Titre : Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire / directeur-rédacteur en chef : Gustave Chadeuil
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1886-06-01
Contributeur : Chadeuil, Gustave (1821-1896). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32757974m
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 68249 Nombre total de vues : 68249
Description : 01 juin 1886 01 juin 1886
Description : 1886/06/01 (A17,N5257). 1886/06/01 (A17,N5257).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7562040d
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-199
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 09/04/2013
Dix-ieptième année. — M* 5257
Prix du numéro à Paris : 15 centimes — Départements : 20 centimes
Mardi 4" juin 4886
LE XIX' SIECLE
JOURNAL RÉPUBLICAIN
RÉDACTION
!'adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
16, rue GadLet, le
Directeur politique :
A.-EDOUARD PORTALIS
ABONNEMENTS
DÉPARTEMENTS I
Trois mois Six mois 32 »»
Un an. 62 »>, |
PARIS
Trois mois— -Sîî »»
Six mois. SK
Un au. CO »»
Supplément p* l'Etranger (Europe) 1 fco par trimestre
Les abonnem18 partent des 1er et 15 de chaque mois
ADftlIINISTRA Tæ;s.-}
Adresser les Lettres et Mandats à l'Administrateur
1G, rue Cade"t, ±3
EN VENTE A LONDRES
A la liÏDx*air*ie jean
39, OLD COMPTON STREET (SOHO)
ET DANS SES SUCCURSALES
nÍ':;GISSEUns D'ANNONCES:
MM. LAGRANGE, CERF ET CIS
6, place de la Bourse, 6
BULLETIN
La Chambre a adopté hier la proposition
de loi de M. Ballue sur la responsabilité
des commandants de places ou de forte-
resses, et qui tend à assimiler les com-
mandants des armées de terre et de mer
en les soumettant tous, en cas de capitu-
lation, à un jugement obligatoire.
La question de la revision constitution-
nelle se pose en Belgique.
On sait que les conditions de l'électorat
politique sont fort différentes de ce qu'elles
sont en France et même en Allemagne.
Actuellement, la Constitution belge est ba-
sée sur le système censitaire en matière
électorale.
Le parti progressiste a inscrit dans le
programme de ses revendications l'insti-
tution du suffrage universel. Le parti libé-
ral ou doctrinaire, sans aller aussi loin
dans ses aspirations, se borne à demander
l'adjonction des capacités aux censitaires.
Le parti clérical, qui forme aujourd'hui
la majorité de la Chambre belge, ne veut,
cela va sans dire, ni du suffrage univer-
sel ni de l'adjonction des capacités. C'est
dans ces termes que se pose la question
de la revision qui s'agite depuis quelques
semaines dans les assemblées électorales
tenues à Bruxelles, à Liège et dans les
grands centres de Belgique, en vue du
renouvellement partiel de la Chambre des
représentants. - - h
Jjimancne dernier avait lieu à Liège une
réunion de l'Association libérale. La séance
offrait un attrait tout particulier. M. Frère-
Orban, leader du parti libéral, y a pro-
noncé un important discours qui peut être
considéré comme le programme des doc-
trinaires belges. L'éminent orateur a exa-
miné la question de la revision avec toute
l'ampleur que comporte un pareil. sujet.
M. Frère-Orban admet le principe de la
revision de la Constitution; il rappelle que
cette question est agitée depuis seize ans,
mais il est obligé de reconnaître qu'elle
n'a pas fait un pas en avant, bien au con-
traire, peut-être parce qu'elle n'a jamais
été posée nettement et de façon oppor-
tune.
Une solution favorable est-elle possible
à l'heure présente ? M. Frère-Orban ne le
pense pas pour plusieurs raisons.
D'abord il n'y aura pas une majorité
suffisante à la Chambre pour voter la ré-
forme électorale, quelle qu'elle soit. En
supposant que le parti libéral arrive à faire
entrer vingt de ses membres à la Cham-
bre, — ce qui ne semble pas probable,
étant donné l'influence du parti catholique
dans nombre de collèges, — ce succès in-
espéré ne suffirait pas à assurer le triom-
phe de la réforme, puisque la revision de
la Constitution ne peut être accomplie que
par les deux tiers des voix.
Il y a une autre raison. Le désaccord
le plus complet existe entre ceux-là mêmes
qui admettent la revision. Supprimer l'ar-
ticle 47 — celui qui règle les conditions
de l'électorat politique — est chose aisée ;
mais que pourra-t-on mettre à la place de
cet article 47? Le suffrage universel, le
suffrage capacitaire et censitaire ou le suf-
frage capacilaire seulement?
Autant de solutions, autant de contro-
verses. Est-ce dans ces conditions que l'on
peut raisonnablement faire de la revision
de la Constitution la plate-forme des élec-
tions qui vont avoir lieu prochainement?
Cette doctrine n'est pas celle des radicaux,
qui marcheront aux urnes en déployant
le drapeau du suffrage universel.
Nous saurons bientôt qui de M. Frère-
Orban ou de ses adversaires a le mieux
jugé la situation à ce point de vue parti-
culier. Mais il est dès à présent certain
qu'il faudra attendre le second renouvelle-
ment de la Chambre pour atteindre le
but, c'est-à-dire pour former une majorité
résolument révisionniste.
Louis HXNRlQUR.
—————————— .——————————.
INFORMATIONS PARTICULIÈRES
Au ministère des affaires étrangères
M. de Freycinet, minisfre des affaires étran-
gères, a reçu hier matin le nonce du pape.
L'entretien a porté sur les négociations re-
latives à l'envoi en Chine d'un légat du pape.
L'inspection des enfants assistés
Le conseil d'Etat, réuni dimanche en assem-
blée générale, a voté un nouveau règlement
d'administration publique concernant l'ins-
pection des enfants assistés.
Ce règlement a pour but de réagir contre
l'inexécution du règlement du 31 juillet 1870
qui laissait livrée à l'arbitraire ministériel
l'inspection des enfants assistés.
Voici les principales innovations qu'il con-
tient :
« Le cadre de l'inspection est fixé, pour le
département de la Seine, par le décret lui-
même, et pour les autres par arrêtés du mi-
nistre; des inspectrices et sous-inspectrices
sont crées en sus du personnel masculin ; un
maximum d'âge de quarante-cinq ans est éta-
bli pour l'admission dans le service, en con-
sidération de l'activité physique qu'il réclame.
Des simplifications sont introduites dans la
classification et l'échelle des traitements des
fonctionnaires ; pour que leur recrutement
offre toutes garanties de maturité et de com-
pétence, il s'opérera : pour les inspecteurs,
dans la profession médicale, les bureaux du
ministère de l'intérieur, l'inspection de l'en-
seignement primaire ; pour les sous-inspec-
teurs, dans le personnel administratif des
préfectures, sous-préfectures, mairies et éta-
lissements de bienfaisance et parmi les ins-
tituteurs ; des règles spéciales sont instituées
pour le département de la Seine. Enfin, pour
que les frais de tournée ne constituent pas un
supplément indirect de traitement, ils ne se-
ront liquidés qu'à concurrence des dépenses
faites et dûment justifiées. »
Les élections de dimanche
Une élection au conseil général a eu lieu
dimanche dans le canton do Villefranche-de-
Rouerguo (Aveyron).
Ont obtenu -
MM. Jugla, républicain 824 voix
Pastre, républicain. 730 —
Buffird, réactionnaire.. 307 —
n.ii.ii
mUlOttage
Deux élections au conseil d'arrondissement
ont également eu lieu : 1° dans le canton de
Châteauneuf (Maine-et-Loire), M. Briand, ré-
actionnaire, a été élu par 1,892 voix contre
641 à M. Cailleu.
2° Dans le canton de Damazan (Lot-et-Ga-
ronne), M. Neuville, républicain, a été élu par
1,227 voix contre 1,005 à M. Bacquié, réaction-
naire.
Les élections municipales complémentaires
qui ont eu lieu à Saint-Quentin ont donné la
majorité à tous les candidats républicains.
———————————— ———————————
Les princes doivent jubiler. La ques-
tion qui, aujourd'hui, prime toutes les
affaires publiques, est celle de savoir si
on les expulsera, comment on les expul-
sera, si ce sera par un décret, par un
arrêté ou par une loi, si on les expul-
sera tous à la fois ou les uns après les
autres. On allait jusqu'à dire, hier, qu'ils
pourraient être la cause d'une crise mi-
nistérielle qui, éclatant dans les circon-
stances présentes, aurait pour consé-
quence probable un remaniement du
budget et apporterait un inévitable re-
tard dans toutes les affaires engagées,
telles que, par exemple, l'Exposition,
le Métropolitain, les grands travaux de
Paris, etc., etc. Et tout cela pour-
quoi ? Parce que les radicaux de la
Chambre et même, dit-on, les radi-
caux du ministère ne trouveraient pas
le projet présenté par le gouvernement
pour régler la question des princes
assez radical, et qu'ils auraient la pré-
tention d'appliquer dans l'espèce la
fameuse politique tant exploitée contre
eux du tout ou rien. Qu'ils y pren-
nent garde ! Le pays ne comprend
rien à ces subtilités sur lesquelles
les intrigants de couloir échafaudent
des crises ministérielles. Le gouver-
nement, par le dépôt de son projet de
loi, a hautement manifesté sa ferme
résolution de n'user à l'égard des princes
d'aucun ménagement. S'il a demandé
à la Chambre l'autorisation de les ex-
pulser par des arrêtés pris en conseil des
ministres, au lieu de proposer une loi
générale d'expulsion qui aurait dégagé
sa responsabilité, c'est apparemment
qu'il avait ses raisons pour agir ainsi.
n •» 4 i •
oans cloute n n a pas voulu s exposer
et exposer la Chambre à un avorte ment
semblable à celui de 4883. Qui ne se
rappelle ce qui s'est passé à cette époque,
la Chambre votant un projet d'expul-
sion, le Sénat en adoptant un autre, la
Chambre votant alors une proposition
plus radicale, le Sénat la repoussant,
tout cela pour aboutir à ne rien voter du
tout, mais avec cette circonstance ag-
gravante que pendant la discussion deux
ministères étaient tombés les uns sur
les autres comme des capucins de carte ?
