Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1929-09-05
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 05 septembre 1929 05 septembre 1929
Description : 1929/09/05 (A23,N6077). 1929/09/05 (A23,N6077).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 25/05/2015
T23a ANNEE. - N" 6077,
■ Le'NUMÉRO : CINQUINTE- CENTIÏK"^ ^if-'Rue S'amt-GeffîgïsF^- Tèlr: TrïïZcRne 92-80» It92^.84^
.TEUfar5 SEPTEMBRE 192%
Gabriel ALPHAUD
Directeur
.Une ample comédie aux cent actes divers
1. et dont la scène est l'univers.
(LA FONTAINE.)
REDACTION ADMINISTRATION
61, rue Saint-Ceàrges, Paris (g*)
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Adressa la correspondance sans exception
à M. le directeur de « Coznoedla, a
L'Intransigeant a fait le total
des victimes de l'automobile de-
puis janvier
'436 MORTS
1.035 BLESSES
Quand usera-t-on des sanctions
nécessaires contre ceux qui trâns-.
v gressent le Code de la route ?
HOJlïZOJVS
,.
La Fra n ce9 la presse italienne
et l'avenir de la civilisation méditérranéenne
Entre la France et l'Italie serait-ce
l'embellie définitive, l'embellie pré-
sageant d'une heureuse navigation de
conserve Tous les Français qui
reviennent d'Italie sont unanimes,
quelles que soient leurs opinions, à
proclamer la prodigieuse activité de
toute la Péninsule. Une fois de plus
s'impose ce sentiment qu'il n'y a pas
d'hostilité foncière entre les deux
pays. Un génie qui vient du fond de
leur être les unit. Il s'est manifesté
malgré les alliances en igï5- II par-
lera, il agira toujours aux minutes
décisives. Et même si elles deve-
naient un jour des adversaires. l'Ita-
lie et la France ne seront jamais des
snnemies.
Seulement, on ne le répétera ja-
mais assez : l'Italie nouvelle veut
être comprise et admirée. Elle le mé-
rite. Je ne comprends pas la mes-
quine humeur de certains Français,
rageurs d'être contraints de changer
d'opinion. Heureusement, comme je
le souhaitais, les enquêtes en cours
vont sérieusement aider à cet examen
de conscience. Henry de Korab nous
montre la lande romaine en fleurs et
en fruits. Henri Béraud exprime
exactement le vœu italien que j'es-
quissai ici :
« A cela, les Italiens répondent que
nous pouvons dénigrer nos politiciens
tout à notre aise et qu'ils entendent
honorer les leurs à leur façon. qu'il y
a, dans la discipline et la hiérarchie,
des voluptés ignorées des peuples dé
générés et immoraux; que la liberté
d'opinion est un préjugé de vieillards,
tandis que l'obéissance passive et la
violence concertée sont des ivresses
d'hommes sains, jeunes et forts. Voi-
là ce qu'ils disent. Libre à vous d'en
penser ce qui vous plaît. Ils ajoutent
d'ailleurs, non sans rudesse, que peu
leur chaut la raillerie des soi-disant
Européens ; qu'ils ne demandent comp-
te ni aux Anglais de la perruque du
lord-maire, ni aux Suisses du chapeau
de Gessler, ni aux Allemands des Cl,OUS
d'Hindenburg, ni aux Belges de leur
Mannekenpiss, ni aux Français de
leurs pipes à l'effigie de Clemençeau. »
Oui, que répondre à cela ? Et l'on
est ému de constater que la presse ita-
lienne a comme nous compris l'im-
portance du moment. Elle sait que
de l'orientation qui sera donnée de-
main à la politique française dépen-
dra l'avenir de nos. relations et peut-
être l'avenir de notre civilisation. Si
bien que, d'une façon générale, dans
cette presse, toujours si. sensible et
si franche à communiquer sa désap-
probation, avec une sincérité et une
vigueur saisissantes, avec une sorte
de tremblement de joie résorbée,
s'élève l'espoir d'une collaboration
entière avec la France, collaboration
libre et fière, bien entendu.
La Stampa constate l'irréductibilité
profonde des causes de frictions entre
la France et l'Allemagne, et discerne
avec perspicacité qu'après l'évacua-
tion du Rhin, après celle de la Sarre
après le « couloir polonais », après
:1a Haute-Silésie, après. (elle ne
parle pas de l'Alsace) après tout cela
il y aura encore d'autres causes de
discorde. Car ces discordes sont inhé-
rentes au naturel germanique et
La Stampa demande avec un amou-
reux regret : « Quand donc vos yeux
s'ouvriront/ »
Le Corriere de la Sera est plus
catégorique encore. Quand donc. in-
terroge-t-il, la France comprendra-t-
elle qu'entre l'Allemagne ennemie et
l'Angleterre peu sûre il y aurait tout
intérêt à cultiver la loyale amitié ita-
lienne. Ceci, ajoute-t-il, ne ferait que
faciliter « la reprise éventuelle de
rapports plus amicaux avec l'Angle-
terre et même avec l'Allemagne ».
Et c'est très vrai. -
Mais, ajoute notre confrère ita-
lien, si la France doit venir vers nous,
elle doit le faire après mûre réflexion
et non ab irato, après avoir « déposé
les préjugés antiitaliens et après avoir
apprécié dans toute leur valeur
l'amitié de notre pays, la loyauté de
la continuité d'une politique qui n'est
plus sujette aux caprices parlementai-
res et aux hystérismes du corps élec-
toral ».
L'Italie, dit encore notre confrère,
ne prétend nullement « spéculer sur
le différend franco-britannique ni
s'insinuer subrepticement dans les
mailles d'une idylle brisée ». Elle
veut être considérée « comme un
élément vivant et stable de force et
dléquilibre ».
On ne saurait parler plus nette-
ment, plus simplement, plus noble-
ment.
Et si l'on veut trouver le sens com-
plet de ces déclarations, ou plus exac-
tement les causes lointaines de cet
état d'esprit (que manifestent d'au-
tres journaux d'ordinaire aussi réti-
cents que le .Tevere), il suffira de
savoir que l'amiral von Tirpitz (dont
l'influence reste considérable et cor-
respond en tout cas à toute une caté-
gorie de dirigeants allemands) vient
d'écrire dans la Deutsche Allege-
meine Zeitung un article où il pousse
à nouveau le grand appel à l'union
germanique. Et voici comment parle
ce serviteur du « vieux Dieu » :
J'ai considéré - d'emblée que la voie
dans laquelle on s'engageait à Lo-
carno. vers un rapprochement étroit
^vec la France, ne devait mener à
rien et j'ai fait tout mon possible pour
empêcher qu'on s'engageât dans cette
voie.
A cette époque, la psychose de
guerre des Anglais contre nous n'était
pas encore étei-.te, mais déjà au temps
de Baldwin elle s'était considérable-
ment «méni cc et 'nuis elle a encore
diminué. Nous devrions chercher au-
jourd'hui à entretenir de bons rapports
avec les puissances anglo-saxonnes.
Mais la première condition préalable
est aue nous avoue de la dienité, une
attitude calme, ce qui n'a pas toujours
été le cas au cours des dix dernières
années, et cela à notre détriment.
Il est bien évident que l'Allemagne
est obligée, depuis la fin de la guerre,
de renoncer à toute politique navale
au point de vue mondial. Ce qui reste
à l'Allemagne à ce point de vue ne
peut manifestement pas éveiller une
jalousie sérieuse de l'Angleterre envers
l'Allemagne. Par contre, nous avons
a- - l'Angleterre, et davantage encore
avec l'Amérique, tant de relations
culturelles et tant d'autres points com-
muns d'un autre ordre que de bons rap-
ports entre ces trois Etats germaniques
ne peuvent qu'être utiles aux trois puis-
sances intéressées.
Nous sommes avertis. De pareils
traits en disent long sur la persistan-
ce, par delà systèmes et essais gene-
vois, des fatalités ethniques. L'Euro-
pe se regroupe. Chacun des peuples
méditerranéens, de cette civilisation
de douceur, de mesure et de liberté,
ne comptera jamais d'amitiés réelles,
sauf les amitiés des nations de son
sang ou de sa culture. ',
Gabriel BOISSY.
Derrière le rideau
De tout un peu
INSINUATION CHINOISE.
On en a fait des gorges chaudes à Ge-
nève. Bien entendu hors séances, dans
les petits comités et au cours des innom-
brables déjeuners et dîners que les in-
nombrables délégués, secrétaires, chefs de
cabinet peuvent s'offrir grâce au supplé-
ment d'émoluments que leur valent ces
bienheureuses sessions. De quoi ? De
l'ironique, de la malicieuse intervention,
après ce discours de M. Mac Donald qvi
causa une déception générale, du délé-
gué de la Chine, M. Chao Chu Wu.
