Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1921-01-06
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 06 janvier 1921 06 janvier 1921
Description : 1921/01/06 (A15,N2943). 1921/01/06 (A15,N2943).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7646664t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 25/05/2015
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Le Numéro: 5 Paris 0 fr. 20
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UN AN 6 MOIS 3 MOIS
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JEUDI 6 JANVIER 1921 , V
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L'ARMOIRE AUX SOUVENIRS
0 Farces de Comédienâ 0 -
Frédéric Febvre, ex-doyen die la Comé-
die-Française, était un des bavards les ptus
bavards que j'aie jamais connus.
H appartenait à la classe charmante par-
fois, mais terrible souvent, des « anecdo-
tiers ». Ce qu'il savait d'histoires de théâ-
tre est incroyable, sans compter celles
qu'il inventait. A force de les répéter, il fi-
nissait par croire, en toute bonne foi, à leur
authenticité.
J'ai eu souvent l'occasion de chasser
avec Febvire chez un ami commun, en
Seine-et-Marne. C'était un tireur médio-
cre; mais, comme élégance de tenue cyné-
gétique, il ne le cédait à personne. Des sou-
liers à la casquette, il était impeccable. Il
avait toujours l'air de sortir d'une plus que
Belle Jardinière. Quand le nasard vous
avait fait son voisin, il vous happait, entre
deux battues, et sa langue de courir, plus
vite que les lièvres par llui. manques.
Mais c'était à table qu'il fallait le voir,
t'entendre, plutôt. Il commençait à parler
dès le potage pour ne fintir. qu'au dessert.
Que dis-je, finir? Ce diable d'homme ne
finissait jamais. Le repas termine, la maî-
tresse de maison n'osait se lever pour don-
ner l'e signal du départ. Febvre parlait, par-
lait toujouirs. Les domestiques, figés autour
de la table, maudissaient le bavard intaris-
sable qui les empêchait d'aller dîner à leur
tour. Quand, finalement, on se levait, Feb-
vre parlait encore. Et, au s a ton, sitôt qu'on
était assis, Febvre recommençait de parler.
Je me hâte de rendre un juste hommage
à ta vérité en ajoutant que, s'H' parlait trop,
il pariait bieln. Il racontait avec esprit. Il
savait, e;ni acteur d.e grand talent, doroner
de la vie à tout ce qu'il disait, mettre en
scène la moindre anecdote, et surtout lan-
cer le trait, comme il avait l'habitude de le
faire à la scène.
J'ai oublié La plupart des histoires que
m'a racontées Febvre. En voici deux ce-
pendant qui me reviennent en mémoire.
Ce sont deux farces de comédiens. Ils ne
son font plus guère de nos jours. La vie
est trop morose. Mais au temps de la jeu-
nesse de Febvre — et cela remonte Ic.i.n-,
car il est mort fort âgé — i's ne s'en pri-
vaient pas. Pour plus de facilité dans moni
réoit, je laisse la parole au défunt et aima-
ble doyen de là comédie.
« je jouais alors dans ylni théâtre du
bouleyard. On représentait un grand dra-
me en cinq actes et en vers, dirame moyen-
âgeux; ouinasses, gantelets de fe,r, bras-
sards, cuissards, toute la ferblanterie ro-
mantique, d'alors. Agacés par le .carac~ tère
orgueilleux et gri-ncheux d'un de - nos
camarades, nous résolûmes de Lui en
faire '« une bonne ». H remplissait, dans
fla pièce, le rôle d'un chevalier partant
pour la croisade — ou en revenant, je ne
sais au juste. Il portait un. de ces casques
de tonne cocasse qui,: lorsque la visière
est baissée, donnent à l'homme un aspect
a oiseau au bec pointu. Au beau milieu
d un acte, dans une scène très dramatique,
- ou qui voulait l'être — notre camarade
arrivât- en scène, fier, superbe, le jarret
tendu, et, avec de grands gestes, déclamait
une tirade d'une centaine de vers, au
moins. - - - 1
« Nous eqmes l'idée diadique de pireinr
d.re son casque chez le costumier du théâ-
tire et d y adapter un petit système à dé-
tecte qui dès le premier geste un peu vio-
lent, se déclanchait et faisait brusquement
retomber la visière, et de telle façon qu'il
était impose de la relever. Vous devi-
nez ce -qui, arriva. Dans sa loge, une fois
prêt, X. demanda son casque. L'habilleur,
de connivence avec nous, lui apporte le
casque truqué. Il te met, entre en scène, se
campe pour commencer sa tirade, dit les
quatre premiers vers, fait un geste. crac!
La v,isière tombe. Il veut Ila relevein. Im-
possible. Que faire? sortir de scène? Ce
e )erait un scandale. Continuer sa tirade à
travers la visière baissée? Ce serait rîdi- -
cule C'est à ce parti néanmoins qu'il se
décide. Mais, en entendant cette voix ca-
verneuse sortant de ce bec d'oiseau grotes-
que, le public se tord de rLre et force est
au malheureux de déoàmpelr à toutes jam-
bes, en faisant sonner toute sa ferblante-
rie. u
,La seconde anecdote, dont je me souviens
a une aillure napoléonienne assez savoureu-
se. Je donne encore lia parole à l'inépuisa-
ble conteur:
« Oro jouait un drame militaire qui se
passait sous le Premier Empire. Nous vou-
lions faire une farce à un camarade rem-
plissant le rôle de Napoléon. Au dénoue-
ment, le soir d'une victoire, l'Empereur
doit lire une proclamation à ses troupes.
C'est Berthier, chef d'état-major général,
qui doit lui remettre le rouleau de papier
portant le texte de la proclamation, que,
bien entendu, pair' une négligence commune
à tous les comédiens, en pareil cas, l'ac-
teur n'a pas pris la peinte d'apprendre. Il
fut convenu que, ce soir-là, Berthier ap-
porterait un papier blanc, complètement
bfenc.
Et voici comment les choses se passè-
rent:
Napoléon entre en scène, suivi de son
état-major. Berthier va à llui, s'incline, Lui
présente le rouleau de papier. Napoléon le
déplie, regarde, s'aperçoit que le texte
manque. H devient pâle, mais ne perd
pas la tête, et foudroyant du regard le ca-
marade qui a voulu le mystifier :
« Maréchal Benhielf, j'ai cru mettre le
comble à la reconnaissance que je dois à
vos mérites en' vous faisant Maréchal de
France, prince de Wagram et de Neuchâ-
teil, grand-croix de mon aigle impérial, chef
d'état-major géinérail de mes armées. Eh!
bien, ce n'était pas suffisant. Je vous .ré-
servais l'honneur suprême de litre aujour-
d'hui la proclamation que j'adresse à mes
vaillantes troupes. » -
Et il luii tendit le papier. « Tête » du
maréchal Berthier. M&is il ne perdit pas
son sang-froid et, foudroyant à son tour
Napoléon d'un regard ironique:
« Siire, il est vrai que vous m'avez com-
blé de vos bienfaits. Vous m'avez créé ma-
réchal de France, chef d'état-major de vos
armées, etc., etc. Mais daignez ne pas
oublier que je ne suis qu'un homme sains
instruction- première, un simple officier de
fortune., et que je ne sais pas lire!. »
Et il lui retenait le mialheureux papier.
Nouvelle « tête » de l'Empereur, mais
nouvelle, preuve de présence d'esprit. Il
se tourne vers l'Impératrice qui assistait à
la revue: -- .- -, .- , ., -
« Madame, c'est à vous alors que je
m'adresse poutr. lire cette proclamation.Pas-
sant - par vos lèvres, elle sera encore mieux
appréciée par mes braves soldats. »
Et H re-retend le papier.
L'actrice qui jouait le rôle de l'Impéra-
trke n'était point sotte. Elle s'incline de-
vant Sa Majesté l'Empereur et Roi, et, les
yeux pleins d'une insidieuse: flatterie:
« Sire, vous me voyez confuse d'avoir
à vous refuser un pareil honneur; mais le
soleil d'Austeditz m'a aveuglée! »
« Tonnerre! » grommela Napoléon e:",-
trie ses dents.
Mais il voulut avoir le dernier et se tour-
nant vers uin aide de camp :
« Portez ce papier au général Cambronr
ne. Un jour viendra peut-êtire où i,l en aura
besoin! » .-'-
Febvre, en finissant cette anecdote, né-
gligeait de dire comment le public avait
pris la chose. Je me suis souvent demandé
dat,eurs si, cette histoire n'était pas sin-
guikerement amplifiée par lui ou même in-
ventée de toutes pièces. Qu'importe? J'ai
pris jadis plaisir à l'entendre.; j'espère que
on aura aujourd'hui le même plaisir à la
lire.
Jacques NORMAND.)