Si les radicaux profitaient du débat sur
les princes, qui n'est après tout qu'un
débat de pure forme, pour ouvrir une
crise ministérielle, c'est pour le coup
qu'on les accuserait d'être les en-
nemis jurés de toute stabilité gou-
vernementale et de jouer dans la po-
litique le rôle d'incorrigibles brouil-
lons ! Sans compter que ce n'est pas eux
qui, cette fois encore, croqueraient les
marrons qu'ils auraient tirés du feu. Ils
n'ont pour s'en convaincre qu'à consi-
dérer l'attitude et les airs de triomphe
de leurs pires ennemis.
QUESTIONS DU JOUR
Un parti qui s'en va
Le congrès impérialiste, dont le XIXo
Siècle d'hier a succinctement rendu
compte, se composait surtout de rédac-
teurs des journaux bonapartistes des
départements. Nos confrères, arrivés de
tous les points de la France, ont tenu
dans le même jour deux séances assez
mornes; on aurait dit de bons parents,
un peu éloignés, venus de leur province
pour un enterrement et échangeant
entre eux quelques propos découragés
sur la triste situation de la famille. Le
fait est que ce malheureux impérialisme
s'est effondré!
Son écrivain et son orateur le plus
brillant, M. Paul de Cassagnac, — qui
n'assistait pas au congrès, — s'est à peu
près rallié au parti royaliste-orléaniste-
clérical, tout en conservant un attache-
chement respectueux à la mémoire de
Napoléon III et du feu prince impérial ;
l'ancienne Droite du bonapartisme est
généralement dans des dispositions sem-
blables.
Le prince Jérôme a plutôt des amis
personnels que des partisans ; quant
aux illusions, je pense qu'il ne lui en
reste guère.
Le prince Victor enfin a découragé
ceux qui mettaient en lui quelque espé-
rance, et c'est par les impérialistes
mêmes qu'il a été le plus sévèrement
jugé.
Depuis la mort du prince impérial,
— qui d'ailleurs, s'il avait vécu, se serait
sans doute aliéné les bonapartistes de
l'ancienne école, — le parti impérialiste
est tombé dans un état de discorde
aiguë qui l'a bientôt conduit à sa ruine.
Il sent, d'ailleurs, combien ses dernières
querelles sont vaines, puisqu'il n'avait
pas d'empereur et qu'il en faut un pour
faire un empire !.
Les résolutions adoptées dans le con-
grès de dimanche n'ont en elles-mêmes
aucune importance. On les a votées
parce qu'il est de tradition, après que
l'on s'est réuni et qu'on a beaucoup
parlé, de voter quelque chose. Mais tous
ces journalistes qui ont soutenu dans
les départements les derniers combats
pour l'aigle napoléoninne ne semblent
s'être réunis plutôt afin d'échanger l'a-
veu du découragement et de la désillu-
sion qu'ils éprouvent, de causer entre
eux des amertumes de leur situation,
de s'orienter enfin, si cela leur était
possible, qu'afin de procéder à de nou-
veaux essais d'organisation d'un parti
en pleine décomposition. Et pour qui,
en effet, dépenseraient-ils leur temps,
leur argent et leur peine ? Pour Jérôme
ou Victor ? Ces noms font hausser les
épaules, et il n'y a plus personne après!
Aussi toute ardeur est éteinte.
Le congrès, on l'a vu, a d'abord re-
tenti de plaintes, d'injures même, con-
tre les royalistes, par qui les bonapar-
tistes se plaignent d'avoir été malhon-
nêtement exploités aux élections de
1885. — Sur deux cents sièges dévolus
aux conservateurs, s'est écrié quelqu'un,
ils ne nous en ont laissé que quarante !.
— On a donc, pour l'avenir, répudié vi-
vement toute idée d'alliance nouvelle
avec les royalistes, et l'on a décidé « de
soutenir devant la nation, directement
consultée, la cause de l'Empire avec les
Napoléons. »
Je rappelle que « les Napoléons »
sont là pour la forme, et ceci paraît
d'autant plus clairement que, parmi les
Napoléons, il a été impossible au con-
grès d'en désigner aucun. Le seul point
où les assistants aient pu réellement
s'accorder, c'a été une nouvelle procla-
mation du principe plébiscitaire. Et il
semble que plusieurs d'entre eux se-
raient bien aises de trouver par là une
voie de dégagement qui leur permît de
changer de parti en sauvant au moins
les apparences.
MM. Robert Mitchell, Georges La-
chaud, ont déclaré qu'ils se rangeraient
à la République, si elle était «plébisci-
tée », plutôt que de pactiser avec le parti
monarchiste.
D'autres ont dit qu'ils n'attendaient
que l'acceptation du principe plébisci-
taire par les d'Orléans pour se ranger
sous leur bannière.
En résumé, — et c'est un symptôme
curieux." — il a été moins question
d'Empire que de plébiscite.
Un journaliste des Ardennes, M. G.
Thiébaud, a énoncé cette profession de
foi intéressante :
Je propose très nettement de consulter le
pays sur le point spécial et limité de savoir
qui doit non pas renverser la République.
mais la gouverner, de concert avec la repré-
sentation nationale, et qui sera, par exemple,
le successeur de M. Grévy.
En d'autres termes, je ne suis pas un impé-
rialiste préconisant un moyen pour arriver
à son but. Je suis tout bonnement un démo-
crate recherchant sincèrement le moyen de
constituer l'autorité dans l'Etat par la volonté
nationale désignant un chef.
Je ne m'inquiète même pas de savoir si
c'est là l'essence des idées napoléoniennes ;
je le crois cependant, et je regrette que ce
dogme soit perpétuellement méconnu au pro-
fit d'une espèce de doctrine dynastique qui
n'est pas la mienne.
Voici donc des hommes qui, voyant
leur parti ruiné par la force des choses,
se disposent à faire leurs paquets et à
émigrer, les uns vers le camp royaliste
et les autres vers les institutions répu-
blicaines, selon leur tempérament. Mais
ils prétendent rester en même temps
plébiscitaires, peut-être par une sorte de
point d'honneur, peut-être aussi par
l'effet d'un reste de foi dans une théo-
rie politique qui a figuré si longtemps
en tête des articles de leur Credo. En
somme, il n'est point d'idée fausse, en
matière politique ou religieuse, qui
n'ait ses adeptes convaincus, dévoués,
fidèles.
a
VUOl qu il en soit, on pourra se remet-
tre un jour à discuter, — matière de
curiosité, — la théorie du plébiscite,
bien qu'on ait déjà démenti cent fois et
mille fois que le plébiscite, tel du moins
que le parti impérialiste le conçoit, n'a-
boutit qu'à la confiscation des .droits du
peuple. Ce que j'ai voulu aujourd'hui
noter simplement, en chroniqueur con-
sciencieux des incidents de la vie poli-
tique, c'est la très frappante évolution
du parti impérialiste se transformant en
simple parti plébiscitaire. Je ne sais ce
que deviendra, d'ici à peu de temps
sans doute, le fameux « principe » dont
Napoléon III fit un si bel usage; mais,
en attendant, voilà la dynastie lâchée!
, EUG. LIÉBERT.
FAUSSES INTERPRÉTATIONS
S'il était encore besoin d'arguments nou-
veaux pour démontrer les inconvénients
des interpellations sur les grèves, ces ar-
guments seraient fournis par les nouvelles
qui arrivent de Decazeville. M. Basly s'est
emparé de ce fait que 171 voix se sont pro-
noncées contre l'ordre du jour pur et sim-
ple pour expliquer aux ouvriers que les
partisans de leurs revendications gagnaient
du terrain. Ils n'étaient que cinq autrefois.
Ils sont maintenant 171.
Cette interprétation du vote de samedi
est évidemment abusive. Il ne se serait
certainement pas trouvé 169 voix en fa-
veur de l'ordre du jour de M. Michelin,
bien qu'il ne fît, après tout, que demander
un arbitrage. Quant à l'ordre du jour de
M. Basly, demandant 500,000 francs en
faveur des « affamés », on se prend à re-
gretter qu'il n'ait pas été mis aux voix ; il
n'aurait pas réuni dix suffrages.
