Titre : Gil Blas / dir. A. Dumont
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1909-12-25
Contributeur : Dumont, Auguste (1816-1885). Directeur de publication
Contributeur : Gugenheim, Eugène (1857-1921). Directeur de publication
Contributeur : Mortier, Pierre (1882-1946). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 25 décembre 1909 25 décembre 1909
Description : 1909/12/25 (N12005,A30). 1909/12/25 (N12005,A30).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-209
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 11/10/2012
f
30e ANNEE. NUMERO 4200&-" PARIS & DÉPARTEMENTS : Le Numéro 15 Centimes
SAMEDI 25 DECEMr .iE 100?T
La fournée Parisienne :
Courses. — Vincennes (fraf)
Cadeaux de Noël. — Visiter les
Grands Magasins Dufayeï ouverts au-
jourd'hui jusqu'à 6 h. 4j2 du soir.
Matinées. — Dans tous les théâtres de
Paris.
Baraques du Jour de l'an. — Pro-
menade traditionnelle, sur les grands
boulevards, des Parisiens en quête des
nouveaux jouets de l'année.
m i
1 26,
Boulevard des Italiens
PARIS (9e Art.)
L a
TÉLÉPHONES:
, Direction et Administr. 266-01
Rédaction u c. c. 102-7.4
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BUREAU SPÉCIAL A LONDRES
89. Mincing Lanc. E.C.
Lu xammia nemmt pas mdue
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° ÇTu frotrsems &f* siieaai te ptcapfà d'Horace^ tutîlt mil&
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HENRI de KGiiSS £ NNE.Qï0ae«aa Idu tp-rdm de rdintail
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26.
Boulevard des Italiens
PARIS (9e Arr)
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Crète (courrier hebdomadaire). —
Egypte, Syrie, Ceylan, Cochinehine,
Aunam, Tonkin, Chine. Japon, Corée;
Amérique du Sud ; Côte orientale
Afrique, Australie, Nouvelle-Calé-
donie.
Noël poup les petits
Linon, blondinette de six ans, .,/
à ses petits amis, tous les enfants
« J'AVAIS Mis NON S0VE1EB BAJFS LA (JlEMINkE. ri
Un jour, il y a très longtemps (je crois que,
je n'avais pas encore quatre ans), j'ai vu le
petit Jésus. C'était Noël, et j'avais mis mon
soulier dans la cheminée de maman avant de
me coucher. J'avais. aussi fait ma prière et
j'avais demandé au petit Jésus de. me donner
beaucoup de cadeaux : une poupée habillée
en bleu, un livre d'images, un parapluie, et
encore tout ce qu'il voudrait.
Quand j'ai été couchée, maman m'a bordée
dans mon berceau, m'a embrassée, et elle
m'a dit : « Endors-toi vite, ma petite Linon ;
a Noël ne vient jamais que quand les enfants
« dorment. »
Et j'ai dit : « Oui, maman », et j'ai fermé les
yeux.
Alors maman a cru que je dormais. Elle a
emporté la lampe et je suis restée toute seule,
dans la grande chamhre où il y avait la veil-
leuse allumée.
Je ne voulais pas m'en dormir, parced que je
voulais voir par où viendrait le petit Noël : je
croyais ça tellement impossible qu'il passe
par la cheminée !. Alors, pour m pas m'en-
cendre sur la terre, sûrement les méchants
hommes n'oseraient pas entrer dans les mai-
sons : alors, tout de suite, je n'ai plus peur.
Coucou 1 coucou ! coucou ! Oh 1 là, là ! J'en
l ai sauté dans mon petit lit !. Mais quoi ! c'est
en bas, dans la salle à manger, le coucou qui
dit l'heure. Un, deux, trois. (je sais comp-
ter jusqu'à vingt). Il sonne douze coups .: ça
? fait minuit.
| Mon cœur bat !. Vrai ! je n'ai plus du tout
envie de dormir !.
Du côté de la cheminée, j'entends un petit
bruit : je regarde, et ce que j'ai vu là, c'est
quelque chose de si extraordinaire que ja-
mais, jamais, je n'aurais cru que c'était pos-
sible !
