Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1921-01-07
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 07 janvier 1921 07 janvier 1921
Description : 1921/01/07 (A15,N2944). 1921/01/07 (A15,N2944).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
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Date de mise en ligne : 25/05/2015
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BAUDELAIRE
Cette notice de M. Henry Bataille sur Baude-
laire sera lue à la matinée poétique de la Comé-
die-Frallçaise, demain, samedi, par M. Silvain.
M. de Max dira L'Horloge, Recueillement, et
JRevereibilité, de Baudelaire.
Nous savons bien, nous, les poètes,
que Baudelaire est le sommet de la poé-
sie au dix-neuvième siècle (le commet et
la somme), mais le public le sait moins.
Baudelaire a contre lui la légende de
blasphémateur et d'introducteur de la
névrose dans les sphères olympiennes du
Parnasse. Des critiques comme Brune-
tière se sont déshonorés en le traitant
de corrupteur. Il a contre lui les appré-
ciations de ses contemporains qui, même
en le louant, n'ont pas pénétré la qualité
de son génie. La lourde, copieuse et inin-
telligente préface dont Théophile Gau-
tier a accablé les Fleurs du Mal en est
le plus triste témoignage! Il a contre lui
ïe mot populaire que lui décocha Hugo :
« Vous avez créé, monsieur, un frisson
nouveau », et qui réduit cette poésie mi-
chel-angesque, pure, terrible, vaste
comme aucune ne l'avait été jusque là,
au frisson de Petite-secousse. Il a contre
lui, disons-le aussi, le titre de : « Fleurs
du mal », qui est un titre faux, fâcheu-
sement anecdotique et qui particularise
à 1 excès l'universalité de son essor. En
Charles BAUDELAIRE
quoi Baudelaire s'est humilié jusqu'à
consentir lui-même à sa propre légende :
sans doute comprenait-il tout ce que le
livre allait heurter de conventionnel et
d'établi, et s'cst-il résigné à lui donner
une étiquette orgueilleuse ae damnation
-
qui devait, par la suite, lui retirer, aux
yeux de la foule, son caractère général
et éternel.
Hélas! Il subsiste encore des préven-
tions contre Baudelaire. Est-ce croyable?
Mais il sont innombrables ceux qui sa-
vent pourquoi ce livre domine tous les
autres, et les absorbe. Pourquoi? Parce
qu'il a ouvert les portes de la vie. Parce
que Baudelaire a épousé les contours de
la realité, puisé son inspiration, son art,
dans les sources authentiques de l'âme
humaine. Visionnaire, rien ne lui a
échappé de ce qui était réel. Il a vu toute
la nature, mais il en a fait un symbole.
La poésie lyrique ne vivait que de thè-
mes conventionnels, même aux moments
de sa plus glorieuse réussite. Pourquoi
encore? Parce que son vers est une cho-
se unique, qui atteint le plus haut lyris-
me, sans le secours d'aucun procédé. Le
vers de Baudelaire se maintient là-haut,
en planant, par le moyen de ses propres
ailes étendues, comme un aigle. Aucun
mouvement artificiel. C'est le grand ly-
risme immobile! Il n'est pas de poète
qui ait fait contenir autant d'infini en
aussi peu de mots ! C'est la concentration
même des énergies sublimes, un com-
primé d'intelligence. Ce livre est sem-
blable, en poids et en radio-activité, à ces
parcelles de métaux qui renouvellent in-
cessamment leurs décharges, sans jamais
rien perdre de leur énergie et de leur
puissance. Chaque vers de Baudelaire
peut presque s'isoler des autres, il ne
perd rien de sa beauté ; il forme presque
un tout, un petit univers : on dirait qu'il
est a lui-même son principe et sa foi.
Mais. mais. nous ne sommes pas ici
pour faire de l'analyse ni surtout une
conférence! Bornons-nous a la notice
qu'on sollicite de nous. Pardonnez seule-
ment à iun humble poète de la terminer
par un point d'exclamation admirative,
dont nous ne pouvons, nous autres, nous
empêcher de faire suivre le nom magique
de celui que Catulle Mendès appelait,
possessivement, « Notre cher Baudelai-
re au grand cœur douloureux ». La foule
ne le connaît pas à fond. C'est une amè-
re vérité!. Aussi ferai-je, en termi-
nant, de la propagande poétique. mais
om. en disant ce que d'aucuns ne ju-
geront point puéril :
Mesdames, messieurs,
Si, dans cette salle, il est par hasard
un auditeur qui ne possède pas Les
Fleurs du Mal, un simple, un être qui ait
souffert, vécu, en un mot, qui n'ait pas
porté son âme en vain — qu'il coure en
sortant d'ici, chez le libraire voisin ache-
ter le livre unique, le livre essentiel! Il
y découvrira un remède de beauté à tous
les maux de l'âme. Ce livre, qui fait
face aux quatre vents de la douleur! Les
catholiques assurent qu'ils trouvent tout,
c'est-à-dire l'aliment suprême, dans
l'Imitation. Pour les esprits frappés du
don de sentir, de souffrir, et d'aspirer
au divin, il y a un miracle inépuisable de
cette sorte, dans la manne providentielle
que nous a laissée Baudelaire. On a cru
naguère que ce novateur était exception-
nel, morbide. La vérité re remet à son
plan. Il est universel, il est humain. Ce-
lui qui a écrit :
Hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère.
pourrait porter le titre de philanthrope.
Rendez lui l'amour et la pitié qu'il éprou-
vait pour lui. C'est qu'entre la public et
l'auteur, du plus humble au plus grand,
il existe un échange bien émouvant de
sincérité, de larmes et de tendresse!
Quand nous donnons des pièces de théâ-
tre, c'est nous qui allons à vous, à votre
peine, à votre angoisse, à vos solitudes,
à votre passion. On dirait que c'est nous
qui vous pressons sur notre cœur.
Quand nous donnons des livres de poè-
mes, c'est vous qui nous pressez sur vo-
tre cœur !
Henry BATAILLE.
A PROPOS DE LA WALKYRIE
La mise en scène
des œuvres
de Richard Wagner
.On a- 'or* apprécia, lors de la reprise de la
Willkyrie, la mise en. scène de cet ouvrage.
Cette mise en scène, réglée par M. Merle Fo-
rest, reste tout à fait conforme à la tradition
wagnéJ'Ïoe.nne. On a plaisir toutefois à constater
que, tout en respectant les indications du maître
de Bayreuth, le metteur en scène a tenu compte
des progrès de la technique théâtrale.
Je veux parler du 3e acte de la Walkyrie. La
partition porte que le ciel doit être traversé de
nuées orageuses que parcourent par intermiHen-
ce les Walkyries chevauchant leurs coursiers
ailés.
Autrefois, on avait recours à des bandes de
toiles peintes qui s'enrouaient sur des cylindres
a la manière de ces dioramas qu'on admirait
si fort a la fin du siècle dernier.
Quant aux coursiers ailés, c'étaient de pe-
tits chevaux de bois que l'on tarait par un fil.
Cette mise en scène était un peu simpliste, mais
suffisait jadis.
Aujourd'hui le spectateur est devenu plus
exigeant. On é,ut recours, l'autre soir, à de nou-
Veau.x appareils de projection, inventés récem-
rnellt en Amérique et que M. Rouché a Tntro-
diiit ts i-mmédiatement dans son théâtre.
y est à l'aide de ces projecteurs que. sont pro-
duitsles flots du torrent de la Légende de
Saint-Christophe. La chevauchée des Walkyri-es
a travers le ciel nuageux produisit un effet beaun
coup plus artistique et l'illusion était presque
cornplète:
Il serait bon qu'on modernisât également l'en-
trée de Pricka et de son char. Malgré les coups
d'aiguillon dont Mlle Lapeyrette harcelait les bé-
Jiers chacun se rendit parfaitement compte que
ces fougueux animaux étaient en carton.
La mise en scène des œuvres de Wagner a
subi, font peu de transformations et voici pour-
quo): Wagner était un enfant de la balle, et
ayant vécu pendant son, enfance dans le théâtre,
Il réglait lui-même avec soin sa mise en scène
et les - artifices de la machinerie sont notés de
sa main sur la partition de ses opéras.
