Titre : Le Gaulois : littéraire et politique
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1882-06-14
Contributeur : Pène, Henri de (1830-1888). Directeur de publication
Contributeur : Tarbé des Sablons, Edmond Joseph Louis (1838-1900). Directeur de publication
Contributeur : Meyer, Arthur (1844-1924). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 14 juin 1882 14 juin 1882
Description : 1882/06/14 (Numéro 1005). 1882/06/14 (Numéro 1005).
Description : Collection numérique : Arts de la marionnette Collection numérique : Arts de la marionnette
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k524269p
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/02/2008
PARIS t S centimes. DÊPARTEMENTg"ET"GARES :€~CENTtMES/
Quinzième Année DeuxïèMe Sérîo–MumêM 1005
Mercredi 14 Juin 188S
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MM. Ch. ~mgr&nge, Cert et~C"
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J'TTIL.BS SIMC~
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ABONNEMENTS /'<
P~R:s Trois mois. 13 fr.5~
DEPARTEMENTS Trois mois. <6 fr.
REDACTION
0, boulevard dee Btat!cmx, Q
DE DEU-X HEURES A MINUtT
LM MANUSCRITS NE SERONT PAS RENDUS
LEMÉTIER D'ELECTEUR.
Nos Eoaos. –Utt DoMtHo.
SOUS LE MASQUE. V[0~«C<.
CHRONIQUE. GM~ de ~Omp6t:Myt<.
LES AFFAIRES D'EGYPTE.– .L. J~.
LES ENVOIS DE ROME. jE-oMM Z.aM&er<.
Au PARLEMENT LE SÉNAT. Gro<. LA
CHAMBRE.–fer/o!.
LE SALON. FoKycO:t{<
MOUVEMENT ADMINISTRATIF.
A TRAVERS LA PRESSE.– GMS<«Ce .PMtLE GAULOIS PARTOUT.
CHRONIQUE DES TRIBUNAUX. .Mettre X.
LA BouRSE. Henri PrtBS<.
TÉL~aRAMMES ET CORRESPONDANCES. G. JUM.
NOUVELLES DIVERSES. GM<<0!Be Coite.
SPORT. Sir Becy<.
ECHOS DES THEATRES. Arthur CCfMFEUILLETON LES ENFANTS DE LA BALLE. tOHM
Detoy!.
LE
MËTtER B ËLECTEtJR
Un empereur du très bas Empire avait
pris la fantaisie de gagner, par ses lieu-
tenants, de très faciles et très inutiles
batailles, et de se décerner de très somp-
tueux et très dispendieux triomphes,
avec accompagnement d'hécatombes.
On lui nt cette épigramme
LES BŒUFS
0 César si tu triomphes nous périssons.
Nous autres, qui faisons partie de la
plèbe, nous pourrions dire à nos tri-
buns « 0 grands citoyens, si vous con-
tinuez à triompher, nous sommes per-
dus pour nos ateliers. Vous nous acca-
blez de tant d'honneurs et de tant de
droits, qu'il ne nous restera plus une
minute pour travailler à notre ancien
métier. Le métier de citoyen absorbera
tout.
Nous avons depuis longtemps le
droit de nommer nos députés, nos con-
seillers généraux, nos conseillers d'ar-
rondissement et nos conseillers muni-
cipaux nous sommes loin de nous en
plaindre. C'est un droit qu'on ne nous
arracherait qu'avec la vie. Nous en
usons languissamment il y a souvent
du tirage pour arriver au minimum de
votants exigé par la loi. C'est qu'on a
un peu abusé de nous avec les dissolu-
tions et les invalidations.
On parle à présent de rendre le vote
obligatoire. Nous ne nous en plaindrons
pas non plus. L'obligatoire est à la
'mode. Instruction obligatoire, service
militaire obligatoire, vote obligatoire:,
cela s'enchaîne. Est-il vrai que M. A.
Naquet pense à rendre le mariage obli-
gatoire, quand il aura établi le divorce?
Le bruit en a couru et lui a valu une
nouvelle popularité parmi les demoi-
selles. C'est un savant il a peut-être dé-
couvert que ce serait le meilleur moyen
d'augmenter la densité de la popula-
tion. Nous nous marierons, s'il le veut.
Nous sommes prêts à tout.
Nous voulons élire nos prud'hommes,
nos juges consulaires, les membres de
nos chambres de commerce, et les
membres de nos syndicats profession-
nels. Au besoin, nous sacrifierons les
autres élections, pour garder les syn-
dicats, parce que très prochainement les
syndicats nous tiendront lieu de tout le
reste. Mais nous ne sacrifions rien nous
ne savons pas pourquoi, élisant les
députés, nous n'élirions pas les pru-
d'hommes.
II paraît qu'on veut aussi nous faire
élire les juges. On l'a à peu près décidé
samedi dernier. C'est très bon. Nous
comprenons qu'élire un juge civil n'est
pas plus difficile qu'élire un juge de
commerce. Vous nous dites que nous
.faisons des choix merveilleux en poli-
tique. En effet, nous vous avons choi-
sis il n'était pas possible de mieux
faire. Cette preuve décisive établit notre
compétence et notre capacité. Il est hors
de doute que nous nommerons des ma-
gistrats aussi sages et aussi habiles que
nos députés. Nous ne saurions nous
mettre trop vite à la besogne. Les can-
didats commencent déjà à tourner au-
tour de nous, et à nous ennuyer de
leurs programmes. Chacun d'eux avait
une théorie toute prête sur les affaires
d'Egypte.
Election dès juges de paix, élection
des juges civile et correctionnels, élec-
tion des conseillers de cour d'appel et
des conseillers de la cour de cassation
voilà, citoyens, du pa.in sur la planche.
Avec les élections politiques, départe-
mentales, municipales, et les élections
des corps de métier, cela nous fera bien
deux élections par mois. Mettons, par
élection, trois réunions préparatoires
seulement. C'était comme cela sous la
première Révolution. Les esclaves
étaient forgerons, cordonniers ou culti-
vateurs les hommes libres étaient
électeurs. Ils avaient aussi les séances
du club des Jacobins, qui était en per-
manence.
Vous allez instituer des assises de
nouvelle espèce; alors nous serons au.
complet. Quand nous aurons siégé aux
assises criminelles, nous nous délasse-
rons aux assises correctionnelles, et en-
suite aux assises, civiles. Notre yie sera
très simple élire et juger. Nous ferons
-venir nos habits et nos chaussures de la
Belgique et de la. Suisse, où on a encore
le temps de travailler et le "goût de s'a-
baisser au travail manuel, L'Amérique
ne demande pas mieux que de nous
ve'ndre du blé.
Nous avons, citoyens, une requête
à vous présenter mais, entendez-le bien,
c'est une requête du peuple. Vous avez.
pour être députés, vingt-cinq francs par
jour. C'est un beau denier, et nous ne
nous étonnons pas d'apprendre qu'avec
cet argent-là plusieurs d'entre vous
roulent carosse. Nous trouvons parfai-
tement juste qu'on vous paye pour le
temps qu'on vous prend. Quand les con-
seillers.municipaux de Paris ont voulu
être payés, on leur a fait des dif&cultés
qui sont déplacées et incompréhensibles.
M. Joffrin n'a pas moins besoin de son
temps que M. Benjamin Raspail. L'heure
de travail de l'un et l'heure de travail
de l'autre doivent avoir le même prix
sur la place, car elles se valent absolu-
ment. D'ailleurs, nous n'admettons pas
l'inégalité des salaires; maiscequeno~is
admettons encore moins, c'est qu'on
couvre d'or M. Benjamin, et qu'on ne
donne pas un rouge liard à M. JoSrm.
Vous voyez où nous voulons en ve-
nir. Nous sommes électeurs et jurés. Il
faut nous faire notre part. Nous avons,
comme vous, des femmes et des enfants,
à qui les honneurs ne suffisent. pas. Il
leur faut, en outre, le pot-au-feu. Nous
ne demandons pas cependant qu'on nous
donne 9,000 francs; la dépense serait
peut-être trop forte. Il vous suffira de
décréter que tout le monde, sénateurs,
députés, conseillers municipaux, jurés,
électeurs, sera payé par vacations. Vous
y perdrez comme députés, puisque vous
êtes payés à forfait mais il est proba-
ble que vous vous en retirerez, en sié-
geant beaucoup comme jurés correction-
nels, et en assistant à toutes les assem-
blées électorales.