Sur la grosse bûche éteinte, à moitié brûlée,
toute noire, un, puis deux petits petons roses;
le bas d'une robe- blanche comme la neige,
puis un corps tout entier, un petit enfant un
peu plus grand que moi, avec une figure dou-
ce, jolie, oh, mais ! jolie, enfin, comme on n'a
jamais rien vu de pareil, avec un sourire et
des yeux bleus, et des cheveux blonds frisés,
et tout autour de la tête, une petite couronne
si dorée qu'on aurait dit des rayons de soleil,
et qui n'était pas collée à sa tète, mais qui
volait tout le temps au-dessus. Après le petit
Jésus, il sort. de la cheminée des tas de tout
petits anges, rien qu'avec une tête et des ailes,
- comme celui de mon berceau, — et ils vo-
lent tout autour de Jésus en chantant douce-
ment des chansons avec des toutes petites
voix hautes. Et encore après, un grand ange
blanc, avec des ailes pointues dans le dos —
5 ça doit être celui-là qui aide Jésus à descen-
dre du ciel, - et il a des paquets plein les
! bras ; malheureusement, c'est tout enveloppé,
I on ne peut rien voir que. des jolis papiers
bleus. - .:
li DES TOUT PETITS ANGES, RIEN QU'AVEC USE TÊTE ET DES AILES. ET UN (UUÑD. AIQt lUltC:c.¡ M
dormir, j'ai ouvert les yeux très grands et j'ai,
regardé tout autour de moi.
J'ai commencé par faire des risettes au petit
ange qui est collé sur la croix d'ivoire, au-des-
sus de mon berceau : un drôle de petit ange
avec des grosses joues rondes, une chevelure
loute frisée, et detix petites ailes, sans bras,
ni jambes : rien qu'une tête ; ((. C'est pas des
vrais anges, ça », que j'ai dit.
Après mon petit ange, j'ai, compté les fleurs
de l'étoffe qui est au lit de maman, tout près
;de mon lit : mais il y en a bien plus que jus-
qu'où je sais compter.
Et de temps en temps, je regardais mon
soulier : pn gentil soulier verni, qui faisait
sur le marbre blane comme une tache d'encre
au milieu d'une belle feuille, de papier sauf
que c'est plus joli 1 Et je pensais à tout ce
qu'il y aurait demain dans ce petit soulier, et
à côté.
Hum ! Hum 1 Pourvu qu'il n'y ait pas de
verge !
Tiens ! cette veilleuse !. comme elle dan-
se !. Ça fait danser des ombres noires au
plafond !. Ça n'est pas drôle de voir ça : on
dirait des bêtes I.
Et puis, il ne fait pas de bruit du tout dans
la maison, seulement des petits craes dans le
parquet ou dans les armoires, et même dans
Je lit de maman.
On dirait qu'il y a quelqu'un, là dedans.
Mais non, maman est à la messe de minuit
avec papa et ma bonne tes attend dans la
chambre à côté.
Si je l'appelais ?. ■
Je n'ose pas. J'ai, trop peur que si elle vient,
ça empêche le petit Noël.
Enfin, je me dis qu'une nuit où il doit des-
Il se penche devant la cheminée ? il met
tous les paquets devant mon soulier, et je
crois qu'il n'y a pas de verge.
Le petit Jésus le regardait faire. Quand
ç'a été fini, l'ange s'est relevé et il a attendu.
Le petit'Jésus s'est approché de moi, pro-
bablement pour voir si je dormais.
Alors, j'ai fermé les yeux pour faire sem-
blant. Il s'est penché sur mon front et il m'a
embrassée tout doucement. Et j'ai très bien
senti ses cheveux chatouiller mon petit
cou.
Je l'ai encore entendu remuer dans la
chambre, mais je n'ai pas osé ouvrir les yeux.
Alors, je me suis endormie, et je n'ai pas vu
quand il est parti, et par où ; si c'est par la
cheminée, ou par la fenêtre, ou à travers le
mur.
Mais, tout ce que je sais, c'est que demain,
quand je me suis réveillée, j'ai trouvé dans
mon soulier toutes les cboses que je lui avais
demandées.
Et maman m'a ait que j'avais eu bien au
bonheur de voir de près le petit Noël, parce
que tous les enfants voudrait, mais que
; presque pas n'y arrivent.