Le culte que l'on rendait à Wagner fit que
personne n'osa rien changer aux indications scé-
niques du maître. Au reste, cette mise en scène
représenta pendant Longtemps 1e mise en scène
perfectionnement. L'électricité n' Ser"ter ™ot du
employée au -théâtre et l'on ilé po.uvait réaliser
avec la rampe à gaz tous les effNs de lumière
que l'on obtient aujourd'hui avec un simple pro-
jecteur. , ..<
C'est ainsi que, dans Parsi/al, on voit le hé-
ros et son guide gravir le mont Salvat. Cette
ascension se fait dans deS conditions peu fati-
gantes: les ézux personnages marquent le pas sur
place, ;ePendant que le décor de fond se dérou-
le — toujours le dicirama. C'est encore le pm-
cédé que l'on employait à l'Opéra en 1014.
Les béliers de Fricka font songer au cygne
de LOhengrin, du même carton, et au montre
du Çrépuscule des Dieux, monstre articulé, dans
la d'un duquel un artiste dissimulé chante à l'ai-
Ht Porte-voix.
Etant donné l'importance de la mise en scène
dans l'œuvre de Wagner, il est bon que l'on se
préoccupe de moderniser les procédés de la
machinerie.
Grâce à 1 électricité et aux projecteurs on
arrive a des résumais prodigieux et l'on obtient
des « apparitions » parfaites. Je n'en veux
pour exempte que les épisodes du rêve de Faust
dans la Damnation - mise en scène de M.
Gunsbourg.
Si,gn:al:ons, pouir terminer, une heureuse inno-
vation, toujours dans le dernier acte de la Wal-'
kyrie, Wotan protège Brunnhilde d'une barrière
de flammes, obtenue aisément par des jets de
poudre de lyeopode et des flammèches de soie
soulevées par un ventilateur. Jadis, les flammes
tournaient autour du rocher où est étendue la
Walkyrie. Aujourd'hui, la barrière de flammes
est rectiligne et n'isole plus Brunnhilde de Wo-
tan; elle sépare uniquement le séjour des mor-
te-ls du séjour des Dieux. C'est plus logique et
l'effet est préférable.
Il reste bien des choses à dire sur la mise en
scène; nous en reparlerons..
ANDRÉ RIGÃUD.
Nous publierons demain un article de
A. t'SERSTEVENS
et « Les Petites Expositions »
de RENE-JEAN
ON REPETE..,
Prochains spectacles
au Vaudeville,au Gymnase
et au Théâtre de Paris
Vers la fin de ce mois, trois de nos grandes
scènes renouvelleront leur affiche.
Au Vaudeville, c'est une pièce nouvelle de M.
Henry Bataille, La Tendresse, qui succédera aux
Ailes Brisées. De ce fait, la reprise dJAmants,
qu'avait prêtée M. Victor Silvestre, se trouve
différée de plusieurs mois. Les principaux rôles
de La Tendresse seront créés par M. Huguenot
Mlle Yvonne de Bray et M. Armand Bour.
Au Gymnase, < M. Henry Bernsteiii avait reçu
sur scénario urne pièce tirée de Chéri, le dernier
roman d® Mme Colette, par M. Léopold Mar-
chand, mais des circonstances indépendantes de
la volonté du directeur et de l'auteur ne per-
mettront pas, pour le moment du moins, les
représentations de Chéri. C'est une comédie
nouvelle de M. André Picard qui prendra la
Place de La Rafale.
AuThéâtre, de Paris, L'Homme à la Rose, le
cn, ef„-d , œuvre de M. Henry Bataille, sera rem-
pl;a.cé Par Coeur de Lilas, de MM. Tristan Ber-
e' Charles-Henry Hirsch, avec M. André
Rn,;,.et Mlle Madeleine Lély dans les deux rôles
n .Cl. ^aUX' Ai,0Uit,°ns que M. Léon Volterra a
reQu, pour être créées cette saison, ou la saison
„ une pièce de M. Pierre Wolff; une
comédie a<^aP^e de l'anglais par MM. Robert de
FIers et Francis de Croisse::; Romance, une
Pièce de M. Marcel Prévost, les Don Juanes, le
Molière, de MM. J--J- F"W>» et H. Dupuy-
Mazuel, et La Puissance de la Mort, de M. Mau-
rice Maeterlinck. G. L.
Échos
7 Janvier 1869. — A la Comédie-Française, pre-
mière représentation des Faux Ménages, de Pail-
letroiii (Bressant, Delauftay): .1
u
'ne pièce de M. Le Bargy. -
, M. Le BR-rgy a écrit une comédie
dramatique : Une danseuse est morte, cest
le titre. Cette œuvre sera bientôt représen-
tée à Bruxelles. Voici non le sujet, mais
l'événement essentiel d'Une danseuse est
morte: un homme politique très pop'uJ,alire
et très influent a pour maîtresse une dan-
se,use; à -la suite d'une violer te discussion,
lia jeune femme meurt d'un accident cardia-
que. Au mome-nt où l'on découvre l'a morte,
un jeune homme — son jeuine amant, —:
est auprès d'elle. Il est soupçonné de meur-:
tre et la police l'arrête. Oro s'imagine les
angoisses de notre homme politique au mi-
lieu de ce s'cla,ndi:111e.
Nous ,c¡¡lny(),ns savoir que les principaux
iintierpTètes d'Une danseuse est morte se-
ront Mme Neiliy Cormon, Mile Betty Daus-
smond, et M. de Gulngand;, qui fut si jus-
tement remarqué dans Une faible femme;
mais le choiix de ces excellents artistes
n'est pas définitif. Le rôle principal, celui
die l'homme politique, sera tenu pair M. Le
Bargy.
A
l'occasion des belles représenta-
tions de Beethoven au Théâtre des
Champs-Elysées, notre excluent collabora-
teur et amii André Lébey nous envoie res
vers suivants: <
Devant le piano vaste et nu ,-,
Où le reflet de ses bras longs,
La mêle plus à lui selon
Le rythme sous ses doigts venu.
Comme une onde de l'inconnu
Que le clavier éveOlle au fond
Du mystère immense où le son
De l'Harmonie est revenu,
Belle et d'or sous ses cheveux blonds,
La nuque inclinée, le front
Maître du, jeu qu'elle illumine,
Lucy Caffaret, merveilleuse,
Sur la salle silencieuse,
Fait palpxer l'aile divine.
André LEBEY.
A
vant-hieir soir, à la représentatiton du
Simoun. M. Max Maurey est seul
dans une avant-scène. M. Emile Fabre c
.seut à l'orchestre. M. Antoine arrive et s'asg
seoiit dans un corn. Au premier entracte,
grande conversation entre MM. Palhre et
Antoine, qui se sont (rencontrés. Au scoonitô
enitr'acte, M. Max Maaiirey se joint à eux
et la conversation s'anime ; les trois direc-
teurs, disparaissent bientôt par la porte de
fer. Ils vont voir M. Gémier pour le1 félici-
ter. C'est ce qu'on appelle un carré de
rois.
L
e librettiste est mélomane,
Généralement aux répétitions d'un
ouvrage lyri'que c est le compostteur ,liU!l-
même qiui donne la mesure, et le^ librettiste
se contente de fournir des explications poûf¡'.,
le poème. - •
U n'en'est pas de même à la Gaîté-Lyn. -
qUiB où l'on répète une nouvelle opérette de.
MM. Jacques Bousquet et Marcel Lattès.
Si ce demier, compositeur très d¡istin.güé'?
se tient au piano et accompagne sa parti-
tion, M. Jacques Bousquet, un des au-teurs
du livret, bat la mesure et diilri, ge aussi les
études musicales.
C'est que M. Jacques Bousquet se sou-
vient qu'il débuta au théâtre comme musi-
cien', et pouir lui les croches, les TIloiÏres et
les hiasnehes. n'ont pas de mystères.
L
a bonne plaisanterie.
.Dernièrement Mlle Polaire recevait
un petit paquet qui d'abord plongea la char-
mante artiste dans la plus graine perplexité.
Le paquet portait comme dési^ gnation de
son contenu : « Serpent? » Il n'est guère
ré jouis saint de voir sortir d'un carton un
reptile.
L'interprète de Marie Gazelle s'arma die
courage, fébrilement elfe enleva, les ficelles
diè la boite. Quelle ne fut pas sa grande sar
tisfaction en. découvrant au milieu d'une
couche de coton uw superbe serpent en
diamants.
Lai pliaisaimteriie était d'un très bon goût,
et à la piriemière de Marie Gazelle elle
porta ce bi¡jioiul qu'elle considère maintenant
comme un fétiche. -
n
a GRANDE MAISON DE BLANC com-
mencera lundi prochain son exposi-
tion de bUanc assurée d un grand succès en
iraison des prix très particuliers établis cet-
te année.