Mais les ouvriers de Decazeville ne vont
pas à la Chambre ; ils ne mesurent pas les
raisons diverses qui poussent tel ou tel
député, tel ou tel groupe, à voter dans un
sens ou dans l'autre ; ils ne voient que le
fait brutal. L'explication qu'on leur en
donne leur paraît plausible. Ils l'acceptent
les yeux fermés et à leur tour ils se li-
vrent à des interprétations ; ils échafau-
dent des combinaisons dont ils n'aperçoi-
vent pas la fragilité. Comptant que les par-
tisans de leurs revendications se sont
multipliés avec cette rapidité en un si
court délai, ils se déclarent résolus à résis-
ter avec plus d'énergie que jamais et ils
tiennent pour certain qu'en faisant un
nouvel effort ils obligeront le gouverne-
ment à agir en leur faveur.
Ce sont des illusions chimériques. Les
amis des ouvriers devraient le leur faire
comprendre et lutter avec une infatigable
ardeur contre les excitations qui leur sont
adressées par de prétendus auxiliaires.
Faute d'être mis en garde contre ces
excitations, les ouvriers se jettent tête
baissée dans des difficultés inextricables
et vont au-devant de déceptions d'autant
plus amères qu'elles seront plus impré-
vues.
Il appartient à la Chambre de ne pas
donner d'aliments à ces espérances. Qua-
tre fois déjà la grève de Decazeville a fait
l'objet d'interpellations. Quatre fois le gou-
vernement a répété qu'en l'état actuel de
la législation il ne pouvait faire autre
chose que ce qu'il avait fait. Quatre fois le
résultat a été de rendre la situation plus
difficile à Decazeville. S'il avait été fait
moins de bruit autour de cette grève, elle
serait depuis longtemps terminée et les
ouvriers n'en seraient pas plus à plaindre.
Il faut espérer que, si l'on voulait dans
quelque temps renouveler ce débat pério-
dique, le gouvernement se refuserait à
faire le jeu des socialistes et des voya-
geurs en révolution.
Que la Chambre étudie le projet de loi
du gouvernement sur les mines, qu'elle
en presse autant que possible la discussion,
rien de mieux ! Mais il faut être absolu-
ment ignorant des choses parlementaires
pour ne pas prévoir que cette discussion
demandera un an au moins. On ne peut
cependant pas songer à faire durer la grève
de Decazeville jusque-là !
En reproduisant hier la lettre de M.
Amagat sur une criante inj ustice dont le
député du Cantal accuse le conseil de re-
vision de son département, nous avons
exprimé la conviction que M. le général
Boulanger ne laisserait pas passer l'inci-
dent sans enquête.
Nous apprenons en effet que le minis-
tre de la guerre vient de donner l'ordre
d'examiner avec le plus grand soin cette
affaire.
Si réellement le jeune Chanson, fils d'un
autre député du Cantal, a été exempté du
service militaire bien que n'étant atteint
d'aucune infirmité, nous espérons que les
membres du conseil de revision seront ap-
pelés à justifier leur verdict devant les
tribunaux.
Mais, s'il y a eu diffamation, nous espé-
rons aussi que M. Amagat supportera
toutes les conséquences de l'erreur qu'il
aura commise en recueillant, en publiant
et en soutenant des faits inexacts.
L'EXPULSION DES PRINCES
La commission de l'expulsion. — Bruits de
crise. — La soirée d'hier.
La commission chargée d'examiner le pro-
jet de loi du gouvernement concernant l'ex-
pulsion des prétendants a procédé hier à la
nomination de son bureau.
M. Madier de Montjau a été élu président
par 6 voix contre 5 données à M. Anatole de
Là Forge.
M. Brousse, député des Pyrénées-Orienta-
les, a été désigné aux fonctions de secré-
taire.
La commission a ensuite entendu l'exposé
des opinions de ses membres.
M. Henry Maret a fait observer qu'avant
d'ouvrir la discussion générale il était néces-
saire d'entendre le gouvernement.
La commission s'étant ralliée à cette opi
nion, M. Madier de Montjau a vu dans l'après-
midi le président du conseil et les ministres
de l'intérieur et de la justice pour les inviter
à se présenter devant la commission.
Après avoir conféré avec les membres du
gouvernement, M. Madier de Montjau a pré-
venu ses collègues que MM. de Freycinet,
Sarrien et Démoli se rendraient devant la
commission aujourd'hui à deux heures.
On demandera à M. Sarrien de préciser
les faits auxquels il a fait allusion sa-
medi dans son bureau, faits qui auraient
motivé la présentation du projet de loi et qu'il
s'était réservé de ne faire connaître qu'à la
commission.
Le gouvernement sera entendu aujourd'hui,
à deux heures,par la commission des princes.
L'entente résultera-t-elle do cette entrevue ?
C'est ce qu'on ne saurait préalablement af-
firmer.
Le choix de M. Madier de Montjau pour la
présidence de la commission semble indiquer
l'intention bien arrêtée des commissaires
expulsionnistes de ne pas admettre de tran-
saction. M Madier de Montjau a encore ac-
centué le caractère de son élection en décla-
rant qu'en toute autre occasion il aurait dé-
cliné, par suite de son grand âge, l'honneur
qu'on venait de lui faire ; mais que, dans la
situation actuelle, il l'acceptait pour bien
montrer que l'opinion de la commission est
favorable à l'expulsion obligatoire et totale.
Dans la soirée, on prêtait à certains mem-
bres de la Gauche radicale l'intention de
soumettre à la Chambre une proposition
transactionnelle qui prononcerait l'expulsion
immédiate des descendants en ligne directe
des famillés ayant régné en France et qui au-
toriserait le ministre de l'intérieur à interdire
le territoire de la République aux autres
membres de ces familles, par un simple ar-
rêté pris en conseil des ministres.
Le bruit s'est tout à coup répandu hier à la
Chambre, vers cinqheures du soir, qu'une crise
ministérielle venait d'éclater. Les uns affir-
maient que MM. Lockroy, Granet, Boulanger
et Aube étaient démissionnaires ; les autres
donnaient pour certaine la retraite de M. de
Freycinet. C'est dans la salle même des séan-
ces, et des bancs du Centre et de la Droite,
que partaient ces nouvelles contradictoires.
Un peu de réflexion eût cependant suffi à
démontrer le peu de sérieux de ces informa-
tions. Tout. d'abord les ministres n'ont pas
tenu conseil hier matin ; ils ne se sont même
pas réunis depuis la nomination de la com-
mission d'expulsion. Ce n'est que dans le
conseil de ce malin que seront arrêtées les
déclarations à faire à la commission et seule-
ment alors les divergences de vues, si elles
existent, se feront jour d'une façon effective.
Jusqu'alors, il est impossible de prédire une
crise.
Le projet déposé par M. Demôle a été ac-
cepté par tous les ministres, et c'est au nom
du cabinet tout entier que parlait le garde
des sceaux. On s'étonne de voir, en présence
d'une situation qui devrait commander l'union
de tous les républicains, les tentatives dissol-
vantes de certains incorrigibles pour lesquels
les crises ministérielles sont devenues un élé-
ment naturel.
Voici les renseignements que nous avons
recueillis en dernière heure sur les incidents
qui ont marqué la soirée d'hier.
Dans le dernier conseil des ministres, MM.
Lockroy, Granet et Boulanger avaient insisté
pour que le gouvernement adoptât une pro-
position d'expulsion totale et immédiate. M.
l'amiral Aube avait paru incliner vers cette
solution, mais toutefois avec quelques ré-
serves.
La majorité du conseil avait cependant ar-
rêté un texte qui a été déposé sur le bureau
de la Chambre, texte auquel s'étaient ralliés
MM. Boulanger, Lockroy, Granet et Aube.
Hier, MM. Boulanger, Aube, Granet et Loc-
kroy ont été pris de nouveaux scrupules et
ils ont eu plusieurs conférences, soit avec
M. Clémenctau, soit avec M. Grévy, soit enfin
avec M. de Freycinet.
Les quatre ministres se sont rendus au mi-
nistère des affaires étrangères et ont eu un
long entretien avec le président du conseil.
Contrairement aux bruits qui couraient, il
n'a nullement été question de démission, et
il est présumable que la discussion qui aura
lieu au conseil des ministres de ce matin con-
duira à une entente.
——————————— ———————————
LE PARLEMENT
SÉANCE DE LA CHAMBRE
Les livrets d'ouvriers. — La responsabi-
lité du commandement militaire.
En attendant les séances à grand orches-
tre que nous ménage la question des
princes, la Chambre et son président se
livrent aux premières douceurs de l'été.
L'une et l'autre sont aux champs. M, Flo-
quet cède le fauteuil à M. Buyat. Quant
aux députés, il y en a bien peu qui n'aient
pas fait carrément le lundi. Si la salle est
vide, les couloirs ne sont pas mieux
garnis.
Dans les couloirs, ce n'est pas un mal
qu'il y ait peu de monde. Les fauteurs
d'intrigues trouvent ainsi moins d'oreilles,
et tel bruit qui s'en irait grossissant s'il y
avait des badauds pour le colporter s'éva-
nouit sous les hautes coupoles comme une
bulle de savon.