Nos 15 chos
~sr~tM~JM~~M
En France, !a persistance des vents d'entre 0. et
N. va maintenir une température basse et amener
encore des averses dans te nord. A Saint-Maur, le
minimum de la nuit a été de 6" et on signale de la
neige au Puy-de-Dôme.
AUJOURH'HUt
A 6 heures et demie, dîner au Grand-Hôte~
admission jusqu'à 7 heures.
Pendant la durée du dîner, l'orchestre de
M. Desgranges jouera. dans la nouvelle "alla de
musique. .MENU
MENU
Potage garbure
Hors-d'cBUvre
Filets de dorades sauce crevettes
Pommes do terre à l'anglaise
Pièce de bœuf à la Dauphino
Petits pieds Cendrillon aux laitues
Chapons du Mans au cresson
Salade
Haricots verts maître-d'hôtel
Bava.reisà.IaJoinvillo
Glace & l'orange
Desserts
fromages, fruits et petits-fourt
Le salon des dames est ouvert aux voyageurs.
Piano, orgue, tables de jeux. Dîner à la carte
tm restaurant. Billards au Café Divan.
Le programme du dîner-concert. (Voir à 1&
4' page.)
A l'Opéra. Le F/'enc/tK~ et JVetOtOK~ot.
Au Théâtre-Français.–Les .RAl'Opéra-Comiquo.–Josep/t.
OEMAtN
Au Theatre-Franca.is. f.e Monde o& !'o~
t'eyMtne.
A l'Opéra-Comique Les ~Vocet de Ft~cfro.
LA POUTtOUE
Le conseil des ministres s'est réuni
hier matin à l'Elysée et s'est principale-
ment occupé des affaires d'Egypte.
M. Humbert assistait à la séance. Il a
consenti, sur les instances du président
de la République et des autres membres
du cabinet, à retirer sa démission.
Toutefois, comme nous l'indiquions
hier, l'honorable garde des sceaux -va
prendre un congé d'un mois.
Le garde des sceaux se rend à M~lun,
chez son nls. Les affaires urgente~ lui
seront transmises. On ignore encore s'il
y aura un intérimaire.
Le président de la République a. signé
la nomination de M. Malens, 'sénateur
de la Drôme, comme premier président
de la cour de Grenoble, en remplace-
ment de M. Bonafous, atteint par la li-
mite d'âge. M. Bonafous avai4 été séna-
teur bonapartiste de 1876 à 1879.
On annonce que le Livre Jaune sur les
affaires d'Egypte sera distribué dans six
ou huit jours.
LE MONDE ET LAVtLLE
Hier à midi, M. le président de la Re-
publique a reçu à déjeuner M. Cherbu-
îiez, le nouvel académicien. Il était ac-
compagné de MM. Camille Doucet, Pas-
teur, Renan, Maxime Du Camp, chargés
de le présenter.
Aujourd'hui, à onze heures, aura lieu,
à l'Elysée, la remise des insignes de l'or-
dre de la Toison d'or, qui seront appor-
tés au Président par le duc de Fernan-
Nunez, ambassadeur d'Espagne.
M. Grévy aura pour parrains l'ambas-
sadeur d'Espagne et le duc d'Aumale.
La cérémonie sera suivie d'un déieu-
ner où assisteront le ministre des affai-
res étrangères et le haut personnel de
l'ambassade d'Espagne; M. Mollard, in-
troducteur des ambassadeurs, et la mai-
son militaire du président de la Répu-
blique.
Le général Colonieu est relevé de son
commandement de Méchéria et des co-
lonnes d'opérations du Sud crânais. II
rentre en France.
C'est par ordre de cet officier général
que fut exécutée cette reconnaissance
topographique sur le territoire maro-
cain qui coûta, aux deux compagnies
de la légion étrangère formant l'escorte,
cinq officiers, cinquante hommes tués et
autant de blessés au combat du chott
Tigri. v
M. le général de brigade Thomassin,
commandant l'artillerie du deuxième
corps d'armée, a été nommé au com-
mandement de la division d'Oran, en
remplacement de M. le général Delebec-
que, nommé commandant du dix-sep-
tième corps d'armée.
Le prince de Galles est attendu à Pa-
ris à la nn de cette semaine.
Il a accepté la présidence d'honneur
du grand concours international de
~M~- sence, au Lawn-Club du bois de Bou-
logne, les premiers champions du
monde.
L'amélioration annoncée récemment
dans l'état de santé de S. Exc. Mgr
Czacki, nonce apostolique, ne s'est pas
maintenue.
On constate une prostration de forces
plus grande.
Certains journaux anglais annoncent
que M. Gambetta est attendu, la semaine
prochaine, en Angleterre, et qu'il assis-
tera aux fêtes qui auront lieu à Brad-
ford, en l'honneur du prince de Galles.
Lord Rowton, le Mêle secrétaire de
feu Beaconsfield, vient d'arriver à Paris,
en route pour le Mont-Dore, où il suivra
une cure. Lord Rowton travaille, on le
sait, depuis deux ans, à rassembler les
manuscrits et documents laissés p~r
lord Beaconsfield, dont un grand nom-
bre seront imprimés et publiés, par
ordre de la reine Victoria, sous le titre
de .M<~OM"M de ~oro! .BMcotM/!eM.
L'honorable M. et Mme Levi P. Mor-
ton ont donné hier soir un grand dîner
diplomatique, à la Légation des Etats-
Unis.
Principaux convives
Le président de la Chambre et Mme
Henri Brisson, M. et Mme Jules Ferry,
le ministre de la guerre et Mme Billot,
M. et Mme de Mahy, le comte Foucher
de Careil.M. etMmeFloquet.M. et Mme
Camescasse, M. et Mme Louis de Hoff-
mann, M. et Mme Ricard, MM. Varroy,
Cochery, Pouyer-Quertier, Caubert, Al-
bert Rhodes, Alphand, le colonel et
Mme Ritchic, Henri Vignaud, etc.
Réception intime dans la soirée.
Le R. P. Charmettant que l'O/yMe~
appelait hier M. Charmettant se-
crétaire du cardin~a! archevêque d'Alger,
est nommé chevalier de la Légion d'hon-
neur pour services exceptionnels ren-
dus comme directeur du collège fran-
çais de Carthage et pour l'installation du
nouveau vicariat apostolique de Tu-
nisie.
Cette décoration est accordée sur la
proposition du ministre des cultes.
Hier a eu lieu, à la Madeleine, le ma-
riage de M. Etienne Wallon, fils de M.
Henri Wallon, sénateur, ancien minis-
tre, secrétaire perpétuel de l'Académie
des belles-lettres, avec Mlle Dupont.
Dans l'assistance, MM. le comte Rampon,
Chesnelong, Delsol, Clément, Duval,
Lafond de Saint-Mûr, le marquis de Ma-
leville, le général Robert, Tribert, séna-
teurs Jules Simon, Léopold Delisle, De-
loche, le vicomte Delaborde, Gruyer,
membres de l'Institut; M. Plichon, M.
Deltour, inspecteur général de l'Univer-
sité, etc.
Nous apprenons que M. Abel Cou-
vreux, dont nous avons annoncé le pro-
chain mariage avec Mlle Marie Decau-
ville, sœur du célèbre constructeur de
Petit-Bourg, est le fils de M. Alphonse
Couvreux, associé de M. H. Hersent,
pour l'entreprise du canal de Panama.
Mgr Lequette, évêque d'Arras, est
mort hier matin, à dix heures un quart,
après une courte maladie. Il était âgé de
soixante et onze ans et comptait seize ans
d'épiscopat.
Mgr Lequette, était vicaire général
d'Arras lorsqu'il fut nommé évêque du
même diocèse le 3 avril 1866:
A part ses lettres pastorales et man-
dements, on lui doit une nouvelle édition
de la tSoMM~g <~par le R. P. Billuard pour les écoles
modernes.
L'évêque d'Arras était chevalier de la
Légion d'honneur. Ce deuil qui frappe
l'épiseopat français est vivement ressenti
dans le diocèse où Mgr Lequette était
grandement estimé et aimé.
Dans sa séance du vendredi 9juind882,
la conférence Molé-Tocqueville a voté
la résolution suivante, signée par MM.
Rendu, Sellier et un grand nombre de
leurs collègues.
t .La conférence Molé-Tocqueville
proteste avec indignation contre les
persécutions sanglantes exercées dans
certaines contrées de l'Europe sur les
Israélites.