Pour le Centenaire du Gymnase 1
- M. Henry "Bernstein offre une Matinée gratuite 1:
Le ceintenaire de la fondation du Gymnase tom-
bait le 23 decembre. M. Henry Bemstein aurait
voulu pouvoir fêter ce jour même l'ouverture de
ce théât,re qui fut et qui est encore un des plus
charmants des boulevards, en donnant une mati-
née gratuite où il aurait fait représenter quatre
Pertes pièces en un acte, jouées en 1821 au
gymnase. Mais les fêtes de Noël et du Nouvel
an ayant surmené ses artistes, il décida de fêter
ce centenaire le II janvier. Nous sommes allé
voir l'auteur de la Rafale qui, très aimablement
selon sa coutume, voulut bien nous parler du
centenaire de son théâtre.
(Pîioto Boissonas et Taponier)
M. Henry BERNSTEIN
- Je me suis d~-'cidé, nous dit-il, à offrir une
matinée gerraattuuihte e comme celle du 14 millet au,
public du quartier Bonne-Nouvelle et au pu-blie
Parisien en général.
« C'est une occasion pour moi de convier
une oeuvre d'artistes les très Prîtes bourses
qui Soat éloignées du théâtre par le prix des pla-
ces prix imposés aux entreprises théâtrales par
le frais grandissants et redoutables dont nous
sommes accablés.
ff Cette too,Je fête fera grand plaisir, j'en suis
sûr au pu.blic du quartier Bonne-Nouvelle qui
vit là Paisiblement, de père en fils, public com-
posé p.t'esque un:'quement de petits boutiquiers et
de petits àrtisans. Il y a encore des gens dont
les grands-pare.nts ont assi5té à l'ouverture du
Gymnase.
» Je ve.ux réserver également un grand nom-
bre de places gratuites à des professionnels du
théâtre et ayant tout, aux auteurs, stagiaires
adhérents de la Société des Auteurs, à des aS
tes dramatiques et musiciens jouant actuellement
a Paris, et même à des professionnels du petit
,personnel. En conséquence, j'ai prié tous les re-
présentants des différents syndicats fédérés oui
libres, de m'aider à faire le contrôle des entrées.
« Je suis enchanté d'avoir l'occasion d'inviter
un grand nombre de braves gens qui sont vérita-
blement qualifiés pour assister à d.es représenta-
tions gratuites, puisqu'ils font partie du « bâti-
ment ». Malheureusement, nous ne pouvons les
convier sans leur faire payer les taxes et droits,
ce qui finit par. représenter le prix d'un bon
biiHet d'avant-guerre. -
« Mmes. Simone et Mady Berry, MM. Signo-
ret, Grétiltet, Alcover et Numès ont bien voulu
prêter leur concours gratuitement afin de s'as-
socier avec moi à cette petite fête toute fami-
liale. M - -..: -
Nous adressons à M. Bernstein toutes nos fé-
licitations pour son beau geste qu,i permettra'à
toutes les catégories d'artistes d'assister- à La
Rafale, cette pièce remarquable. de vigueur, de
concision, dont l'action pathétique entraîne sans
un instant de détente Le spectateur, -dans une scr-
te de tcurbillon d'angoisse. ■. ;
- - .;. .- ; y : -, : A. D'E.
Nos Etrennes
à nos abonnés, à nos lecteurs
Nous avons pu obtenir dans des conditions
exceptionnelles un assez grand nombre de ma
gnifiques boîtes, présentées avec un goût parfait
dans un cartonnage d'art, et contenant du choco-
lat de la célèbre maison Klaus. '., ,,' -
Ces boîtes sont actuellement d'une valeur
marchande de 25 francs. - - --
A l'occasion des étrennes, et pendant quelques
jours encore, nous offrons:
1° Gratuitement une boîte à tout nouvel
abonné ou à tout ancien abonné, prolongeani
son abonnement d'une année.
2° Au prix, de douze francs, une ou plusieurs
boites, à tout abonné quelle que soit la durée
de son abonnement.
3° Au prix de quinze francs, une ou plusieurs
boites, à tout lecteur présentant, cinq exemplai-
res différents de Gomœdia.
Ces boîtes sont exposées dans les bureaux de
l'Administration du Journal. Les abonnés pour-
ront, en les retirant, prendre en même temps
Leur ticket d'assurance :
Leurs coupons de réduction dans les théâtres.
- A nos Lecteurs
Nous sommes heureux d'annoncer que de-
main — et désormais chaque vendredi — Co-
moediia paraîtra sur six pages.
Nos lecteurs qui, depuis la réapparition de
notre journal, suivent avec une sympathie fidè-
lement attentive, les efforts que nous faisons
pour présenter de la vie artistique et littéraire
une image aussi complète que oossible. ont, plit
voir combien il était. parfois difficile de ta ré-
péter tout entière. dans le miroir souvent trop
exigu de quatre pages.
c'est en grande partie notre rubrique ciné-
matographique qui bénéficiera de la place dont
nous allons disposer. Notre collaborateur ¡.-L.
Croze aura naturellement la haute main sur
« Ciné-Comœdia » qui s'efforcera de donner le
plus d'échos, le plus d'images possibles sur le
monde si intéressant, si vivant, du film fr an-,
çais et étranger.
Les autres rubriques seront, elles aussi lar-
gement favorisées.
Ainsi, Comœdia pourra donner à quelques
grandes questions d'art et de théâtre l'impor-
tance qui leur est due et que, seule, jusqu'ici,
le manque de place, nous avait empêché de trai-
ter comme nous l'aurions désiré.
Les matinées poétiques
de la Comédie»Française
*"' r G
Emile Despax
- 1 1
Quand, un jour de printemps, en 1905, parut
un recueil de poèmes intitulé La Maison des
Glycines, tous les lecteurs, séduits et ravis, com-
prirent qu'un adolescent renouvelait, pvec une
grâce infinie, le sentiment de l'adolescence. Dans
ces pages où les paysages des Landes et du
Béarn reposent comme les fleurs endormies dans
l'herbier de Francis Jammes, l'Idylle et l'Elé-
gie font alterner le rire des jeunes filles et la
plainte du jeune homme. Vraiment les tourte-
relles et le ramier échangent dans ce livre fré-
missant, sous un ciel de poésie, leur antique
chant naturel, transposé pour dès voix humaines.
Paysages assouPis et résineux, vallons rafraî-
chis par le vent des gaves, petits villages con-
fits dans la chaleur, le silence et les parfums,
charmante cité de Bayonne, on ne vous parcour-
ra plus sans songer avec mélancolie: à ce jeune
Théocrite que fut Emile Despax.
Cet enfant de-Virgile, amoureux des mutines
bergères qui sortent des pensionnats de Pau pour
les vacances, de Noël et de Pâques, ne devant
pas dépasser l'âge heureux des plaintes légères
et de la tristesse enivrée. **
Mort pour la France au début de l'année 191.5,
il est de ceux qu'enveloppe d'une étreinte plus
attendrie cette illustre lamentation funèbre :
« L'année a perdu son printemps ».
Comtesse de NoaiUes
(M. Escande dira : Bonheur, d'Emile Despax).-
Echos
6 Janvier 1846. — Au Théâtre-Italien, première re-
présentation (l'Ernani, de Verdi, créé à Venise.
u
ne .re'traite. , :
Dans l'une des travées conduisant
aux fauteuils d orchestre, le jour de lia « gé-
nérale » de Maman Colibri une petite da-
me, toute .vive avec ses cheveux blonds-
blancs, déclarait: « L'an prochain! Je ver14
rai l'an prochain. pensez. Je serai ren-
tière, alors! » ':,
Est-ce que Mme Anton va quitter son pe-,
tit brnreau des abonnements où elile offh"
ciaat depuis si longtemps avec tant de boninp
grâce et d'autorité. Qui sera donc la direct
tri ce dies « abonnements », '1 ',an prochain,
chez Molière? - -
s
ouivenirs sur George Sand. '- -- -
Nous aillons avoir au musée Car'na-
valet une salle spéciale.: la « Salle George-
Sand ». On y verra, offertes par Mme
Lauth-Sand, petite-fille dé George Sand;,
quelques œuvres se rapportant à l'illustre
romancier: des croquis die Delacroix, des
caricatures et des autographes de Chopin
et de Musset, et de nombreuses peintures
die la famille Sand et de ses ascendants,
parmi lesquels le maréchal dé Saxe dont un
magnifique pastel de La Tour reproduit l'i-
mage.
A
stiroinorrae et chorégraphie.
L'apothéose du cinquième acte de
castor et Pollux nous présente 1 arrivée a:u
ciel des gémeaux qui sont promus à lagnité de constellation.
On y voit le soleil, entouré de ses satel-
listes et tous lies astres qui gambadent alen-
tour.