En séance, on ne s'aperçoit pas non plus
que le petit nombre des auditeurs soit un
grand mal. La journée au contraire per
met de constater que, si nos assemblées
comptaient moins de membres, il y serait
plus facile de parler et d'écouter. Les deux
lois qu'on a votées étaient deux lois tech-
niques. On a pu les suivre et les éplucher
d'un bout à l'autre, par cette simple raison
qu'il n'y avait dans la salle que des gens
qu'elles intéressaient.
tt
★ +
On a commencé par la loi sur les livrets
d'ouvriers. C'est celle pour laquelle l'audi-
toire s'est montré le plus récalcitrant.
L'affaire, il est vrai, arrivait dans de mau-
vaises conditions. Précédemment la Cham-
bre avait repoussé l'article 2 qui était le
produit d'un amendement du Sénat et qui
réglementait le contrat de louage du tra-
vail. Il n'y avait plus dès lors aucune rai-
son pour maintenir les articles 3 et 4 qui
étaient également le fruit d'un amende-
ment du Sénat et qui créaient le livret
facultatif.
Le rapporteur, M. Lagrange, avait dé-
claré que la commission retirait ces arti-
cles et tout le monde croyait qu'on en
resterait là, quand le même M. Lagrange
est venu présenter un amendement qui
rétablissait sous d'autres noms le livret
facultatif.
Alors personne n'y a plus rien compris.
M. Lagrange a prononcé un discours trop
long. M. Lyonnais, M. Guillaumou sont
intervenus sans éclaircir beaucoup la ques-
tion. Enfin M. Lockroy est arrivé. En
quelques paroles pleines de sens, il a in-
vité la Chambre à s'en tenir à ce qui est
fait, à l'abrogation du livret obligatoire.
La Chambre n'a même pas eu besoin de
répondre par un vote. M. Lagrange, con-
vaincu, a retiré son amendement.
*
* *
On est entré alors dans la loi Ballue qui
a pour objet d'étendre, d'aggraver la res-
ponsabilité des officiers qui commandent
devant l'ennemi. Certes, nos désastres de
1870 ont prouvé que sur ce point le Code
de justice militaire a besoin d'être com-
plété.
- La loi proposée par M. Ballue n'a que
deux défauts : celui d'être née sous le coup
d'une émotion politique et celui d'avoir
été préparée par une commission qui pos-
sède l'ardeur patriotique plus que la lan-
gue du droit.
M. de Martimprey en profite pour diri-
ger contre le projet de la commission une
critique très longue, très serrée, qui au-
rait sans doute donné de l'hésitation à la
Chambre si le discours avait été suivi
d'une conclusion pratique. Mais M. de
Martimprey se borne à déclarer qu'il est
trop cruel de donner au commandant
d'une place ou d'une armée des responsa-
bilités égales à celles du commandant
d'un navire et d'obliger tout officier qui a
reculé devant l'ennemi à se justifier de-
vant un conseil d'enquête. Il n'indique au-
cun moyen d'améliorer le Code de 1857.
Il conseille purememt et simplement le
statu quo.
* *
Or, c'est précisément le statu quo qui
est condamné par l'expérience. Le rap-
porteur, M. Thiers, le démontre dans un
discours plein d'éloquence et de patrio-
tisme. Seulement, ce discours est la dé-
monstration vivante de ce que nous di-
sions tout à l'heure : qu'il eût mieux valu
ne pas faire sortir la loi nouvelle d'un évé-
nement isolé qui s'est produit dans des
régions barbares, à quatre mille lieues de
la mère-patrie.
Pour justifier la loi, M. Thiers laisse
absolument de côté l'incident dont elle est
sortie en décembre dernier : il remonte
jusqu'en 1870. Il invoque les souvenirs de
Sedan et de Metz. A ces noms douloureux,
des applaudissements éclatent, faisant
l'union complète, spontanée, des Gauches,
des applaudissements auxquels ne répond
aucune protestation de droite, que les
monarchistes saluent au contraire en
courbant la tête.
Dans les circonstances présentes, l'in-
fluence des événements qui se sont accom-
plis il y a quinze ans est bonne à méditer.
On peut voir sur quel terrain patriotique
l'union de tous les bons Français pourrait
être indissoluble.
Le grand succès oratoire de M. Thiers
enlève le vote de la loi malgré ses imper-
fections juridiques. Le général Boulanger
déclare du reste que, comme ministre de
la guerre, il sent la nécessité de mettre le
pays à l'abri des défaillances qui se sont
produites autrefois.
Les attaques de la Droite deviennent
impuissantes. Il y en a une, d'ailleurs, qui
ne compte pas, qui n'est qu'un court bé-
gaiement, celle du colonel de Plazanet.
Après une courte réplique de M. Ballue,
la Chambre passe aux articles par 369 voix
contre 171.
L'examen des articles était plus sca-
breux. Il y en a de rédigés dans une lan-
gue douteuse, obscure. Un moment, M.
Berger, flanqué du baron Reille, menace
de faire verser l'article 2, en montrant qu'il
peut donner matière à bien des interpré-
tations, qu'il ne définit pas notamment ce
que c'est qu'une reddition de place.
Mais on est encore sous le coup de la
parole vibrante du rapporteur. On repousse
tous les amendements, on adopte tous les
articles. On finit même par ne plus écou-
ter M. de Lanjuinais qui vient formuler
différentes critiques de détail, et l'on pro-
longe la séance jusqu'à ce que la loi en-
tière, y compris l'ensemble, ait été défini-
tivement adoptée. S'il y a des erreurs de
rédaction, le Sénat seul pourra les recti-
fier.
Dr RALPH.
LA VIE DE PARIS
Il y a, depuis hier, je ne sais combien
de peintres médaillés et mentionnés,
médaillés de première, de seconde et de
troisième classe, sans compter les gran-
des médailles et les médailles de voyage.
« Médaillons-nous les uns les autres »
est la devise des peintres français. Et
cependant, sur cent distinctions distri-
buées pour le moins, je ne sais pas si
on a fait dix heureux sans arrière-pen-
sée. Car le lauréat d'une première mé-
daille aurait voulu « décrocher » la mé-
daille d'honneur, et ainsi de suite jus-
qu'au dernier des mentionnés. De plus,
le public lui-même trouve excessive
cette humeur médaillante et commence
à en sentir les inconvénients.
Bientôt, en effet, devant l'encombre-
ment des œuvres exemptes de droit par
suite des récompenses octroyées à leur
auteur, il y aura si peu de place au Sa-
lon que des peintures très méritantes,
mais œuvres de début signées de noms
inconnus, ne trouveront plus de place.
Les peintres ne sont pas sans s'aperce-
voir que l'on ne peut pas indéfiniméllt
augmenter le nombre des toiles au Sa-
Ion. Il y en a tant et tant que le public,
quel que soit le robuste appétit de ses
curiosités, en arrive à l'indigestion.
Cette table trop bien servie coupe l'ap-
pétit.
Je sais des gens qui, renonçant à voir
tout le Salon avec ses milliers de ta-
bleaux, au lieu d'y aller trois ou quatre
fois, n'y vont qu'une seule, se faisant
conduire devant quelques tableaux choi-
sis et laissant le reste de côté. Il ne faut
donc pas penser à ouvrir des salles
nouvelles, et le flot montant des œuvres
d'art semble avoir atteint les dernières
limites de l'étiage. La démocratisation
de l'exposition risque donc, chose sin-
gulière! d'arriver à un résultat diamé-
tralement opposé à celui qu'on avait
espéré et voulu. On avait pour but et
pour mot d'ordre, dans la révolution
pacifique opérée il y a quelques années,
d'ouvrir plus aisément les portes du
Salon aux jeunes peintres. Et voilà que
le médaillage à outrance constitue déjà
une aristocratie de privilégiés, qui se
défend, comme toutes les aristocraties,
contre les nouveaux venus, repousse les
envahisseurs et repousse avec eux des
hommes qui mériteraient cependant un
meilleur accueil. Pendant quelques an-
nées, les expositions des refusés du
Salon ont fait l'effet de véritables plai-
santeries. On ne voyait pas bien la dif-
férence entre ces exhibitions et celle des
Incohérents, qui n'ont jamais prétendu
à autre chose qu'à être de joyeux fu-
mistes. Mais, cette année, l'exposition
des œuvres refusées a un tout autre
caractère. Il s'y trouve des peintures in-
contestablement plus intéressantes ou
moins folles que certaines toiles qui
sont au Salon et qui y sont entrées
exemptes de l'examen du jury d'admis-
sion. Si les choses vont ainsi pendant
quelques années, le Salon appartiendra
à un syndicat fermé de médaillés, et on
n'aura donné la liberté aux peintres
que pour leur permettre de se montrer
impunément illibéraux. -.u_.