Et elle s'associe aux hommes émi-
nents de tous les partis qui, ûdéles aux
traditions libérales et généreuses qui
sont l'honneur de notre pays, unissent
leurs eSorts pour secourir des infortu-
nes qui sont la honte du XIX" siècle. »
NOUVELLES A LA MAIN
Les parents du jeune Tomy lui don-
nent continuellement comme exemple
et comme modèle le petit Jacques, un
enfant-prodige qui ne pleure pas, qui
ne désobéit jamais, qui n'est ni gour-
mand, ni menteur, ni paresseux.
Hier soir, en dînant, Tomy avait cassé
une assiette. Sa mère le gronde et lui
afnrm~ que le petit Jacques ne casse ja-
mais d'assiettes.
–Eh bien 1 moi, il m'embête, le petit
Jacques s'écrie Tomy avec convic-
tion.
Entre boulevardiers
Eh bien ) cher, comment suppor-
tez-vous la politique, en ce joli mois de
juin? 'l
Comme ci. comme ça! Et vous?
Oh! moi, toujours comme scie.
MM OOM
h
LES tMCTMNS EN BEM!<)t!E
Par <~ecAe ~f~Oip~Me
DE NOTRE CORRESPONDANT SPÉCIAL
Bruxelles, 13 juin.
Aujourd'hui ont eu lieu les élections
législatives, dont les résultats définitifs
viennent d'être proclamés.
La majorité libérale de la Chambre des
représentants, qui était de 14 membres,
s'élève actuellement à 18.
Au Sénat, la majorité s'est élevée de
4à7.
Tous les ministres soumis à la réélection
ont été réélus.
PET)TE BOUR~ DU SO!R
D!X HEURES S
30/0. 8295.
50/0. 11536,37,31,36.
Turc. 1225,37,30.
Italien. 90 40, 30, 40.
Egypte. 33125,34,37.
Banque ottomane. 791 25. 86, S7, 88, 12.
Extérieure. 289/16.
SOUS LE MASQUE
Le « départe est un cliché qui court sous
toutes les plumes.
Le magistral coup d'archet réglemen-
taire du Grand Prix a donné le signal, et,
avec une précision digne de la classe de
danse académique, les Parisiennes devraient
s'envoler.
'Elles sont phrs intelligentes que cela;
secouant volontiers <: la coutume et l'u-
sage elles font comme les hirondelles,
leurs sœurs. C'est la températur~qui les
guide en leurs lointaines migrations. Elles
attendent donc patiemment, à l'abri de
leurs pénates, l'apparition au calendrier de
quelque saint de bonne volonté, qui sup-
plée à la négligence de saint Barnabé et
mette une digue céleste au déluge de
saint Médard.
Au premier rayon de clair soleil, elles
fileront rapidement, envahissant tous les
coins de la France où se trouve une villa,
une source, quelques vagues ou une mon-
tagne. Rien ne les presse; car, en cette
saison privilégiée, l'existence parisienne
possède des charmes spéciaux.
On reçoit encore, quoi qu'en disent les
gazettes; témoin le dîner de la baronne
Erlanger, lundi; le bal de la duchesse de
Pomar hier soir, et, ce soir, la réception de
la baronne von Hoffmann. Mais, quelque
nombreuses qu'elles soient, ces réunions
empruntent à la saison un caractère plus
intime. L'été met à l'aise, et la gaieté s'en
ressent. Les jupes se raccourcissent, les
costumes ronds, tout frissonnants de den-
telles, sont de toute obligation la toi-
lette abdique toute majesté comme toute
gène importune.
Dans l'après-midi, on quitte ses jours s
et l'on supprime la corvée des <[ visites x,
ouvrant sa porte seulement aux intimes, à
deux heures, ou bien le soir, quand on
reste chez soi.
L'après-midi, on court les fournisseurs,
faisant les apprêts du départ prochain, em-
pilant les emplettes, qui rempliront une
douzaine de grandes malles. On se retrouve
rue de la Paix, à quatre heures; et, laissant
sa voiture, on y flâne le long des boutiques,
passant de la couturière à la modiste, du
bijoutier à la lingère quelquefois, on y
goûte d'un verre de malaga et d'un sand-
wich, afin de prendre des forces pour le
tour du Bois.
C'est peut-être de tout Paris le coin le
plus parisien que cette rue de la Paix. La
quintessence de tout notre luxe, de toute
notre élégance, y est éclose. Depuis les tê-
tes couronnées jusqu'aux simples million-
naires, toutes les femmes et toutes les aris-
tocraties s'y coudoient. Et, naturellement,
comme partout où il y a de jolies femmes,
leurs admirateurs s'empressent, les gilets ~M
ctrottoirs, foulés par tant de pieds mignons.
De trois à quatre, tous sont à leur poste,
flairant l'arrivée, guettant l'occasion, met-
tant à profit les brillantes vitrines pour
multiplier leurs conquêtes pour les unes,
une épingle nouvelle pour les autres, une
simple neur en échange d'un sourire.
Il paraît que cela s'appelle < le passage
des Cailles~.
C'est en ce moment un véritable chassé-
croisé d'hôtels. J'ai annoncé, il y a quelque
temps déjà, l'achat de l'hôtel de la reine
Christine, appartenant à M. Secretan, par
la duchesse d'Uzès. Aujourd'hui le comte
Pillet-Will se défait, en faveur de M. Se-
cretan, de sa belle demeure de la place
Moncey, un véritable château seigneurial,
enfoui dans un grand parc de province, aux
futaies séculaires. Mais le quartier manque
de chic, et l'élégante comtesse y prenait le
spleen. Elle s'en ira rejoindre ses belles
amies par delà le parc Monceau.
La duchesse de Mouchy, elle aussi, a
vendu son bel hôtel du parc Monceau, ces
magnifiques salons qui l'an dernier, après
huit ans de deuil, se sont ouverts pour une
fois, pour une seule, et pour la dernière,
aussitôt refermés par la mort On conçoit
que la jeune mère ait voulu fuir jusqu'au
souvenir des fêtes où s'épanouit son
bonheur, échapper à la constante vision de
l'ange envolé dont l'ombre nottaitlà, parmi
les fantômes triomphants des jours de joie
radieuse
V)OLETTt
CHRONIQUE
Nos hommes politiques s'occupent en
ce moment de l'indemnité à accorder
aux Espagnols victimes des incursions
des Arabes sur les hauts plateaux alfa-
tiers du Sud oranais.
Le gouvernement espagnol le prend
de haut, et les avis sur cette question
sont partagés. Sans émettre aucune opi-
nion, et même sans en avoir aucune, je
veux rappeler quelques souvenirs sur
ce pays que j'ai visité immédiatement
après le massacre des colons.
Dès qu'on a passé Saïda, on s'engage
dans la montagne, une montagne de
pierre rouge, calcinée, toujours brû-
lante puis on retrouve des plaines nues,
interminables, puis une espèce de soli-
tude ou poussent, de cinquante mètres
en cinquante mètres, des touffes de ge-
névriers. On appelle cela la forêt des
Hassassenas puis enfin on rencontre
l'alfa, sorte de petit jonc! qui couvre des
espaces innnis et qui fait songer à la
mer. Toute maison est inconnue en ces
contrées mornes seule la tente brune
et basse des Arabes s'accroche au sol,
comme un étrange champignon.
Dans ces océans d'alfa vivait une
vraie nation, des hordes d'hommes plus
sauvages et plus farouches que les Ara-
bes les alfatiers espagnols. Isolés
ainsi, loin du monde, réunis par bandes
avec leurs femmes et leurs enfants, per-
dus en dehors de toute loi, ils ont fait,
dit-on, ce que faisaient leurs ancêtres
sur les terres nouvelles ils ont été vio-
lents, sanguinaires, terribles, avec leurs
voisins les Arabes.
Or, l'Arabe supporte tout, jusqu'au
moment où il tue.
Bon-Amamaestvenu,et, profitant de
sa présence à Assi-Tircine, à vingt-qua-
tre kilomètres de Saïda (on le croyait
alors derrière les Chotts), les deux tribus
au milieu desquelles vivaient les Espa-
gnols, les Harrars et les Hassassenas,
ont massacré les alfatiers.
Ils ont respecté les employés français
de la petite ligne de fer; mais ils ont été
sans pitié pour quiconque était Espa-
gnol.
Alors, pendant plusieurs jours, des
blessés ont erré, des enfants mutilés,
des femmes martyrisées. Tous ces misé-
rables se rapprochaient de la voie, et,
quand un train passait cherchant les vic-
times, ils s'élançaient, appelaient, nus
et sanglants.
Une semaine avant mon arrivée, on
avait retrouvé encore une grande fille
de dix-huit ans, d'une incomparable
beauté, violée, lardée de coups de cou-
teau et qui cependant courait vers le
convoi, aussi dévêtue qu'on peut l'être.