! Cécile Fournery-Coquard,
I {Illustrations tfe Félix Fournery).
., 1 C'EST L 'lRS'IANT 1 MON CŒUR BAT 1 S
ÉDITORIAL
"*' -.
Les Mendicités annuelles
Mon Dieu, je ne suis l'ennemi ni du pour-
boires, ni des étrennes. Je trouve très naturel
qu'on reconnaisse par une gratification non
pas des services rémunérés d'autre part, mais
ce qu'on pourrait appeler le superflu de ces
services : un certain zèle, un particulier em-
pressement, une affabilité attentionnée.
Seulement, il faut que cette gratification
garde le caractère d'un don volontaire, et ne
prenne pas celui d'un impôt obligatoire. Et
cet impôt ne doit pas se superposer aux au-
tres taxes, et arriver à faire corps avec elles
jusqu'à être escompté par les pouvoirs pu-
blics, comme le fait se produit pour les fac-
teurs des postes. On dit couramment, dans
l'administration : tel emploi de facteur vaut
quatorze eents francs et deux cents francs
d'étrennes. On n'en est pas encore à l'impri-
mer sur les annuaires. Mais cela viendra.
Et encore, je passerais condamnation pour !
les facteurs des postes, bien qu'à leur grati-
fication annuelle s'ajoutent maintenant celles
des facteurs d'imprimés, des télégraphistes,
des distributeurs de, journaux, et même des
porteurs de prospectus. Il faut être bien
malheureux pour qu'au moins une fois dans
l'année ce messager des tristesses et des bon-
heur s ne vous ait pas apporté un peu de joie
dans un carré de papier, et c'est une aimable
et bonne superstition que de récompenser ce-
lui qui, même inconscient, vous transmet, un
peu de plaisir ou d'espérance. -
Maisès tous les j arasites qui, peu à
peu, se sont groupés autour de ces braves
gens, voici maintenant que « les employés du
gaz » viennent réclamer leurs étrennes ! Cette
fois, c'est tout de même un peu fort. Voilà un
personnel qui a réclamé avec un acharnement
peut-être légitime,, mais bruyant, son assimi-
lation avec les employés de la Ville, et main-
tenant qu'il l'a obtenue, maintenant qu'il est
devenu un personnel municipal, c'est aux par-
ticuliers, qu'il s'adresse pour se procurer une
augmentation d'appointements ! Et à quel ti-
tre, grand Dieu ! les employés du gaz récla-
ment-ils des gratifications ? Quels services
personnels, quelles complaisantes obligean-
ces justifient cette extraordinaire prétention ?
Il faut pourtant qu'il y ait une limite : nous
ne pouvons pas payer deux fois nos impôts.
Les administrations doivent intervenir énergi-
quement si elles ne veulent pas être tenues
pour complices de honteuses et fatigantes
mendicités. ,
GIL BLAS.
ÉCHOS
*
Les courses.
Aujourd'hui, à i h. 15, courses a Vincennes.
Pronostics du Gil Blnt e <
Prix de Larré. — Guetten; Gaulois.—~— -1
Prix de Casserens. — Gardenia, La Bobine.
Prix de Tresses. - Espoir, Finassier.
Prix du Lieu Harras. - Franco, Eduen,
Prix de Semallè. - Loustic, Fibleur. *
Prix de Sully. — Faon, Ginette. \1
IL Y A CENT ANS
Samedi 25 décembre 1809.
On attend sous peu de jours la nouvelle de la
signature de la paix avec la Suède Il faut que ce der-
nier royaume accède, au système continental contre
FAngtctene.
— Hambourg. — Le 68 régiment d'infanterie West-
phalienne, en garnison dans notre ville, est parti
hier pour Cuxhaven. Il sera, remplacé par d'autres
roupes westphaliennes.
- Rotterdam. — Les préparatifs contre Walche-
ren deviennent de jour en jour plus sérieux.
.--- x-
Bien rugi, lion !