Or, lorsqu'on monta l'oeuvre de Rameau
en 1918, M. Nicolas Gu'eirira, maître de bal-
l'et à cette époque voulait que- ce divertis-
sement figurât exactement la révolution des
astres. Et il étudiait l'astronomie, dans lies
ouvrages de M. Camille Flammarion., et il
arrêtait les gens dans les couloirs pour Leur
demander « te' nombre de satellites de ju.
piter. » - ,
Mails depuis, nous avons eu Les Mystè-
res du Ciel, et le nouveau: ballet, s'il ré-
pond moins exactement à l'ordonnance de
la machine céleste, y gagne en richesse et
en harmonie. Jupiter ne se plaindra pas si
on lui retire des satellites.
L
auteur est bon prophète..
A la devanture d'un libraire, des en-
virons de la Trinité se trouve un exem-
plaire du Beethoven de M. René Fauchois.
Sur la première page de ce volume est
inscrite l,a, dédicace suivante: « A Paul
Deschanel, futur président de la Républi-
que, en souvenir d'un bel après-midi, René
Fallchois, nov. 1910. »
A cette époque le jeune poète fut bon
prophète, aujourd'hui à quel homme polir
tique enverrait-il un exemplaire de sa delr-
nière pièce, avec une .pafein'e dédicace?
Désignera-t-il le futur élu. d;e 1927?
s
9 r d f Ah d
ur la façade fraîchement repeinte du
Théâtre die Versailles, on peut lire
cette affiche, assez surprenante:
LAKMÉ
Opéra comique en 3 actes
Muf^ue de Puccini et de Ph. Gilles (sic)
J (Suit la distribution)
! Vraiment à Landlerneau cela passerait,
mais à 20 kilomètres de Paris, OR- exagère
u'n peu.
Le Masque de Verre.
Nous publierons demain un article de
A. t'SERSTEVENS
.1 et « La Musique chez soi n de
HENRI COLLET
LA RENTRÉE DE WAGNER A L'OPÉRA
- Reprise de "LA WALKYRIE"
1 *-\
'}: Voici , plus d'un an que Wagner a repris
place au concert, sans avoir vu s'ouvrir
devant Lui les portas du théâtre. Une telïie
Situation, paradoxale autant qu'insoutenable
nreŒ»çait de tourner au ridicule, pour peu
.- qu'euel se fût encore prolongée. Comment
admettre, en effet, que nos grandes asso-
fciaittons aient pu durant des mois inscrire
sur 3eurs programmes hebdomadaires, non
seulement des fragments symphoniques,
mais aussi des actes entiers de ces ouivra-
:g¡es, âiliors que leur représentation intégra>!e
étaaif impitoyablement proscrite dé nos prin-
'Cipau.x lyriques!
Est-H nécessaire de redire que le ban-
nissement momentané des œuvres wawnrë-
rknnes ne mit jamais en cause, le ,génde du
compositeur, et qu'il fut naguère unique-
ment motivé par des ra,iso)ns de sentiments
et de convenances qui se sont atténués ou
ont graduellement disparu ? Faut-il rappeler
qttte depuis sept ans déjà la production de
"Wagner est tombée dans le domaine public?
Mais le temps ayant fait son oeuvre, l'heu-
re du retour a sonné pour le compositeur
prodigue malgré Itui.
f La plupart dés drames du maître aie
Bayreuth appartenant au répertoire, on n'a-
vait que l'embarras du choix. M. Rouché Va
judicieusement fadlt porter sur La Walkyrie,
deuxième épisode de la tétralogie fameuse.
Ne comportant pas de chœurs, la pièce est
facile à remettre rapidement en scène, et
sa carrière passée est un sûr earamt de la
faveur qui l'attend.
C'est en mai 1893, sous la dulrection! Ber-
trand et Gailhardi, que La Walkyrie fut pour
la première fois représentée sur le pfeiteau
die: l'Académie Nationale. Dès vsa prime
chevauchée, la fière guerrière prit en crou-
pe le succès et leur élan nie se démentit
point au cours dés vin et années sui vantes,
même aiors que les tronçons séparés de
- (Ph"t.O Sabouirin, anc* Bert)
M. DELMAS
A
L'Anneau du Niebelung vinrent successive-
ment1, se souder là. x
: La partition: renferme des pages de ten-
dresse et de fougue qui la rendent particu-
lièrement chèlre aux fervents du système
waignériten. Je n'entreprendlrai point de dé-
couvrir ce que sait tout amateur éclairé:
la poésie du premier aote, tour à tour fa-
rouche et priiTtanier avet son finale passion-
rl , < Photo Nadar}
Mlle DEMOUCEOT
nément extasié ; la grandeur du d'eux, en dé-
pit des longueurs que renferme la dispute
conjugale dies divinités du Walhallah ; l'é-
tinpelanite chevauchée aux crinières vertigi-
neuses et aux lances brandies, puis l,a su-
blime scène des adieux die Wotan et de
l'Incantation; du feu, magnifique péroraison
d'un monument les plus grandioses qu'un
cerveau de musicien ait conçu-.
Lors die la création en notre capitale, les
protaigo.niiis.tes avaient nom Mmes Rose Ca-
ron, BrévaJ, Deschamps-Jehin, MM. Ernest
Van Dyck, Delmlas, Plançon. Durant plu-
sieurs lustres on vint acclamer dans leurs
rôles respectifs de Brunnhilde et de Wotan,
Mlle Bréval et M. Delmas, couple d'une
autorité supérieure.^
Aujourd'hui l'interprétation n'apparaît
pas moins hriHa:nte.A Mlle Demo:uogeot,arfiis-
te dans l'acception la plus élevée, a été con-
fiée cette figure d'amazone qui lui sied su-
perbement. Siegmuind, c'est M. Franz, té-
nor de musicalité rare, apte à déclamer le
récitatif wagnérién. M. Delmas incarne tou-
jours Wotan avec une ampleur inégalable:
la voix - ne saurai* être la même que jadis,
mais le style demeure magnifique. En Sie-
g^nd'e Mme Germaine Lubin a d'émouvants
accents, mais son articulation s'avère dé-
faillante. Mlle Lapevrette est une excellente
Fnicka. M. Gresse déployé ses qualités
coutumiières dans le personnage de Hun-
ding. Et je nomme dans l'ordre lies huit
WaLkures qui poussent les sauvages cris de
« Ho-ïs-to-ho l Hei-a-ha ! » : Mmies Lauite-
Briunjane Lavta.I, Ha:flamboulre, Odletite Leiroy,
Duboiis-Lauger, J. Royer, Dagne&ly, Arné.
L'orchestre que conduisit Ediaulalrd Co-
lonne le soir de l'a. première, était hier soir
dirigé par M. Camille Chevillard dont on
connaiit le compréhénsif attachement à cette
musique. Chef et exécutants s'acquittèrent
noblement de leur puissante mission sonore.
JEAN POUEIGH. ---
'1 La Soirée
Il paraît qu'une manifestation était nécessai-
re. Elle eut lieu. Mais elle n'était pas prémédi-
tée, à ce qu Til semble, et les coupables furent
dp malheureuses victimes qui voulaient entrer
maligré qu'on leur eût affirmé que 1'uJ.time stra-
pontin était loué. La garde municipale rétablit
l'ordre et expulsa du. hall où ils s'agitaient, ad
trop fervents admirateurs de la Walkyrie.
Lès couloirs fleuraient la poudre de riz com-
me '&ux soirs de grand gala et de grand décolleté:
de fait, on n'avait vu pareil déploiement d'élé-
gance depuis la dernière saison des baUets
russes.
Dans les entrées du parterre,, de l'orchestre et
des balcons, les retardataires, haussés sur la
pointe des pieds ou perchés sur des chaises, ten-
daient le cou. et l'oreille. -
Dans la salle, un silence surhumain. Malheur
au malheureux qui tentait de manifester sa ioie *
par un léger battement de mains. Des « chttts »
énergiques le rappelaient aussitôt aux bienséan-
ces. Les fidèles écoutèrent religieusement et se
dédommagèrent seulement après le dernier éclat
de l'orchestre 'saluant la chute du rideau. Chaque
acte fut suivi de cinq rappels; la foule, déchaî-
née, debout et hurlante, donnait l'impressioa
d'une émeute. v~
Un hurcn, peu au courant des usages civile
sés, s enquiit de la raison de cette effervescence
et ne fut pleinement rassuré que lorsqu'on lui
eût affirmé que tous ces gens-là ne voulaient
point la tête de M. Chevillard, mais qu'ils sou^
haitaient seulement de l'acclamer sur le plateau -
M. Camille Chevillard apparut donc, en(4
Erunnhilde et Wotan, Mlle Demougeot et M*
Delmas. p
Mile Demougeot fut acclamée à la fin d't
second acte avec un enthousiasme frénétique,
M. Franz et M. Delmas obtinrent un véritabre
triomphe, t
D'ans les couloirs, la foule s'écrasait. Et tout
le monde semblait réjoui comme d'une victoire.