Ces choses sont horribles mais reste à
savoir qui avait commencé. On dit là-bas
communément qu'on aimerait mieux
tomber au milieu de cavaliers dissidents
qu'au milieu d'un groupe d'alfatiers.
Quels sont ces aventuriers qui vont
cueillir l'alfa dans ces tristes pays'?
Quelle fut leur vie auparavant quels
sont, comme on dit, leurs antécédents?
J'en ai vu, de ces hommes eh bien i
franchement, je me croirais plus en sû-
reté dans une tribu arabe, même révol-
tée, que sous leur toit.
Comme j'étais sorti de Saïda par un
après-midi de furieux soleil, je me diri-
geai d'abord vers l'ancienne ville d'Abd-
el-Kader. Sur un rocher escarpé, on dis-
tingue vaguement quelques murailles:
c'est tout ce qui reste de la résidence
chère au célèbre émir.
Mais, quand je fus là-haut, l'aperçus,
par derrière, une admirable chose. Un
ravin profond sépare la vieille forteresse
delamontagne. Elle est, cette montagne,
toute rouge, d'un rouge doré, d'un rouge
de feu, dentelée, escarpée, coupée par
de minces échancrures où descendent,
en hiver, les torrents.
Mais tout le fond du ravin n'est qu'un
bois de lauriers-rosés, un grand tapis de
feuilles et de fleurs.
J'y descendis, non sans peine. Une
mince rivière coulait sous les merveil-
leux arbustes, une rivière sautant les
pierres, écumante, tortueuse. J'y trem-
pai ma main l'eau était chaude, presque
brûlante.
Sur les bords, de gros crabes, des
centaines de crabes fuyaient devant moi
une longue couleuvre parfois glissait
dans l'eau, et des lézards énormes s'en-
fonçaient dans les taillis.
Soudain un grand bruit me fit tres-
saillir. A quelques pas, un aigle s'envo-
lait. L'immense oiseau, surpris, s'éleva
brusquement vers le ciel bleu, et il était si
large qu'il semblait toucher avec ses ailes
les deux murailles de pierre calcinée qui
enfermaient le ravin.
Après une heure de marche, je rejoi-
gnis la route qui monte vers Aïn-el-
Hadjar.
Devant moi, une femme marchait, une
vieille femme courbée, qui s'abritait du
soleil sous un antique parapluie.
Il est bien rare, en ces contrées, de
voir une femme, hormis les grandes
négresses luisantes, chamarrées d'étoffés
jaunes ou bleues. Je rejoignis la femme.
Elle était ridée, soufrait, semblait exté-
nuée et désespérée, avec une face sévère
et triste. Elle allait à petits pas, sous la
chaleur accablante. Je lui parlai, et sou-
dain sa colère indignée éclata. C'était
une Alsacienne qu'on avait envoyée en
ces pays désolés avec ses quatre fils,
après la guerre. Trois de ses enfants
étaient morts en ce climat meurtrier il
en restait un, malade aussi maintenant
et leurs terres ne rapportaient rien, bien
que grandes, car elles n'avaient pas une
goutte d'eau. Elle répétait, la vieille
< Il n'y vient pas un chou, monsieur, pas
un chou ) !) s'obstinantàcette idée dechou.
Ce légume, évidemment, représentait
pour elle le bonheur terrestre. Et quand.
elle m'eut dit toute sa peine, elle s'assit
sur une pierre, et pleura.
Et je n'ai jamais rien vu de plus
navrant que cette bonne femme d'Alsace
perdue sur ce sol de feu où il~'e pousse
pas un chou.
En me quittant, elle ajouta: "Savez-
vous si on donnera des terres en Tuni-
sie ? On dit que c'est bon par lâ~ ça vau-
dra toujours mieux qu'ici. »
N'est-ce pas à ces gens-là, messieurs
les députés, qu'il faudrait accorder une
indemnité? ?'
Quel enseignement pour les roman-
ciers, que ce fameux drame du Pecq 1
Quand on a retrouvé ce cadavre roul'é
dans un tuyau de plomb, les lèvres fer-
mées par une épingle de femme, tous
les membres liés, tortionné comme s'il
avait passé par les mains des inquisi-
teurs, chacun eut une secousse de stu-
péfaction et d'horreur. Et les imagina-
tions s'exaltèrent; on parlait d'une ven-
geance d'époux outragé, et l'horriMe
scène était devinée; chacun aurait pu
la raconter, tant elle semblait logique.
commençant par les imprécations et
unissant par l'exécution.
MM. X. de Montépin, du Boisgobey
et G" en ont dû frémir de joie.
Le misérable, attiré dans le piège, en-
trait en la chambre ou le mari vengeur
l'attendait.
Un dialogue ironique de la part de
l'époux commençait, comme on en en-
tend au théâtre, un dialogue à faire se
pâmer la salle. Puis venaient les repro-
ches, les menaces, la colère, la lutte.
L'amant terrassé râlait, et l'autre, à ge-
noux sur lui, vibrant d'une rage fréné-
tique, le mutilait, criant che m'a trompé, monstre ) elle a balbutié
des paroles d'amour dans l'oreille de
celle que j'aime, de celle que la loi et
l'église m'ont donnée pour compagne;
elle a jeté ses baisers brûlants sur les
lèvres qui m'appartenaient: eh bien, je
la fermerai, cette bouche, avec une
épingle de son corsage, une de ces épin-
gles que tu aimais tant à défaire. Et
dans tes yeux qui l'ont admirée, j'en
enfoncerai deux autres, et je lierai avec
du plomb tes mains infâmes qui l'ont ca-
ressée
Et on voyait cette bouche sanglante
cherchant encore à s'ouvrir, clouée par
la longue pointe d'acier fin.
Quel effet sur un théâtre! 1
La réalité est plus simple.
Pas de colère le mari, trompé depuis
des années, le savait. La petite aNaire se
prépare en famille, s'exécute en famille,
tout tranquillement, comme on met le
pot-au-feu le dimanche.
Pas de grands mots, pas de sentiments
exaltés. Toutes les affreuses mutilations
ne sont que de petites précautions pra-
tiques, des précautions de ménagère.
Le frère dit Mais l'eau va lui entrer
dans la bouche, et ça le fera flotter.
L'idée est singulière, mais le mari la
trouve juste. Comment fermer cette
bouche? Soudain une inspiration les
frappe. On la percera d'une épingle.
< Donne une épingle ) dit l'époux à sa
femme, comme s'il voulait rattacher sa
cravate. Elle en retire une de sa gorge
et la tend avec douceur.
Le tuyau de plomb n'est qu'une inno-
vation pratique. Il joue le rôle de la
pierre qui retient le corps au fond et ce-
lui de la corde qui l'enlace. Avis aux
imitateurs. Rien de dramatique ni d'é-
levé, tout est simple et commun.
En route, un cahot violent fait dégrin-
goler le cadavre de la voiture, devant la
porte d'un boucher. Aussitôt un des
meurtriers eSace doucement avec son
pied la trace de sang laissée a, terre ¡
comme font certains hommes après
avoir craché.
Puis les trois complices vont se cou-
cher.
Vraiment, ces criminels sont trop na-
ture.
Moralité Ne faites jamais la cour aux
femmes dont les maris sont mal en leurs
affaires.
CUY DE MAUPASSANT
MS AFFAIRES D~CTPfE
Parmi les nouvelles que le télégraphe
nous a apportées d'Egypte, dans la
journée d'hier, les plus importantes
nous sont parvenues par le détour de
Londres.
En effet, à la séance de la Chambre des
communes, Sir Charles Dilke a fait hier
soir une série de déclarations dont la
portée extraordinaire n'échappera point
à tous ceux qui savent lire entre les li-
gnes du compte rendu télégraphique
que voici
Répondant à sir Stafford Northcote, sir
Charles Dilke annonce que le calme est
complet à Alexandrie et que, sur l'ordre de
Dervisch-Pacha, la garnison égyptienne a
été portée à 12,000 hommes.
Les informations sur le nombre des vic-
times de l'émeute de dimanche sont, dit-il,
contradictoires; on peut l'évaluer à cin-
quante personnes tuées.
Le Khédive continue à donner ses or-
dres par l'intermédiaire d'Arabi-Pacha et
des autres ministres.
Tewnck et Dervisch-Pacha sont partis
ce matin pour Alexandrie. M. Malet et les
autres consuls sont restés au Caire M.
Malet a toutefois prévenu le gouverne-
ment qu'à son avis sa place était auprès
du Khédive.
