Langue et culture syriaques dans la transmission du savoir
Tétraévangile, manuscrit en langues syriaque et arabe (VIIe-XIIe s)
L'araméen moderne, ou syriaque, est une langue encore parlée dans certaines régions, mais surtout utilisée dans les liturgies de plusieurs communautés chrétiennes du Moyen-Orient telles que l'Eglise syro-orientale et sa branche catholique, les Chaldéens, l'Eglise syro-occidentale, à savoir les Syriaques miaphysites et les Syriaques catholiques, les Maronites. Ces communautés ecclésiales sont réparties en Turquie, en Iraq, en Jordanie, en Iran, en Syrie, au Liban et en Inde.
Carte de l'Asie occidentale ancienne
Depuis le XIIe siècle avant J.-C., le syriaque désigne un dialecte d'araméen oriental, parlé à Edesse (Turquie actuelle), et qui s'est répandu après l'apparition du Christianisme. Le syriaque a donc pour origine l'araméen parlé dans le nord de la Mésopotamie. L'évolution de ces dialectes, peut être suivie en raison de leur influence sur l'araméen impérial à partir du Ve siècle avant J.-C.
Après la conquête de la Syrie et de la Mésopotamie par Alexandre le Grand, le syriaque et d'autres dialectes araméens commencent à être écrits en réaction à l'hellénisme dominant. L'araméen reste cependant utilisé comme langue d'échange même après l'introduction du grec. Fondé à Edesse en 132 avant J.-C., le royaume d'Osroène qui s'étend entre le Tigre et l'Euphrate, adopte, quelques temps après sa fondation, le dialecte local, le syriaque, comme sa langue officielle.
La plus vieille inscription retrouvée en syriaque ancien date de l'an 6 de notre ère. Son statut de langue officielle fait que le syriaque possède un style et une grammaire relativement uniformes, contrairement aux autres dialectes d'araméen.
Avec l'apparition du Christianisme, le syriaque va supplanter l'araméen impérial au début de notre ère comme version standard de l'araméen.
Recueil de textes médicaux et astrologiques
Au début du XXe siècle, les dialectes syriaques sont parlés par environ 400 000 personnes très éparpillées géographiquement, mais on les retrouve principalement dans le sud-est de la Turquie et dans le nord de l'Irak. On les trouve aussi dans de petites communautés au Liban, en Syrie, Iran, Arménie, Géorgie et Azerbaïdjan. Pour bien comprendre l'importance de cette langue, il faut parcourir Mossoul et ses environs, Djézireh ibn Omar, Tour Abidine, ainsi que quarante-cinq localités riches en syriologie : Bassebrina, Mardine et ses banlieues, Deir Zaafaran, Diarbékir et ses villages, Weiranchaher, Ourfa (Edesse), Alep, Hama, Homs et leurs villages, Damas, Beyrouth. Le rôle des couvents : Saint Marc et d'autres arméniens et orthodoxes de Jérusalem sont essentiels car ils conservent toujours des manuscrits très rares.
Le syriaque a servi à transmettre à travers les générations les textes des Ecritures Saintes, la liturgie mais aussi la culture et les connaissances profanes : philosophie, musique, ingénierie, médecine et les sciences comme la chimie ou l’astronomie à partir du grec, vers le syriaque, puis vers l'arabe, à l'époque des califes Omeyyades et Abbassides, et ensuite en latin, vers les XVIe-XVIIe siècles.
Recueil de traités de médecine (XIIe s) L'Organon, la Rhétorique et la Poétique (XIe s)
Les catalogues les plus complets des ouvrages en syriaque sont : la Bibliotheca orientalis d'Assémani (Bibliothèque du Vatican), les Quatre histoires de la littérature syriaque, détaillées ou résumées de W. Wright-Ruben, R. Duval, A. Baumstark, J.-B. Chabot (1894-1934) et les Syriac Studies de Sebastian Brock (1960-1990). Il existe aussi d'autres catalogues dont l'un d'eux établit la liste des manuscrits de la Bibliothèque nationale de France.
Apocalypse de Pierre ; Histoire de la Sibylle (XVIe s) Ancien Testament dans la version peshitta (XVIIe s)
Les collections de manuscrits et ouvrages imprimés en syriaque les plus riches sont conservées dans plusieurs bibliothèques à travers le monde : en Egypte, à Charfé au Liban, à Istanbul, à Londres, à Oxford et Cambridge, à Florence, Rome, Berlin, New-York, Boston. En France, elles se trouvent à Paris mais également à Aix-en-Provence, Lyon et Strasbourg.
La Bibliothèque nationale de France conserve environ cinq cents ouvrages en caractères originaux et une centaine de manuscrits. Trente-quatre manuscrits issus de la collection du Père Graffin sont entrés dans les fonds BnF en 1990 ; treize autres proviennent de la bibliothèque de l'archevêché chaldéen de Siirt, dans le Kurdistan turc, et récemment nous avons reçu grâce au don du fonds de l'orientaliste Maxime Rodinson une trentaine d'ouvrages rares, en langue syriaque, publiés au début du XXe siècle, qui sont venus enrichir les collections.
N.T. Évangiles.(syriaque). (XIIe s) Liturgie de Nestorius (XIXe s)
La Réserve des Livres Rares a numérisé récemment le premier imprimé du monde arabe dit Imprimé de Quzhayya (1610) dont la page de titre contient une prière en syriaque. Le texte de ce livre est en karchouni (c'est-à-dire en langue arabe rédigée en caractères syriaques).
Imprimé de Quzhayya (1610)
Parmi les écrits des grands auteurs et textes importants syriaques, vous pouvez trouver sur Gallica :
Une biographie inédite de Bardesane l'astrologue
Une version syriaque inédite de la vie de Schenoudi
Les légendes syriaques d'Aaron de Saroug, de Maxime et Domèce, d'Abraham, maître de Barsoma et de l'empereur Maurice
La légende syriaque de saint Alexis l'homme de Dieu
Grammaire de la langue soureth ou chaldéen vulgaire : selon le dialecte de la plaine de Mossoul et des pays adjacents
Volume de peintures illustrant la vie de Jésus, avec légendes en syriaque et en arménien
Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le site Bibliothèques d'Orient et voir des manuscrits présentés au public à l'occasion de l'exposition Chrétiens d'Orient. Deux mille ans d'histoire qui se tient actuellement à l'Institut du Monde arabe.
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