Pendant 'tout le mois de janvier, la Gran-
de Maison de Blanc restera ouverte le sa-
medi après-midi.
1 Le Masque de Verre.
Lire en deuxième page :
NOTRE GRAND CONCOURS DE COMIQUES
UN PLAIDOYER DE M. LE ROY
POUR LA REFORME DE LA COMEIDIE-FRANQAISE
Lire en troisième page :
LA « MUSIQUE CHEZ SOI »
Lire en quatrième page :
CINÉ.COMŒDIA
Lire en cinquième page :
DE PROGRAMME DE LA SEMAINE AU CINEMA
Nos Étrennes
à nos abonnés, à nos% lecteurs
Nous avons pu obtenir dans des conditions
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gnifiques boîtes, présentées avec un goût parfait
dans un cartonnage d'art, et contenant du choco-
lat de la célèbre maison Klaus.
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marchande de 25 francs.
A l'occasion des étrennes, et pendant quelques
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1° Gratuitement une boîte à tout nouvel
abonné ou à tout ancien abonné, prolongeant
son abonnement d'une année.
2° Au prix de douze francs, une ou plusieurs
boîtes, à tout abonné guette que soit la durée
de son abonnement.
3° Au prix de quinze francs, Une ou plusieurs
boites, à tout lecteur présentant etz; exemplai-
res différents de Comœdia.
Ces boites sont exposées dans les bureaux do
l'Administration du Journal. Les abonnés pour-
ront, en les retirant, prendre en même temps
Leur ticket d'assuance (voir en 5e page) ;
I .Êiirs - de réduction dans les théâtres.
1 AU THEATRE DES ARTS
"Galatée ',:
- Pièce en un acte, de M. Alfred Mortier
"Bonheur')J ,
Pièce en trois-actes, de M. Charles Oulmont
Le Théâtre des Arts nous a donné unie
Galatée de M. Alfred Mortier. C'est beaui-
çcwrp mieux qu'un lever de rideau, et nous
avons retrouvé dans cette petite pièce l'in-
telligence de l'auteur de Sylla et d'une
Dramaturgie de Paris (pour faire pendant
à celle die Ham/bouirg) qui est um dtes livres
les plus savoureux qu'on ait éclrits depuis
dix ans sur le théâtre. Pygmaiion, comme
dans le vieux mythe illustre, éveille à for-
ce d'amour, la statue de Galatee, et ce
sculpteur aux goûts matériels veut tout die
suète la triaiter en maîtresse. Mais Nicias, un
boiteux philosophe, en soigne à Galatée l'ar
rnour platonique, l'amour des âmes, et
quand Pygmailiion, qui a' dû s'absetniter die
sa maison (je vais vous dire pourrquoi), re-
vient et, pour satisfaire ses grossiers désirs,
se jette sur Galatée, celle-ci redevient de
marbre sous son baiser brutal.
Il y a là une idée fort jolie, et lé dua- j
logue philosophique de Nicias et die Gala-
tée est traité par un esprit élevé et chez
qui, on le sent, le goût des idées est natif.
sMais — et je l'ai gardée pour la hn -
la vrsie « idée » de cette Galatée nou-
;vefe, c'est la raison pour laquelle Pygma-
-lion a dû quêter un instant sa demeure et
sa bien..a:imée; malheureusement M. Mor-
tier ïie pouvait lui'faine le sort qu'elle mé-
ritait, car c'était une adorable idée. d'opé-
retSe. - Pygmaiion a été mandé chez l'archi-
viste, qui le somme de livrer sa statue
ifçmr laquelle il a déjà touché le prix fixé.
Et Pysmalion est très ennuyé, il nie peut
livrer- la statue, puisque maintenant c'est
um femme ! La chose s'arrange très vite
chez "M. Mortier, cair Pygmalion restitue
l'argent avancé. Mais imaginez qu'il me l'ait
plus, qu'il l'ait dépensé en folles orgies, et
voyez lia bouffonnerie possible die 'la situa-
tidrIl, Pygmalion follement épris de Gantée!
vivante, et obligé de la faire redeveniir die
marbre s'il veut ne pas couicher à la prison
pour dettes. Avec quelques péripéties, un
banquet, des couplels polissons et La musi-
que de M. Ohrilsltiné, cela eût pu avoir 900
représentations aux Bouffes. Quant au tiifare
iJ est touit indiqué, à l'imitation de Phi-Phi:
ce serait Ga-ga.
* lVi. Gh,aúl!es Oulmont nous a ensuite conté
Qine .hisit'oiire de famille où ses qualités de
(fiarté, die netteté, de décis,ion sont éviden-
tes, mais qui manque d'originalité réelle et
de ce graiira de nouveauté que l'art exige
die tout créateur. M. Oullrniont a toutes les
vertus fondamentales, si je puis dire, d'un
drunaltUirge; et il n'y a pas die grosse ob-
jection à élever contre sa pièce, sinon la
pire: pourquoi, n'ayant à dire que cela,
i ant-il écrite? Je sais bien qu'ill voulait faine
itne pièce, et la faire jouer; mais alors il
s est trop pressé. Il lui eût fallu ein écrire
quatre ou cinq die cette sorte avant d'a-
BONHEUR (Pli. H Arrt.nnel)
Mme FEREZ
(Simone)
Mme MOREiNO
(La Mère)
M. BURCUET
(Jean)
ÎHKrder la scène. J'ai eu l'impression! d''un«e>
pièce de débutant écrite avec l'autorité d"Ulf)
esprit déjà mûr. Le sujet insuffisant n'a pu
être racheté par l'exéçutiQn'.
Une mère à un fils, Jean, et unie fille.,
Simone; eÜle a fait épouser à Jean une j;e,w-
ne fille, Gassilenne, qui ne l'aimait pas,
mais que lui aimait. Ce qui devait arriver,
ce qu'avait prévu. Gassienne ellie-imême, ar-
rive: mariée elle n'est pas heureuse, et s'é-
prend" d'uni autre homme. Or, cet autre,
c'est Maurice, le jeune homme quie lia mère
destine à sa fille, à Simone qui en est
amoureuse. Maurice ne l'aime pas:, cette
enfant, il aimé Gassiienne, qui s'offre et se
donne. Les deux amants s'enfuient. Et
jean désespéré, dans lia scène qui a paru
là ^lus intéressante de la pièce, éclate en
pcpiroches contre sa mère. C'est l'aveugle
amour m'atieirneili qui a fait tout lié mal!
Il s'est caché lia vérité, il l'a cadhée aux
a semer des désastres, en insistant pour un
nouveau miariage aussi mal assorti, puis-
que le jeune homme. Là iil s'arrête, pair
pitié pour sa petite soeur qui halète et veut
savoir. Et lui, qui venait dé crier son be-
soin de la vérité dans la vie, n'ose déjà
plus la dire parce qu'elle va faire trop die
mal à un être cher. Il y aurait eu là une
idée, qu'algue chose de particulieir, qui va-
lait qu'on écrivit la scène et même lia pièce.
Car il faut si peu de chose parfois pour
qu'une œuvre ait une raison d'être! Mais
M. Oulmont n'a pas persévéré dans la voie
qu'il s'indiquait à lui-même; le fils finit par
jeter à s,a sœur le nom du séducteur, et la
pièce se termine dans lies larmes dies trois
personnages.
Le style d'le, M. Ouil'mont gagnerait à être
élagué ; il « en met » trop, il se satisfait
trop de ce que le hasard des répliques lui
offre, on lie sent étonné de sa propre abon-
d'ange, il s'écoute écrire. Mais il. a de la
précision, du: naturel, et dans la scène die lia
mèlre et du fils, d'e l'éloquence. Riem ne
contre-inidiique le ibéâtre à M. Ouilmomt!
Il lui faut travailler, choisir, rejeter, re-
prendre; ill nous donnera alors une pièce
qui vaudra d'être écrite, surtout s'il est sé-
vëne également à l'égard de son style. Je
l'attends à cette pièce, que je souhaite pro-
chaine.