Donc M. Chao Chu Wu, doucement,
discrètement, à petits pas feutrés, a fait
observer qu'il était tout à fait de l'avis
de M. Mac Donald lorsque le Premier
anglais exprimait la nécessité d'établir
« la justice et l'équité dans les relations
entre les peuples, quel que soit l'hé-
misphère auquel ils appartiennent. »
Quel plus sur moyen suggéra doucement
M. Chao Chu Wu pour développer cette
action Pacificatrice que « d'appliquer l'ar-
ticle 19 <(u pacte » ? On sait que cet arti-
clé permet à ta' Société des Nations de
remettre en cause les traités anciens deve-
nus par la transformation des pays et des
situations absolument inapplicables.
Vous apercevez d'ici la tête que firent
les Anglais de vieille roche qui étaient
là en songeant, à ce moment, aux « capi-
tulations » chinoises ? D'ailleurs M. Chao
Chu Wu retourna le fer dans la plaie,
ajoutant qu'il n'y avait pas de moyen plus
sûr « pour démontrer les efforts de la So-
ciété des Nations. » Notre cauteleux bon-
homme paracheva son « effet » quand il
lança — oh 1 façon de parler 1 — quand il
susurra cette formule magnifique: « La So-
ciété des Nations justifiera son existence et
renforcera son pouvoir, non pas parce qu'elle
est une Société des Nations fortes, mais
patee qu'elle est une Société des Nations
jvstes. »
Il y eut, alors, un mouvement particu-
lièrement vif du côté de la délégation
égyptienne.
TRAVAILLISTES NATIONALISTES.
Rien de plus amusant — ai l'on peut
dire — que de feuilleter ces jours-ci les
grands journaux illustrés d'A ngleterre. Ils
abondent en photographies et celles-ci,
mieux que tout compte rendu de presse,
nous éclairent svr l'importance, sur la
chàleur et.parfois sur l'enthousiasme quasi
déïirant qui a accueilli à son arrivée à
Londres, malgré l'heure matinale et la
froideur du tempérament, M. Snowden.
., Ce ne sont que têtes découvertes, que
bouches acclamant, que larges sourires;
enfin, tous les signes d'une popularité
qui atteste que sous toutes les étiquettes
l'orgueil nationaliste de l'avoir emporté
reste le sentiment le plus profond de tou-
rtes les populations.
f AU PARADIS SOVIÉTIQUE.
Notre confrère Le Matin a publié les
déclarations d'un grand industriel améri-
cain. M. Jesse Wright, qui faisait partie
du récent voyage d'enquête au pays rouge.
Elles sont édifiantes :
« Nous nous sommes trouvés en face de
la misère. misère écrite sur tout le
pays. Nous n'aurions jamais cru que des
êtres humains pussent vivre dans pareille
saleté et pareille pourriture. Chacun de
vos pas est épié. le train de Moscou
était dégoûtant. le mécanicien en gue-
nilles. tout le monde en Russie est misé-
rablement habillé. les gens ont darts le
regard une obsession; ils ont aussi comme
une crainte les uns des autres. dans au-
cun pays du monde je n'ai vu autant de
soldats en uniforme. »
i
ET LA FRANCE, MONSIEUR ?
Après sa grande interview donnée à
l'A gence Reuter, M. Sn,>wden a complété
ses impressions pour des journalistes amis :
— Vous me voyez bien heureux, dit-il,
car je reviens après avoir remporté une
grande victoire pour mon pays.
— Après le succès anglais que tout le
monde constate, quel est le résultat que
vous mettez au premier plan ?
— La restauration de la souveraineté
politique et économique de l'Allemagne.
qui sort de La Haye justifiée grandement
tant au point de vue financier qu'écono-
mique.
, — Et la France ?.
M. Snowden réfléchit un moment; puis,
sans un mot, il fit un geste vague, fai-
sant claquer son pouce avec 1 index.
Après M. Henry de Jouvenel,
M. Anatole de Monzie veut quitter le Sé-
nat pour aller à la Chambre des députés
où il aura davantage de chance d'être mi-
nistrable. M. Anatole de Monzie, séna-
teur, — comme M. Henry de Jouvenel —
estime sans doute, que la Haute-Assem-
blée manque de mouvement. de vie
parlementaires.
Le 22 octobre, M.. de Monzie soumettra
sa candidature au Congrès républicain
qui se tiendra à Figeac, sous la présidence
de M. Loubet, sénateur.
.- -- AGORA.
Le château de N euvio
Dans ce château où flotte le souvenir de Diane de Poitiers un Américain, ami de la France, vient d'instituer}
ainsi que le conte Plus loin, un de , nos collabora teitrs, M. M.-/. Champel de s rendez-vous intellectuels et artistiques
du Plus vif intérêt.
opmjom
0
Deviendrions-nous dliscour ftois 1
0
Ceci est un examen de conscience, et l'on n'ignore
pas que le principe de ces revues et rappels de fautes
et défauts plus ou moins connus, est de n'être pas
agréable à la personne qui les fait. Plaisants ou non,
ces retours sur soi-même sont utiles, lorsqu'ils se tra-
duisent en décisions et actes, et pas simplement en
couplets de revues.
Or, que nous le voulions ou non, nous ne sommes
plus très polis, en France, et nous le voyons bien
lorsque nous nous comparons à certains étrangers,
qui ont d'autres mœurs et habitudes que nous.
Je ne dirai pas tous nos défauts, dans ce genre. Je
me bornerai à souligner certains de nos travers, aisé-
ment guérissables.
J'avais un ami, qui était ministre. Naturellement,
je le soutenais autant que faire se pouvait, dans la
conversation et dans les journaux où l'on me laisse
liberté d'exprimer des opinions. Je crois lui avoir
rendu des services réels, et même, avec un directeur
d'hebdomadaire, consolidé son existence ministérielle
durant plusieurs mois. Or, cet ami ministre avait une
singulière habitude: il accordait peu de lettres d'au-
dience, et entrait chez lui quiconque se présentait,
sauf les jours où il préparait un discours ou le pro-
chain conseil des ministres.
De cette habitude démocratique, désordonnée, cor-
diale, résultait que nous étionsjparfois vingt dans son
antichambre, à attendre qu'il eut fini avec les premiers
arrivés. J'avais fini par emporter un tome de Cournbt
et le lire patiemment), pour ne pas perdre des heures.
Mais les malheureux qui arrivaient sans provision de
lecture, écumaient de rage concentrée ou ouverte, et
l'huissier — ancien combattant — passait son temps
à leur conter des balivernes de tranchée, pour les aider
à prendre patience.
Premier défaut, donc : faire attendre les gens,
lorsqu'il est si aisé de prévoir ses rendez-vous
d'avance.
L'erreur est la même, d'ailleurs, lorsqu'un ministre
ou un président de n'importe quoi qui vous convoque
pour n'importe quel - jour «' dans la matinée ». Ce
terme ne veut rien dire, et aboutit à de furieux em-
bouteillages dans les antichambres officielles ou
autres. Remarquez que nous sommes un certain nom-
bre de citoyens, journalistes ou non, qui avons pour
habitude de voir les puissants de ce monde non point
pour leur demander des faveurs personnelles ou des
hochets de vanité, mais bien pour les entretenir de
questions d'intérêt général ou pour attirer leur atten-
tion sur des victimes de guerre ou des négociations
utiles avec des pays ou des citoyens étrangers. Il est
bien rare que nous nous permettions d'arriver en
retard chez un homme plus âgé ou plus « ancien en
grade » que nous. Mais nous sommes scandalisés
lorsque cette puissance nous fait attendre des demi-
heures en face de ses huissiers.
Quelques hommes politiques de la jeune génération,
comme M. Tardieu, ont le sens de la vitesse nécessaire
dans le monde moderne: ils sont rares. Souhaitons
que leurs aînés, contemporains et cadets prénnent mo-
dèle sur eux. A Berlin, à Rome, à Washington, les
ministres ne font pas poser les personnes qu'ils accep-
tent de voir.
Dans ces capitales, d'ailleurs, on ne vous accorde
pas d'audience pour dans dix, douze et quatorze
jours, comme on le fait trop souvent chez nous: on
vous voit dans les quarante-huit heures. On dirait
toujours, à Paris, que les gens en place disposent de
l'éternité pour réaliser leurs plans, et ceux qu'on leur
propose.