Les réclamations abondent déjà. J en
ai reçu un bon nombre pour ma part,
et dont quelques-unes m'ont paru assez
justement motivées. Les peintres étran-
gers, par exemple, se plaignent volon-
tiers que, n'ayant ni maîtres ni cama-
rades d'atelier dans les commissions
formées par les artistes, ils sont géné-
ralement mal placés et voient leurs ta-
bleaux éloignés de cette fameuse « ci-
maise » qui est le paradis des toiles. La
répartition des médailles et des men-
tions, que nos lecteurs connaissent, n a
pas été non plus sans donner lieu à des
récriminations passionnées. On a vu
avec quelque surprise des œuvres très
sérieuses recevoir la même distinètîbn
que des œuvres simplement agréables,
Prix du numéro à Paris : 15 centimes — Départements : 20 centimes
Mardi 4" juin 4886
LE XIX' SIECLE
JOURNAL RÉPUBLICAIN
RÉDACTION
!'adresser au Secrétaire de la Rédaction
de 2 heures à minuit
16, rue GadLet, le
Directeur politique :
A.-EDOUARD PORTALIS
ABONNEMENTS
DÉPARTEMENTS I
Trois mois
Un an. 62 »>, |
PARIS
Trois mois— -Sîî »»
Six mois. SK
Un au. CO »»
Supplément p* l'Etranger (Europe) 1 fco par trimestre
Les abonnem18 partent des 1er et 15 de chaque mois
ADftlIINISTRA Tæ;s.-}
Adresser les Lettres et Mandats à l'Administrateur
1G, rue Cade"t, ±3
EN VENTE A LONDRES
A la liÏDx*air*ie jean
39, OLD COMPTON STREET (SOHO)
ET DANS SES SUCCURSALES
nÍ':;GISSEUns D'ANNONCES:
MM. LAGRANGE, CERF ET CIS
6, place de la Bourse, 6
BULLETIN
La Chambre a adopté hier la proposition
de loi de M. Ballue sur la responsabilité
des commandants de places ou de forte-
resses, et qui tend à assimiler les com-
mandants des armées de terre et de mer
en les soumettant tous, en cas de capitu-
lation, à un jugement obligatoire.
La question de la revision constitution-
nelle se pose en Belgique.
On sait que les conditions de l'électorat
politique sont fort différentes de ce qu'elles
sont en France et même en Allemagne.
Actuellement, la Constitution belge est ba-
sée sur le système censitaire en matière
électorale.
Le parti progressiste a inscrit dans le
programme de ses revendications l'insti-
tution du suffrage universel. Le parti libé-
ral ou doctrinaire, sans aller aussi loin
dans ses aspirations, se borne à demander
l'adjonction des capacités aux censitaires.
Le parti clérical, qui forme aujourd'hui
la majorité de la Chambre belge, ne veut,
cela va sans dire, ni du suffrage univer-
sel ni de l'adjonction des capacités. C'est
dans ces termes que se pose la question
de la revision qui s'agite depuis quelques
semaines dans les assemblées électorales
tenues à Bruxelles, à Liège et dans les
grands centres de Belgique, en vue du
renouvellement partiel de la Chambre des
représentants. - - h
Jjimancne dernier avait lieu à Liège une
réunion de l'Association libérale. La séance
offrait un attrait tout particulier. M. Frère-
Orban, leader du parti libéral, y a pro-
noncé un important discours qui peut être
considéré comme le programme des doc-
trinaires belges. L'éminent orateur a exa-
miné la question de la revision avec toute
l'ampleur que comporte un pareil. sujet.
M. Frère-Orban admet le principe de la
revision de la Constitution; il rappelle que
cette question est agitée depuis seize ans,
mais il est obligé de reconnaître qu'elle
n'a pas fait un pas en avant, bien au con-
traire, peut-être parce qu'elle n'a jamais
été posée nettement et de façon oppor-
tune.
Une solution favorable est-elle possible
à l'heure présente ? M. Frère-Orban ne le
pense pas pour plusieurs raisons.
D'abord il n'y aura pas une majorité
suffisante à la Chambre pour voter la ré-
forme électorale, quelle qu'elle soit. En
supposant que le parti libéral arrive à faire
entrer vingt de ses membres à la Cham-
bre, — ce qui ne semble pas probable,
étant donné l'influence du parti catholique
dans nombre de collèges, — ce succès in-
espéré ne suffirait pas à assurer le triom-
phe de la réforme, puisque la revision de
la Constitution ne peut être accomplie que
par les deux tiers des voix.
Il y a une autre raison. Le désaccord
le plus complet existe entre ceux-là mêmes
qui admettent la revision. Supprimer l'ar-
ticle 47 — celui qui règle les conditions
de l'électorat politique — est chose aisée ;
mais que pourra-t-on mettre à la place de
cet article 47? Le suffrage universel, le
suffrage capacitaire et censitaire ou le suf-
frage capacilaire seulement?
Autant de solutions, autant de contro-
verses. Est-ce dans ces conditions que l'on
peut raisonnablement faire de la revision
de la Constitution la plate-forme des élec-
tions qui vont avoir lieu prochainement?
Cette doctrine n'est pas celle des radicaux,
qui marcheront aux urnes en déployant
le drapeau du suffrage universel.
Nous saurons bientôt qui de M. Frère-
Orban ou de ses adversaires a le mieux
jugé la situation à ce point de vue parti-
culier. Mais il est dès à présent certain
qu'il faudra attendre le second renouvelle-
ment de la Chambre pour atteindre le
but, c'est-à-dire pour former une majorité
résolument révisionniste.
Louis HXNRlQUR.
—————————— .——————————.
INFORMATIONS PARTICULIÈRES
Au ministère des affaires étrangères
M. de Freycinet, minisfre des affaires étran-
gères, a reçu hier matin le nonce du pape.
L'entretien a porté sur les négociations re-
latives à l'envoi en Chine d'un légat du pape.
L'inspection des enfants assistés
Le conseil d'Etat, réuni dimanche en assem-
blée générale, a voté un nouveau règlement
d'administration publique concernant l'ins-
pection des enfants assistés.
Ce règlement a pour but de réagir contre
l'inexécution du règlement du 31 juillet 1870
qui laissait livrée à l'arbitraire ministériel
l'inspection des enfants assistés.
Voici les principales innovations qu'il con-
tient :
« Le cadre de l'inspection est fixé, pour le
département de la Seine, par le décret lui-
même, et pour les autres par arrêtés du mi-
nistre; des inspectrices et sous-inspectrices
sont crées en sus du personnel masculin ; un
maximum d'âge de quarante-cinq ans est éta-
bli pour l'admission dans le service, en con-
sidération de l'activité physique qu'il réclame.
Des simplifications sont introduites dans la
classification et l'échelle des traitements des
fonctionnaires ; pour que leur recrutement
offre toutes garanties de maturité et de com-
pétence, il s'opérera : pour les inspecteurs,
dans la profession médicale, les bureaux du
ministère de l'intérieur, l'inspection de l'en-
seignement primaire ; pour les sous-inspec-
teurs, dans le personnel administratif des
préfectures, sous-préfectures, mairies et éta-
lissements de bienfaisance et parmi les ins-
tituteurs ; des règles spéciales sont instituées
pour le département de la Seine. Enfin, pour
que les frais de tournée ne constituent pas un
supplément indirect de traitement, ils ne se-
ront liquidés qu'à concurrence des dépenses
faites et dûment justifiées. »
Les élections de dimanche
Une élection au conseil général a eu lieu
dimanche dans le canton do Villefranche-de-
Rouerguo (Aveyron).
Ont obtenu -
MM. Jugla, républicain 824 voix
Pastre, républicain. 730 —
Buffird, réactionnaire.. 307 —
n.ii.ii
mUlOttage
Deux élections au conseil d'arrondissement
ont également eu lieu : 1° dans le canton de
Châteauneuf (Maine-et-Loire), M. Briand, ré-
actionnaire, a été élu par 1,892 voix contre
641 à M. Cailleu.
2° Dans le canton de Damazan (Lot-et-Ga-
ronne), M. Neuville, républicain, a été élu par
1,227 voix contre 1,005 à M. Bacquié, réaction-
naire.
Les élections municipales complémentaires
qui ont eu lieu à Saint-Quentin ont donné la
majorité à tous les candidats républicains.
———————————— ———————————
Les princes doivent jubiler. La ques-
tion qui, aujourd'hui, prime toutes les
affaires publiques, est celle de savoir si
on les expulsera, comment on les expul-
sera, si ce sera par un décret, par un
arrêté ou par une loi, si on les expul-
sera tous à la fois ou les uns après les
autres. On allait jusqu'à dire, hier, qu'ils
pourraient être la cause d'une crise mi-
nistérielle qui, éclatant dans les circon-
stances présentes, aurait pour consé-
quence probable un remaniement du
budget et apporterait un inévitable re-
tard dans toutes les affaires engagées,
telles que, par exemple, l'Exposition,
le Métropolitain, les grands travaux de
Paris, etc., etc. Et tout cela pour-
quoi ? Parce que les radicaux de la
Chambre et même, dit-on, les radi-
caux du ministère ne trouveraient pas
le projet présenté par le gouvernement
pour régler la question des princes
assez radical, et qu'ils auraient la pré-
tention d'appliquer dans l'espèce la
fameuse politique tant exploitée contre
eux du tout ou rien. Qu'ils y pren-
nent garde ! Le pays ne comprend
rien à ces subtilités sur lesquelles
les intrigants de couloir échafaudent
des crises ministérielles. Le gouver-
nement, par le dépôt de son projet de
loi, a hautement manifesté sa ferme
résolution de n'user à l'égard des princes
d'aucun ménagement. S'il a demandé
à la Chambre l'autorisation de les ex-
pulser par des arrêtés pris en conseil des
ministres, au lieu de proposer une loi
générale d'expulsion qui aurait dégagé
sa responsabilité, c'est apparemment
qu'il avait ses raisons pour agir ainsi.
n •» 4 i •
oans cloute n n a pas voulu s exposer
et exposer la Chambre à un avorte ment
semblable à celui de 4883. Qui ne se
rappelle ce qui s'est passé à cette époque,
la Chambre votant un projet d'expul-
sion, le Sénat en adoptant un autre, la
Chambre votant alors une proposition
plus radicale, le Sénat la repoussant,
tout cela pour aboutir à ne rien voter du
tout, mais avec cette circonstance ag-
gravante que pendant la discussion deux
ministères étaient tombés les uns sur
les autres comme des capucins de carte ?