FERNAND GREGH. T
S BONHEUR » — PiREMIER ACTE (Photo Henri Manw#
Mme Sarah RAFALB - M. LE VICAN ,< ,
(Gassienne) (Maurice)
L'interprétation
J'entends bien que dans sa Galatée, M. Al-
fred Mortier a vouto montrer un Pygmalion
bien en forme, wlidle, sanguin, avec des lèvres
épaisses et des mains prenantes, et à qui le
baiser que lui rend sa statue inspiire tout de
suite aiutre chose qu'un pur hommage à Aphro-
dite, qui l'a vivUÏiée. M'ais quelques bonheurs
précis qu'il promette à GaJatée, ils n'excluent
point un peu de poésie, et, quand même, il a
ipfu à M. Alfred Mortier d'ueer die la prbse,
le caractère de la « légende antique » qu'à son
touT il porte à la scène est d'être lyrique. Or,
te lyrisme est ce qui manque le plus à M. Ar-
vel, et j'aime à croi're' que lui-même ne se fait
point d'illusion à cet égard. Il s'ensuit que son
Pygmalion nous apparaît pesant et rustre, et
qu'en place die l'animateur espéré, nous trou-
vons un brave tailleur de marbre, dur à l'ou-
vrage et bien inférieur au dtestiti merveiillfeux
que M Mt, par une inexplicable faveur, la
déesse capricieuse.
En revanche, Mile Maylianes, Galatée éton-
née et sensible, est lia grâce même, sans mol-
lesse ni afféterie. Sa diction est juste et ses
gestes harmonieux : il y a, en cette jeune ar-
tiste, que nous avons déjà remarquée, de la
finesse et une grande distinction. Mlle Claire
M-agnus n'a-t-elle jamais encore rencontré de
courtisane? Où a-t-elle pris que la fonction
d'amoureuse s'accommode d'une telle sécheresse
de voix, de gestes, de maintien? Pense-t-eile,
avec ce ton acariâtre, employer le bon moyen
de retenir Pygmalion, qui lui échappe? Le dé-
pit ne s'accompagne pas nécessairement de vio-
lence, et l'accent de l'invective réussit rare-
ment aux amantes: rien, dans le texte de l'au-
teur, ne pouvait engager Mlle Magnus à pren-
dre ces façons revèches,! contre lesqueHes on
ne doute point que nie proteste sa nature. M.
Le Viigan, a joué correctement et intelligemment
son rôle dé philosophe disgracié et tendre.
La distriiibuitâon! de l'oeuvre de M. Charles Oui-
mont comporte des noms de comédiens impor-
tants, e:t c'est une /raison^ — mais non la seule
— de l'intérêt que suscitait Bonhoir. On a bien
vu, au dlernôer acte, aui cours d'une scène dif-
ficile, de queil secours lut pour l'écrivain: l'au-
toiité d'artistes tels que Mme Marguerite Mo-
ireno eit M. Henry Burguet. Par sa haute tenue
et par. sa doulteiuir, Mme Moreio a tait valoir
un rôle de mère exagérément acharnée au bon-
heur de ses enfants, et diont te tendresse est,
à-son insu, mêlée de tant d'égoïsme, que l'on
hésiterait à distribuer les parts die la bonté et
de l'inconsciente volonté de domination. Mme
MIotreno a délibérément opté pour lia teinidresse,
et, théâtralement, elle a eu raison: l'événement
l'a bien prouvé. Quant à M. Burgulet, fils dé-
férent et soumis, jusqu'au moment où récrau-
IJem!oo,t de son illusoire, bonheur le dresse con-
tre sa mère, il nous a paru montrer plus d'â-
preté dians sa révolte filiale que d'élan dans
son aimbiur conjugal ; mais c'est qu'il n'y a point
équivalence entre ces deux asnects de son per-
sonnage, et que le propos essentiel de l'auteur
n'hait point de nous montrer un mari amou-
reux de sa femme. M. Burguet a eu, au der-
nier acte, des accents d'une belle vigueur, et
je n>3 lui demanderai que de nous faire sentir
davantage; s'il lui est possibLe, le idéchàremient
de son cœur d'amoureux, à l'heure où Jui
(Dessin de Bib)
Mme MORENO
(La. Mère)
échappe la femme qui fut sienne, sans qu'il ait
pu jamais la conquérir.
M. Le Vigan a joué son personnage d'amant
avec assez de naturel et avec une énergie som-
bre qui, toutefois, n'est pas exempte de quel-
que sécheresse. Ce jeune artiste n'est pas sans
qualités, mais 11 manqUie d'éclat et ne paraît
pas apte à jouer indistinctement tous les rôles
dumoureux. Mlle Pérez a de la vivacité, trop
de vivacité: l'esquisse de jeune fille qu'elle
nous a donnée, agitée, sautillante et jacasse,
est dépourvue d'originalité.-La scène finale, où
elle fait sa partie sur le mode aigu-, apparaît,
par moments, assez confuse ; la mise en scène
en. a été réglée hâtivement, mais le jeu de Mlle
Pérez ne contribue pas à la clarifier.
On attendait avec un vif intérêt Mlle Sarah
Rafale. Cette éclatante artiste s'était révélée à
nious, l'été dernier, au même théâtre des Arts,
dans Les Quatre Coins, de M. Nozière, où elle
tenait, avec une autorité singulière, un person-
nage de jeune femme hautaine, intelligente, sé-
duisante et fine. Elle y montrait, avec des doos
hrilïants, une personnalité très accusée qui sem-
blait annoncer une artiste de race. Dans un
rôle très différent, nous l'avons retrouvée JeJle
qu'elle s'était révélée, avec des qualités écoit- r
nentes et une force expressive, à lac- elle il
n'a manqué, pour l'assouplir, la régler et lui
faiire donner tout ce qui est en elté. que la .1:
direction d'un metteur en scène attentif. Le rôk
de Gassienne, violent et dur, n'est pas Je ceux
qui peuvent tenter une artiste désireuse de bril-
ler. Mariée depuis cinq ans et mère, eiie n'a
d'excuse à abandonner le foyer familial que si
elle est éperdument emportée par un irrésisti-
ble amour; elle l'est en effet; mais, en cette
piièoe où l'auteur semble s'être délibérément
-.. d, CALATEE (J'th. H1 Manoell *
M. ARVEL:
- 1 (Pygmalion)
Mlle MAYLIANES
(Galatée)
concentre sur son sujet essentiel, au risque 3e
rester sommaire, nous n'en sommes instruits
que par une courte scène du premier acte, in-
suffisants à nous faire entrer dans la passion
qu'j possède la jeune femme. Dès lors, ce qui
subsiste de son personnage, c'est l'unique vo-
lonté de rompre avec son mari, de quitter la
mlaison où vivent, avec son enfant, sa belle-
mère et sa beaIbe:-sœuir, et cette volonté s'ex-
prime en termes inexorables, à la manière d'un
acte d'accusation!, sans un retour de tendresse,
sans un cri d'apitoiement, sans un geste de
remords ou d'hésitation.
Mlle Sarah Rafale, élégante et mince, a Jotré
avec une grande force la scène du second acte,
où elle affronte sa beMe-mère, * et qui est pour
ainsi dire lia scène unique cte son rôle. Elle
a unie voix chaude et passionnées un regard
profond, 'et son geste est ample naturellement.
Efllie a interprété âprement, durement ,un rôle
écrit durement, sans chercher à ruser vec lui-.
Mafis elle est capable — elle l'a prouvé — de
pto de complexité, et ce n'est pas cette fois
qu'este pouvait mettre en œuvre toutes les res-
sources d'un tempérament original et varié,
dont il est permis d'attendre beaucoup.
GEORGES BOURDONE.
———— A
La Soirée
Il y avait trois couleurs de cartes, mercredi
soir, pour entrer aux Arts:
la direction avait envoyé des cartons blàncd;
les journalistes sans invitation exhibaient leur
jolie carte rouge ;
les auteurs syndiqués, affiliés à la Sé-Ché-T,.
ainsi dénommée parce que Alphonse Séché y est
trésorier, montraient la fameuse carte bleue de te
Bourse du Travail.
Ainsi, au contrôle des Arts, le drapeau trico-
lore, symbole d'union, régnait. Renouvelant le
geste de Lafayette, Rodolphe Darzens avait piqué
la note blanche entre le bleu des Rouges (Gtan-
ge - aux - Beaux, et le rouge des Bleus (rue
Henner)..
Et l'on a pu voir les mains aristocratiques dé
Robert de Fiers applaudir aux rythmes cypriotes
du camarade syndique Alfred Mortier. La concors
de est aux camps d'agrément.
Le directeur des Grands IMagasins A Pygma-
lion (statues avec ou sans draperie, Maison de
confiance, Prix défiant toute concurrence. Socle*
à tous les rayons) un jour, remarqua dans sa vi.
trine qu'un des mannequins de cire, servant à
l'étalage, avait la tête d'une vendeuse fort jolie:
Galatée.