Un compositeur murmurait : « Voilà Wagner
revenu à l'Opéra, les concerts joueront .peut-être
maintenant un peu plus de musique française. n
Et une charmante danseuse disait à .un abonné
.-- (Photo SatKmnn. a:nc,' Bert)
M. FRANZ
.M
— tous les abonnés étaient là quoiqu'il n'y eut
pas de ballet — « Ce qu'iJ y a d'agréable dans
les œuvres de Wagner, c'est qu'il n'y a pas de
danse ; pendant ce temps, au moins, en se re-
pose ».
ANDRÉ RIGÀUD.
LES REPETITIONS GENERALES
GALATÉE pl BONHEUR
au Théâtre des Arts »
■ Sur la mer calmée. chantonne dans les
couteirs M. Darzens. Le chapeau en arrière,
les mains dans les poches, il va' des coulisses
au balcon, des loges au ba.r et sans avoir l'air
d'éceuter la pièce, il la suit bout à bout.
L. Sur la mef calmée.
Û paraît que l'atmosphère des dernières répé-
titions fut lourde.
Tandis que sur le plateau se répétait Bonheur
dénotes coulisses se jouait La Rafale. Comme
il faut toujours que ce soit le passant qui éco-
pe de la balle égarée, ce fut en l'occurence
l'hauteur ou plutôt son œuvre qui se ressentit de
la tension nerveuse provoquée par des discus-
sions intérieures. 1"
M. Ch. Oulmont m'a fait part de tout le bien
qu'il pensait de MM. BuTguet, Le Vigan, de
Mmâs Moreno, Sarah Rafale, Jane Pérez, Si j'en
juge '-par lies applaudissements qui furent prodi-
gués à ces artistes cette opinion fut aussi celle
du public..
M: Darzens nous a fait une surprise agréable
en nous présentant Mite Jane Pérez dans un
rôle qui était à sa mesure. Elle y a mis du
charme, de la vie, de la jeunesse. Sa Simone
fut bien celle conçue par l'auteur.
La pièce de M. Abfred Mortier reçut le meil-
leur accueil et ses interprètes furent très ap-
pLaudis. M. Arvel ne veut pas convenir qu'il
ait conservé l'accent méridional du « pasteur »»
et il m'en veut de le lui dire.
M. Le Vigan s'est composé un masque et une
sllîicmette remarquables. Mlle Maillane a un pe-
tit rôlte, mais c'est une Galatée charmante. Sa
dote, Mille C. Magnus, bien que perdant" lai
partie avec Pygmalion, est non moins charman-
te. Un Pygmalion moderne eût été' plus gailant
que te grec antique. Il'eût porté en son cœur
tout en même temps, l'image de Constantin et
de Vénizélos. pardon de Galatée et de Myrrha.
L. ROBERT DE THIAC
Les obsèques
de Mme Daniel Lesueur
On a célébré hier matin au Temple de la rue
Roquépîne,les obsèques de Mme Daniel Lesueur.
La levée du corps avait eu lieu dans l'apparte-
ment qu'occupe M. Henry Lapauze, au Petit-
Palais.
M.. Henry Lapauze conduisait le deuil. La
feule'était nombreuse, car elle se composait de
beaucoup d'écrivains et d'artistes, de tous les
amis littéraires de la défunte, de ses lecteurs et
de tous ceux dont sa bienfaisance inlassable
avait attiré la reconnaissance.
M. Edmond Haraucourt prit la parole au' nom
de la Société des Gens de Lettres. -
On remarquait dans l'assistance MM. Marcel
Prévo6t, Georges Lecomte, Albert Flament,
Mme Alphonse Daudet, etc.
A l'Association ^Syndicale de la Comédie.Française
M. Le Roy donne sa démission
à M. de Féraudy .-
M. Georges Le Roy, que j'interrogeais hier,
ici même, sur les causes et les fins de l'agita-
tion entretenue par un groupe de membres de
1 Association syndicale de la Comédie-Française,
groupe à la têté duquel il se trouvait, m'écrit
une lettre dont je vais publier ci-dessous tout
l'essentiel.
Mais cette lettre en contient une seconde,
dont l'importance n'échappera pas et qui mérite
d'être donnée à part et en premier.. Par cette
lettre, M. Le Roy a donné à M. de Féraudy,
dans la journée d'hier, sa démission définitive de
* - (Photo Henri Manuel) *
, M. M. die FERAUDY
secrétaire général de l'Association syndicale. La
voici :
Mon cher Président,
Je me sruis employé de mon mieux, depuis la
fondation de notre Association Syndicale à la
servir, en m'entourait de tous les conseils dési-
rables.
L'on prétend1 que j'ai agi par « orgueil », et par
anibition .peirsonnelle Il : Dans ces conditions,
3 aa 1 lx>iHveur de vous Tenouveleir ma démission
de membre du Conseil et de secrétaire général, en
vous piriant de vouloir bien la considérer comme
irrévocable.
Je vous pi-le, mon cher Président d'agréer l'ex-
pression de mon respectueux dévouement.
Georges Le Roy
Nous nous abstiendrons de commenter une
démission qui fera assurément réfléchir nombre
des principaux membres de l'Association syndi-
cale. On lira d'ailleurs plus loin, dans un ar-
ticle de M. Asté d'Esparbès, quels furent les
incidents qui se placent à l'origine de la déter-
mination de M. Le Roy.
Je demandais hier au jeune sociétaire de nous
exposer ses griefs, ses buts, de façon précise.
Il m'écrit justement à ce sujet :
.-- Cher Monsieur, 9 ,
J'ai « éclairé ma lanterne », dans une int&rtl^w
que « La (Liberté » a publiée à la date du
4 janvier dernier. Je vous serais particulièrement
obligé de ivoiutoir bien en reproduire la conclu-
sion que voici :
« En résume, nous entendons recréer l'esprit de
société, séparer les personnes des idées, substi-
tuer l'active, énetrgie A ce qui reste de routine
favoriser l'associaticin des tempéraments artistiques
et des talents en vue d'une production la plus
parfaite possible, ne point laisser tarir' la source
joyeuse des jeunes entlicuisiasmes et fai-re que le
public le plus délicat ne respire pas chez GUoltti*
un air de .petite, province, mais celui dont i,1 a
besoin de s« nourrir. Nous sommes quelques idéa-
listes entêtés, forcenés si l'oà}¡ veut .-le public
nous le pa~don.nera sans doute Ce que nousvou
lons, ce que noustateurs comme pour nous créateurs de chimères,
- c'est la doie,- la jOie pd'us ^',re opposa les
uns aux autres 1a JOie d'être guidés. - je pense
à la ballade de rGeorges Berr : Les Comédiens sont
de Petits enfants,. - la joie d'êtire aimés comme
nous aimons nous-mêmes. Nous voulons bien vo-
ter 4.800,000 francs de crédits, mais, pour ce prix-
là, , nous demandons ce que je viens-de tacher de
vous dire. De la joie pour ceux qui aimant et i
se dévouent. ; l'air libre pour .les autres -
, « Tel était le sens.- de cette association syndicale
a laquelle- je me suis employé de si grand cœur.
aux côtés de M. de Kraudy que. nous aivons vu'
tant de fois à notre tête quand il s'est agi de dé-
fendre des droits légitimes dans le" respect de
I ordre. Tel est le sens de mon ordre du jour
que, sur la proposition dé "M. l'Administrateur
général, l'AsscmMoo: des Sociétaires a voté à' l'una-
nimité dans le séance où, pour l'élection au Co-
mité, je me suis trouvé battu, tout en ayant la
majorité. »
Et M. Le Roy, avec des paroles trop a:mah
bles, faiit a.ppel à « ma courtoisie et à ma
loyauté » pour ne plus lui faire dire « ce qu'il
n'a pas dit ».
Je .ne faisais rien dire à M. Le Roy. J'essayais
simplement de l'aider par des interrogations plus
précises que les phrases qu'on vient de lire-.
Ces phrases, je les avais lues. Or, elles
-m'avaient paru bien générales. Toutes. I"
questions que je soulevais correspondent, M. Le
Roy le sait bien, soit à des erreurs, soit à de$'
irrégularités. Ces erreurs, ces irrégularités;'
quand on. est hors de la Maison, on ne peut qu^.
les signaler, quand on, est dedans on peut y
remédier. Les amis déjà Maison et le public
attendent un purificateur. M. Le Roy, s'il al
cette volonté et cette énergie, peut être soutenu,
î5* ANNEE — N- "2943 — Quotidte*
Le Numéro: 5 Paris 0 fr. 20
: 0 fr. 25
LONDON OFFICÈ, 20, High Holborn W. C. 1
Tél.: Holb 5.352 Principal Correspondant H. Sonnai.