Si les radicaux profitaient du débat sur
les princes, qui n'est après tout qu'un
débat de pure forme, pour ouvrir une
crise ministérielle, c'est pour le coup
qu'on les accuserait d'être les en-
nemis jurés de toute stabilité gou-
vernementale et de jouer dans la po-
litique le rôle d'incorrigibles brouil-
lons ! Sans compter que ce n'est pas eux
qui, cette fois encore, croqueraient les
marrons qu'ils auraient tirés du feu. Ils
n'ont pour s'en convaincre qu'à consi-
dérer l'attitude et les airs de triomphe
de leurs pires ennemis.
QUESTIONS DU JOUR
Un parti qui s'en va
Le congrès impérialiste, dont le XIXo
Siècle d'hier a succinctement rendu
compte, se composait surtout de rédac-
teurs des journaux bonapartistes des
départements. Nos confrères, arrivés de
tous les points de la France, ont tenu
dans le même jour deux séances assez
mornes; on aurait dit de bons parents,
un peu éloignés, venus de leur province
pour un enterrement et échangeant
entre eux quelques propos découragés
sur la triste situation de la famille. Le
fait est que ce malheureux impérialisme
s'est effondré!
Son écrivain et son orateur le plus
brillant, M. Paul de Cassagnac, — qui
n'assistait pas au congrès, — s'est à peu
près rallié au parti royaliste-orléaniste-
clérical, tout en conservant un attache-
chement respectueux à la mémoire de
Napoléon III et du feu prince impérial ;
l'ancienne Droite du bonapartisme est
généralement dans des dispositions sem-
blables.
Le prince Jérôme a plutôt des amis
personnels que des partisans ; quant
aux illusions, je pense qu'il ne lui en
reste guère.
Le prince Victor enfin a découragé
ceux qui mettaient en lui quelque espé-
rance, et c'est par les impérialistes
mêmes qu'il a été le plus sévèrement
jugé.
Depuis la mort du prince impérial,
— qui d'ailleurs, s'il avait vécu, se serait
sans doute aliéné les bonapartistes de
l'ancienne école, — le parti impérialiste
est tombé dans un état de discorde
aiguë qui l'a bientôt conduit à sa ruine.
Il sent, d'ailleurs, combien ses dernières
querelles sont vaines, puisqu'il n'avait
pas d'empereur et qu'il en faut un pour
faire un empire !.
Les résolutions adoptées dans le con-
grès de dimanche n'ont en elles-mêmes
aucune importance. On les a votées
parce qu'il est de tradition, après que
l'on s'est réuni et qu'on a beaucoup
parlé, de voter quelque chose. Mais tous
ces journalistes qui ont soutenu dans
les départements les derniers combats
pour l'aigle napoléoninne ne semblent
s'être réunis plutôt afin d'échanger l'a-
veu du découragement et de la désillu-
sion qu'ils éprouvent, de causer entre
eux des amertumes de leur situation,
de s'orienter enfin, si cela leur était
possible, qu'afin de procéder à de nou-
veaux essais d'organisation d'un parti
en pleine décomposition. Et pour qui,
en effet, dépenseraient-ils leur temps,
leur argent et leur peine ? Pour Jérôme
ou Victor ? Ces noms font hausser les
épaules, et il n'y a plus personne après!
Aussi toute ardeur est éteinte.
Le congrès, on l'a vu, a d'abord re-
tenti de plaintes, d'injures même, con-
tre les royalistes, par qui les bonapar-
tistes se plaignent d'avoir été malhon-
nêtement exploités aux élections de
1885. — Sur deux cents sièges dévolus
aux conservateurs, s'est écrié quelqu'un,
ils ne nous en ont laissé que quarante !.
— On a donc, pour l'avenir, répudié vi-
vement toute idée d'alliance nouvelle
avec les royalistes, et l'on a décidé « de
soutenir devant la nation, directement
consultée, la cause de l'Empire avec les
Napoléons. »
Je rappelle que « les Napoléons »
sont là pour la forme, et ceci paraît
d'autant plus clairement que, parmi les
Napoléons, il a été impossible au con-
grès d'en désigner aucun. Le seul point
où les assistants aient pu réellement
s'accorder, c'a été une nouvelle procla-
mation du principe plébiscitaire. Et il
semble que plusieurs d'entre eux se-
raient bien aises de trouver par là une
voie de dégagement qui leur permît de
changer de parti en sauvant au moins
les apparences.
MM. Robert Mitchell, Georges La-
chaud, ont déclaré qu'ils se rangeraient
à la République, si elle était «plébisci-
tée », plutôt que de pactiser avec le parti
monarchiste.
D'autres ont dit qu'ils n'attendaient
que l'acceptation du principe plébisci-
taire par les d'Orléans pour se ranger
sous leur bannière.
En résumé, — et c'est un symptôme
curieux." — il a été moins question
d'Empire que de plébiscite.
Un journaliste des Ardennes, M. G.
Thiébaud, a énoncé cette profession de
foi intéressante :
Je propose très nettement de consulter le
pays sur le point spécial et limité de savoir
qui doit non pas renverser la République.
mais la gouverner, de concert avec la repré-
sentation nationale, et qui sera, par exemple,
le successeur de M. Grévy.
En d'autres termes, je ne suis pas un impé-
rialiste préconisant un moyen pour arriver
à son but. Je suis tout bonnement un démo-
crate recherchant sincèrement le moyen de
constituer l'autorité dans l'Etat par la volonté
nationale désignant un chef.
Je ne m'inquiète même pas de savoir si
c'est là l'essence des idées napoléoniennes ;
je le crois cependant, et je regrette que ce
dogme soit perpétuellement méconnu au pro-
fit d'une espèce de doctrine dynastique qui
n'est pas la mienne.
Voici donc des hommes qui, voyant
leur parti ruiné par la force des choses,
se disposent à faire leurs paquets et à
émigrer, les uns vers le camp royaliste
et les autres vers les institutions répu-
blicaines, selon leur tempérament. Mais
ils prétendent rester en même temps
plébiscitaires, peut-être par une sorte de
point d'honneur, peut-être aussi par
l'effet d'un reste de foi dans une théo-
rie politique qui a figuré si longtemps
en tête des articles de leur Credo. En
somme, il n'est point d'idée fausse, en
matière politique ou religieuse, qui
n'ait ses adeptes convaincus, dévoués,
fidèles.
a
VUOl qu il en soit, on pourra se remet-
tre un jour à discuter, — matière de
curiosité, — la théorie du plébiscite,
bien qu'on ait déjà démenti cent fois et
mille fois que le plébiscite, tel du moins
que le parti impérialiste le conçoit, n'a-
boutit qu'à la confiscation des .droits du
peuple. Ce que j'ai voulu aujourd'hui
noter simplement, en chroniqueur con-
sciencieux des incidents de la vie poli-
tique, c'est la très frappante évolution
du parti impérialiste se transformant en
simple parti plébiscitaire. Je ne sais ce
que deviendra, d'ici à peu de temps
sans doute, le fameux « principe » dont
Napoléon III fit un si bel usage; mais,
en attendant, voilà la dynastie lâchée!
, EUG. LIÉBERT.
FAUSSES INTERPRÉTATIONS
S'il était encore besoin d'arguments nou-
veaux pour démontrer les inconvénients
des interpellations sur les grèves, ces ar-
guments seraient fournis par les nouvelles
qui arrivent de Decazeville. M. Basly s'est
emparé de ce fait que 171 voix se sont pro-
noncées contre l'ordre du jour pur et sim-
ple pour expliquer aux ouvriers que les
partisans de leurs revendications gagnaient
du terrain. Ils n'étaient que cinq autrefois.
Ils sont maintenant 171.
Cette interprétation du vote de samedi
est évidemment abusive. Il ne se serait
certainement pas trouvé 169 voix en fa-
veur de l'ordre du jour de M. Michelin,
bien qu'il ne fît, après tout, que demander
un arbitrage. Quant à l'ordre du jour de
M. Basly, demandant 500,000 francs en
faveur des « affamés », on se prend à re-
gretter qu'il n'ait pas été mis aux voix ; il
n'aurait pas réuni dix suffrages.
Mais les ouvriers de Decazeville ne vont
pas à la Chambre ; ils ne mesurent pas les
raisons diverses qui poussent tel ou tel
député, tel ou tel groupe, à voter dans un
sens ou dans l'autre ; ils ne voient que le
fait brutal. L'explication qu'on leur en
donne leur paraît plausible. Ils l'acceptent
les yeux fermés et à leur tour ils se li-
vrent à des interprétations ; ils échafau-
dent des combinaisons dont ils n'aperçoi-
vent pas la fragilité. Comptant que les par-
tisans de leurs revendications se sont
multipliés avec cette rapidité en un si
court délai, ils se déclarent résolus à résis-
ter avec plus d'énergie que jamais et ils
tiennent pour certain qu'en faisant un
nouvel effort ils obligeront le gouverne-
ment à agir en leur faveur.