Or, c'était, en effet, la vendeuse eUe-même
;, ;r
Directeur: GEORGES CASELLlV
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BAUDELAIRE
Cette notice de M. Henry Bataille sur Baude-
laire sera lue à la matinée poétique de la Comé-
die-Frallçaise, demain, samedi, par M. Silvain.
M. de Max dira L'Horloge, Recueillement, et
JRevereibilité, de Baudelaire.
Nous savons bien, nous, les poètes,
que Baudelaire est le sommet de la poé-
sie au dix-neuvième siècle (le commet et
la somme), mais le public le sait moins.
Baudelaire a contre lui la légende de
blasphémateur et d'introducteur de la
névrose dans les sphères olympiennes du
Parnasse. Des critiques comme Brune-
tière se sont déshonorés en le traitant
de corrupteur. Il a contre lui les appré-
ciations de ses contemporains qui, même
en le louant, n'ont pas pénétré la qualité
de son génie. La lourde, copieuse et inin-
telligente préface dont Théophile Gau-
tier a accablé les Fleurs du Mal en est
le plus triste témoignage! Il a contre lui
ïe mot populaire que lui décocha Hugo :
« Vous avez créé, monsieur, un frisson
nouveau », et qui réduit cette poésie mi-
chel-angesque, pure, terrible, vaste
comme aucune ne l'avait été jusque là,
au frisson de Petite-secousse. Il a contre
lui, disons-le aussi, le titre de : « Fleurs
du mal », qui est un titre faux, fâcheu-
sement anecdotique et qui particularise
à 1 excès l'universalité de son essor. En
Charles BAUDELAIRE
quoi Baudelaire s'est humilié jusqu'à
consentir lui-même à sa propre légende :
sans doute comprenait-il tout ce que le
livre allait heurter de conventionnel et
d'établi, et s'cst-il résigné à lui donner
une étiquette orgueilleuse ae damnation
-
qui devait, par la suite, lui retirer, aux
yeux de la foule, son caractère général
et éternel.
Hélas! Il subsiste encore des préven-
tions contre Baudelaire. Est-ce croyable?
Mais il sont innombrables ceux qui sa-
vent pourquoi ce livre domine tous les
autres, et les absorbe. Pourquoi? Parce
qu'il a ouvert les portes de la vie. Parce
que Baudelaire a épousé les contours de
la realité, puisé son inspiration, son art,
dans les sources authentiques de l'âme
humaine. Visionnaire, rien ne lui a
échappé de ce qui était réel. Il a vu toute
la nature, mais il en a fait un symbole.
La poésie lyrique ne vivait que de thè-
mes conventionnels, même aux moments
de sa plus glorieuse réussite. Pourquoi
encore? Parce que son vers est une cho-
se unique, qui atteint le plus haut lyris-
me, sans le secours d'aucun procédé. Le
vers de Baudelaire se maintient là-haut,
en planant, par le moyen de ses propres
ailes étendues, comme un aigle. Aucun
mouvement artificiel. C'est le grand ly-
risme immobile! Il n'est pas de poète
qui ait fait contenir autant d'infini en
aussi peu de mots ! C'est la concentration
même des énergies sublimes, un com-
primé d'intelligence. Ce livre est sem-
blable, en poids et en radio-activité, à ces
parcelles de métaux qui renouvellent in-
cessamment leurs décharges, sans jamais
rien perdre de leur énergie et de leur
puissance. Chaque vers de Baudelaire
peut presque s'isoler des autres, il ne
perd rien de sa beauté ; il forme presque
un tout, un petit univers : on dirait qu'il
est a lui-même son principe et sa foi.
Mais. mais. nous ne sommes pas ici
pour faire de l'analyse ni surtout une
conférence! Bornons-nous a la notice
qu'on sollicite de nous. Pardonnez seule-
ment à iun humble poète de la terminer
par un point d'exclamation admirative,
dont nous ne pouvons, nous autres, nous
empêcher de faire suivre le nom magique
de celui que Catulle Mendès appelait,
possessivement, « Notre cher Baudelai-
re au grand cœur douloureux ». La foule
ne le connaît pas à fond. C'est une amè-
re vérité!. Aussi ferai-je, en termi-
nant, de la propagande poétique. mais
om. en disant ce que d'aucuns ne ju-
geront point puéril :
Mesdames, messieurs,
Si, dans cette salle, il est par hasard
un auditeur qui ne possède pas Les
Fleurs du Mal, un simple, un être qui ait
souffert, vécu, en un mot, qui n'ait pas
porté son âme en vain — qu'il coure en
sortant d'ici, chez le libraire voisin ache-
ter le livre unique, le livre essentiel! Il
y découvrira un remède de beauté à tous
les maux de l'âme. Ce livre, qui fait
face aux quatre vents de la douleur! Les
catholiques assurent qu'ils trouvent tout,
c'est-à-dire l'aliment suprême, dans
l'Imitation. Pour les esprits frappés du
don de sentir, de souffrir, et d'aspirer
au divin, il y a un miracle inépuisable de
cette sorte, dans la manne providentielle
que nous a laissée Baudelaire. On a cru
naguère que ce novateur était exception-
nel, morbide. La vérité re remet à son
plan. Il est universel, il est humain. Ce-
lui qui a écrit :
Hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère.
pourrait porter le titre de philanthrope.
Rendez lui l'amour et la pitié qu'il éprou-
vait pour lui. C'est qu'entre la public et
l'auteur, du plus humble au plus grand,
il existe un échange bien émouvant de
sincérité, de larmes et de tendresse!
Quand nous donnons des pièces de théâ-
tre, c'est nous qui allons à vous, à votre
peine, à votre angoisse, à vos solitudes,
à votre passion. On dirait que c'est nous
qui vous pressons sur notre cœur.
Quand nous donnons des livres de poè-
mes, c'est vous qui nous pressez sur vo-
tre cœur !
Henry BATAILLE.
A PROPOS DE LA WALKYRIE
La mise en scène
des œuvres
de Richard Wagner
.On a- 'or* apprécia, lors de la reprise de la
Willkyrie, la mise en. scène de cet ouvrage.
Cette mise en scène, réglée par M. Merle Fo-
rest, reste tout à fait conforme à la tradition
wagnéJ'Ïoe.nne. On a plaisir toutefois à constater
que, tout en respectant les indications du maître
de Bayreuth, le metteur en scène a tenu compte
des progrès de la technique théâtrale.
Je veux parler du 3e acte de la Walkyrie. La
partition porte que le ciel doit être traversé de
nuées orageuses que parcourent par intermiHen-
ce les Walkyries chevauchant leurs coursiers
ailés.
Autrefois, on avait recours à des bandes de
toiles peintes qui s'enrouaient sur des cylindres
a la manière de ces dioramas qu'on admirait
si fort a la fin du siècle dernier.
Quant aux coursiers ailés, c'étaient de pe-
tits chevaux de bois que l'on tarait par un fil.
Cette mise en scène était un peu simpliste, mais
suffisait jadis.
Aujourd'hui le spectateur est devenu plus
exigeant. On é,ut recours, l'autre soir, à de nou-
Veau.x appareils de projection, inventés récem-
rnellt en Amérique et que M. Rouché a Tntro-
diiit ts i-mmédiatement dans son théâtre.
y est à l'aide de ces projecteurs que. sont pro-
duitsles flots du torrent de la Légende de
Saint-Christophe. La chevauchée des Walkyri-es
a travers le ciel nuageux produisit un effet beaun
coup plus artistique et l'illusion était presque
cornplète:
Il serait bon qu'on modernisât également l'en-
trée de Pricka et de son char. Malgré les coups
d'aiguillon dont Mlle Lapeyrette harcelait les bé-
Jiers chacun se rendit parfaitement compte que
ces fougueux animaux étaient en carton.
La mise en scène des œuvres de Wagner a
subi, font peu de transformations et voici pour-
quo): Wagner était un enfant de la balle, et
ayant vécu pendant son, enfance dans le théâtre,
Il réglait lui-même avec soin sa mise en scène
et les - artifices de la machinerie sont notés de
sa main sur la partition de ses opéras.
Le culte que l'on rendait à Wagner fit que
personne n'osa rien changer aux indications scé-
niques du maître. Au reste, cette mise en scène
représenta pendant Longtemps 1e mise en scène
perfectionnement. L'électricité n' Ser"ter ™ot du
employée au -théâtre et l'on ilé po.uvait réaliser
avec la rampe à gaz tous les effNs de lumière
que l'on obtient aujourd'hui avec un simple pro-
jecteur. , ..<
C'est ainsi que, dans Parsi/al, on voit le hé-
ros et son guide gravir le mont Salvat. Cette
ascension se fait dans deS conditions peu fati-
gantes: les ézux personnages marquent le pas sur
place, ;ePendant que le décor de fond se dérou-
le — toujours le dicirama. C'est encore le pm-
cédé que l'on employait à l'Opéra en 1014.