A une question de M. Macartney, sir
Charles Diike répond qu'il doit présumer
qn'Arabi est toujours au Caire, car il,n'a.
reçu nulle nouvelle de son départ.
Un membre du Parlement demande en-
suite si, en l'absence des troupes, la sécu-
rité des Européens au Caire n'est pas me-
nacée.
Si les consuls partent pour AlexaRdrie.
Quinzième Année DeuxïèMe Sérîo–MumêM 1005
Mercredi 14 Juin 188S
3Nf. 13 B C~rOM'
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'ANNONCES '=.
MM. Ch. ~mgr&nge, Cert et~C"
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Le! tbonnemente partent dM 1" et M du mot'
J'TTIL.BS SIMC~
DtrectettfJPo~K~ttt
ABONNEMENTS /'<
P~R:s Trois mois. 13 fr.5~
DEPARTEMENTS Trois mois. <6 fr.
REDACTION
0, boulevard dee Btat!cmx, Q
DE DEU-X HEURES A MINUtT
LM MANUSCRITS NE SERONT PAS RENDUS
LEMÉTIER D'ELECTEUR.
Nos Eoaos. –Utt DoMtHo.
SOUS LE MASQUE. V[0~«C<.
CHRONIQUE. GM~ de ~Omp6t:Myt<.
LES AFFAIRES D'EGYPTE.– .L. J~.
LES ENVOIS DE ROME. jE-oMM Z.aM&er<.
Au PARLEMENT LE SÉNAT. Gro<. LA
CHAMBRE.–fer/o!.
LE SALON. FoKycO:t{<
MOUVEMENT ADMINISTRATIF.
A TRAVERS LA PRESSE.– GMS<«Ce .PMt
CHRONIQUE DES TRIBUNAUX. .Mettre X.
LA BouRSE. Henri PrtBS<.
TÉL~aRAMMES ET CORRESPONDANCES. G. JUM.
NOUVELLES DIVERSES. GM<<0!Be Coite.
SPORT. Sir Becy<.
ECHOS DES THEATRES. Arthur CCfM
Detoy!.
LE
MËTtER B ËLECTEtJR
Un empereur du très bas Empire avait
pris la fantaisie de gagner, par ses lieu-
tenants, de très faciles et très inutiles
batailles, et de se décerner de très somp-
tueux et très dispendieux triomphes,
avec accompagnement d'hécatombes.
On lui nt cette épigramme
LES BŒUFS
0 César si tu triomphes nous périssons.
Nous autres, qui faisons partie de la
plèbe, nous pourrions dire à nos tri-
buns « 0 grands citoyens, si vous con-
tinuez à triompher, nous sommes per-
dus pour nos ateliers. Vous nous acca-
blez de tant d'honneurs et de tant de
droits, qu'il ne nous restera plus une
minute pour travailler à notre ancien
métier. Le métier de citoyen absorbera
tout.
Nous avons depuis longtemps le
droit de nommer nos députés, nos con-
seillers généraux, nos conseillers d'ar-
rondissement et nos conseillers muni-
cipaux nous sommes loin de nous en
plaindre. C'est un droit qu'on ne nous
arracherait qu'avec la vie. Nous en
usons languissamment il y a souvent
du tirage pour arriver au minimum de
votants exigé par la loi. C'est qu'on a
un peu abusé de nous avec les dissolu-
tions et les invalidations.
On parle à présent de rendre le vote
obligatoire. Nous ne nous en plaindrons
pas non plus. L'obligatoire est à la
'mode. Instruction obligatoire, service
militaire obligatoire, vote obligatoire:,
cela s'enchaîne. Est-il vrai que M. A.
Naquet pense à rendre le mariage obli-
gatoire, quand il aura établi le divorce?
Le bruit en a couru et lui a valu une
nouvelle popularité parmi les demoi-
selles. C'est un savant il a peut-être dé-
couvert que ce serait le meilleur moyen
d'augmenter la densité de la popula-
tion. Nous nous marierons, s'il le veut.
Nous sommes prêts à tout.
Nous voulons élire nos prud'hommes,
nos juges consulaires, les membres de
nos chambres de commerce, et les
membres de nos syndicats profession-
nels. Au besoin, nous sacrifierons les
autres élections, pour garder les syn-
dicats, parce que très prochainement les
syndicats nous tiendront lieu de tout le
reste. Mais nous ne sacrifions rien nous
ne savons pas pourquoi, élisant les
députés, nous n'élirions pas les pru-
d'hommes.
II paraît qu'on veut aussi nous faire
élire les juges. On l'a à peu près décidé
samedi dernier. C'est très bon. Nous
comprenons qu'élire un juge civil n'est
pas plus difficile qu'élire un juge de
commerce. Vous nous dites que nous
.faisons des choix merveilleux en poli-
tique. En effet, nous vous avons choi-
sis il n'était pas possible de mieux
faire. Cette preuve décisive établit notre
compétence et notre capacité. Il est hors
de doute que nous nommerons des ma-
gistrats aussi sages et aussi habiles que
nos députés. Nous ne saurions nous
mettre trop vite à la besogne. Les can-
didats commencent déjà à tourner au-
tour de nous, et à nous ennuyer de
leurs programmes. Chacun d'eux avait
une théorie toute prête sur les affaires
d'Egypte.
Election dès juges de paix, élection
des juges civile et correctionnels, élec-
tion des conseillers de cour d'appel et
des conseillers de la cour de cassation
voilà, citoyens, du pa.in sur la planche.
Avec les élections politiques, départe-
mentales, municipales, et les élections
des corps de métier, cela nous fera bien
deux élections par mois. Mettons, par
élection, trois réunions préparatoires
seulement. C'était comme cela sous la
première Révolution. Les esclaves
étaient forgerons, cordonniers ou culti-
vateurs les hommes libres étaient
électeurs. Ils avaient aussi les séances
du club des Jacobins, qui était en per-
manence.
Vous allez instituer des assises de
nouvelle espèce; alors nous serons au.
complet. Quand nous aurons siégé aux
assises criminelles, nous nous délasse-
rons aux assises correctionnelles, et en-
suite aux assises, civiles. Notre yie sera
très simple élire et juger. Nous ferons
-venir nos habits et nos chaussures de la
Belgique et de la. Suisse, où on a encore
le temps de travailler et le "goût de s'a-
baisser au travail manuel, L'Amérique
ne demande pas mieux que de nous
ve'ndre du blé.
Nous avons, citoyens, une requête
à vous présenter mais, entendez-le bien,
c'est une requête du peuple. Vous avez.
pour être députés, vingt-cinq francs par
jour. C'est un beau denier, et nous ne
nous étonnons pas d'apprendre qu'avec
cet argent-là plusieurs d'entre vous
roulent carosse. Nous trouvons parfai-
tement juste qu'on vous paye pour le
temps qu'on vous prend. Quand les con-
seillers.municipaux de Paris ont voulu
être payés, on leur a fait des dif&cultés
qui sont déplacées et incompréhensibles.
M. Joffrin n'a pas moins besoin de son
temps que M. Benjamin Raspail. L'heure
de travail de l'un et l'heure de travail
de l'autre doivent avoir le même prix
sur la place, car elles se valent absolu-
ment. D'ailleurs, nous n'admettons pas
l'inégalité des salaires; maiscequeno~is
admettons encore moins, c'est qu'on
couvre d'or M. Benjamin, et qu'on ne
donne pas un rouge liard à M. JoSrm.
Vous voyez où nous voulons en ve-
nir. Nous sommes électeurs et jurés. Il
faut nous faire notre part. Nous avons,
comme vous, des femmes et des enfants,
à qui les honneurs ne suffisent. pas. Il
leur faut, en outre, le pot-au-feu. Nous
ne demandons pas cependant qu'on nous
donne 9,000 francs; la dépense serait
peut-être trop forte. Il vous suffira de
décréter que tout le monde, sénateurs,
députés, conseillers municipaux, jurés,
électeurs, sera payé par vacations. Vous
y perdrez comme députés, puisque vous
êtes payés à forfait mais il est proba-
ble que vous vous en retirerez, en sié-
geant beaucoup comme jurés correction-
nels, et en assistant à toutes les assem-
blées électorales.
Nos 15 chos
~sr~tM~JM~~M
En France, !a persistance des vents d'entre 0. et
N. va maintenir une température basse et amener
encore des averses dans te nord. A Saint-Maur, le
minimum de la nuit a été de 6" et on signale de la
neige au Puy-de-Dôme.