Autre forme de la grossiéreté, dont personne n'est
dupe, et qui est trop acclimatée à Paris:
Vous avez quelque chose à dire à un gars de votre
génération, qui occupe un emploi, qu'il croit géant,
et qui est tout relatif, de sous-directeur de n'importe
quoi, de rédacteur en chef de revue ou de journal.
Vous avez été le camarade de l'heureux gaillard à la
Sorbonne ou dans des revues de jeunes. Pour bien
vous montrer l'importance de ses fonctions, votre
ancien copain vous fait répondre d'attendre une
minute, qu'il est occupé, et il vous fait poser dix mi-
nutes, au moins. Personne ne sort de son bureau.
L'aimable occupant d'un fauteuil vous fait enfin
introduire. Il n'a rien fait de ce temps, que de dicter
trois lettres à sa sténo. Mais il croit avoir donné une
haute idée de ses pouvoirs.
Naturellement, votre premier mot, en entrant, n'est
pas pour lui manifester qu'il vient de se comporter
comme un imbécile doublé d'un snob et d'un goujat,
mais vous le pensez, et votre revanche est de vous
dire que,. demain, tandis que, paisible, vous regar-
derez les tulipes au soleil gonfler leurs coquilles jaune
et rouge, il continuera, le malheureux, à se donner
des airs d'importance dans son bureau sans air.
Or, je le répète, à New-York, à Leipzig, à Milan,
on ne fait pas attendre les gens dont le temps est au
moins aussi précieux que le vôtre. Et l'on ne se gêne
pas pour dire que les Français ont un peu trop l'habi-
tude, la manie même de croire que l'on est d'autant
plus important que l'on fait davantage poser les gens
dans son antichambre.
Les grands docteurs parisiens, les dentistes en re-
nom font trop attendre. Et quant aux avocats, célè-
bres ou non, ce sont d'ahurissants phénomènes, qui
ignorent ce que sont les heures et ont, chaque matin,
de dix à onze, chaque soir de six à huit, vingt, trente
clients, anxieux, dans leur salon. C'est le Pal-ais de
Justice qui donne ces déplorables habitudes à nos
avocats.
Mais qui s'avisera de décrire cet, antre de folie
qu'est le Palais de Justice de Paris, où les juges que
nous appointons pour régler, les différends entre
citoyens, ont à peine réformé leurs moeurs depuis le
XVIIe siècle, et où nous, modestes contribuables, som-
mes traités comme de simples voyous par ces fonc-
tionnaires ivres de leur grandeur? Qui dira les excès
d'insolence des juges de la correctionnelle? Qui fera
un tableau de la discourtoisie solennelle de ces mes-
sieurs en robe, incapables de fixer leur emploi du
temps d'avance, et qui font revenir quatre et cinq
fois le fantoche contribuable pour décider d'une
affaire de quelques centaines de francs?
Fuyons, citoyens, ces monstres d'impolitesse. N'es-
pérons pas qu'un Parlement, un Gouvernement ten-
tera jamais d'enseigner la vitesse et la courtoisie à
nos magistrats. Ils sont nos Rois, nos Maîtres. Incli-
nons-nous. Saluons-les, chapeau bas. Vais-je pas être
mis en prison, pour avoir osé dire que les petits-fils
de Bridoison abusent de l'incapacité où nous sommes,
au tribunal, de leur dire leur fait? Si je suis con-
damné, du moins, pour insulte à magistrats dans
l'exercice de leurs fonctions, vous saurez que c'est
pour avoir rempli mon devoir de journaliste et pour
avoir demandé'que ces Messieurs laissent au vestiaire,
avec les défroques d'un autre temps, l'impolitesse,
l'insolence, la hauteur vaine, qui ne sont pas de mise
entre simples citoyens libres, paraît-il, et égaux en
droits. En droits et en devoirs, peut-être aussi.
Louis THOMAS.
Georges Clemenceau
(Photo Henri Manuel.)
M. Georges Clemenceau
gravement atteint
, Le bruit a couru hier dans Paris,
à une heure trop tardive pour qu'il
soit possible d'obtenir des détails
circonstanciés, que M. Georges Cle-
menceau était gravement malade.
D'après certaines rumeurs, il au-
rait été victime d'un accident d'au-
tomobile. Selon d'autres, il aurait eu
une attaque et plusieurs de ses pror
ches auraient été appelés d'urgence à
son chevet dans sa solitaire demeure
vendéenne de Saint-Laurent-du-Jars.
La France tout entière sera émue
par cette nouvelle. La vie de l'hom-
me qui força la victoire, qui sut choi-
sir les chefs, accomplir les actes né-
cessaires, dissiper les miasmes spiri-
tuels, nous tieat au cœur et nous fai-
sons des vœux pour que le robuste
vieillard triomphe encore de cet as-,
saut.
En deitxiè::ie page: •
Notre feuilleton radiophonique
par BERTRAND 'DUPEYRAT
En troisième page:
Villégiatures d'artistes provençaux
par RENÉ-JEAN
;, .Georges Carpentier
Çet excellent comédien, qui fut un
apôtre de l'action corporative, vient de
mourir subitement.
(Lire l'article dans notre 2e paee.)
*
Après le Prix de. Rome
•: Pourquoi .la France m.
ne créerait-elle pas
un (i Pr*ix d'Athènes» ?
Une idée qui aiderait au relèvement
de notre Ecole d'Athènes
Nous rendons compte dans notre
troisième page de l'intéressante confé-
rence que M. Alex. Philadelpheus a
faite hier à la galerie Henri-Manuel
sur des questions archéologiques
Mais au cours de cette causerie l'é-
minent directeur -du Musée d'Olym-
pie qui fut l'ami et le disciple de no-
tre grand Fougères a exposé une idée
qui ne mérite pas de passer inaperçue.
— Vous êtes des Grecs, a dit encore
M. Philadelpheus. Vous êtes des Grecs
bien plus que des Latins. Malgré la
conquête de César et malgré le rayon-
nement de Rome. C'est de Grèçe que
l'art vous apporte son plus merveilleux
sortilège. Vous, avez le Prix de Rome
plus particulier aux peintres ? Pour-
quoi n'auriez-vous pas plus spéciale-
ment pour les sculpteurs le Prix d'A-
thènes?
cc Athènes, pour vos architectes, vos
sculpteurs et vos peintres, aussi serait
une révélation et un émerveillement
Et, de Grèce, viendrait une 'nnuence
salutaire, pour votre art. »
Un Prix d'Athènes ? Pourquoi pas ?
Il y a là une idée généreuse et utile,
qui mérite d'être étudiée sérieusement.
On sait quel rôle décisif eut naguère
pour la résurrection de la Grèce an-
t;que, notre Ecole d'Athènes. Milgré
le dévouement de ses maîtres actuels
on doit dire qu'elle se survit à peine.
Tandis que les archéologues améri-
cains et même les allemands regoigent
d'argent elle vit dans la pénurie. Tous
ceux qui ont visité la Grèce et plus
récemment la mission d'écrivains en-
voyée à Delphes, puis MM. Henry Bi-
dou et Max Fischer l'ont constaté.
N'y aurait-il pas dans cette idée l'o-
rigine d'une renaissance, le moyen de
corriger un état de fait qui est 'ndi-
qué de notre pays et du sentiment de
la France que professent les Athéniens
id'aujourd'hui ?
Entre nous
Pour les Pères Rabat-joie
Les pères rabat-joie qui opèrent dans
les journaux politiques, et de toutes
nuances, ne doivent pas profiter des va-
cances pour voir comment on vit dans
notre beau pays de France, sans quoi
j'aime à croire qu'ils mettraient un peu'
moins de noir dans leurs papiers et mêle-
raient à leurs sempiternelles lamenta-
tions quelques joyeuses remarques.
Il est bien entendu que tout né va
pas pour le mieux, et je me demande
en quel temps notre bon peuple s'est
déclaré complètement satisfait, et que
nous avons au point de vue national des
sujets de préoccupation, et quelle est la
nation qui n'en a pas? Mais ce n' est
pas une raison pour transformer nos jour-
naux en autant de Murs de - lamenta-
tions contre lesquels leurs lecteurs sont
invités à se frapper la tête en pleurant
et en invoquant Sion comme les Juifs
de Jérusalem.
En parcourant nos régions les plus
diverses, on constate que les Français
n'ont pas du tout l'air de se croire
malheureux. Si on me permettait une ex- j
pression vulgaire, je dirais que dans tes
villes comme à la campagne on ne s'en
fait pas. Partout, en cette saison esti-
vale. favorisée par un temps magnifi-
que, les casinos regorgent de monde et
jusque dans les plus petits trous la par-
tie va fort.