Les béliers de Fricka font songer au cygne
de LOhengrin, du même carton, et au montre
du Çrépuscule des Dieux, monstre articulé, dans
la d'un duquel un artiste dissimulé chante à l'ai-
Ht Porte-voix.
Etant donné l'importance de la mise en scène
dans l'œuvre de Wagner, il est bon que l'on se
préoccupe de moderniser les procédés de la
machinerie.
Grâce à 1 électricité et aux projecteurs on
arrive a des résumais prodigieux et l'on obtient
des « apparitions » parfaites. Je n'en veux
pour exempte que les épisodes du rêve de Faust
dans la Damnation - mise en scène de M.
Gunsbourg.
Si,gn:al:ons, pouir terminer, une heureuse inno-
vation, toujours dans le dernier acte de la Wal-'
kyrie, Wotan protège Brunnhilde d'une barrière
de flammes, obtenue aisément par des jets de
poudre de lyeopode et des flammèches de soie
soulevées par un ventilateur. Jadis, les flammes
tournaient autour du rocher où est étendue la
Walkyrie. Aujourd'hui, la barrière de flammes
est rectiligne et n'isole plus Brunnhilde de Wo-
tan; elle sépare uniquement le séjour des mor-
te-ls du séjour des Dieux. C'est plus logique et
l'effet est préférable.
Il reste bien des choses à dire sur la mise en
scène; nous en reparlerons..
ANDRÉ RIGÃUD.
Nous publierons demain un article de
A. t'SERSTEVENS
et « Les Petites Expositions »
de RENE-JEAN
ON REPETE..,
Prochains spectacles
au Vaudeville,au Gymnase
et au Théâtre de Paris
Vers la fin de ce mois, trois de nos grandes
scènes renouvelleront leur affiche.
Au Vaudeville, c'est une pièce nouvelle de M.
Henry Bataille, La Tendresse, qui succédera aux
Ailes Brisées. De ce fait, la reprise dJAmants,
qu'avait prêtée M. Victor Silvestre, se trouve
différée de plusieurs mois. Les principaux rôles
de La Tendresse seront créés par M. Huguenot
Mlle Yvonne de Bray et M. Armand Bour.
Au Gymnase, < M. Henry Bernsteiii avait reçu
sur scénario urne pièce tirée de Chéri, le dernier
roman d® Mme Colette, par M. Léopold Mar-
chand, mais des circonstances indépendantes de
la volonté du directeur et de l'auteur ne per-
mettront pas, pour le moment du moins, les
représentations de Chéri. C'est une comédie
nouvelle de M. André Picard qui prendra la
Place de La Rafale.
AuThéâtre, de Paris, L'Homme à la Rose, le
cn, ef„-d , œuvre de M. Henry Bataille, sera rem-
pl;a.cé Par Coeur de Lilas, de MM. Tristan Ber-
e' Charles-Henry Hirsch, avec M. André
Rn,;,.et Mlle Madeleine Lély dans les deux rôles
n .Cl. ^aUX' Ai,0Uit,°ns que M. Léon Volterra a
reQu, pour être créées cette saison, ou la saison
„ une pièce de M. Pierre Wolff; une
comédie a<^aP^e de l'anglais par MM. Robert de
FIers et Francis de Croisse::; Romance, une
Pièce de M. Marcel Prévost, les Don Juanes, le
Molière, de MM. J--J- F"W>» et H. Dupuy-
Mazuel, et La Puissance de la Mort, de M. Mau-
rice Maeterlinck. G. L.
Échos
7 Janvier 1869. — A la Comédie-Française, pre-
mière représentation des Faux Ménages, de Pail-
letroiii (Bressant, Delauftay): .1
u
'ne pièce de M. Le Bargy. -
, M. Le BR-rgy a écrit une comédie
dramatique : Une danseuse est morte, cest
le titre. Cette œuvre sera bientôt représen-
tée à Bruxelles. Voici non le sujet, mais
l'événement essentiel d'Une danseuse est
morte: un homme politique très pop'uJ,alire
et très influent a pour maîtresse une dan-
se,use; à -la suite d'une violer te discussion,
lia jeune femme meurt d'un accident cardia-
que. Au mome-nt où l'on découvre l'a morte,
un jeune homme — son jeuine amant, —:
est auprès d'elle. Il est soupçonné de meur-:
tre et la police l'arrête. Oro s'imagine les
angoisses de notre homme politique au mi-
lieu de ce s'cla,ndi:111e.
Nous ,c¡¡lny(),ns savoir que les principaux
iintierpTètes d'Une danseuse est morte se-
ront Mme Neiliy Cormon, Mile Betty Daus-
smond, et M. de Gulngand;, qui fut si jus-
tement remarqué dans Une faible femme;
mais le choiix de ces excellents artistes
n'est pas définitif. Le rôle principal, celui
die l'homme politique, sera tenu pair M. Le
Bargy.
A
l'occasion des belles représenta-
tions de Beethoven au Théâtre des
Champs-Elysées, notre excluent collabora-
teur et amii André Lébey nous envoie res
vers suivants: <
Devant le piano vaste et nu ,-,
Où le reflet de ses bras longs,
La mêle plus à lui selon
Le rythme sous ses doigts venu.
Comme une onde de l'inconnu
Que le clavier éveOlle au fond
Du mystère immense où le son
De l'Harmonie est revenu,
Belle et d'or sous ses cheveux blonds,
La nuque inclinée, le front
Maître du, jeu qu'elle illumine,
Lucy Caffaret, merveilleuse,
Sur la salle silencieuse,
Fait palpxer l'aile divine.
André LEBEY.
A
vant-hieir soir, à la représentatiton du
Simoun. M. Max Maurey est seul
dans une avant-scène. M. Emile Fabre c
.seut à l'orchestre. M. Antoine arrive et s'asg
seoiit dans un corn. Au premier entracte,
grande conversation entre MM. Palhre et
Antoine, qui se sont (rencontrés. Au scoonitô
enitr'acte, M. Max Maaiirey se joint à eux
et la conversation s'anime ; les trois direc-
teurs, disparaissent bientôt par la porte de
fer. Ils vont voir M. Gémier pour le1 félici-
ter. C'est ce qu'on appelle un carré de
rois.
L
e librettiste est mélomane,
Généralement aux répétitions d'un
ouvrage lyri'que c est le compostteur ,liU!l-
même qiui donne la mesure, et le^ librettiste
se contente de fournir des explications poûf¡'.,
le poème. - •
U n'en'est pas de même à la Gaîté-Lyn. -
qUiB où l'on répète une nouvelle opérette de.
MM. Jacques Bousquet et Marcel Lattès.
Si ce demier, compositeur très d¡istin.güé'?
se tient au piano et accompagne sa parti-
tion, M. Jacques Bousquet, un des au-teurs
du livret, bat la mesure et diilri, ge aussi les
études musicales.
C'est que M. Jacques Bousquet se sou-
vient qu'il débuta au théâtre comme musi-
cien', et pouir lui les croches, les TIloiÏres et
les hiasnehes. n'ont pas de mystères.
L
a bonne plaisanterie.
.Dernièrement Mlle Polaire recevait
un petit paquet qui d'abord plongea la char-
mante artiste dans la plus graine perplexité.
Le paquet portait comme dési^ gnation de
son contenu : « Serpent? » Il n'est guère
ré jouis saint de voir sortir d'un carton un
reptile.
L'interprète de Marie Gazelle s'arma die
courage, fébrilement elfe enleva, les ficelles
diè la boite. Quelle ne fut pas sa grande sar
tisfaction en. découvrant au milieu d'une
couche de coton uw superbe serpent en
diamants.
Lai pliaisaimteriie était d'un très bon goût,
et à la piriemière de Marie Gazelle elle
porta ce bi¡jioiul qu'elle considère maintenant
comme un fétiche. -
n
a GRANDE MAISON DE BLANC com-
mencera lundi prochain son exposi-
tion de bUanc assurée d un grand succès en
iraison des prix très particuliers établis cet-
te année.
Pendant 'tout le mois de janvier, la Gran-
de Maison de Blanc restera ouverte le sa-
medi après-midi.