Ce sont des illusions chimériques. Les
amis des ouvriers devraient le leur faire
comprendre et lutter avec une infatigable
ardeur contre les excitations qui leur sont
adressées par de prétendus auxiliaires.
Faute d'être mis en garde contre ces
excitations, les ouvriers se jettent tête
baissée dans des difficultés inextricables
et vont au-devant de déceptions d'autant
plus amères qu'elles seront plus impré-
vues.
Il appartient à la Chambre de ne pas
donner d'aliments à ces espérances. Qua-
tre fois déjà la grève de Decazeville a fait
l'objet d'interpellations. Quatre fois le gou-
vernement a répété qu'en l'état actuel de
la législation il ne pouvait faire autre
chose que ce qu'il avait fait. Quatre fois le
résultat a été de rendre la situation plus
difficile à Decazeville. S'il avait été fait
moins de bruit autour de cette grève, elle
serait depuis longtemps terminée et les
ouvriers n'en seraient pas plus à plaindre.
Il faut espérer que, si l'on voulait dans
quelque temps renouveler ce débat pério-
dique, le gouvernement se refuserait à
faire le jeu des socialistes et des voya-
geurs en révolution.
Que la Chambre étudie le projet de loi
du gouvernement sur les mines, qu'elle
en presse autant que possible la discussion,
rien de mieux ! Mais il faut être absolu-
ment ignorant des choses parlementaires
pour ne pas prévoir que cette discussion
demandera un an au moins. On ne peut
cependant pas songer à faire durer la grève
de Decazeville jusque-là !
En reproduisant hier la lettre de M.
Amagat sur une criante inj ustice dont le
député du Cantal accuse le conseil de re-
vision de son département, nous avons
exprimé la conviction que M. le général
Boulanger ne laisserait pas passer l'inci-
dent sans enquête.
Nous apprenons en effet que le minis-
tre de la guerre vient de donner l'ordre
d'examiner avec le plus grand soin cette
affaire.
Si réellement le jeune Chanson, fils d'un
autre député du Cantal, a été exempté du
service militaire bien que n'étant atteint
d'aucune infirmité, nous espérons que les
membres du conseil de revision seront ap-
pelés à justifier leur verdict devant les
tribunaux.
Mais, s'il y a eu diffamation, nous espé-
rons aussi que M. Amagat supportera
toutes les conséquences de l'erreur qu'il
aura commise en recueillant, en publiant
et en soutenant des faits inexacts.
L'EXPULSION DES PRINCES
La commission de l'expulsion. — Bruits de
crise. — La soirée d'hier.
La commission chargée d'examiner le pro-
jet de loi du gouvernement concernant l'ex-
pulsion des prétendants a procédé hier à la
nomination de son bureau.
M. Madier de Montjau a été élu président
par 6 voix contre 5 données à M. Anatole de
Là Forge.
M. Brousse, député des Pyrénées-Orienta-
les, a été désigné aux fonctions de secré-
taire.
La commission a ensuite entendu l'exposé
des opinions de ses membres.
M. Henry Maret a fait observer qu'avant
d'ouvrir la discussion générale il était néces-
saire d'entendre le gouvernement.
La commission s'étant ralliée à cette opi
nion, M. Madier de Montjau a vu dans l'après-
midi le président du conseil et les ministres
de l'intérieur et de la justice pour les inviter
à se présenter devant la commission.
Après avoir conféré avec les membres du
gouvernement, M. Madier de Montjau a pré-
venu ses collègues que MM. de Freycinet,
Sarrien et Démoli se rendraient devant la
commission aujourd'hui à deux heures.
On demandera à M. Sarrien de préciser
les faits auxquels il a fait allusion sa-
medi dans son bureau, faits qui auraient
motivé la présentation du projet de loi et qu'il
s'était réservé de ne faire connaître qu'à la
commission.
Le gouvernement sera entendu aujourd'hui,
à deux heures,par la commission des princes.
L'entente résultera-t-elle do cette entrevue ?
C'est ce qu'on ne saurait préalablement af-
firmer.
Le choix de M. Madier de Montjau pour la
présidence de la commission semble indiquer
l'intention bien arrêtée des commissaires
expulsionnistes de ne pas admettre de tran-
saction. M Madier de Montjau a encore ac-
centué le caractère de son élection en décla-
rant qu'en toute autre occasion il aurait dé-
cliné, par suite de son grand âge, l'honneur
qu'on venait de lui faire ; mais que, dans la
situation actuelle, il l'acceptait pour bien
montrer que l'opinion de la commission est
favorable à l'expulsion obligatoire et totale.
Dans la soirée, on prêtait à certains mem-
bres de la Gauche radicale l'intention de
soumettre à la Chambre une proposition
transactionnelle qui prononcerait l'expulsion
immédiate des descendants en ligne directe
des famillés ayant régné en France et qui au-
toriserait le ministre de l'intérieur à interdire
le territoire de la République aux autres
membres de ces familles, par un simple ar-
rêté pris en conseil des ministres.
Le bruit s'est tout à coup répandu hier à la
Chambre, vers cinqheures du soir, qu'une crise
ministérielle venait d'éclater. Les uns affir-
maient que MM. Lockroy, Granet, Boulanger
et Aube étaient démissionnaires ; les autres
donnaient pour certaine la retraite de M. de
Freycinet. C'est dans la salle même des séan-
ces, et des bancs du Centre et de la Droite,
que partaient ces nouvelles contradictoires.
Un peu de réflexion eût cependant suffi à
démontrer le peu de sérieux de ces informa-
tions. Tout. d'abord les ministres n'ont pas
tenu conseil hier matin ; ils ne se sont même
pas réunis depuis la nomination de la com-
mission d'expulsion. Ce n'est que dans le
conseil de ce malin que seront arrêtées les
déclarations à faire à la commission et seule-
ment alors les divergences de vues, si elles
existent, se feront jour d'une façon effective.
Jusqu'alors, il est impossible de prédire une
crise.
Le projet déposé par M. Demôle a été ac-
cepté par tous les ministres, et c'est au nom
du cabinet tout entier que parlait le garde
des sceaux. On s'étonne de voir, en présence
d'une situation qui devrait commander l'union
de tous les républicains, les tentatives dissol-
vantes de certains incorrigibles pour lesquels
les crises ministérielles sont devenues un élé-
ment naturel.
Voici les renseignements que nous avons
recueillis en dernière heure sur les incidents
qui ont marqué la soirée d'hier.
Dans le dernier conseil des ministres, MM.
Lockroy, Granet et Boulanger avaient insisté
pour que le gouvernement adoptât une pro-
position d'expulsion totale et immédiate. M.
l'amiral Aube avait paru incliner vers cette
solution, mais toutefois avec quelques ré-
serves.
La majorité du conseil avait cependant ar-
rêté un texte qui a été déposé sur le bureau
de la Chambre, texte auquel s'étaient ralliés
MM. Boulanger, Lockroy, Granet et Aube.
Hier, MM. Boulanger, Aube, Granet et Loc-
kroy ont été pris de nouveaux scrupules et
ils ont eu plusieurs conférences, soit avec
M. Clémenctau, soit avec M. Grévy, soit enfin
avec M. de Freycinet.
Les quatre ministres se sont rendus au mi-
nistère des affaires étrangères et ont eu un
long entretien avec le président du conseil.
Contrairement aux bruits qui couraient, il
n'a nullement été question de démission, et
il est présumable que la discussion qui aura
lieu au conseil des ministres de ce matin con-
duira à une entente.
——————————— ———————————
LE PARLEMENT
SÉANCE DE LA CHAMBRE
Les livrets d'ouvriers. — La responsabi-
lité du commandement militaire.
En attendant les séances à grand orches-
tre que nous ménage la question des
princes, la Chambre et son président se
livrent aux premières douceurs de l'été.
L'une et l'autre sont aux champs. M, Flo-
quet cède le fauteuil à M. Buyat. Quant
aux députés, il y en a bien peu qui n'aient
pas fait carrément le lundi. Si la salle est
vide, les couloirs ne sont pas mieux
garnis.
Dans les couloirs, ce n'est pas un mal
qu'il y ait peu de monde. Les fauteurs
d'intrigues trouvent ainsi moins d'oreilles,
et tel bruit qui s'en irait grossissant s'il y
avait des badauds pour le colporter s'éva-
nouit sous les hautes coupoles comme une
bulle de savon.
En séance, on ne s'aperçoit pas non plus
que le petit nombre des auditeurs soit un
grand mal. La journée au contraire per
met de constater que, si nos assemblées
comptaient moins de membres, il y serait
plus facile de parler et d'écouter. Les deux
lois qu'on a votées étaient deux lois tech-
niques. On a pu les suivre et les éplucher
d'un bout à l'autre, par cette simple raison
qu'il n'y avait dans la salle que des gens
qu'elles intéressaient.
tt
★ +
On a commencé par la loi sur les livrets
d'ouvriers. C'est celle pour laquelle l'audi-
toire s'est montré le plus récalcitrant.