AUJOURH'HUt
A 6 heures et demie, dîner au Grand-Hôte~
admission jusqu'à 7 heures.
Pendant la durée du dîner, l'orchestre de
M. Desgranges jouera. dans la nouvelle "alla de
musique. .MENU
MENU
Potage garbure
Hors-d'cBUvre
Filets de dorades sauce crevettes
Pommes do terre à l'anglaise
Pièce de bœuf à la Dauphino
Petits pieds Cendrillon aux laitues
Chapons du Mans au cresson
Salade
Haricots verts maître-d'hôtel
Bava.reisà.IaJoinvillo
Glace & l'orange
Desserts
fromages, fruits et petits-fourt
Le salon des dames est ouvert aux voyageurs.
Piano, orgue, tables de jeux. Dîner à la carte
tm restaurant. Billards au Café Divan.
Le programme du dîner-concert. (Voir à 1&
4' page.)
A l'Opéra. Le F/'enc/tK~ et JVetOtOK~ot.
Au Théâtre-Français.–Les .R
OEMAtN
Au Theatre-Franca.is. f.e Monde o& !'o~
t'eyMtne.
A l'Opéra-Comique Les ~Vocet de Ft~cfro.
LA POUTtOUE
Le conseil des ministres s'est réuni
hier matin à l'Elysée et s'est principale-
ment occupé des affaires d'Egypte.
M. Humbert assistait à la séance. Il a
consenti, sur les instances du président
de la République et des autres membres
du cabinet, à retirer sa démission.
Toutefois, comme nous l'indiquions
hier, l'honorable garde des sceaux -va
prendre un congé d'un mois.
Le garde des sceaux se rend à M~lun,
chez son nls. Les affaires urgente~ lui
seront transmises. On ignore encore s'il
y aura un intérimaire.
Le président de la République a. signé
la nomination de M. Malens, 'sénateur
de la Drôme, comme premier président
de la cour de Grenoble, en remplace-
ment de M. Bonafous, atteint par la li-
mite d'âge. M. Bonafous avai4 été séna-
teur bonapartiste de 1876 à 1879.
On annonce que le Livre Jaune sur les
affaires d'Egypte sera distribué dans six
ou huit jours.
LE MONDE ET LAVtLLE
Hier à midi, M. le président de la Re-
publique a reçu à déjeuner M. Cherbu-
îiez, le nouvel académicien. Il était ac-
compagné de MM. Camille Doucet, Pas-
teur, Renan, Maxime Du Camp, chargés
de le présenter.
Aujourd'hui, à onze heures, aura lieu,
à l'Elysée, la remise des insignes de l'or-
dre de la Toison d'or, qui seront appor-
tés au Président par le duc de Fernan-
Nunez, ambassadeur d'Espagne.
M. Grévy aura pour parrains l'ambas-
sadeur d'Espagne et le duc d'Aumale.
La cérémonie sera suivie d'un déieu-
ner où assisteront le ministre des affai-
res étrangères et le haut personnel de
l'ambassade d'Espagne; M. Mollard, in-
troducteur des ambassadeurs, et la mai-
son militaire du président de la Répu-
blique.
Le général Colonieu est relevé de son
commandement de Méchéria et des co-
lonnes d'opérations du Sud crânais. II
rentre en France.
C'est par ordre de cet officier général
que fut exécutée cette reconnaissance
topographique sur le territoire maro-
cain qui coûta, aux deux compagnies
de la légion étrangère formant l'escorte,
cinq officiers, cinquante hommes tués et
autant de blessés au combat du chott
Tigri. v
M. le général de brigade Thomassin,
commandant l'artillerie du deuxième
corps d'armée, a été nommé au com-
mandement de la division d'Oran, en
remplacement de M. le général Delebec-
que, nommé commandant du dix-sep-
tième corps d'armée.
Le prince de Galles est attendu à Pa-
ris à la nn de cette semaine.
Il a accepté la présidence d'honneur
du grand concours international de
~M~-
logne, les premiers champions du
monde.
L'amélioration annoncée récemment
dans l'état de santé de S. Exc. Mgr
Czacki, nonce apostolique, ne s'est pas
maintenue.
On constate une prostration de forces
plus grande.
Certains journaux anglais annoncent
que M. Gambetta est attendu, la semaine
prochaine, en Angleterre, et qu'il assis-
tera aux fêtes qui auront lieu à Brad-
ford, en l'honneur du prince de Galles.
Lord Rowton, le Mêle secrétaire de
feu Beaconsfield, vient d'arriver à Paris,
en route pour le Mont-Dore, où il suivra
une cure. Lord Rowton travaille, on le
sait, depuis deux ans, à rassembler les
manuscrits et documents laissés p~r
lord Beaconsfield, dont un grand nom-
bre seront imprimés et publiés, par
ordre de la reine Victoria, sous le titre
de .M<~OM"M de ~oro! .BMcotM/!eM.
L'honorable M. et Mme Levi P. Mor-
ton ont donné hier soir un grand dîner
diplomatique, à la Légation des Etats-
Unis.
Principaux convives
Le président de la Chambre et Mme
Henri Brisson, M. et Mme Jules Ferry,
le ministre de la guerre et Mme Billot,
M. et Mme de Mahy, le comte Foucher
de Careil.M. etMmeFloquet.M. et Mme
Camescasse, M. et Mme Louis de Hoff-
mann, M. et Mme Ricard, MM. Varroy,
Cochery, Pouyer-Quertier, Caubert, Al-
bert Rhodes, Alphand, le colonel et
Mme Ritchic, Henri Vignaud, etc.
Réception intime dans la soirée.
Le R. P. Charmettant que l'O/yMe~
appelait hier M. Charmettant se-
crétaire du cardin~a! archevêque d'Alger,
est nommé chevalier de la Légion d'hon-
neur pour services exceptionnels ren-
dus comme directeur du collège fran-
çais de Carthage et pour l'installation du
nouveau vicariat apostolique de Tu-
nisie.
Cette décoration est accordée sur la
proposition du ministre des cultes.
Hier a eu lieu, à la Madeleine, le ma-
riage de M. Etienne Wallon, fils de M.
Henri Wallon, sénateur, ancien minis-
tre, secrétaire perpétuel de l'Académie
des belles-lettres, avec Mlle Dupont.
Dans l'assistance, MM. le comte Rampon,
Chesnelong, Delsol, Clément, Duval,
Lafond de Saint-Mûr, le marquis de Ma-
leville, le général Robert, Tribert, séna-
teurs Jules Simon, Léopold Delisle, De-
loche, le vicomte Delaborde, Gruyer,
membres de l'Institut; M. Plichon, M.
Deltour, inspecteur général de l'Univer-
sité, etc.
Nous apprenons que M. Abel Cou-
vreux, dont nous avons annoncé le pro-
chain mariage avec Mlle Marie Decau-
ville, sœur du célèbre constructeur de
Petit-Bourg, est le fils de M. Alphonse
Couvreux, associé de M. H. Hersent,
pour l'entreprise du canal de Panama.
Mgr Lequette, évêque d'Arras, est
mort hier matin, à dix heures un quart,
après une courte maladie. Il était âgé de
soixante et onze ans et comptait seize ans
d'épiscopat.
Mgr Lequette, était vicaire général
d'Arras lorsqu'il fut nommé évêque du
même diocèse le 3 avril 1866:
A part ses lettres pastorales et man-
dements, on lui doit une nouvelle édition
de la tSoMM~g <~
modernes.
L'évêque d'Arras était chevalier de la
Légion d'honneur. Ce deuil qui frappe
l'épiseopat français est vivement ressenti
dans le diocèse où Mgr Lequette était
grandement estimé et aimé.
Dans sa séance du vendredi 9juind882,
la conférence Molé-Tocqueville a voté
la résolution suivante, signée par MM.
Rendu, Sellier et un grand nombre de
leurs collègues.
t .La conférence Molé-Tocqueville
proteste avec indignation contre les
persécutions sanglantes exercées dans
certaines contrées de l'Europe sur les
Israélites.
Et elle s'associe aux hommes émi-
nents de tous les partis qui, ûdéles aux
traditions libérales et généreuses qui
sont l'honneur de notre pays, unissent
leurs eSorts pour secourir des infortu-
nes qui sont la honte du XIX" siècle. »
NOUVELLES A LA MAIN
Les parents du jeune Tomy lui don-
nent continuellement comme exemple
et comme modèle le petit Jacques, un
enfant-prodige qui ne pleure pas, qui
ne désobéit jamais, qui n'est ni gour-
mand, ni menteur, ni paresseux.