1 Le Masque de Verre.
Lire en deuxième page :
NOTRE GRAND CONCOURS DE COMIQUES
UN PLAIDOYER DE M. LE ROY
POUR LA REFORME DE LA COMEIDIE-FRANQAISE
Lire en troisième page :
LA « MUSIQUE CHEZ SOI »
Lire en quatrième page :
CINÉ.COMŒDIA
Lire en cinquième page :
DE PROGRAMME DE LA SEMAINE AU CINEMA
Nos Étrennes
à nos abonnés, à nos% lecteurs
Nous avons pu obtenir dans des conditions
exceptionnelles un assez grand nombre de ma-
gnifiques boîtes, présentées avec un goût parfait
dans un cartonnage d'art, et contenant du choco-
lat de la célèbre maison Klaus.
Ces boîtes sont actuellement d'une valeur
marchande de 25 francs.
A l'occasion des étrennes, et pendant quelques
jours encore, nous offrons :
1° Gratuitement une boîte à tout nouvel
abonné ou à tout ancien abonné, prolongeant
son abonnement d'une année.
2° Au prix de douze francs, une ou plusieurs
boîtes, à tout abonné guette que soit la durée
de son abonnement.
3° Au prix de quinze francs, Une ou plusieurs
boites, à tout lecteur présentant etz; exemplai-
res différents de Comœdia.
Ces boites sont exposées dans les bureaux do
l'Administration du Journal. Les abonnés pour-
ront, en les retirant, prendre en même temps
Leur ticket d'assuance (voir en 5e page) ;
I .Êiirs - de réduction dans les théâtres.
1 AU THEATRE DES ARTS
"Galatée ',:
- Pièce en un acte, de M. Alfred Mortier
"Bonheur')J ,
Pièce en trois-actes, de M. Charles Oulmont
Le Théâtre des Arts nous a donné unie
Galatée de M. Alfred Mortier. C'est beaui-
çcwrp mieux qu'un lever de rideau, et nous
avons retrouvé dans cette petite pièce l'in-
telligence de l'auteur de Sylla et d'une
Dramaturgie de Paris (pour faire pendant
à celle die Ham/bouirg) qui est um dtes livres
les plus savoureux qu'on ait éclrits depuis
dix ans sur le théâtre. Pygmaiion, comme
dans le vieux mythe illustre, éveille à for-
ce d'amour, la statue de Galatee, et ce
sculpteur aux goûts matériels veut tout die
suète la triaiter en maîtresse. Mais Nicias, un
boiteux philosophe, en soigne à Galatée l'ar
rnour platonique, l'amour des âmes, et
quand Pygmailiion, qui a' dû s'absetniter die
sa maison (je vais vous dire pourrquoi), re-
vient et, pour satisfaire ses grossiers désirs,
se jette sur Galatée, celle-ci redevient de
marbre sous son baiser brutal.
Il y a là une idée fort jolie, et lé dua- j
logue philosophique de Nicias et die Gala-
tée est traité par un esprit élevé et chez
qui, on le sent, le goût des idées est natif.
sMais — et je l'ai gardée pour la hn -
la vrsie « idée » de cette Galatée nou-
;vefe, c'est la raison pour laquelle Pygma-
-lion a dû quêter un instant sa demeure et
sa bien..a:imée; malheureusement M. Mor-
tier ïie pouvait lui'faine le sort qu'elle mé-
ritait, car c'était une adorable idée. d'opé-
retSe. - Pygmaiion a été mandé chez l'archi-
viste, qui le somme de livrer sa statue
ifçmr laquelle il a déjà touché le prix fixé.
Et Pysmalion est très ennuyé, il nie peut
livrer- la statue, puisque maintenant c'est
um femme ! La chose s'arrange très vite
chez "M. Mortier, cair Pygmalion restitue
l'argent avancé. Mais imaginez qu'il me l'ait
plus, qu'il l'ait dépensé en folles orgies, et
voyez lia bouffonnerie possible die 'la situa-
tidrIl, Pygmalion follement épris de Gantée!
vivante, et obligé de la faire redeveniir die
marbre s'il veut ne pas couicher à la prison
pour dettes. Avec quelques péripéties, un
banquet, des couplels polissons et La musi-
que de M. Ohrilsltiné, cela eût pu avoir 900
représentations aux Bouffes. Quant au tiifare
iJ est touit indiqué, à l'imitation de Phi-Phi:
ce serait Ga-ga.
* lVi. Gh,aúl!es Oulmont nous a ensuite conté
Qine .hisit'oiire de famille où ses qualités de
(fiarté, die netteté, de décis,ion sont éviden-
tes, mais qui manque d'originalité réelle et
de ce graiira de nouveauté que l'art exige
die tout créateur. M. Oullrniont a toutes les
vertus fondamentales, si je puis dire, d'un
drunaltUirge; et il n'y a pas die grosse ob-
jection à élever contre sa pièce, sinon la
pire: pourquoi, n'ayant à dire que cela,
i ant-il écrite? Je sais bien qu'ill voulait faine
itne pièce, et la faire jouer; mais alors il
s est trop pressé. Il lui eût fallu ein écrire
quatre ou cinq die cette sorte avant d'a-
BONHEUR (Pli. H Arrt.nnel)
Mme FEREZ
(Simone)
Mme MOREiNO
(La Mère)
M. BURCUET
(Jean)
ÎHKrder la scène. J'ai eu l'impression! d''un«e>
pièce de débutant écrite avec l'autorité d"Ulf)
esprit déjà mûr. Le sujet insuffisant n'a pu
être racheté par l'exéçutiQn'.
Une mère à un fils, Jean, et unie fille.,
Simone; eÜle a fait épouser à Jean une j;e,w-
ne fille, Gassilenne, qui ne l'aimait pas,
mais que lui aimait. Ce qui devait arriver,
ce qu'avait prévu. Gassienne ellie-imême, ar-
rive: mariée elle n'est pas heureuse, et s'é-
prend" d'uni autre homme. Or, cet autre,
c'est Maurice, le jeune homme quie lia mère
destine à sa fille, à Simone qui en est
amoureuse. Maurice ne l'aime pas:, cette
enfant, il aimé Gassiienne, qui s'offre et se
donne. Les deux amants s'enfuient. Et
jean désespéré, dans lia scène qui a paru
là ^lus intéressante de la pièce, éclate en
pcpiroches contre sa mère. C'est l'aveugle
amour m'atieirneili qui a fait tout lié mal!
Il s'est caché lia vérité, il l'a cadhée aux
a
nouveau miariage aussi mal assorti, puis-
que le jeune homme. Là iil s'arrête, pair
pitié pour sa petite soeur qui halète et veut
savoir. Et lui, qui venait dé crier son be-
soin de la vérité dans la vie, n'ose déjà
plus la dire parce qu'elle va faire trop die
mal à un être cher. Il y aurait eu là une
idée, qu'algue chose de particulieir, qui va-
lait qu'on écrivit la scène et même lia pièce.
Car il faut si peu de chose parfois pour
qu'une œuvre ait une raison d'être! Mais
M. Oulmont n'a pas persévéré dans la voie
qu'il s'indiquait à lui-même; le fils finit par
jeter à s,a sœur le nom du séducteur, et la
pièce se termine dans lies larmes dies trois
personnages.
Le style d'le, M. Ouil'mont gagnerait à être
élagué ; il « en met » trop, il se satisfait
trop de ce que le hasard des répliques lui
offre, on lie sent étonné de sa propre abon-
d'ange, il s'écoute écrire. Mais il. a de la
précision, du: naturel, et dans la scène die lia
mèlre et du fils, d'e l'éloquence. Riem ne
contre-inidiique le ibéâtre à M. Ouilmomt!
Il lui faut travailler, choisir, rejeter, re-
prendre; ill nous donnera alors une pièce
qui vaudra d'être écrite, surtout s'il est sé-
vëne également à l'égard de son style. Je
l'attends à cette pièce, que je souhaite pro-
chaine.