L'affaire, il est vrai, arrivait dans de mau-
vaises conditions. Précédemment la Cham-
bre avait repoussé l'article 2 qui était le
produit d'un amendement du Sénat et qui
réglementait le contrat de louage du tra-
vail. Il n'y avait plus dès lors aucune rai-
son pour maintenir les articles 3 et 4 qui
étaient également le fruit d'un amende-
ment du Sénat et qui créaient le livret
facultatif.
Le rapporteur, M. Lagrange, avait dé-
claré que la commission retirait ces arti-
cles et tout le monde croyait qu'on en
resterait là, quand le même M. Lagrange
est venu présenter un amendement qui
rétablissait sous d'autres noms le livret
facultatif.
Alors personne n'y a plus rien compris.
M. Lagrange a prononcé un discours trop
long. M. Lyonnais, M. Guillaumou sont
intervenus sans éclaircir beaucoup la ques-
tion. Enfin M. Lockroy est arrivé. En
quelques paroles pleines de sens, il a in-
vité la Chambre à s'en tenir à ce qui est
fait, à l'abrogation du livret obligatoire.
La Chambre n'a même pas eu besoin de
répondre par un vote. M. Lagrange, con-
vaincu, a retiré son amendement.
*
* *
On est entré alors dans la loi Ballue qui
a pour objet d'étendre, d'aggraver la res-
ponsabilité des officiers qui commandent
devant l'ennemi. Certes, nos désastres de
1870 ont prouvé que sur ce point le Code
de justice militaire a besoin d'être com-
plété.
- La loi proposée par M. Ballue n'a que
deux défauts : celui d'être née sous le coup
d'une émotion politique et celui d'avoir
été préparée par une commission qui pos-
sède l'ardeur patriotique plus que la lan-
gue du droit.
M. de Martimprey en profite pour diri-
ger contre le projet de la commission une
critique très longue, très serrée, qui au-
rait sans doute donné de l'hésitation à la
Chambre si le discours avait été suivi
d'une conclusion pratique. Mais M. de
Martimprey se borne à déclarer qu'il est
trop cruel de donner au commandant
d'une place ou d'une armée des responsa-
bilités égales à celles du commandant
d'un navire et d'obliger tout officier qui a
reculé devant l'ennemi à se justifier de-
vant un conseil d'enquête. Il n'indique au-
cun moyen d'améliorer le Code de 1857.
Il conseille purememt et simplement le
statu quo.
* *
Or, c'est précisément le statu quo qui
est condamné par l'expérience. Le rap-
porteur, M. Thiers, le démontre dans un
discours plein d'éloquence et de patrio-
tisme. Seulement, ce discours est la dé-
monstration vivante de ce que nous di-
sions tout à l'heure : qu'il eût mieux valu
ne pas faire sortir la loi nouvelle d'un évé-
nement isolé qui s'est produit dans des
régions barbares, à quatre mille lieues de
la mère-patrie.
Pour justifier la loi, M. Thiers laisse
absolument de côté l'incident dont elle est
sortie en décembre dernier : il remonte
jusqu'en 1870. Il invoque les souvenirs de
Sedan et de Metz. A ces noms douloureux,
des applaudissements éclatent, faisant
l'union complète, spontanée, des Gauches,
des applaudissements auxquels ne répond
aucune protestation de droite, que les
monarchistes saluent au contraire en
courbant la tête.
Dans les circonstances présentes, l'in-
fluence des événements qui se sont accom-
plis il y a quinze ans est bonne à méditer.
On peut voir sur quel terrain patriotique
l'union de tous les bons Français pourrait
être indissoluble.
Le grand succès oratoire de M. Thiers
enlève le vote de la loi malgré ses imper-
fections juridiques. Le général Boulanger
déclare du reste que, comme ministre de
la guerre, il sent la nécessité de mettre le
pays à l'abri des défaillances qui se sont
produites autrefois.
Les attaques de la Droite deviennent
impuissantes. Il y en a une, d'ailleurs, qui
ne compte pas, qui n'est qu'un court bé-
gaiement, celle du colonel de Plazanet.
Après une courte réplique de M. Ballue,
la Chambre passe aux articles par 369 voix
contre 171.
L'examen des articles était plus sca-
breux. Il y en a de rédigés dans une lan-
gue douteuse, obscure. Un moment, M.
Berger, flanqué du baron Reille, menace
de faire verser l'article 2, en montrant qu'il
peut donner matière à bien des interpré-
tations, qu'il ne définit pas notamment ce
que c'est qu'une reddition de place.
Mais on est encore sous le coup de la
parole vibrante du rapporteur. On repousse
tous les amendements, on adopte tous les
articles. On finit même par ne plus écou-
ter M. de Lanjuinais qui vient formuler
différentes critiques de détail, et l'on pro-
longe la séance jusqu'à ce que la loi en-
tière, y compris l'ensemble, ait été défini-
tivement adoptée. S'il y a des erreurs de
rédaction, le Sénat seul pourra les recti-
fier.
Dr RALPH.
LA VIE DE PARIS
Il y a, depuis hier, je ne sais combien
de peintres médaillés et mentionnés,
médaillés de première, de seconde et de
troisième classe, sans compter les gran-
des médailles et les médailles de voyage.
« Médaillons-nous les uns les autres »
est la devise des peintres français. Et
cependant, sur cent distinctions distri-
buées pour le moins, je ne sais pas si
on a fait dix heureux sans arrière-pen-
sée. Car le lauréat d'une première mé-
daille aurait voulu « décrocher » la mé-
daille d'honneur, et ainsi de suite jus-
qu'au dernier des mentionnés. De plus,
le public lui-même trouve excessive
cette humeur médaillante et commence
à en sentir les inconvénients.
Bientôt, en effet, devant l'encombre-
ment des œuvres exemptes de droit par
suite des récompenses octroyées à leur
auteur, il y aura si peu de place au Sa-
lon que des peintures très méritantes,
mais œuvres de début signées de noms
inconnus, ne trouveront plus de place.
Les peintres ne sont pas sans s'aperce-
voir que l'on ne peut pas indéfiniméllt
augmenter le nombre des toiles au Sa-
Ion. Il y en a tant et tant que le public,
quel que soit le robuste appétit de ses
curiosités, en arrive à l'indigestion.
Cette table trop bien servie coupe l'ap-
pétit.
Je sais des gens qui, renonçant à voir
tout le Salon avec ses milliers de ta-
bleaux, au lieu d'y aller trois ou quatre
fois, n'y vont qu'une seule, se faisant
conduire devant quelques tableaux choi-
sis et laissant le reste de côté. Il ne faut
donc pas penser à ouvrir des salles
nouvelles, et le flot montant des œuvres
d'art semble avoir atteint les dernières
limites de l'étiage. La démocratisation
de l'exposition risque donc, chose sin-
gulière! d'arriver à un résultat diamé-
tralement opposé à celui qu'on avait
espéré et voulu. On avait pour but et
pour mot d'ordre, dans la révolution
pacifique opérée il y a quelques années,
d'ouvrir plus aisément les portes du
Salon aux jeunes peintres. Et voilà que
le médaillage à outrance constitue déjà
une aristocratie de privilégiés, qui se
défend, comme toutes les aristocraties,
contre les nouveaux venus, repousse les
envahisseurs et repousse avec eux des
hommes qui mériteraient cependant un
meilleur accueil. Pendant quelques an-
nées, les expositions des refusés du
Salon ont fait l'effet de véritables plai-
santeries. On ne voyait pas bien la dif-
férence entre ces exhibitions et celle des
Incohérents, qui n'ont jamais prétendu
à autre chose qu'à être de joyeux fu-
mistes. Mais, cette année, l'exposition
des œuvres refusées a un tout autre
caractère. Il s'y trouve des peintures in-
contestablement plus intéressantes ou
moins folles que certaines toiles qui
sont au Salon et qui y sont entrées
exemptes de l'examen du jury d'admis-
sion. Si les choses vont ainsi pendant
quelques années, le Salon appartiendra
à un syndicat fermé de médaillés, et on
n'aura donné la liberté aux peintres
que pour leur permettre de se montrer
impunément illibéraux. -.u_.
Les réclamations abondent déjà. J en
ai reçu un bon nombre pour ma part,
et dont quelques-unes m'ont paru assez
justement motivées. Les peintres étran-
gers, par exemple, se plaignent volon-
tiers que, n'ayant ni maîtres ni cama-
rades d'atelier dans les commissions
formées par les artistes, ils sont géné-
ralement mal placés et voient leurs ta-
bleaux éloignés de cette fameuse « ci-
maise » qui est le paradis des toiles. La
répartition des médailles et des men-
tions, que nos lecteurs connaissent, n a
pas été non plus sans donner lieu à des
récriminations passionnées. On a vu
avec quelque surprise des œuvres très
sérieuses recevoir la même distinètîbn
que des œuvres simplement agréables,
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.96%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.96%.
- Auteurs similaires Chadeuil Gustave Chadeuil Gustave /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Chadeuil Gustave" or dc.contributor adj "Chadeuil Gustave")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k7562040d/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k7562040d/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k7562040d/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k7562040d/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k7562040d
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k7562040d
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k7562040d/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest