré tout, le cuir reste utilisé majoritairement et a la faveur du public du fait de sa qualité.
Le découpage, le montage et le piquage
Après la conception du modèle et le choix du matériau, vient le découpage à l’emporte-pièce à l’aide d’une machine à découper les peaux. Ensuite, la chaussure est passée dans une machine à cambrer pour lui donner sa forme. Le talon est assemblé à la tige par collage ou vissage.
Une fois découpés à partir du gabarit, tous les éléments vont être assemblés pour former la tige ou le dessus de la chaussure. C’est ce qu’on appelle le piquage. C’est à partir de cette étape que les différents morceaux de cuir vont être cousus ensemble pour commencer à donner une forme à la chaussure. Les chaussures sont cousues au fil.
Pour éviter d’avoir une surépaisseur lorsque deux morceaux de cuir ou autre matériau se superposent, le piqueur doit les parer : cela signifie qu’on réduit volontairement l’épaisseur au niveau des liaisons entre les morceaux. Cela permet d’éviter d’avoir trop de matière au niveau des coutures. Cette opération est très importante car, si on a trop enlevé de matière, la couture est alors fragilisée ; si au contraire on n’en a pas enlevé assez, on risque d’avoir une démarcation ou une gêne peut apparaître lors du porté de la chaussure.
Le piqueur réalise aussi le rempliage : le bord de certaines pièces est replié sur lui-même puis collé et cousu afin d’obtenir une finition plus esthétique. Le piquage se termine par le claquage qui est une opération au cours de laquelle on assemble l’avant et l’arrière de la chaussure ensemble pour obtenir la tige.
Le montage d’une chaussure décrit généralement le procédé par lequel la tige est fixée à la semelle. La chaussure prend alors sa forme.
En Angleterre, en 1809, apparait une machine destinée au clouage des semelles. En 1830, Thimonnier invente la machine à coudre. Vers 1860, les ateliers de fabrication de chaussures commencent à utiliser des machines plus perfectionnées pour coudre les tiges en matière souple.
Après la Seconde Guerre mondiale, l’évolution technologique de la fabrication des chaussures est rapide, en particulier pour le montage.
Après l’assemblage des différentes parties de la chaussure-tige, semelle et talon- vient le finissage, qui donne à la chaussure un aspect attrayant et propre. Au stade des finitions, on entre ici dans les petits détails qui ont néanmoins toute leur importance. Des œillets sont posés si le modèle le nécessite, les fils qui dépassent sont brûlés. C’est à ce moment que les lacets et la semelle intérieure dite de propreté sont ajoutés et les étiquettes de marque apposées. La chaussure est nettoyée, astiquée, choyée avant d’être contrôlée puis conditionnée dans sa boîte.
Les pointures
Trouver chaussure à son pied
L’expression date du XVIIe siècle et son sens s’est élargi pour trouver ce dont on a besoin ou rencontrer une personne qui nous convienne.
Pour être bien chaussé il faut trouver des chaussures à sa taille, ni trop grandes, ni trop petites afin de pouvoir marcher sans douleur.
Les chaussures doivent s’adapter à la morphologie du pied ; pour cela, il faut repérer les courbures et les points d’appui de la plante des pieds. Le pied est composé de 28 os formant 16 articulations et reliés par 100 ligaments et 20 muscles. Chaque pied est unique.
Avant le XVIIIe siècle, les artisans cordonniers faisaient les chaussures sur mesure. Avec l’industrialisation, les fabricants de chaussures ont dû standardiser les tailles des chaussures exprimées en pointure. Ce n’est qu’après 1870, que l’utilisation d’une forme pour chaque pied se généralise.
La pointure, c’est l’ensemble des mesures, exprimées en points, qui caractérise un pied. Il existe trois systèmes basés sur un système métrique ou sur les normes anglaises.
Trouvez votre pointure si vous êtes une femme ou un homme selon l’échelle du point français ou point de Paris. Un point correspond 2/3 de cm ou 6.66 mm. Si votre pied mesure 26 cm, votre pointure est du 39 en point français et 10 en point anglais.
Dans l’échelle du point anglais, plus ancien, les pointures vont de 1 à 8 pour les femmes et de 5 à 12 pour les hommes. Un point correspond au tiers du pouce soit 25.4 mm. Le même système est utilisé aux États-Unis si ce n’est que l’échelle recommence à 1 pour les pointures des adultes. L’écart est donc de 1 à 2 entre les deux systèmes. Une pointure homme 41 correspond à 7,5 UK, 8,5 US ou 260 en Mondopoint.
Ce dernier système, plus récent, dit le Mondopoint est aussi un système métrique exprimé en millimètre correspondant à la longueur du pied, un point correspondant à 5 mm ou 7,5 mm. L’intervalle correspond à une demi-pointure. Ce système de pointure est défini selon des normes ISO depuis 1972. Il est officiel en Russie, en Chine et au Japon.
Seule la longueur est prise en compte dans ces différents systèmes. La largeur, la voûte plantaire et la forme ne le sont pas. Seul l’essayage peut garantir une chaussure adaptée au pied.
Ajouter un commentaire