FERNAND GREGH. T
S BONHEUR » — PiREMIER ACTE (Photo Henri Manw#
Mme Sarah RAFALB - M. LE VICAN ,< ,
(Gassienne) (Maurice)
L'interprétation
J'entends bien que dans sa Galatée, M. Al-
fred Mortier a vouto montrer un Pygmalion
bien en forme, wlidle, sanguin, avec des lèvres
épaisses et des mains prenantes, et à qui le
baiser que lui rend sa statue inspiire tout de
suite aiutre chose qu'un pur hommage à Aphro-
dite, qui l'a vivUÏiée. M'ais quelques bonheurs
précis qu'il promette à GaJatée, ils n'excluent
point un peu de poésie, et, quand même, il a
ipfu à M. Alfred Mortier d'ueer die la prbse,
le caractère de la « légende antique » qu'à son
touT il porte à la scène est d'être lyrique. Or,
te lyrisme est ce qui manque le plus à M. Ar-
vel, et j'aime à croi're' que lui-même ne se fait
point d'illusion à cet égard. Il s'ensuit que son
Pygmalion nous apparaît pesant et rustre, et
qu'en place die l'animateur espéré, nous trou-
vons un brave tailleur de marbre, dur à l'ou-
vrage et bien inférieur au dtestiti merveiillfeux
que M Mt, par une inexplicable faveur, la
déesse capricieuse.
En revanche, Mile Maylianes, Galatée éton-
née et sensible, est lia grâce même, sans mol-
lesse ni afféterie. Sa diction est juste et ses
gestes harmonieux : il y a, en cette jeune ar-
tiste, que nous avons déjà remarquée, de la
finesse et une grande distinction. Mlle Claire
M-agnus n'a-t-elle jamais encore rencontré de
courtisane? Où a-t-elle pris que la fonction
d'amoureuse s'accommode d'une telle sécheresse
de voix, de gestes, de maintien? Pense-t-eile,
avec ce ton acariâtre, employer le bon moyen
de retenir Pygmalion, qui lui échappe? Le dé-
pit ne s'accompagne pas nécessairement de vio-
lence, et l'accent de l'invective réussit rare-
ment aux amantes: rien, dans le texte de l'au-
teur, ne pouvait engager Mlle Magnus à pren-
dre ces façons revèches,! contre lesqueHes on
ne doute point que nie proteste sa nature. M.
Le Viigan, a joué correctement et intelligemment
son rôle dé philosophe disgracié et tendre.
La distriiibuitâon! de l'oeuvre de M. Charles Oui-
mont comporte des noms de comédiens impor-
tants, e:t c'est une /raison^ — mais non la seule
— de l'intérêt que suscitait Bonhoir. On a bien
vu, au dlernôer acte, aui cours d'une scène dif-
ficile, de queil secours lut pour l'écrivain: l'au-
toiité d'artistes tels que Mme Marguerite Mo-
ireno eit M. Henry Burguet. Par sa haute tenue
et par. sa doulteiuir, Mme Moreio a tait valoir
un rôle de mère exagérément acharnée au bon-
heur de ses enfants, et diont te tendresse est,
à-son insu, mêlée de tant d'égoïsme, que l'on
hésiterait à distribuer les parts die la bonté et
de l'inconsciente volonté de domination. Mme
MIotreno a délibérément opté pour lia teinidresse,
et, théâtralement, elle a eu raison: l'événement
l'a bien prouvé. Quant à M. Burgulet, fils dé-
férent et soumis, jusqu'au moment où récrau-
IJem!oo,t de son illusoire, bonheur le dresse con-
tre sa mère, il nous a paru montrer plus d'â-
preté dians sa révolte filiale que d'élan dans
son aimbiur conjugal ; mais c'est qu'il n'y a point
équivalence entre ces deux asnects de son per-
sonnage, et que le propos essentiel de l'auteur
n'hait point de nous montrer un mari amou-
reux de sa femme. M. Burguet a eu, au der-
nier acte, des accents d'une belle vigueur, et
je n>3 lui demanderai que de nous faire sentir
davantage; s'il lui est possibLe, le idéchàremient
de son cœur d'amoureux, à l'heure où Jui
(Dessin de Bib)
Mme MORENO
(La. Mère)
échappe la femme qui fut sienne, sans qu'il ait
pu jamais la conquérir.
M. Le Vigan a joué son personnage d'amant
avec assez de naturel et avec une énergie som-
bre qui, toutefois, n'est pas exempte de quel-
que sécheresse. Ce jeune artiste n'est pas sans
qualités, mais 11 manqUie d'éclat et ne paraît
pas apte à jouer indistinctement tous les rôles
dumoureux. Mlle Pérez a de la vivacité, trop
de vivacité: l'esquisse de jeune fille qu'elle
nous a donnée, agitée, sautillante et jacasse,
est dépourvue d'originalité.-La scène finale, où
elle fait sa partie sur le mode aigu-, apparaît,
par moments, assez confuse ; la mise en scène
en. a été réglée hâtivement, mais le jeu de Mlle
Pérez ne contribue pas à la clarifier.
On attendait avec un vif intérêt Mlle Sarah
Rafale. Cette éclatante artiste s'était révélée à
nious, l'été dernier, au même théâtre des Arts,
dans Les Quatre Coins, de M. Nozière, où elle
tenait, avec une autorité singulière, un person-
nage de jeune femme hautaine, intelligente, sé-
duisante et fine. Elle y montrait, avec des doos
hrilïants, une personnalité très accusée qui sem-
blait annoncer une artiste de race. Dans un
rôle très différent, nous l'avons retrouvée JeJle
qu'elle s'était révélée, avec des qualités écoit- r
nentes et une force expressive, à lac- elle il
n'a manqué, pour l'assouplir, la régler et lui
faiire donner tout ce qui est en elté. que la .1:
direction d'un metteur en scène attentif. Le rôk
de Gassienne, violent et dur, n'est pas Je ceux
qui peuvent tenter une artiste désireuse de bril-
ler. Mariée depuis cinq ans et mère, eiie n'a
d'excuse à abandonner le foyer familial que si
elle est éperdument emportée par un irrésisti-
ble amour; elle l'est en effet; mais, en cette
piièoe où l'auteur semble s'être délibérément
-.. d, CALATEE (J'th. H1 Manoell *
M. ARVEL:
- 1 (Pygmalion)
Mlle MAYLIANES
(Galatée)
concentre sur son sujet essentiel, au risque 3e
rester sommaire, nous n'en sommes instruits
que par une courte scène du premier acte, in-
suffisants à nous faire entrer dans la passion
qu'j possède la jeune femme. Dès lors, ce qui
subsiste de son personnage, c'est l'unique vo-
lonté de rompre avec son mari, de quitter la
mlaison où vivent, avec son enfant, sa belle-
mère et sa beaIbe:-sœuir, et cette volonté s'ex-
prime en termes inexorables, à la manière d'un
acte d'accusation!, sans un retour de tendresse,
sans un cri d'apitoiement, sans un geste de
remords ou d'hésitation.
Mlle Sarah Rafale, élégante et mince, a Jotré
avec une grande force la scène du second acte,
où elle affronte sa beMe-mère, * et qui est pour
ainsi dire lia scène unique cte son rôle. Elle
a unie voix chaude et passionnées un regard
profond, 'et son geste est ample naturellement.
Efllie a interprété âprement, durement ,un rôle
écrit durement, sans chercher à ruser vec lui-.
Mafis elle est capable — elle l'a prouvé — de
pto de complexité, et ce n'est pas cette fois
qu'este pouvait mettre en œuvre toutes les res-
sources d'un tempérament original et varié,
dont il est permis d'attendre beaucoup.
GEORGES BOURDONE.
———— A
La Soirée
Il y avait trois couleurs de cartes, mercredi
soir, pour entrer aux Arts:
la direction avait envoyé des cartons blàncd;
les journalistes sans invitation exhibaient leur
jolie carte rouge ;
les auteurs syndiqués, affiliés à la Sé-Ché-T,.
ainsi dénommée parce que Alphonse Séché y est
trésorier, montraient la fameuse carte bleue de te
Bourse du Travail.
Ainsi, au contrôle des Arts, le drapeau trico-
lore, symbole d'union, régnait. Renouvelant le
geste de Lafayette, Rodolphe Darzens avait piqué
la note blanche entre le bleu des Rouges (Gtan-
ge - aux - Beaux, et le rouge des Bleus (rue
Henner)..
Et l'on a pu voir les mains aristocratiques dé
Robert de Fiers applaudir aux rythmes cypriotes
du camarade syndique Alfred Mortier. La concors
de est aux camps d'agrément.
Le directeur des Grands IMagasins A Pygma-
lion (statues avec ou sans draperie, Maison de
confiance, Prix défiant toute concurrence. Socle*
à tous les rayons) un jour, remarqua dans sa vi.
trine qu'un des mannequins de cire, servant à
l'étalage, avait la tête d'une vendeuse fort jolie:
Galatée.
Or, c'était, en effet, la vendeuse eUe-même
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