S'il rugit encore, il rugira sans lui, le maître des
fauves, l'indomptable dompteur ; galant avec les
dames, courageux et ardent, la cravache d'une
main, le sourire aux lèvres, il triomphait des ti.
gres, et conquérait les tigresses. Bidel est mort! Il
vivait depuis dix ans à l'écart du boulevard — du
boulevard extérieur — et vieillissait après avoir vu
le déclin de sa royauté : ses enfants s'étaient par-
tagé sa gloire, ses voitures, son troupeau, et disper-
saient aux quatre coins de la France un nom autre-
fois unique. -
Pendant vingt années, d'ailleurs, Bidel avait ré-
gné sans conteste. C'était de 1875 à 1895. Vingt
années de fortune. Le music-hall n'avait pas encore
mis à la portée, de tous, animaux, gymnasiaiques,
acrobates, et le cirque ou la ménagerie allaient par
les villes, toujours attendus, toujours brillants. Bi-
del et Pezon parcoururent l'Europe et gagnèrent
tous deux renom et argent. Puis la décadence est
venue : et les barbares ont transformé en tristes ba-
raques sans attrait les établisements sompteuux de
jadis que conduisaient des trains spéciaux parmi
tes populations surexcitées.
Bidel quitta ses parents, riches cultivateurs du
Calvados, à vingt ans, pour obéir à sa vocation. Il
voulait être « montreur d'ours ». Il réussit en ce
métier, alors un peu sommaire, acheta de plui vas-
tes troupeaux, multiplia ses voitures, et peu après
la guerre sa vogue commença. Des accidents servi-
rent sa renommée. Plusieurs fois, il fut assailli par
ses lions et faillit perdre la vie. Il meurt à soixante-
six ans, dans sa villa d'Asnières, paisiblement, en
bourgeois heureux. ,
Il avait été beau garçon, de prestance héroïque,
à la fois élégant et volontaire. Toutes ses vertus
semblent désormais inutiles. Il n'y a plus de publIc.
plus de dompteurs; il n'y a surtout plus de lions.
- x
Eloquence.
Les Amitiés françaises — joli titre pour une jo-
lie chose — continuent à appeler en Belgique des
conférenciers français. Nous avons dit quel succès
Alfred Capus obtint récemment à Liège. Mme Ca-
tulle Mendès sera non moins fêtée, en cette même
ville, le 7 janvier prochain, lorsqu'elle paraîtra de-
vant le public wallon attentif, avec cet imposant
éclat que le. Tout-Paris des premières admire sans
se lasser. -
Les Amitiés françaises ont pris pour délégué à
Paris notre excellent confrère de la Petite Républi-
que, M. Pascal Bonetti. Mme Catulle Mendès par-
lera, dans sa conférence, de chers poètes disparus,
et célébrera peut-être leurs vertus..
X
On liquide. --
Hier matin eut lieu le tirage de la loterie dite de
liquidation. Pas de liquidation des congrégations,
encore qu'elle ne serait pas inutile, si les liquida-
teurs continuent quelque temps encore leurs petits
travaux d'enrichissement personnel. Il s'agit de
se libérer de deux douzaines de loteries plus ou
moins importantes, que le Parlement autorisa peut-
être imprudemment et qui, multipliées à l'excès, ne
trouvèrent même pas à couvrir leurs frais.
Une loterie générale, avec gros lots d'un million,
nous en doit débarrasser — jusqu'à la prochaine
fois. Hier, en tous cas, la fortune a fait, d'un seul
coup, trois heureux. Le milion a été gagné par M.
Raoul Guiet, vingt-cinq ans, originaire de Tours,
coiffeur à Poitiers. M. Guiet avait pris son billet à
la succursale du Crédit Lyonnais, en participation
avec M. Tranchant, boulanger, route de Bordeaux,
et M. Aubugeau, son ouvrier.
Les trois compères avaient rédigé et signé un ac-
cord aux termes duquel il était entendu que, si le
lot n'était pas supérieur à 50 francs, la somme se-
rait consacrée à un festin intime. Au-dessus de 50
francs, on devait procéder à un partage sans condi-
tion, chacun touchait sa part régulière dans cette
poportion : Tranchant deux parts, les autres cha-
cun une. Et naturellement, ils se déclaraient hier,
tous les trois, surpris, émus, philosophes, bref ra-
vis.
Ils parlent déjà de continuer leur travail quoti-
dien et de répandre deo bienfaits autour d'eux. Ah !
les prodigues, les prodigues, va penser M. Georges
Leygues..