Hier soir, en dînant, Tomy avait cassé
une assiette. Sa mère le gronde et lui
afnrm~ que le petit Jacques ne casse ja-
mais d'assiettes.
–Eh bien 1 moi, il m'embête, le petit
Jacques s'écrie Tomy avec convic-
tion.
Entre boulevardiers
Eh bien ) cher, comment suppor-
tez-vous la politique, en ce joli mois de
juin? 'l
Comme ci. comme ça! Et vous?
Oh! moi, toujours comme scie.
MM OOM
h
LES tMCTMNS EN BEM!<)t!E
Par <~ecAe ~f~Oip~Me
DE NOTRE CORRESPONDANT SPÉCIAL
Bruxelles, 13 juin.
Aujourd'hui ont eu lieu les élections
législatives, dont les résultats définitifs
viennent d'être proclamés.
La majorité libérale de la Chambre des
représentants, qui était de 14 membres,
s'élève actuellement à 18.
Au Sénat, la majorité s'est élevée de
4à7.
Tous les ministres soumis à la réélection
ont été réélus.
PET)TE BOUR~ DU SO!R
D!X HEURES S
30/0. 8295.
50/0. 11536,37,31,36.
Turc. 1225,37,30.
Italien. 90 40, 30, 40.
Egypte. 33125,34,37.
Banque ottomane. 791 25. 86, S7, 88, 12.
Extérieure. 289/16.
SOUS LE MASQUE
Le « départe est un cliché qui court sous
toutes les plumes.
Le magistral coup d'archet réglemen-
taire du Grand Prix a donné le signal, et,
avec une précision digne de la classe de
danse académique, les Parisiennes devraient
s'envoler.
'Elles sont phrs intelligentes que cela;
secouant volontiers <: la coutume et l'u-
sage elles font comme les hirondelles,
leurs sœurs. C'est la températur~qui les
guide en leurs lointaines migrations. Elles
attendent donc patiemment, à l'abri de
leurs pénates, l'apparition au calendrier de
quelque saint de bonne volonté, qui sup-
plée à la négligence de saint Barnabé et
mette une digue céleste au déluge de
saint Médard.
Au premier rayon de clair soleil, elles
fileront rapidement, envahissant tous les
coins de la France où se trouve une villa,
une source, quelques vagues ou une mon-
tagne. Rien ne les presse; car, en cette
saison privilégiée, l'existence parisienne
possède des charmes spéciaux.
On reçoit encore, quoi qu'en disent les
gazettes; témoin le dîner de la baronne
Erlanger, lundi; le bal de la duchesse de
Pomar hier soir, et, ce soir, la réception de
la baronne von Hoffmann. Mais, quelque
nombreuses qu'elles soient, ces réunions
empruntent à la saison un caractère plus
intime. L'été met à l'aise, et la gaieté s'en
ressent. Les jupes se raccourcissent, les
costumes ronds, tout frissonnants de den-
telles, sont de toute obligation la toi-
lette abdique toute majesté comme toute
gène importune.
Dans l'après-midi, on quitte ses jours s
et l'on supprime la corvée des <[ visites x,
ouvrant sa porte seulement aux intimes, à
deux heures, ou bien le soir, quand on
reste chez soi.
L'après-midi, on court les fournisseurs,
faisant les apprêts du départ prochain, em-
pilant les emplettes, qui rempliront une
douzaine de grandes malles. On se retrouve
rue de la Paix, à quatre heures; et, laissant
sa voiture, on y flâne le long des boutiques,
passant de la couturière à la modiste, du
bijoutier à la lingère quelquefois, on y
goûte d'un verre de malaga et d'un sand-
wich, afin de prendre des forces pour le
tour du Bois.
C'est peut-être de tout Paris le coin le
plus parisien que cette rue de la Paix. La
quintessence de tout notre luxe, de toute
notre élégance, y est éclose. Depuis les tê-
tes couronnées jusqu'aux simples million-
naires, toutes les femmes et toutes les aris-
tocraties s'y coudoient. Et, naturellement,
comme partout où il y a de jolies femmes,
leurs admirateurs s'empressent, les gilets ~M
c
De trois à quatre, tous sont à leur poste,
flairant l'arrivée, guettant l'occasion, met-
tant à profit les brillantes vitrines pour
multiplier leurs conquêtes pour les unes,
une épingle nouvelle pour les autres, une
simple neur en échange d'un sourire.
Il paraît que cela s'appelle < le passage
des Cailles~.
C'est en ce moment un véritable chassé-
croisé d'hôtels. J'ai annoncé, il y a quelque
temps déjà, l'achat de l'hôtel de la reine
Christine, appartenant à M. Secretan, par
la duchesse d'Uzès. Aujourd'hui le comte
Pillet-Will se défait, en faveur de M. Se-
cretan, de sa belle demeure de la place
Moncey, un véritable château seigneurial,
enfoui dans un grand parc de province, aux
futaies séculaires. Mais le quartier manque
de chic, et l'élégante comtesse y prenait le
spleen. Elle s'en ira rejoindre ses belles
amies par delà le parc Monceau.
La duchesse de Mouchy, elle aussi, a
vendu son bel hôtel du parc Monceau, ces
magnifiques salons qui l'an dernier, après
huit ans de deuil, se sont ouverts pour une
fois, pour une seule, et pour la dernière,
aussitôt refermés par la mort On conçoit
que la jeune mère ait voulu fuir jusqu'au
souvenir des fêtes où s'épanouit son
bonheur, échapper à la constante vision de
l'ange envolé dont l'ombre nottaitlà, parmi
les fantômes triomphants des jours de joie
radieuse
V)OLETTt
CHRONIQUE
Nos hommes politiques s'occupent en
ce moment de l'indemnité à accorder
aux Espagnols victimes des incursions
des Arabes sur les hauts plateaux alfa-
tiers du Sud oranais.
Le gouvernement espagnol le prend
de haut, et les avis sur cette question
sont partagés. Sans émettre aucune opi-
nion, et même sans en avoir aucune, je
veux rappeler quelques souvenirs sur
ce pays que j'ai visité immédiatement
après le massacre des colons.
Dès qu'on a passé Saïda, on s'engage
dans la montagne, une montagne de
pierre rouge, calcinée, toujours brû-
lante puis on retrouve des plaines nues,
interminables, puis une espèce de soli-
tude ou poussent, de cinquante mètres
en cinquante mètres, des touffes de ge-
névriers. On appelle cela la forêt des
Hassassenas puis enfin on rencontre
l'alfa, sorte de petit jonc! qui couvre des
espaces innnis et qui fait songer à la
mer. Toute maison est inconnue en ces
contrées mornes seule la tente brune
et basse des Arabes s'accroche au sol,
comme un étrange champignon.
Dans ces océans d'alfa vivait une
vraie nation, des hordes d'hommes plus
sauvages et plus farouches que les Ara-
bes les alfatiers espagnols. Isolés
ainsi, loin du monde, réunis par bandes
avec leurs femmes et leurs enfants, per-
dus en dehors de toute loi, ils ont fait,
dit-on, ce que faisaient leurs ancêtres
sur les terres nouvelles ils ont été vio-
lents, sanguinaires, terribles, avec leurs
voisins les Arabes.
Or, l'Arabe supporte tout, jusqu'au
moment où il tue.
Bon-Amamaestvenu,et, profitant de
sa présence à Assi-Tircine, à vingt-qua-
tre kilomètres de Saïda (on le croyait
alors derrière les Chotts), les deux tribus
au milieu desquelles vivaient les Espa-
gnols, les Harrars et les Hassassenas,
ont massacré les alfatiers.
Ils ont respecté les employés français
de la petite ligne de fer; mais ils ont été
sans pitié pour quiconque était Espa-
gnol.
Alors, pendant plusieurs jours, des
blessés ont erré, des enfants mutilés,
des femmes martyrisées. Tous ces misé-
rables se rapprochaient de la voie, et,
quand un train passait cherchant les vic-
times, ils s'élançaient, appelaient, nus
et sanglants.
Une semaine avant mon arrivée, on
avait retrouvé encore une grande fille
de dix-huit ans, d'une incomparable
beauté, violée, lardée de coups de cou-
teau et qui cependant courait vers le
convoi, aussi dévêtue qu'on peut l'être.
Ces choses sont horribles mais reste à
savoir qui avait commencé. On dit là-bas
communément qu'on aimerait mieux
tomber au milieu de cavaliers dissidents
qu'au milieu d'un groupe d'alfatiers.
Quels sont ces aventuriers qui vont
cueillir l'alfa dans ces tristes pays'?