-" - ABONNEMENTS
UN AN 6 MOIS 3 MOIS
France C5 » 35 » 20 »
Etranser. 85 » 45 ». 25 a
JEUDI 6 JANVIER 1921 , V
REDACTION & ADMINISTRATION
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L'ARMOIRE AUX SOUVENIRS
0 Farces de Comédienâ 0 -
Frédéric Febvre, ex-doyen die la Comé-
die-Française, était un des bavards les ptus
bavards que j'aie jamais connus.
H appartenait à la classe charmante par-
fois, mais terrible souvent, des « anecdo-
tiers ». Ce qu'il savait d'histoires de théâ-
tre est incroyable, sans compter celles
qu'il inventait. A force de les répéter, il fi-
nissait par croire, en toute bonne foi, à leur
authenticité.
J'ai eu souvent l'occasion de chasser
avec Febvire chez un ami commun, en
Seine-et-Marne. C'était un tireur médio-
cre; mais, comme élégance de tenue cyné-
gétique, il ne le cédait à personne. Des sou-
liers à la casquette, il était impeccable. Il
avait toujours l'air de sortir d'une plus que
Belle Jardinière. Quand le nasard vous
avait fait son voisin, il vous happait, entre
deux battues, et sa langue de courir, plus
vite que les lièvres par llui. manques.
Mais c'était à table qu'il fallait le voir,
t'entendre, plutôt. Il commençait à parler
dès le potage pour ne fintir. qu'au dessert.
Que dis-je, finir? Ce diable d'homme ne
finissait jamais. Le repas termine, la maî-
tresse de maison n'osait se lever pour don-
ner l'e signal du départ. Febvre parlait, par-
lait toujouirs. Les domestiques, figés autour
de la table, maudissaient le bavard intaris-
sable qui les empêchait d'aller dîner à leur
tour. Quand, finalement, on se levait, Feb-
vre parlait encore. Et, au s a ton, sitôt qu'on
était assis, Febvre recommençait de parler.
Je me hâte de rendre un juste hommage
à ta vérité en ajoutant que, s'H' parlait trop,
il pariait bieln. Il racontait avec esprit. Il
savait, e;ni acteur d.e grand talent, doroner
de la vie à tout ce qu'il disait, mettre en
scène la moindre anecdote, et surtout lan-
cer le trait, comme il avait l'habitude de le
faire à la scène.
J'ai oublié La plupart des histoires que
m'a racontées Febvre. En voici deux ce-
pendant qui me reviennent en mémoire.
Ce sont deux farces de comédiens. Ils ne
son font plus guère de nos jours. La vie
est trop morose. Mais au temps de la jeu-
nesse de Febvre — et cela remonte Ic.i.n-,
car il est mort fort âgé — i's ne s'en pri-
vaient pas. Pour plus de facilité dans moni
réoit, je laisse la parole au défunt et aima-
ble doyen de là comédie.
« je jouais alors dans ylni théâtre du
bouleyard. On représentait un grand dra-
me en cinq actes et en vers, dirame moyen-
âgeux; ouinasses, gantelets de fe,r, bras-
sards, cuissards, toute la ferblanterie ro-
mantique, d'alors. Agacés par le .carac~ tère
orgueilleux et gri-ncheux d'un de - nos
camarades, nous résolûmes de Lui en
faire '« une bonne ». H remplissait, dans
fla pièce, le rôle d'un chevalier partant
pour la croisade — ou en revenant, je ne
sais au juste. Il portait un. de ces casques
de tonne cocasse qui,: lorsque la visière
est baissée, donnent à l'homme un aspect
a oiseau au bec pointu. Au beau milieu
d un acte, dans une scène très dramatique,
- ou qui voulait l'être — notre camarade
arrivât- en scène, fier, superbe, le jarret
tendu, et, avec de grands gestes, déclamait
une tirade d'une centaine de vers, au
moins. - - - 1
« Nous eqmes l'idée diadique de pireinr
d.re son casque chez le costumier du théâ-
tire et d y adapter un petit système à dé-
tecte qui dès le premier geste un peu vio-
lent, se déclanchait et faisait brusquement
retomber la visière, et de telle façon qu'il
était impose de la relever. Vous devi-
nez ce -qui, arriva. Dans sa loge, une fois
prêt, X. demanda son casque. L'habilleur,
de connivence avec nous, lui apporte le
casque truqué. Il te met, entre en scène, se
campe pour commencer sa tirade, dit les
quatre premiers vers, fait un geste. crac!
La v,isière tombe. Il veut Ila relevein. Im-
possible. Que faire? sortir de scène? Ce
e )erait un scandale. Continuer sa tirade à
travers la visière baissée? Ce serait rîdi- -
cule C'est à ce parti néanmoins qu'il se
décide. Mais, en entendant cette voix ca-
verneuse sortant de ce bec d'oiseau grotes-
que, le public se tord de rLre et force est
au malheureux de déoàmpelr à toutes jam-
bes, en faisant sonner toute sa ferblante-
rie. u
,La seconde anecdote, dont je me souviens
a une aillure napoléonienne assez savoureu-
se. Je donne encore lia parole à l'inépuisa-
ble conteur:
« Oro jouait un drame militaire qui se
passait sous le Premier Empire. Nous vou-
lions faire une farce à un camarade rem-
plissant le rôle de Napoléon. Au dénoue-
ment, le soir d'une victoire, l'Empereur
doit lire une proclamation à ses troupes.
C'est Berthier, chef d'état-major général,
qui doit lui remettre le rouleau de papier
portant le texte de la proclamation, que,
bien entendu, pair' une négligence commune
à tous les comédiens, en pareil cas, l'ac-
teur n'a pas pris la peinte d'apprendre. Il
fut convenu que, ce soir-là, Berthier ap-
porterait un papier blanc, complètement
bfenc.
Et voici comment les choses se passè-
rent:
Napoléon entre en scène, suivi de son
état-major. Berthier va à llui, s'incline, Lui
présente le rouleau de papier. Napoléon le
déplie, regarde, s'aperçoit que le texte
manque. H devient pâle, mais ne perd
pas la tête, et foudroyant du regard le ca-
marade qui a voulu le mystifier :
« Maréchal Benhielf, j'ai cru mettre le
comble à la reconnaissance que je dois à
vos mérites en' vous faisant Maréchal de
France, prince de Wagram et de Neuchâ-
teil, grand-croix de mon aigle impérial, chef
d'état-major géinérail de mes armées. Eh!
bien, ce n'était pas suffisant. Je vous .ré-
servais l'honneur suprême de litre aujour-
d'hui la proclamation que j'adresse à mes
vaillantes troupes. » -
Et il luii tendit le papier. « Tête » du
maréchal Berthier. M&is il ne perdit pas
son sang-froid et, foudroyant à son tour
Napoléon d'un regard ironique:
« Siire, il est vrai que vous m'avez com-
blé de vos bienfaits. Vous m'avez créé ma-
réchal de France, chef d'état-major de vos
armées, etc., etc. Mais daignez ne pas
oublier que je ne suis qu'un homme sains
instruction- première, un simple officier de
fortune., et que je ne sais pas lire!. »
Et il lui retenait le mialheureux papier.
Nouvelle « tête » de l'Empereur, mais
nouvelle, preuve de présence d'esprit. Il
se tourne vers l'Impératrice qui assistait à
la revue: -- .- -, .- , ., -
« Madame, c'est à vous alors que je
m'adresse poutr. lire cette proclamation.Pas-
sant - par vos lèvres, elle sera encore mieux
appréciée par mes braves soldats. »
Et H re-retend le papier.
L'actrice qui jouait le rôle de l'Impéra-
trke n'était point sotte. Elle s'incline de-
vant Sa Majesté l'Empereur et Roi, et, les
yeux pleins d'une insidieuse: flatterie:
« Sire, vous me voyez confuse d'avoir
à vous refuser un pareil honneur; mais le
soleil d'Austeditz m'a aveuglée! »
« Tonnerre! » grommela Napoléon e:",-
trie ses dents.
Mais il voulut avoir le dernier et se tour-
nant vers uin aide de camp :
« Portez ce papier au général Cambronr
ne. Un jour viendra peut-êtire où i,l en aura
besoin! » .-'-
Febvre, en finissant cette anecdote, né-
gligeait de dire comment le public avait
pris la chose. Je me suis souvent demandé
dat,eurs si, cette histoire n'était pas sin-
guikerement amplifiée par lui ou même in-
ventée de toutes pièces. Qu'importe? J'ai
pris jadis plaisir à l'entendre.; j'espère que
on aura aujourd'hui le même plaisir à la
lire.