Le vieux Noël poudré de gel.
Le vieux Noël, poudré de gel, pesant d'années,
Parcourt la ville blanche en la neigeuse nuit.
Sur l'éclatant tapis, fantôme allant sans bruit,
Hotte remplie au dos, tôle encapuchonnée.
Il frappe aux seuils joyeux qui s'ouvrent devant lui :
.- Noël ! Je veux voir en cohorte
S'aligner des soldats de plomb.
—Noël 1 Dans mon sabot apporte
Des arbres verts, de blancs moutons,
Un chien, un pâtre doux et blond.
— Je désire une farandole
De pantins fous au bout d'un fil.
— Je veux l'aile plane qui vole
Et passe la mer sans péril.
Où Noël est venu,pour écouter ces rêve?.
Les petits lits douillets sont des nids précieux =
Quand sera l'heure pâle où le sommeil fait tvève^
Les beaux jouets luiront dans l'ûtre spacieux.
"Le vioii.v N'oei, poudre ue ger, pesant d'années,
Parcourt la ville blanche en la neigeuse nuit.
Sur l'éclatant tapis, fantôme allant sans bruit,
Il entend qu'on le prie aux pauvres cheminées :
- Ami des enfants, bon Noël !
Ecoute comme nos dents claquent.
Noël 1 C'est que le vent du ciel
Souffle fort dans notre baraque.
Noël 1 Du feu serait si beau,
Tordant sa flamme en l'âtre chaud :
Mais l'hiver, la vie est bien chère .1
Jette en nos sabots de misère,
Le soleil et les primevères.
Or, messire Noël n'est point dispensateur
Des rêves merveilleux dont s'émeut la pauvraille.
.; L'heure fuit ; le matin, avec morne lenteur,
Par la vitre givreuse, attache à la muraille
Des logis froids son spectre blanc et, dans ces lieux,
Noël ni le soleil ne voulurent descendre :
Où la vie est tragique, où grelottent les gueux,
Ne s'accomplissent point, hélas ! les contes tendres,
Et gisent les sabots dénués sur la cendre;
B. REYNOLD.
Le goût d'une femme.
On parle de tous côtés de la transformation du
Grand Hôtel en magasin de nouveautés, en théâtre,
en établissement financier, etc. En attendant, son
intelligent et sympathique directeur, M. Régly,
laisse dire et fait des merveiles. Les transforma-
tions qu'on doit à son artistique initiative en ont
falt une maison dont les hôtes ne savent pas ce qu'il
faut apprécier le plus du confort ou de l'agrément.
L'heureux directeur a été admirablement secondé
dans sa tâche par Mme Régly; et ce qui fait le
charme du Grand Hôtel, c'est qu'on y sent partout
te goût délicat d'une femme.
-- -----.x
A propos de « Chantecler ».
La grande question du printemps dernier était :
Qui jouera Chantecler? — Guitry fut désigné, et
ce choix fut universellement approuvé.
Mais qui publiera Chantecler ? se demandait-on
depuis l'automne. — Ce sera VIllustration, dès le
lendemain de la première, en quatre numéros ex-
ceptionnels.
•
M. Cook est définitivement convaincu de n'être
pas allé au Pôle, après cent Pearygrination et cent
Pearypéties. Mais une agence célèbre de voyages
est dégoûtée. L'agence Cook s'appelera désor-
mais l'agence Pol Peary.
Lé Diable boiteux.
LIBRES PROPOS
Menu de Réveillon
Si nous étions sérieux, la nuit de Noël nous ap.
prendrait ou nous rappellerait bien des choses.
Le moins qu'elle puisse nous apprendre ou nous
rappeler — même à nous qui ne sommes pas sé-
rieux — c'est l'art de la gastronomie. On prétend
que cet art est en baisse depuis Berchoux, depuis
Brillât-Savarin, et particulièrement depuis Charles
Monselet, qui fut le dernier à comprendre la poésie
de la mangeaille. Peut-être cepentbnt n'a. vous-
nous pas dégénéré autant que nous le supposons. Et
voici un menu qui évoque sans peine toutes les joies
culinaires, tous les grands souvenirs historiques, et
par surcroît tous les mystères du beau langage fran-
çais.