Quelle fut leur vie auparavant quels
sont, comme on dit, leurs antécédents?
J'en ai vu, de ces hommes eh bien i
franchement, je me croirais plus en sû-
reté dans une tribu arabe, même révol-
tée, que sous leur toit.
Comme j'étais sorti de Saïda par un
après-midi de furieux soleil, je me diri-
geai d'abord vers l'ancienne ville d'Abd-
el-Kader. Sur un rocher escarpé, on dis-
tingue vaguement quelques murailles:
c'est tout ce qui reste de la résidence
chère au célèbre émir.
Mais, quand je fus là-haut, l'aperçus,
par derrière, une admirable chose. Un
ravin profond sépare la vieille forteresse
delamontagne. Elle est, cette montagne,
toute rouge, d'un rouge doré, d'un rouge
de feu, dentelée, escarpée, coupée par
de minces échancrures où descendent,
en hiver, les torrents.
Mais tout le fond du ravin n'est qu'un
bois de lauriers-rosés, un grand tapis de
feuilles et de fleurs.
J'y descendis, non sans peine. Une
mince rivière coulait sous les merveil-
leux arbustes, une rivière sautant les
pierres, écumante, tortueuse. J'y trem-
pai ma main l'eau était chaude, presque
brûlante.
Sur les bords, de gros crabes, des
centaines de crabes fuyaient devant moi
une longue couleuvre parfois glissait
dans l'eau, et des lézards énormes s'en-
fonçaient dans les taillis.
Soudain un grand bruit me fit tres-
saillir. A quelques pas, un aigle s'envo-
lait. L'immense oiseau, surpris, s'éleva
brusquement vers le ciel bleu, et il était si
large qu'il semblait toucher avec ses ailes
les deux murailles de pierre calcinée qui
enfermaient le ravin.
Après une heure de marche, je rejoi-
gnis la route qui monte vers Aïn-el-
Hadjar.
Devant moi, une femme marchait, une
vieille femme courbée, qui s'abritait du
soleil sous un antique parapluie.
Il est bien rare, en ces contrées, de
voir une femme, hormis les grandes
négresses luisantes, chamarrées d'étoffés
jaunes ou bleues. Je rejoignis la femme.
Elle était ridée, soufrait, semblait exté-
nuée et désespérée, avec une face sévère
et triste. Elle allait à petits pas, sous la
chaleur accablante. Je lui parlai, et sou-
dain sa colère indignée éclata. C'était
une Alsacienne qu'on avait envoyée en
ces pays désolés avec ses quatre fils,
après la guerre. Trois de ses enfants
étaient morts en ce climat meurtrier il
en restait un, malade aussi maintenant
et leurs terres ne rapportaient rien, bien
que grandes, car elles n'avaient pas une
goutte d'eau. Elle répétait, la vieille
< Il n'y vient pas un chou, monsieur, pas
un chou ) !) s'obstinantàcette idée dechou.
Ce légume, évidemment, représentait
pour elle le bonheur terrestre. Et quand.
elle m'eut dit toute sa peine, elle s'assit
sur une pierre, et pleura.
Et je n'ai jamais rien vu de plus
navrant que cette bonne femme d'Alsace
perdue sur ce sol de feu où il~'e pousse
pas un chou.
En me quittant, elle ajouta: "Savez-
vous si on donnera des terres en Tuni-
sie ? On dit que c'est bon par lâ~ ça vau-
dra toujours mieux qu'ici. »
N'est-ce pas à ces gens-là, messieurs
les députés, qu'il faudrait accorder une
indemnité? ?'
Quel enseignement pour les roman-
ciers, que ce fameux drame du Pecq 1
Quand on a retrouvé ce cadavre roul'é
dans un tuyau de plomb, les lèvres fer-
mées par une épingle de femme, tous
les membres liés, tortionné comme s'il
avait passé par les mains des inquisi-
teurs, chacun eut une secousse de stu-
péfaction et d'horreur. Et les imagina-
tions s'exaltèrent; on parlait d'une ven-
geance d'époux outragé, et l'horriMe
scène était devinée; chacun aurait pu
la raconter, tant elle semblait logique.
commençant par les imprécations et
unissant par l'exécution.
MM. X. de Montépin, du Boisgobey
et G" en ont dû frémir de joie.
Le misérable, attiré dans le piège, en-
trait en la chambre ou le mari vengeur
l'attendait.
Un dialogue ironique de la part de
l'époux commençait, comme on en en-
tend au théâtre, un dialogue à faire se
pâmer la salle. Puis venaient les repro-
ches, les menaces, la colère, la lutte.
L'amant terrassé râlait, et l'autre, à ge-
noux sur lui, vibrant d'une rage fréné-
tique, le mutilait, criant
des paroles d'amour dans l'oreille de
celle que j'aime, de celle que la loi et
l'église m'ont donnée pour compagne;
elle a jeté ses baisers brûlants sur les
lèvres qui m'appartenaient: eh bien, je
la fermerai, cette bouche, avec une
épingle de son corsage, une de ces épin-
gles que tu aimais tant à défaire. Et
dans tes yeux qui l'ont admirée, j'en
enfoncerai deux autres, et je lierai avec
du plomb tes mains infâmes qui l'ont ca-
ressée
Et on voyait cette bouche sanglante
cherchant encore à s'ouvrir, clouée par
la longue pointe d'acier fin.
Quel effet sur un théâtre! 1
La réalité est plus simple.
Pas de colère le mari, trompé depuis
des années, le savait. La petite aNaire se
prépare en famille, s'exécute en famille,
tout tranquillement, comme on met le
pot-au-feu le dimanche.
Pas de grands mots, pas de sentiments
exaltés. Toutes les affreuses mutilations
ne sont que de petites précautions pra-
tiques, des précautions de ménagère.
Le frère dit Mais l'eau va lui entrer
dans la bouche, et ça le fera flotter.
L'idée est singulière, mais le mari la
trouve juste. Comment fermer cette
bouche? Soudain une inspiration les
frappe. On la percera d'une épingle.
< Donne une épingle ) dit l'époux à sa
femme, comme s'il voulait rattacher sa
cravate. Elle en retire une de sa gorge
et la tend avec douceur.
Le tuyau de plomb n'est qu'une inno-
vation pratique. Il joue le rôle de la
pierre qui retient le corps au fond et ce-
lui de la corde qui l'enlace. Avis aux
imitateurs. Rien de dramatique ni d'é-
levé, tout est simple et commun.
En route, un cahot violent fait dégrin-
goler le cadavre de la voiture, devant la
porte d'un boucher. Aussitôt un des
meurtriers eSace doucement avec son
pied la trace de sang laissée a, terre ¡
comme font certains hommes après
avoir craché.
Puis les trois complices vont se cou-
cher.
Vraiment, ces criminels sont trop na-
ture.
Moralité Ne faites jamais la cour aux
femmes dont les maris sont mal en leurs
affaires.
CUY DE MAUPASSANT
MS AFFAIRES D~CTPfE
Parmi les nouvelles que le télégraphe
nous a apportées d'Egypte, dans la
journée d'hier, les plus importantes
nous sont parvenues par le détour de
Londres.
En effet, à la séance de la Chambre des
communes, Sir Charles Dilke a fait hier
soir une série de déclarations dont la
portée extraordinaire n'échappera point
à tous ceux qui savent lire entre les li-
gnes du compte rendu télégraphique
que voici
Répondant à sir Stafford Northcote, sir
Charles Dilke annonce que le calme est
complet à Alexandrie et que, sur l'ordre de
Dervisch-Pacha, la garnison égyptienne a
été portée à 12,000 hommes.
Les informations sur le nombre des vic-
times de l'émeute de dimanche sont, dit-il,
contradictoires; on peut l'évaluer à cin-
quante personnes tuées.
Le Khédive continue à donner ses or-
dres par l'intermédiaire d'Arabi-Pacha et
des autres ministres.
Tewnck et Dervisch-Pacha sont partis
ce matin pour Alexandrie. M. Malet et les
autres consuls sont restés au Caire M.
Malet a toutefois prévenu le gouverne-
ment qu'à son avis sa place était auprès
du Khédive.
A une question de M. Macartney, sir
Charles Diike répond qu'il doit présumer
qn'Arabi est toujours au Caire, car il,n'a.
reçu nulle nouvelle de son départ.
Un membre du Parlement demande en-
suite si, en l'absence des troupes, la sécu-
rité des Européens au Caire n'est pas me-
nacée.
Si les consuls partent pour AlexaRdrie.
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