C'est immoral ? Je ne fais pas le mo- j
raliste. Je constate qu'on s'amuse et
qu'on a de l'argent. Et que les jour-
naux d'extrême-gauche ne me disent pas
que ce sont jeux de bourgeois : je pour-
rais, leur indiquer des pays où le populo
dépense sans compter.. ,
Quoi de plus facilement explicable?
On a eu des fruits à ne savoir qu' en
faire : une bénédiction. On annonce
une récolte de blé telle qu'elle suffira
à nos besoin et que nous ne serons pas
obligés de faire sortir de l'or français
pour en acheter à l'étranger.
Du vin? Il va en pleuvoir. Il y a
deux ans, il s'est vendu jusqu'à 300 fr.
l'hectolitre sur les grands marchés de
Nîmes, Montpellier" Béziers, Perpi-
gnan. A l'heure actuelle, les proprié-
taires sont obligés de le céder entre
80 et 100 francs, ceux de 80 francs
formant la grande majorité. Enfin, on
annonce d'Arcachon que la crise des
huîtres plates est passée, que les parcs
se sont reconstitués, que les marennes
seront abondantes et moins chères.
Je Q.'ajouterai pas : que voulez-vous
de plus? Non, mais j'aurais voulu faire
comprendre à quelques bons confrères
pourquoi ils n' arrivent pas à exciter leur
public comme ils le voudraient. Tenez,
en ce moment, M. Daladier, qui est le
chef du parti radical, parcourt sa cir-
conscription en faisant des discours.-
Comme il est de l'opposition, il déclare,
naturellement, que tout va mal.
Or, sa circonscription, c'est Orange
et une partie de la' plaine comtadine.
toute en jardins bénits de Dieu. La
terre y sue la richesse. Le pays éclate
de prospérité. Et lorsque M. Daladier
a fini de se lamenter, ses électeurs,
après l'avoir applaudi, courent aux
courses de chevaux, aux fêtes votives,
aux bals et aux cercles où on ne s' en-
nuie pas. Jamais la vie n'avait été dans
ce. régions aussi brillante.
Allons, comme on dit en Provence,
sans impiété, sans irrespect : « Le bon
Dieu est un brave homme. »
Jules VÉRAN.
Er. quatrième page:
CI Carnet de bord »
par GEORGES MOULY,
En cinquième page: *
e.
Sauvegardons l'existence des libraires
de métier .,
par PAUL GARCIN
Dans le sillage
de Diane de Poitiers..,
Les Veillées^de* Neuvic,
et faction généreuse
de M. Philippe H. Ohadbourn
Neuvic-sur-l'Isle, août.
Le calme, ici, et le silence sont tels,
que la nature environnante tout entière,
comme une Belle * au Bois dormant,
semble en être l'incarnation vivante.
Une campagne aux verdures si larges
et si variées, que le plus magnifique
Aubusson pâlirait auprès d'elle. Quel..
que chose d'aussi riche et d'aussi doux
à l'a fois que le Val de Loire, mais de
plus intime peut-être. Le, chemin de fer
lui-même — celui de Bordeaux à Mi-
lan — s' est écarté de la rivière sur
plusieurs kilomètres; et c'est sans doute
pourquoi l'Isle s'attarde ici avec tant
d'abandon le long de ses rives serties
de nénuphars, cependant que ses eaux.
presque comme celles d'un lac, reflè-
tent avec une incomparable clarté l'har.
monieuse façade chère jadis aux rêveriei
de Diane.
Diane de Poitiers! La mémoire de
ce nom s'attache au château-de Neuvic
tout entière. Des roses, à la terrasse,
semblent encore pour elle exhaler leur
parfum. Dans une haute et spacieuse
chambre du premier étage, ses initiales
demeurent bellement gravées au-dessus
de l'âtre; à droite et à gauche, rien n'a
bougé : le lit à colonnettes, la table de
milieu, le grand fauteuil, le clavecin,
la bibliothèque et jusqu'à cette sorte de
« bonheur du jour », tout est intact,
encore que nécessairement un peu vieilli,
comme ces œuvres complètes de Mo-
zart, reposant dans un coin, sous une
buée de poussière, dans leur robe de
cuir vert. Partout ailleurs, dans la salle
d'armes elle-même, cette présence per-
siste, uniformément respectée. Aux mu*
railles, les moindres décorations- parlent
encore d'elle. A quatre siècles et demi
d'intervalle, Diane, en : ce château
qu'elle illustra, est toujours l'objet des
soins les plus amoureux.
Il' fallait pour cela un homme ami.
des vieilles choses de France. Cet
homme intelligent et sensible s' est
trouvé en la présence de M. Philippe
H. Chadbourn, qui, il y a six ans, avec
une décision bien américaine, se ren:'
dait acquéreur du château de Neuvit.
Pour banal qu'il pût paraître, ce petit
événement signifiait quelque - dwae.
M. Ph. H. Chadbourn était jusqu'alors
'un grand voyageur; Sa vie : courir le
monde. Il y repartirait encore, si quel-
que chose ne le retenait : Neuvic. Cari
après la Californie, M. Chadbourç a
trouvé une nouvelle patrie : le Péri-
gord. Et sans doute a-t-il bien fait. Lt *
popularité et l'estime dont il jouit dam.
le pays n' en donnent-ils point la
preuve? Serait-il né au château, qu'on
ne l'aimerait pas davantage. Tout d'in-
dulgence, de franchise et de simplicité,
il est ici de toutes les cérémonies, fêtes,
voire mariages. Ne le désigna-t-on point.
certain soir, pour offrir, selon la cou-
tume. le « tourin » aux jeunes époux?
Avec la plus belle humeur, M. Chad-
bourn s'acquitte de chacune de ces pe-
tites corvées de la vie campagnarde' Il
s'incorpore ainsi sans cesse plus étroite-
ment à cette vie toute de force et de
santé, s' en amuse agréablement et donne
plus de charme à ses loisirs. Le soir,
sous les voûtes du château, son esprit
vagabonde plus à l' aise.'
Un autre, cependant a sa place, se
fût contenté de ce facile bonheur. Mau
M. Chadbourn, s'il a beaucoup voyagé,
a aussi beaucoup appris dans les livres.;
Les littératures européennes, et notam-
ment la nôtre, sont ses confidentes. Il
adore les arts, peint lui-même avee
beaucoup de personnalité et de verve,
connaît la musique, s'intéresse à tout ce
qui est idéal. Et, de la fenêtre d.
Diane, se penchant sur. le mirbir de
l'Isle et sur l'écran précieux de se's
bords, il s' est pris à aimer furieusement
ce paysage d'adoption, il a songé peu
à peu à en faire jaillir quelque chose
qui dure.
Ainsi, de jeunes peintres d' abord,
pui- des littérateurs, des journalistes
d'Amérique et de chez nous, sont de.
venus les hôtes du château de Ntuvic.
Librement. ils peuvent y travailler à leur
art. Le soir. à la veillée. l' amitié délia
cate et discrète du maître de céans con-
fronte et résume les. inspirations du jour.
De véritables joutes de' dialecnque et
de fantaisie s' engagent autour d'une ta-
ble propice, où. les préférences *de cha-
cun sont comblées. S'il se trouvait.
parmi le nombre, un chroniqueur offi-
ciel, que de conversations, que d'échan-
ges de pensée, dont le lecteur pourrait}
ensuite tirer le meilleur profit!
Cette dernière semaine, autour * de
M. Chadbourn, se trouvait ainsi réunie
la plus originale et sympathique com-
pagnie; entre autres : Mr Alex SraaU,
de la Chicago Tribune, journaliste étoa.
nant d'érudition et tout épris de culture1
latine; Mrs Polly Small, sa jeuae
femme, dont paraîtra bientôt lè premier
roman; l'honorable Mr Carpenter, pas-
teur, docteur et professeur de sociolo-,
gie, aimant les blues, les chansons nèj
gres, lisant L'Ile des Pingouins et n
buvant que de l'eau; le peintre polo
nais Langermau, qui ne quitte palet
et pinceaux que le dimanche, et jean-
Simian, le « pur » bordelais, parta
ses heures entre le bain, le pho
phe, les traductions anglaises' et 1
ditation de nouvelles « lettres oM
et familières » à la manière dt
Loup Simian. Pensez donc si iS
lées furent longues et si l' on y (
avec ferveur ! Jack London et L
Sainclair d'un côté. François MauriS
et Léon-Paul Fargue de l' aptre, en fu.
rent les héros. Vous dire combien c'était
sérieux ? Deux colonnes récemment pa;'
■ Le'NUMÉRO : CINQUINTE- CENTIÏK"^ ^if-'Rue S'amt-GeffîgïsF^- Tèlr: TrïïZcRne 92-80» It92^.84^
.TEUfar5 SEPTEMBRE 192%
Gabriel ALPHAUD
Directeur
.Une ample comédie aux cent actes divers
1. et dont la scène est l'univers.