Jacques NORMAND.)
Pour le Centenaire du Gymnase 1
- M. Henry "Bernstein offre une Matinée gratuite 1:
Le ceintenaire de la fondation du Gymnase tom-
bait le 23 decembre. M. Henry Bemstein aurait
voulu pouvoir fêter ce jour même l'ouverture de
ce théât,re qui fut et qui est encore un des plus
charmants des boulevards, en donnant une mati-
née gratuite où il aurait fait représenter quatre
Pertes pièces en un acte, jouées en 1821 au
gymnase. Mais les fêtes de Noël et du Nouvel
an ayant surmené ses artistes, il décida de fêter
ce centenaire le II janvier. Nous sommes allé
voir l'auteur de la Rafale qui, très aimablement
selon sa coutume, voulut bien nous parler du
centenaire de son théâtre.
(Pîioto Boissonas et Taponier)
M. Henry BERNSTEIN
- Je me suis d~-'cidé, nous dit-il, à offrir une
matinée gerraattuuihte e comme celle du 14 millet au,
public du quartier Bonne-Nouvelle et au pu-blie
Parisien en général.
« C'est une occasion pour moi de convier
une oeuvre d'artistes les très Prîtes bourses
qui Soat éloignées du théâtre par le prix des pla-
ces prix imposés aux entreprises théâtrales par
le frais grandissants et redoutables dont nous
sommes accablés.
ff Cette too,Je fête fera grand plaisir, j'en suis
sûr au pu.blic du quartier Bonne-Nouvelle qui
vit là Paisiblement, de père en fils, public com-
posé p.t'esque un:'quement de petits boutiquiers et
de petits àrtisans. Il y a encore des gens dont
les grands-pare.nts ont assi5té à l'ouverture du
Gymnase.
» Je ve.ux réserver également un grand nom-
bre de places gratuites à des professionnels du
théâtre et ayant tout, aux auteurs, stagiaires
adhérents de la Société des Auteurs, à des aS
tes dramatiques et musiciens jouant actuellement
a Paris, et même à des professionnels du petit
,personnel. En conséquence, j'ai prié tous les re-
présentants des différents syndicats fédérés oui
libres, de m'aider à faire le contrôle des entrées.
« Je suis enchanté d'avoir l'occasion d'inviter
un grand nombre de braves gens qui sont vérita-
blement qualifiés pour assister à d.es représenta-
tions gratuites, puisqu'ils font partie du « bâti-
ment ». Malheureusement, nous ne pouvons les
convier sans leur faire payer les taxes et droits,
ce qui finit par. représenter le prix d'un bon
biiHet d'avant-guerre. -
« Mmes. Simone et Mady Berry, MM. Signo-
ret, Grétiltet, Alcover et Numès ont bien voulu
prêter leur concours gratuitement afin de s'as-
socier avec moi à cette petite fête toute fami-
liale. M - -..: -
Nous adressons à M. Bernstein toutes nos fé-
licitations pour son beau geste qu,i permettra'à
toutes les catégories d'artistes d'assister- à La
Rafale, cette pièce remarquable. de vigueur, de
concision, dont l'action pathétique entraîne sans
un instant de détente Le spectateur, -dans une scr-
te de tcurbillon d'angoisse. ■. ;
- - .;. .- ; y : -, : A. D'E.
Nos Etrennes
à nos abonnés, à nos lecteurs
Nous avons pu obtenir dans des conditions
exceptionnelles un assez grand nombre de ma
gnifiques boîtes, présentées avec un goût parfait
dans un cartonnage d'art, et contenant du choco-
lat de la célèbre maison Klaus. '., ,,' -
Ces boîtes sont actuellement d'une valeur
marchande de 25 francs. - - --
A l'occasion des étrennes, et pendant quelques
jours encore, nous offrons:
1° Gratuitement une boîte à tout nouvel
abonné ou à tout ancien abonné, prolongeani
son abonnement d'une année.
2° Au prix, de douze francs, une ou plusieurs
boites, à tout abonné quelle que soit la durée
de son abonnement.
3° Au prix de quinze francs, une ou plusieurs
boites, à tout lecteur présentant, cinq exemplai-
res différents de Gomœdia.
Ces boîtes sont exposées dans les bureaux de
l'Administration du Journal. Les abonnés pour-
ront, en les retirant, prendre en même temps
Leur ticket d'assurance :
Leurs coupons de réduction dans les théâtres.
- A nos Lecteurs
Nous sommes heureux d'annoncer que de-
main — et désormais chaque vendredi — Co-
moediia paraîtra sur six pages.
Nos lecteurs qui, depuis la réapparition de
notre journal, suivent avec une sympathie fidè-
lement attentive, les efforts que nous faisons
pour présenter de la vie artistique et littéraire
une image aussi complète que oossible. ont, plit
voir combien il était. parfois difficile de ta ré-
péter tout entière. dans le miroir souvent trop
exigu de quatre pages.
c'est en grande partie notre rubrique ciné-
matographique qui bénéficiera de la place dont
nous allons disposer. Notre collaborateur ¡.-L.
Croze aura naturellement la haute main sur
« Ciné-Comœdia » qui s'efforcera de donner le
plus d'échos, le plus d'images possibles sur le
monde si intéressant, si vivant, du film fr an-,
çais et étranger.
Les autres rubriques seront, elles aussi lar-
gement favorisées.
Ainsi, Comœdia pourra donner à quelques
grandes questions d'art et de théâtre l'impor-
tance qui leur est due et que, seule, jusqu'ici,
le manque de place, nous avait empêché de trai-
ter comme nous l'aurions désiré.
Les matinées poétiques
de la Comédie»Française
*"' r G
Emile Despax
- 1 1
Quand, un jour de printemps, en 1905, parut
un recueil de poèmes intitulé La Maison des
Glycines, tous les lecteurs, séduits et ravis, com-
prirent qu'un adolescent renouvelait, pvec une
grâce infinie, le sentiment de l'adolescence. Dans
ces pages où les paysages des Landes et du
Béarn reposent comme les fleurs endormies dans
l'herbier de Francis Jammes, l'Idylle et l'Elé-
gie font alterner le rire des jeunes filles et la
plainte du jeune homme. Vraiment les tourte-
relles et le ramier échangent dans ce livre fré-
missant, sous un ciel de poésie, leur antique
chant naturel, transposé pour dès voix humaines.
Paysages assouPis et résineux, vallons rafraî-
chis par le vent des gaves, petits villages con-
fits dans la chaleur, le silence et les parfums,
charmante cité de Bayonne, on ne vous parcour-
ra plus sans songer avec mélancolie: à ce jeune
Théocrite que fut Emile Despax.
Cet enfant de-Virgile, amoureux des mutines
bergères qui sortent des pensionnats de Pau pour
les vacances, de Noël et de Pâques, ne devant
pas dépasser l'âge heureux des plaintes légères
et de la tristesse enivrée. **
Mort pour la France au début de l'année 191.5,
il est de ceux qu'enveloppe d'une étreinte plus
attendrie cette illustre lamentation funèbre :
« L'année a perdu son printemps ».
Comtesse de NoaiUes
(M. Escande dira : Bonheur, d'Emile Despax).-
Echos
6 Janvier 1846. — Au Théâtre-Italien, première re-
présentation (l'Ernani, de Verdi, créé à Venise.
u
ne .re'traite. , :
Dans l'une des travées conduisant
aux fauteuils d orchestre, le jour de lia « gé-
nérale » de Maman Colibri une petite da-
me, toute .vive avec ses cheveux blonds-
blancs, déclarait: « L'an prochain! Je ver14
rai l'an prochain. pensez. Je serai ren-
tière, alors! » ':,
Est-ce que Mme Anton va quitter son pe-,
tit brnreau des abonnements où elile offh"
ciaat depuis si longtemps avec tant de boninp
grâce et d'autorité. Qui sera donc la direct
tri ce dies « abonnements », '1 ',an prochain,
chez Molière? - -
s
ouivenirs sur George Sand. '- -- -
Nous aillons avoir au musée Car'na-
valet une salle spéciale.: la « Salle George-
Sand ». On y verra, offertes par Mme
Lauth-Sand, petite-fille dé George Sand;,
quelques œuvres se rapportant à l'illustre
romancier: des croquis die Delacroix, des
caricatures et des autographes de Chopin
et de Musset, et de nombreuses peintures
die la famille Sand et de ses ascendants,
parmi lesquels le maréchal dé Saxe dont un
magnifique pastel de La Tour reproduit l'i-
mage.
A
stiroinorrae et chorégraphie.
L'apothéose du cinquième acte de
castor et Pollux nous présente 1 arrivée a:u
ciel des gémeaux qui sont promus à la
On y voit le soleil, entouré de ses satel-
listes et tous lies astres qui gambadent alen-
tour.
Or, lorsqu'on monta l'oeuvre de Rameau
en 1918, M. Nicolas Gu'eirira, maître de bal-
l'et à cette époque voulait que- ce divertis-
sement figurât exactement la révolution des
astres. Et il étudiait l'astronomie, dans lies
ouvrages de M. Camille Flammarion., et il
arrêtait les gens dans les couloirs pour Leur
demander « te' nombre de satellites de ju.
piter. » - ,
Mails depuis, nous avons eu Les Mystè-
res du Ciel, et le nouveau: ballet, s'il ré-
pond moins exactement à l'ordonnance de
la machine céleste, y gagne en richesse et
en harmonie. Jupiter ne se plaindra pas si
on lui retire des satellites.
L
auteur est bon prophète..
A la devanture d'un libraire, des en-
virons de la Trinité se trouve un exem-
plaire du Beethoven de M. René Fauchois.
Sur la première page de ce volume est
inscrite l,a, dédicace suivante: « A Paul
Deschanel, futur président de la Républi-
que, en souvenir d'un bel après-midi, René
Fallchois, nov. 1910. »
A cette époque le jeune poète fut bon
prophète, aujourd'hui à quel homme polir
tique enverrait-il un exemplaire de sa delr-
nière pièce, avec une .pafein'e dédicace?
Désignera-t-il le futur élu. d;e 1927?
s
9 r d f Ah d
ur la façade fraîchement repeinte du
Théâtre die Versailles, on peut lire
cette affiche, assez surprenante:
LAKMÉ
Opéra comique en 3 actes
Muf^ue de Puccini et de Ph. Gilles (sic)
J (Suit la distribution)
! Vraiment à Landlerneau cela passerait,
mais à 20 kilomètres de Paris, OR- exagère
u'n peu.
Le Masque de Verre.
Nous publierons demain un article de
A. t'SERSTEVENS
.1 et « La Musique chez soi n de
HENRI COLLET
LA RENTRÉE DE WAGNER A L'OPÉRA
- Reprise de "LA WALKYRIE"
1 *-\
'}: Voici , plus d'un an que Wagner a repris
place au concert, sans avoir vu s'ouvrir
devant Lui les portas du théâtre. Une telïie
Situation, paradoxale autant qu'insoutenable
nreŒ»çait de tourner au ridicule, pour peu
.- qu'euel se fût encore prolongée. Comment
admettre, en effet, que nos grandes asso-
fciaittons aient pu durant des mois inscrire
sur 3eurs programmes hebdomadaires, non
seulement des fragments symphoniques,
mais aussi des actes entiers de ces ouivra-
:g¡es, âiliors que leur représentation intégra>!e
étaaif impitoyablement proscrite dé nos prin-
'Cipau.x lyriques!
Est-H nécessaire de redire que le ban-
nissement momentané des œuvres wawnrë-
rknnes ne mit jamais en cause, le ,génde du
compositeur, et qu'il fut naguère unique-
ment motivé par des ra,iso)ns de sentiments
et de convenances qui se sont atténués ou
ont graduellement disparu ? Faut-il rappeler
qttte depuis sept ans déjà la production de
"Wagner est tombée dans le domaine public?
Mais le temps ayant fait son oeuvre, l'heu-
re du retour a sonné pour le compositeur
prodigue malgré Itui.
f La plupart dés drames du maître aie
Bayreuth appartenant au répertoire, on n'a-
vait que l'embarras du choix. M. Rouché Va
judicieusement fadlt porter sur La Walkyrie,
deuxième épisode de la tétralogie fameuse.
Ne comportant pas de chœurs, la pièce est
facile à remettre rapidement en scène, et
sa carrière passée est un sûr earamt de la
faveur qui l'attend.
C'est en mai 1893, sous la dulrection! Ber-
trand et Gailhardi, que La Walkyrie fut pour
la première fois représentée sur le pfeiteau
die: l'Académie Nationale. Dès vsa prime
chevauchée, la fière guerrière prit en crou-
pe le succès et leur élan nie se démentit
point au cours dés vin et années sui vantes,
même aiors que les tronçons séparés de
- (Ph"t.O Sabouirin, anc* Bert)
M. DELMAS
A
L'Anneau du Niebelung vinrent successive-
ment1, se souder là. x
: La partition: renferme des pages de ten-
dresse et de fougue qui la rendent particu-
lièrement chèlre aux fervents du système
waignériten. Je n'entreprendlrai point de dé-
couvrir ce que sait tout amateur éclairé:
la poésie du premier aote, tour à tour fa-
rouche et priiTtanier avet son finale passion-
rl , < Photo Nadar}
Mlle DEMOUCEOT
nément extasié ; la grandeur du d'eux, en dé-
pit des longueurs que renferme la dispute
conjugale dies divinités du Walhallah ; l'é-
tinpelanite chevauchée aux crinières vertigi-
neuses et aux lances brandies, puis l,a su-
blime scène des adieux die Wotan et de
l'Incantation; du feu, magnifique péroraison
d'un monument les plus grandioses qu'un
cerveau de musicien ait conçu-.
Lors die la création en notre capitale, les
protaigo.niiis.tes avaient nom Mmes Rose Ca-
ron, BrévaJ, Deschamps-Jehin, MM. Ernest
Van Dyck, Delmlas, Plançon. Durant plu-
sieurs lustres on vint acclamer dans leurs
rôles respectifs de Brunnhilde et de Wotan,
Mlle Bréval et M. Delmas, couple d'une
autorité supérieure.^
Aujourd'hui l'interprétation n'apparaît
pas moins hriHa:nte.A Mlle Demo:uogeot,arfiis-
te dans l'acception la plus élevée, a été con-
fiée cette figure d'amazone qui lui sied su-
perbement. Siegmuind, c'est M. Franz, té-
nor de musicalité rare, apte à déclamer le
récitatif wagnérién. M. Delmas incarne tou-
jours Wotan avec une ampleur inégalable:
la voix - ne saurai* être la même que jadis,
mais le style demeure magnifique. En Sie-
g^nd'e Mme Germaine Lubin a d'émouvants
accents, mais son articulation s'avère dé-
faillante. Mlle Lapevrette est une excellente
Fnicka. M. Gresse déployé ses qualités
coutumiières dans le personnage de Hun-
ding. Et je nomme dans l'ordre lies huit
WaLkures qui poussent les sauvages cris de
« Ho-ïs-to-ho l Hei-a-ha ! » : Mmies Lauite-
Briunjane Lavta.I, Ha:flamboulre, Odletite Leiroy,
Duboiis-Lauger, J. Royer, Dagne&ly, Arné.
L'orchestre que conduisit Ediaulalrd Co-
lonne le soir de l'a. première, était hier soir
dirigé par M. Camille Chevillard dont on
connaiit le compréhénsif attachement à cette
musique. Chef et exécutants s'acquittèrent
noblement de leur puissante mission sonore.
JEAN POUEIGH. ---
'1 La Soirée
Il paraît qu'une manifestation était nécessai-
re. Elle eut lieu. Mais elle n'était pas prémédi-
tée, à ce qu Til semble, et les coupables furent
dp malheureuses victimes qui voulaient entrer
maligré qu'on leur eût affirmé que 1'uJ.time stra-
pontin était loué. La garde municipale rétablit
l'ordre et expulsa du. hall où ils s'agitaient, ad
trop fervents admirateurs de la Walkyrie.
Lès couloirs fleuraient la poudre de riz com-
me '&ux soirs de grand gala et de grand décolleté:
de fait, on n'avait vu pareil déploiement d'élé-
gance depuis la dernière saison des baUets
russes.
Dans les entrées du parterre,, de l'orchestre et
des balcons, les retardataires, haussés sur la
pointe des pieds ou perchés sur des chaises, ten-
daient le cou. et l'oreille. -
Dans la salle, un silence surhumain. Malheur
au malheureux qui tentait de manifester sa ioie *
par un léger battement de mains. Des « chttts »
énergiques le rappelaient aussitôt aux bienséan-
ces. Les fidèles écoutèrent religieusement et se
dédommagèrent seulement après le dernier éclat
de l'orchestre 'saluant la chute du rideau. Chaque
acte fut suivi de cinq rappels; la foule, déchaî-
née, debout et hurlante, donnait l'impressioa
d'une émeute. v~
Un hurcn, peu au courant des usages civile
sés, s enquiit de la raison de cette effervescence
et ne fut pleinement rassuré que lorsqu'on lui
eût affirmé que tous ces gens-là ne voulaient
point la tête de M. Chevillard, mais qu'ils sou^
haitaient seulement de l'acclamer sur le plateau -
M. Camille Chevillard apparut donc, en(4
Erunnhilde et Wotan, Mlle Demougeot et M*
Delmas. p
Mile Demougeot fut acclamée à la fin d't
second acte avec un enthousiasme frénétique,
M. Franz et M. Delmas obtinrent un véritabre
triomphe, t
D'ans les couloirs, la foule s'écrasait. Et tout
le monde semblait réjoui comme d'une victoire.
Un compositeur murmurait : « Voilà Wagner
revenu à l'Opéra, les concerts joueront .peut-être
maintenant un peu plus de musique française. n
Et une charmante danseuse disait à .un abonné
.-- (Photo SatKmnn. a:nc,' Bert)
M. FRANZ
.M
— tous les abonnés étaient là quoiqu'il n'y eut
pas de ballet — « Ce qu'iJ y a d'agréable dans
les œuvres de Wagner, c'est qu'il n'y a pas de
danse ; pendant ce temps, au moins, en se re-
pose ».
ANDRÉ RIGÀUD.
LES REPETITIONS GENERALES
GALATÉE pl BONHEUR
au Théâtre des Arts »
■ Sur la mer calmée. chantonne dans les
couteirs M. Darzens. Le chapeau en arrière,
les mains dans les poches, il va' des coulisses
au balcon, des loges au ba.r et sans avoir l'air
d'éceuter la pièce, il la suit bout à bout.
L. Sur la mef calmée.
Û paraît que l'atmosphère des dernières répé-
titions fut lourde.
Tandis que sur le plateau se répétait Bonheur
dénotes coulisses se jouait La Rafale. Comme
il faut toujours que ce soit le passant qui éco-
pe de la balle égarée, ce fut en l'occurence
l'hauteur ou plutôt son œuvre qui se ressentit de
la tension nerveuse provoquée par des discus-
sions intérieures. 1"
M. Ch. Oulmont m'a fait part de tout le bien
qu'il pensait de MM. BuTguet, Le Vigan, de
Mmâs Moreno, Sarah Rafale, Jane Pérez, Si j'en
juge '-par lies applaudissements qui furent prodi-
gués à ces artistes cette opinion fut aussi celle
du public..
M: Darzens nous a fait une surprise agréable
en nous présentant Mite Jane Pérez dans un
rôle qui était à sa mesure. Elle y a mis du
charme, de la vie, de la jeunesse. Sa Simone
fut bien celle conçue par l'auteur.
La pièce de M. Abfred Mortier reçut le meil-
leur accueil et ses interprètes furent très ap-
pLaudis. M. Arvel ne veut pas convenir qu'il
ait conservé l'accent méridional du « pasteur »»
et il m'en veut de le lui dire.
M. Le Vigan s'est composé un masque et une
sllîicmette remarquables. Mlle Maillane a un pe-
tit rôlte, mais c'est une Galatée charmante. Sa
dote, Mille C. Magnus, bien que perdant" lai
partie avec Pygmalion, est non moins charman-
te. Un Pygmalion moderne eût été' plus gailant
que te grec antique. Il'eût porté en son cœur
tout en même temps, l'image de Constantin et
de Vénizélos. pardon de Galatée et de Myrrha.
L. ROBERT DE THIAC
Les obsèques
de Mme Daniel Lesueur
On a célébré hier matin au Temple de la rue
Roquépîne,les obsèques de Mme Daniel Lesueur.
La levée du corps avait eu lieu dans l'apparte-
ment qu'occupe M. Henry Lapauze, au Petit-
Palais.
M.. Henry Lapauze conduisait le deuil. La
feule'était nombreuse, car elle se composait de
beaucoup d'écrivains et d'artistes, de tous les
amis littéraires de la défunte, de ses lecteurs et
de tous ceux dont sa bienfaisance inlassable
avait attiré la reconnaissance.
M. Edmond Haraucourt prit la parole au' nom
de la Société des Gens de Lettres. -
On remarquait dans l'assistance MM. Marcel
Prévo6t, Georges Lecomte, Albert Flament,
Mme Alphonse Daudet, etc.
A l'Association ^Syndicale de la Comédie.Française
M. Le Roy donne sa démission
à M. de Féraudy .-
M. Georges Le Roy, que j'interrogeais hier,
ici même, sur les causes et les fins de l'agita-
tion entretenue par un groupe de membres de
1 Association syndicale de la Comédie-Française,
groupe à la têté duquel il se trouvait, m'écrit
une lettre dont je vais publier ci-dessous tout
l'essentiel.
Mais cette lettre en contient une seconde,
dont l'importance n'échappera pas et qui mérite
d'être donnée à part et en premier.. Par cette
lettre, M. Le Roy a donné à M. de Féraudy,
dans la journée d'hier, sa démission définitive de
* - (Photo Henri Manuel) *
, M. M. die FERAUDY
secrétaire général de l'Association syndicale. La
voici :
Mon cher Président,
Je me sruis employé de mon mieux, depuis la
fondation de notre Association Syndicale à la
servir, en m'entourait de tous les conseils dési-
rables.
L'on prétend1 que j'ai agi par « orgueil », et par
anibition .peirsonnelle Il : Dans ces conditions,
3 aa 1 lx>iHveur de vous Tenouveleir ma démission
de membre du Conseil et de secrétaire général, en
vous piriant de vouloir bien la considérer comme
irrévocable.
Je vous pi-le, mon cher Président d'agréer l'ex-
pression de mon respectueux dévouement.
Georges Le Roy
Nous nous abstiendrons de commenter une
démission qui fera assurément réfléchir nombre
des principaux membres de l'Association syndi-
cale. On lira d'ailleurs plus loin, dans un ar-
ticle de M. Asté d'Esparbès, quels furent les
incidents qui se placent à l'origine de la déter-
mination de M. Le Roy.
Je demandais hier au jeune sociétaire de nous
exposer ses griefs, ses buts, de façon précise.
Il m'écrit justement à ce sujet :
.-- Cher Monsieur, 9 ,
J'ai « éclairé ma lanterne », dans une int&rtl^w
que « La (Liberté » a publiée à la date du
4 janvier dernier. Je vous serais particulièrement
obligé de ivoiutoir bien en reproduire la conclu-
sion que voici :
« En résume, nous entendons recréer l'esprit de
société, séparer les personnes des idées, substi-
tuer l'active, énetrgie A ce qui reste de routine
favoriser l'associaticin des tempéraments artistiques
et des talents en vue d'une production la plus
parfaite possible, ne point laisser tarir' la source
joyeuse des jeunes entlicuisiasmes et fai-re que le
public le plus délicat ne respire pas chez GUoltti*
un air de .petite, province, mais celui dont i,1 a
besoin de s« nourrir. Nous sommes quelques idéa-
listes entêtés, forcenés si l'oà}¡ veut .-le public
nous le pa~don.nera sans doute Ce que nousvou
lons, ce que nous
- c'est la doie,- la jOie pd'us ^',re opposa les
uns aux autres 1a JOie d'être guidés. - je pense
à la ballade de rGeorges Berr : Les Comédiens sont
de Petits enfants,. - la joie d'êtire aimés comme
nous aimons nous-mêmes. Nous voulons bien vo-
ter 4.800,000 francs de crédits, mais, pour ce prix-
là, , nous demandons ce que je viens-de tacher de
vous dire. De la joie pour ceux qui aimant et i
se dévouent. ; l'air libre pour .les autres -
, « Tel était le sens.- de cette association syndicale
a laquelle- je me suis employé de si grand cœur.
aux côtés de M. de Kraudy que. nous aivons vu'
tant de fois à notre tête quand il s'est agi de dé-
fendre des droits légitimes dans le" respect de
I ordre. Tel est le sens de mon ordre du jour
que, sur la proposition dé "M. l'Administrateur
général, l'AsscmMoo: des Sociétaires a voté à' l'una-
nimité dans le séance où, pour l'élection au Co-
mité, je me suis trouvé battu, tout en ayant la
majorité. »
Et M. Le Roy, avec des paroles trop a:mah
bles, faiit a.ppel à « ma courtoisie et à ma
loyauté » pour ne plus lui faire dire « ce qu'il
n'a pas dit ».
Je .ne faisais rien dire à M. Le Roy. J'essayais
simplement de l'aider par des interrogations plus
précises que les phrases qu'on vient de lire-.
Ces phrases, je les avais lues. Or, elles
-m'avaient paru bien générales. Toutes. I"
questions que je soulevais correspondent, M. Le
Roy le sait bien, soit à des erreurs, soit à de$'
irrégularités. Ces erreurs, ces irrégularités;'
quand on. est hors de la Maison, on ne peut qu^.
les signaler, quand on, est dedans on peut y
remédier. Les amis déjà Maison et le public
attendent un purificateur. M. Le Roy, s'il al
cette volonté et cette énergie, peut être soutenu,
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