(LA FONTAINE.)
REDACTION ADMINISTRATION
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Adressa la correspondance sans exception
à M. le directeur de « Coznoedla, a
L'Intransigeant a fait le total
des victimes de l'automobile de-
puis janvier
'436 MORTS
1.035 BLESSES
Quand usera-t-on des sanctions
nécessaires contre ceux qui trâns-.
v gressent le Code de la route ?
HOJlïZOJVS
,.
La Fra n ce9 la presse italienne
et l'avenir de la civilisation méditérranéenne
Entre la France et l'Italie serait-ce
l'embellie définitive, l'embellie pré-
sageant d'une heureuse navigation de
conserve Tous les Français qui
reviennent d'Italie sont unanimes,
quelles que soient leurs opinions, à
proclamer la prodigieuse activité de
toute la Péninsule. Une fois de plus
s'impose ce sentiment qu'il n'y a pas
d'hostilité foncière entre les deux
pays. Un génie qui vient du fond de
leur être les unit. Il s'est manifesté
malgré les alliances en igï5- II par-
lera, il agira toujours aux minutes
décisives. Et même si elles deve-
naient un jour des adversaires. l'Ita-
lie et la France ne seront jamais des
snnemies.
Seulement, on ne le répétera ja-
mais assez : l'Italie nouvelle veut
être comprise et admirée. Elle le mé-
rite. Je ne comprends pas la mes-
quine humeur de certains Français,
rageurs d'être contraints de changer
d'opinion. Heureusement, comme je
le souhaitais, les enquêtes en cours
vont sérieusement aider à cet examen
de conscience. Henry de Korab nous
montre la lande romaine en fleurs et
en fruits. Henri Béraud exprime
exactement le vœu italien que j'es-
quissai ici :
« A cela, les Italiens répondent que
nous pouvons dénigrer nos politiciens
tout à notre aise et qu'ils entendent
honorer les leurs à leur façon. qu'il y
a, dans la discipline et la hiérarchie,
des voluptés ignorées des peuples dé
générés et immoraux; que la liberté
d'opinion est un préjugé de vieillards,
tandis que l'obéissance passive et la
violence concertée sont des ivresses
d'hommes sains, jeunes et forts. Voi-
là ce qu'ils disent. Libre à vous d'en
penser ce qui vous plaît. Ils ajoutent
d'ailleurs, non sans rudesse, que peu
leur chaut la raillerie des soi-disant
Européens ; qu'ils ne demandent comp-
te ni aux Anglais de la perruque du
lord-maire, ni aux Suisses du chapeau
de Gessler, ni aux Allemands des Cl,OUS
d'Hindenburg, ni aux Belges de leur
Mannekenpiss, ni aux Français de
leurs pipes à l'effigie de Clemençeau. »
Oui, que répondre à cela ? Et l'on
est ému de constater que la presse ita-
lienne a comme nous compris l'im-
portance du moment. Elle sait que
de l'orientation qui sera donnée de-
main à la politique française dépen-
dra l'avenir de nos. relations et peut-
être l'avenir de notre civilisation. Si
bien que, d'une façon générale, dans
cette presse, toujours si. sensible et
si franche à communiquer sa désap-
probation, avec une sincérité et une
vigueur saisissantes, avec une sorte
de tremblement de joie résorbée,
s'élève l'espoir d'une collaboration
entière avec la France, collaboration
libre et fière, bien entendu.
La Stampa constate l'irréductibilité
profonde des causes de frictions entre
la France et l'Allemagne, et discerne
avec perspicacité qu'après l'évacua-
tion du Rhin, après celle de la Sarre
après le « couloir polonais », après
:1a Haute-Silésie, après. (elle ne
parle pas de l'Alsace) après tout cela
il y aura encore d'autres causes de
discorde. Car ces discordes sont inhé-
rentes au naturel germanique et
La Stampa demande avec un amou-
reux regret : « Quand donc vos yeux
s'ouvriront/ »
Le Corriere de la Sera est plus
catégorique encore. Quand donc. in-
terroge-t-il, la France comprendra-t-
elle qu'entre l'Allemagne ennemie et
l'Angleterre peu sûre il y aurait tout
intérêt à cultiver la loyale amitié ita-
lienne. Ceci, ajoute-t-il, ne ferait que
faciliter « la reprise éventuelle de
rapports plus amicaux avec l'Angle-
terre et même avec l'Allemagne ».
Et c'est très vrai. -
Mais, ajoute notre confrère ita-
lien, si la France doit venir vers nous,
elle doit le faire après mûre réflexion
et non ab irato, après avoir « déposé
les préjugés antiitaliens et après avoir
apprécié dans toute leur valeur
l'amitié de notre pays, la loyauté de
la continuité d'une politique qui n'est
plus sujette aux caprices parlementai-
res et aux hystérismes du corps élec-
toral ».
L'Italie, dit encore notre confrère,
ne prétend nullement « spéculer sur
le différend franco-britannique ni
s'insinuer subrepticement dans les
mailles d'une idylle brisée ». Elle
veut être considérée « comme un
élément vivant et stable de force et
dléquilibre ».
On ne saurait parler plus nette-
ment, plus simplement, plus noble-
ment.
Et si l'on veut trouver le sens com-
plet de ces déclarations, ou plus exac-
tement les causes lointaines de cet
état d'esprit (que manifestent d'au-
tres journaux d'ordinaire aussi réti-
cents que le .Tevere), il suffira de
savoir que l'amiral von Tirpitz (dont
l'influence reste considérable et cor-
respond en tout cas à toute une caté-
gorie de dirigeants allemands) vient
d'écrire dans la Deutsche Allege-
meine Zeitung un article où il pousse
à nouveau le grand appel à l'union
germanique. Et voici comment parle
ce serviteur du « vieux Dieu » :
J'ai considéré - d'emblée que la voie
dans laquelle on s'engageait à Lo-
carno. vers un rapprochement étroit
^vec la France, ne devait mener à
rien et j'ai fait tout mon possible pour
empêcher qu'on s'engageât dans cette
voie.
A cette époque, la psychose de
guerre des Anglais contre nous n'était
pas encore étei-.te, mais déjà au temps
de Baldwin elle s'était considérable-
ment «méni cc et 'nuis elle a encore
diminué. Nous devrions chercher au-
jourd'hui à entretenir de bons rapports
avec les puissances anglo-saxonnes.
Mais la première condition préalable
est aue nous avoue de la dienité, une
attitude calme, ce qui n'a pas toujours
été le cas au cours des dix dernières
années, et cela à notre détriment.
Il est bien évident que l'Allemagne
est obligée, depuis la fin de la guerre,
de renoncer à toute politique navale
au point de vue mondial. Ce qui reste
à l'Allemagne à ce point de vue ne
peut manifestement pas éveiller une
jalousie sérieuse de l'Angleterre envers
l'Allemagne. Par contre, nous avons
a- - l'Angleterre, et davantage encore
avec l'Amérique, tant de relations
culturelles et tant d'autres points com-
muns d'un autre ordre que de bons rap-
ports entre ces trois Etats germaniques
ne peuvent qu'être utiles aux trois puis-
sances intéressées.
Nous sommes avertis. De pareils
traits en disent long sur la persistan-
ce, par delà systèmes et essais gene-
vois, des fatalités ethniques. L'Euro-
pe se regroupe. Chacun des peuples
méditerranéens, de cette civilisation
de douceur, de mesure et de liberté,
ne comptera jamais d'amitiés réelles,
sauf les amitiés des nations de son
sang ou de sa culture. ',
Gabriel BOISSY.
Derrière le rideau
De tout un peu
INSINUATION CHINOISE.
On en a fait des gorges chaudes à Ge-
nève. Bien entendu hors séances, dans
les petits comités et au cours des innom-
brables déjeuners et dîners que les in-
nombrables délégués, secrétaires, chefs de
cabinet peuvent s'offrir grâce au supplé-
ment d'émoluments que leur valent ces
bienheureuses sessions. De quoi ? De
l'ironique, de la malicieuse intervention,
après ce discours de M. Mac Donald qvi
causa une déception générale, du délé-
gué de la Chine, M. Chao Chu Wu.
Donc M. Chao Chu Wu, doucement,
discrètement, à petits pas feutrés, a fait
observer qu'il était tout à fait de l'avis
de M. Mac Donald lorsque le Premier
anglais exprimait la nécessité d'établir
« la justice et l'équité dans les relations
entre les peuples, quel que soit l'hé-
misphère auquel ils appartiennent. »
Quel plus sur moyen suggéra doucement
M. Chao Chu Wu pour développer cette
action Pacificatrice que « d'appliquer l'ar-
ticle 19 <(u pacte » ? On sait que cet arti-
clé permet à ta' Société des Nations de
remettre en cause les traités anciens deve-
nus par la transformation des pays et des
situations absolument inapplicables.
Vous apercevez d'ici la tête que firent
les Anglais de vieille roche qui étaient
là en songeant, à ce moment, aux « capi-
tulations » chinoises ? D'ailleurs M. Chao
Chu Wu retourna le fer dans la plaie,
ajoutant qu'il n'y avait pas de moyen plus
sûr « pour démontrer les efforts de la So-
ciété des Nations. » Notre cauteleux bon-
homme paracheva son « effet » quand il
lança — oh 1 façon de parler 1 — quand il
susurra cette formule magnifique: « La So-
ciété des Nations justifiera son existence et
renforcera son pouvoir, non pas parce qu'elle
est une Société des Nations fortes, mais
patee qu'elle est une Société des Nations
jvstes. »
Il y eut, alors, un mouvement particu-
lièrement vif du côté de la délégation
égyptienne.
TRAVAILLISTES NATIONALISTES.
Rien de plus amusant — ai l'on peut
dire — que de feuilleter ces jours-ci les
grands journaux illustrés d'A ngleterre. Ils
abondent en photographies et celles-ci,
mieux que tout compte rendu de presse,
nous éclairent svr l'importance, sur la
chàleur et.parfois sur l'enthousiasme quasi
déïirant qui a accueilli à son arrivée à
Londres, malgré l'heure matinale et la
froideur du tempérament, M. Snowden.
., Ce ne sont que têtes découvertes, que
bouches acclamant, que larges sourires;
enfin, tous les signes d'une popularité
qui atteste que sous toutes les étiquettes
l'orgueil nationaliste de l'avoir emporté
reste le sentiment le plus profond de tou-
rtes les populations.
f AU PARADIS SOVIÉTIQUE.
Notre confrère Le Matin a publié les
déclarations d'un grand industriel améri-
cain. M. Jesse Wright, qui faisait partie
du récent voyage d'enquête au pays rouge.
Elles sont édifiantes :
« Nous nous sommes trouvés en face de
la misère. misère écrite sur tout le
pays. Nous n'aurions jamais cru que des
êtres humains pussent vivre dans pareille
saleté et pareille pourriture. Chacun de
vos pas est épié. le train de Moscou
était dégoûtant. le mécanicien en gue-
nilles. tout le monde en Russie est misé-
rablement habillé. les gens ont darts le
regard une obsession; ils ont aussi comme
une crainte les uns des autres. dans au-
cun pays du monde je n'ai vu autant de
soldats en uniforme. »
i
ET LA FRANCE, MONSIEUR ?
Après sa grande interview donnée à
l'A gence Reuter, M. Sn,>wden a complété
ses impressions pour des journalistes amis :
— Vous me voyez bien heureux, dit-il,
car je reviens après avoir remporté une
grande victoire pour mon pays.
— Après le succès anglais que tout le
monde constate, quel est le résultat que
vous mettez au premier plan ?
— La restauration de la souveraineté
politique et économique de l'Allemagne.
qui sort de La Haye justifiée grandement
tant au point de vue financier qu'écono-
mique.
, — Et la France ?.
M. Snowden réfléchit un moment; puis,
sans un mot, il fit un geste vague, fai-
sant claquer son pouce avec 1 index.
Après M. Henry de Jouvenel,
M. Anatole de Monzie veut quitter le Sé-
nat pour aller à la Chambre des députés
où il aura davantage de chance d'être mi-
nistrable. M. Anatole de Monzie, séna-
teur, — comme M. Henry de Jouvenel —
estime sans doute, que la Haute-Assem-
blée manque de mouvement. de vie
parlementaires.
Le 22 octobre, M.. de Monzie soumettra
sa candidature au Congrès républicain
qui se tiendra à Figeac, sous la présidence
de M. Loubet, sénateur.
.- -- AGORA.
Le château de N euvio
Dans ce château où flotte le souvenir de Diane de Poitiers un Américain, ami de la France, vient d'instituer}
ainsi que le conte Plus loin, un de , nos collabora teitrs, M. M.-/. Champel de s rendez-vous intellectuels et artistiques
du Plus vif intérêt.
opmjom
0
Deviendrions-nous dliscour ftois 1
0
Ceci est un examen de conscience, et l'on n'ignore
pas que le principe de ces revues et rappels de fautes
et défauts plus ou moins connus, est de n'être pas
agréable à la personne qui les fait. Plaisants ou non,
ces retours sur soi-même sont utiles, lorsqu'ils se tra-
duisent en décisions et actes, et pas simplement en
couplets de revues.
Or, que nous le voulions ou non, nous ne sommes
plus très polis, en France, et nous le voyons bien
lorsque nous nous comparons à certains étrangers,
qui ont d'autres mœurs et habitudes que nous.
Je ne dirai pas tous nos défauts, dans ce genre. Je
me bornerai à souligner certains de nos travers, aisé-
ment guérissables.
J'avais un ami, qui était ministre. Naturellement,
je le soutenais autant que faire se pouvait, dans la
conversation et dans les journaux où l'on me laisse
liberté d'exprimer des opinions. Je crois lui avoir
rendu des services réels, et même, avec un directeur
d'hebdomadaire, consolidé son existence ministérielle
durant plusieurs mois. Or, cet ami ministre avait une
singulière habitude: il accordait peu de lettres d'au-
dience, et entrait chez lui quiconque se présentait,
sauf les jours où il préparait un discours ou le pro-
chain conseil des ministres.
De cette habitude démocratique, désordonnée, cor-
diale, résultait que nous étionsjparfois vingt dans son
antichambre, à attendre qu'il eut fini avec les premiers
arrivés. J'avais fini par emporter un tome de Cournbt
et le lire patiemment), pour ne pas perdre des heures.
Mais les malheureux qui arrivaient sans provision de
lecture, écumaient de rage concentrée ou ouverte, et
l'huissier — ancien combattant — passait son temps
à leur conter des balivernes de tranchée, pour les aider
à prendre patience.
Premier défaut, donc : faire attendre les gens,
lorsqu'il est si aisé de prévoir ses rendez-vous
d'avance.
L'erreur est la même, d'ailleurs, lorsqu'un ministre
ou un président de n'importe quoi qui vous convoque
pour n'importe quel - jour «' dans la matinée ». Ce
terme ne veut rien dire, et aboutit à de furieux em-
bouteillages dans les antichambres officielles ou
autres. Remarquez que nous sommes un certain nom-
bre de citoyens, journalistes ou non, qui avons pour
habitude de voir les puissants de ce monde non point
pour leur demander des faveurs personnelles ou des
hochets de vanité, mais bien pour les entretenir de
questions d'intérêt général ou pour attirer leur atten-
tion sur des victimes de guerre ou des négociations
utiles avec des pays ou des citoyens étrangers. Il est
bien rare que nous nous permettions d'arriver en
retard chez un homme plus âgé ou plus « ancien en
grade » que nous. Mais nous sommes scandalisés
lorsque cette puissance nous fait attendre des demi-
heures en face de ses huissiers.
Quelques hommes politiques de la jeune génération,
comme M. Tardieu, ont le sens de la vitesse nécessaire
dans le monde moderne: ils sont rares. Souhaitons
que leurs aînés, contemporains et cadets prénnent mo-
dèle sur eux. A Berlin, à Rome, à Washington, les
ministres ne font pas poser les personnes qu'ils accep-
tent de voir.
Dans ces capitales, d'ailleurs, on ne vous accorde
pas d'audience pour dans dix, douze et quatorze
jours, comme on le fait trop souvent chez nous: on
vous voit dans les quarante-huit heures. On dirait
toujours, à Paris, que les gens en place disposent de
l'éternité pour réaliser leurs plans, et ceux qu'on leur
propose.
Autre forme de la grossiéreté, dont personne n'est
dupe, et qui est trop acclimatée à Paris:
Vous avez quelque chose à dire à un gars de votre
génération, qui occupe un emploi, qu'il croit géant,
et qui est tout relatif, de sous-directeur de n'importe
quoi, de rédacteur en chef de revue ou de journal.
Vous avez été le camarade de l'heureux gaillard à la
Sorbonne ou dans des revues de jeunes. Pour bien
vous montrer l'importance de ses fonctions, votre
ancien copain vous fait répondre d'attendre une
minute, qu'il est occupé, et il vous fait poser dix mi-
nutes, au moins. Personne ne sort de son bureau.
L'aimable occupant d'un fauteuil vous fait enfin
introduire. Il n'a rien fait de ce temps, que de dicter
trois lettres à sa sténo. Mais il croit avoir donné une
haute idée de ses pouvoirs.
Naturellement, votre premier mot, en entrant, n'est
pas pour lui manifester qu'il vient de se comporter
comme un imbécile doublé d'un snob et d'un goujat,
mais vous le pensez, et votre revanche est de vous
dire que,. demain, tandis que, paisible, vous regar-
derez les tulipes au soleil gonfler leurs coquilles jaune
et rouge, il continuera, le malheureux, à se donner
des airs d'importance dans son bureau sans air.
Or, je le répète, à New-York, à Leipzig, à Milan,
on ne fait pas attendre les gens dont le temps est au
moins aussi précieux que le vôtre. Et l'on ne se gêne
pas pour dire que les Français ont un peu trop l'habi-
tude, la manie même de croire que l'on est d'autant
plus important que l'on fait davantage poser les gens
dans son antichambre.
Les grands docteurs parisiens, les dentistes en re-
nom font trop attendre. Et quant aux avocats, célè-
bres ou non, ce sont d'ahurissants phénomènes, qui
ignorent ce que sont les heures et ont, chaque matin,
de dix à onze, chaque soir de six à huit, vingt, trente
clients, anxieux, dans leur salon. C'est le Pal-ais de
Justice qui donne ces déplorables habitudes à nos
avocats.
Mais qui s'avisera de décrire cet, antre de folie
qu'est le Palais de Justice de Paris, où les juges que
nous appointons pour régler, les différends entre
citoyens, ont à peine réformé leurs moeurs depuis le
XVIIe siècle, et où nous, modestes contribuables, som-
mes traités comme de simples voyous par ces fonc-
tionnaires ivres de leur grandeur? Qui dira les excès
d'insolence des juges de la correctionnelle? Qui fera
un tableau de la discourtoisie solennelle de ces mes-
sieurs en robe, incapables de fixer leur emploi du
temps d'avance, et qui font revenir quatre et cinq
fois le fantoche contribuable pour décider d'une
affaire de quelques centaines de francs?
Fuyons, citoyens, ces monstres d'impolitesse. N'es-
pérons pas qu'un Parlement, un Gouvernement ten-
tera jamais d'enseigner la vitesse et la courtoisie à
nos magistrats. Ils sont nos Rois, nos Maîtres. Incli-
nons-nous. Saluons-les, chapeau bas. Vais-je pas être
mis en prison, pour avoir osé dire que les petits-fils
de Bridoison abusent de l'incapacité où nous sommes,
au tribunal, de leur dire leur fait? Si je suis con-
damné, du moins, pour insulte à magistrats dans
l'exercice de leurs fonctions, vous saurez que c'est
pour avoir rempli mon devoir de journaliste et pour
avoir demandé'que ces Messieurs laissent au vestiaire,
avec les défroques d'un autre temps, l'impolitesse,
l'insolence, la hauteur vaine, qui ne sont pas de mise
entre simples citoyens libres, paraît-il, et égaux en
droits. En droits et en devoirs, peut-être aussi.
Louis THOMAS.
Georges Clemenceau
(Photo Henri Manuel.)
M. Georges Clemenceau
gravement atteint
, Le bruit a couru hier dans Paris,
à une heure trop tardive pour qu'il
soit possible d'obtenir des détails
circonstanciés, que M. Georges Cle-
menceau était gravement malade.
D'après certaines rumeurs, il au-
rait été victime d'un accident d'au-
tomobile. Selon d'autres, il aurait eu
une attaque et plusieurs de ses pror
ches auraient été appelés d'urgence à
son chevet dans sa solitaire demeure
vendéenne de Saint-Laurent-du-Jars.
La France tout entière sera émue
par cette nouvelle. La vie de l'hom-
me qui força la victoire, qui sut choi-
sir les chefs, accomplir les actes né-
cessaires, dissiper les miasmes spiri-
tuels, nous tieat au cœur et nous fai-
sons des vœux pour que le robuste
vieillard triomphe encore de cet as-,
saut.
En deitxiè::ie page: •
Notre feuilleton radiophonique
par BERTRAND 'DUPEYRAT
En troisième page:
Villégiatures d'artistes provençaux
par RENÉ-JEAN
;, .Georges Carpentier
Çet excellent comédien, qui fut un
apôtre de l'action corporative, vient de
mourir subitement.
(Lire l'article dans notre 2e paee.)
*
Après le Prix de. Rome
•: Pourquoi .la France m.
ne créerait-elle pas
un (i Pr*ix d'Athènes» ?
Une idée qui aiderait au relèvement
de notre Ecole d'Athènes
Nous rendons compte dans notre
troisième page de l'intéressante confé-
rence que M. Alex. Philadelpheus a
faite hier à la galerie Henri-Manuel
sur des questions archéologiques
Mais au cours de cette causerie l'é-
minent directeur -du Musée d'Olym-
pie qui fut l'ami et le disciple de no-
tre grand Fougères a exposé une idée
qui ne mérite pas de passer inaperçue.
— Vous êtes des Grecs, a dit encore
M. Philadelpheus. Vous êtes des Grecs
bien plus que des Latins. Malgré la
conquête de César et malgré le rayon-
nement de Rome. C'est de Grèçe que
l'art vous apporte son plus merveilleux
sortilège. Vous, avez le Prix de Rome
plus particulier aux peintres ? Pour-
quoi n'auriez-vous pas plus spéciale-
ment pour les sculpteurs le Prix d'A-
thènes?
cc Athènes, pour vos architectes, vos
sculpteurs et vos peintres, aussi serait
une révélation et un émerveillement
Et, de Grèce, viendrait une 'nnuence
salutaire, pour votre art. »
Un Prix d'Athènes ? Pourquoi pas ?
Il y a là une idée généreuse et utile,
qui mérite d'être étudiée sérieusement.
On sait quel rôle décisif eut naguère
pour la résurrection de la Grèce an-
t;que, notre Ecole d'Athènes. Milgré
le dévouement de ses maîtres actuels
on doit dire qu'elle se survit à peine.
Tandis que les archéologues améri-
cains et même les allemands regoigent
d'argent elle vit dans la pénurie. Tous
ceux qui ont visité la Grèce et plus
récemment la mission d'écrivains en-
voyée à Delphes, puis MM. Henry Bi-
dou et Max Fischer l'ont constaté.
N'y aurait-il pas dans cette idée l'o-
rigine d'une renaissance, le moyen de
corriger un état de fait qui est 'ndi-
qué de notre pays et du sentiment de
la France que professent les Athéniens
id'aujourd'hui ?
Entre nous
Pour les Pères Rabat-joie
Les pères rabat-joie qui opèrent dans
les journaux politiques, et de toutes
nuances, ne doivent pas profiter des va-
cances pour voir comment on vit dans
notre beau pays de France, sans quoi
j'aime à croire qu'ils mettraient un peu'
moins de noir dans leurs papiers et mêle-
raient à leurs sempiternelles lamenta-
tions quelques joyeuses remarques.
Il est bien entendu que tout né va
pas pour le mieux, et je me demande
en quel temps notre bon peuple s'est
déclaré complètement satisfait, et que
nous avons au point de vue national des
sujets de préoccupation, et quelle est la
nation qui n'en a pas? Mais ce n' est
pas une raison pour transformer nos jour-
naux en autant de Murs de - lamenta-
tions contre lesquels leurs lecteurs sont
invités à se frapper la tête en pleurant
et en invoquant Sion comme les Juifs
de Jérusalem.
En parcourant nos régions les plus
diverses, on constate que les Français
n'ont pas du tout l'air de se croire
malheureux. Si on me permettait une ex- j
pression vulgaire, je dirais que dans tes
villes comme à la campagne on ne s'en
fait pas. Partout, en cette saison esti-
vale. favorisée par un temps magnifi-
que, les casinos regorgent de monde et
jusque dans les plus petits trous la par-
tie va fort.
C'est immoral ? Je ne fais pas le mo- j
raliste. Je constate qu'on s'amuse et
qu'on a de l'argent. Et que les jour-
naux d'extrême-gauche ne me disent pas
que ce sont jeux de bourgeois : je pour-
rais, leur indiquer des pays où le populo
dépense sans compter.. ,
Quoi de plus facilement explicable?
On a eu des fruits à ne savoir qu' en
faire : une bénédiction. On annonce
une récolte de blé telle qu'elle suffira
à nos besoin et que nous ne serons pas
obligés de faire sortir de l'or français
pour en acheter à l'étranger.
Du vin? Il va en pleuvoir. Il y a
deux ans, il s'est vendu jusqu'à 300 fr.
l'hectolitre sur les grands marchés de
Nîmes, Montpellier" Béziers, Perpi-
gnan. A l'heure actuelle, les proprié-
taires sont obligés de le céder entre
80 et 100 francs, ceux de 80 francs
formant la grande majorité. Enfin, on
annonce d'Arcachon que la crise des
huîtres plates est passée, que les parcs
se sont reconstitués, que les marennes
seront abondantes et moins chères.
Je Q.'ajouterai pas : que voulez-vous
de plus? Non, mais j'aurais voulu faire
comprendre à quelques bons confrères
pourquoi ils n' arrivent pas à exciter leur
public comme ils le voudraient. Tenez,
en ce moment, M. Daladier, qui est le
chef du parti radical, parcourt sa cir-
conscription en faisant des discours.-
Comme il est de l'opposition, il déclare,
naturellement, que tout va mal.
Or, sa circonscription, c'est Orange
et une partie de la' plaine comtadine.
toute en jardins bénits de Dieu. La
terre y sue la richesse. Le pays éclate
de prospérité. Et lorsque M. Daladier
a fini de se lamenter, ses électeurs,
après l'avoir applaudi, courent aux
courses de chevaux, aux fêtes votives,
aux bals et aux cercles où on ne s' en-
nuie pas. Jamais la vie n'avait été dans
ce. régions aussi brillante.
Allons, comme on dit en Provence,
sans impiété, sans irrespect : « Le bon
Dieu est un brave homme. »
Jules VÉRAN.
Er. quatrième page:
CI Carnet de bord »
par GEORGES MOULY,
En cinquième page: *
e.
Sauvegardons l'existence des libraires
de métier .,
par PAUL GARCIN
Dans le sillage
de Diane de Poitiers..,
Les Veillées^de* Neuvic,
et faction généreuse
de M. Philippe H. Ohadbourn
Neuvic-sur-l'Isle, août.
Le calme, ici, et le silence sont tels,
que la nature environnante tout entière,
comme une Belle * au Bois dormant,
semble en être l'incarnation vivante.
Une campagne aux verdures si larges
et si variées, que le plus magnifique
Aubusson pâlirait auprès d'elle. Quel..
que chose d'aussi riche et d'aussi doux
à l'a fois que le Val de Loire, mais de
plus intime peut-être. Le, chemin de fer
lui-même — celui de Bordeaux à Mi-
lan — s' est écarté de la rivière sur
plusieurs kilomètres; et c'est sans doute
pourquoi l'Isle s'attarde ici avec tant
d'abandon le long de ses rives serties
de nénuphars, cependant que ses eaux.
presque comme celles d'un lac, reflè-
tent avec une incomparable clarté l'har.
monieuse façade chère jadis aux rêveriei
de Diane.
Diane de Poitiers! La mémoire de
ce nom s'attache au château-de Neuvic
tout entière. Des roses, à la terrasse,
semblent encore pour elle exhaler leur
parfum. Dans une haute et spacieuse
chambre du premier étage, ses initiales
demeurent bellement gravées au-dessus
de l'âtre; à droite et à gauche, rien n'a
bougé : le lit à colonnettes, la table de
milieu, le grand fauteuil, le clavecin,
la bibliothèque et jusqu'à cette sorte de
« bonheur du jour », tout est intact,
encore que nécessairement un peu vieilli,
comme ces œuvres complètes de Mo-
zart, reposant dans un coin, sous une
buée de poussière, dans leur robe de
cuir vert. Partout ailleurs, dans la salle
d'armes elle-même, cette présence per-
siste, uniformément respectée. Aux mu*
railles, les moindres décorations- parlent
encore d'elle. A quatre siècles et demi
d'intervalle, Diane, en : ce château
qu'elle illustra, est toujours l'objet des
soins les plus amoureux.
Il' fallait pour cela un homme ami.
des vieilles choses de France. Cet
homme intelligent et sensible s' est
trouvé en la présence de M. Philippe
H. Chadbourn, qui, il y a six ans, avec
une décision bien américaine, se ren:'
dait acquéreur du château de Neuvit.
Pour banal qu'il pût paraître, ce petit
événement signifiait quelque - dwae.
M. Ph. H. Chadbourn était jusqu'alors
'un grand voyageur; Sa vie : courir le
monde. Il y repartirait encore, si quel-
que chose ne le retenait : Neuvic. Cari
après la Californie, M. Chadbourç a
trouvé une nouvelle patrie : le Péri-
gord. Et sans doute a-t-il bien fait. Lt *
popularité et l'estime dont il jouit dam.
le pays n' en donnent-ils point la
preuve? Serait-il né au château, qu'on
ne l'aimerait pas davantage. Tout d'in-
dulgence, de franchise et de simplicité,
il est ici de toutes les cérémonies, fêtes,
voire mariages. Ne le désigna-t-on point.
certain soir, pour offrir, selon la cou-
tume. le « tourin » aux jeunes époux?
Avec la plus belle humeur, M. Chad-
bourn s'acquitte de chacune de ces pe-
tites corvées de la vie campagnarde' Il
s'incorpore ainsi sans cesse plus étroite-
ment à cette vie toute de force et de
santé, s' en amuse agréablement et donne
plus de charme à ses loisirs. Le soir,
sous les voûtes du château, son esprit
vagabonde plus à l' aise.'
Un autre, cependant a sa place, se
fût contenté de ce facile bonheur. Mau
M. Chadbourn, s'il a beaucoup voyagé,
a aussi beaucoup appris dans les livres.;
Les littératures européennes, et notam-
ment la nôtre, sont ses confidentes. Il
adore les arts, peint lui-même avee
beaucoup de personnalité et de verve,
connaît la musique, s'intéresse à tout ce
qui est idéal. Et, de la fenêtre d.
Diane, se penchant sur. le mirbir de
l'Isle et sur l'écran précieux de se's
bords, il s' est pris à aimer furieusement
ce paysage d'adoption, il a songé peu
à peu à en faire jaillir quelque chose
qui dure.
Ainsi, de jeunes peintres d' abord,
pui- des littérateurs, des journalistes
d'Amérique et de chez nous, sont de.
venus les hôtes du château de Ntuvic.
Librement. ils peuvent y travailler à leur
art. Le soir. à la veillée. l' amitié délia
cate et discrète du maître de céans con-
fronte et résume les. inspirations du jour.
De véritables joutes de' dialecnque et
de fantaisie s' engagent autour d'une ta-
ble propice, où. les préférences *de cha-
cun sont comblées. S'il se trouvait.
parmi le nombre, un chroniqueur offi-
ciel, que de conversations, que d'échan-
ges de pensée, dont le lecteur pourrait}
ensuite tirer le meilleur profit!
Cette dernière semaine, autour * de
M. Chadbourn, se trouvait ainsi réunie
la plus originale et sympathique com-
pagnie; entre autres : Mr Alex SraaU,
de la Chicago Tribune, journaliste étoa.
nant d'érudition et tout épris de culture1
latine; Mrs Polly Small, sa jeuae
femme, dont paraîtra bientôt lè premier
roman; l'honorable Mr Carpenter, pas-
teur, docteur et professeur de sociolo-,
gie, aimant les blues, les chansons nèj
gres, lisant L'Ile des Pingouins et n
buvant que de l'eau; le peintre polo
nais Langermau, qui ne quitte palet
et pinceaux que le dimanche, et jean-
Simian, le « pur » bordelais, parta
ses heures entre le bain, le pho
phe, les traductions anglaises' et 1
ditation de nouvelles « lettres oM
et familières » à la manière dt
Loup Simian. Pensez donc si iS
lées furent longues et si l' on y (
avec ferveur ! Jack London et L
Sainclair d'un côté. François MauriS
et Léon-Paul Fargue de l' aptre, en fu.
rent les héros. Vous dire combien c'était
sérieux ? Deux colonnes récemment pa;'
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