C'est en vain qu'on prétend, en effet, que la lan-
gue française est en décadence. Elle a des ressour-
ces infinies et elle se renouvelle incessamment. Que
dites-vous de ce menu, qu'on pourrait faire expli-
quer dans les écoles ? J'estime que les écoles laïques
et les écoles congréganistes se réconcilieraient aisé-
ment autour de lui !
1 y a d'atord : les huîtres royales d'Ostende. Un
enfant de six ans expliquerait facilement que les
huîtres s'appellent ainsi parce qu'il y a beaucoup
d'huîtres à Ostende, même en dehors de la saison
mondaine, parce que le roi des - -- Dieu ait
son âme ! — y fréquenta et non prxnt parce que l'â-
J J..h. .:.I;l.: t:t)-:"-
me belge y prit son essor. Après les huîtres, nous
prénons le consomme i"îveur en tasse, et nous sa-
vons bien que lorsque tout sera consommé, le viveur
quittera la tasse pour !a petite voiture. Nous som-
mes prêts maintenant pour les timbales de homard
à l'américaine, ainsi nommées parce que les ho-
mards font rougir le teint des Américaines ou parce
que les Américaines ont souvent le teint cuit du
homard. Quant aux côtelettes d'agneau, à la maré-
chale, elles ne suscitent aucun embarras, et nous ne
savons pas de quelle maréchale il s'agit. D'ailleurs,
il n'y a plus de maréchales. Le chapon pris à la ge-
lée passe comme une muscade. Les cailles à la
George Sand surprennent au premier abord : ou
bien elles appellent des comparaisons trop vulgai-
res, ou bien il faut convenir que George Sand mé-
rite mieux que de donner son nom à une caille. Il
serait plus sage de dire cailles à la Pompadour, en
mémoire de Voltaire. Un jour que la Pompadour
mangeait une caille qu'elle trouvait grassouillette,
Voltaire lui dit : -
Grassouillette, entre nous, me semble un peu caillette,
Je vous le dis tout bas, belle Pompadourette !
Bien entendu, la salade Diplomate va de soi.
Partout où pasgent les diplomates, tout est brouil-
lé. Des fruits, à cette heure, et quelques petites
friandises. Un dernier verre de Champagne. Des al-
cools en veux-tu en voilà. Et avouons que la
langue française en voit de raides la nuit du Réveil-
lon. Espérons qu'elle se rattrape le jour de Noël.
J. Ernest-Charles.
LIRE EN TROISIEME PAGE :
LA CHROMIOUE. DE LONDRES
Par Sir John
"01L BLAS"
va pou à peu se transformer
Tu-sais-tout !
—
Parodie 'de la belle "pic ce de vers 'de Mme Rose monde Gérard, parue à b gloire de M. Maurice Res*
tond, soji fils, dans le numéro de Noël de ILLUSTRATION et entrée aussitôt dans immortalité.
C'était hier. Je vois tes petites phalanges
Toutes moites encor des horreurs de tes langes
Suivre sur l'alphabet le trajet bien connu : -
B, Ba, Be, Bi, Bo, Bu, C, Ca, Ce, Ci, Co, Cu.
Puis il faut épeler : ce sont de longs murmures :
J'ai-fait-mon-pi-pi-dans-le-pot-aux-con-fi-tu-res ;
Pa-pa-dans-son-ni -ni - faut- pas- met-tre-son-doigt.
Et maintenant, c'est toi qui m'en remontres, toi
Qui m'expliques lorsque j'ai la tête lambine
'A bien saisir le sens d'un terme de marine.
On vante ton esprit, ta science et ton goût.
Et le monde devrait t'appeler : Je-Sais-touS
Car tu sais tout ; j'écoute et c'est un charme immense 1
Tous les rois, avec la date de leur naissance v
Et celle de leur mort, tous les auteurs latins,
Golhs, hottentofs, chinois, hindous et levantins,.
Les six sœurs Barison, tous nos Louis, les urnes
Funéraires, les cols à fraise, les cothurnes,
Le pere Ubu-la-Frousse et la belle Didon
Qui, dit-on, dînait du dos dodu d'un dindon ! -
Le passé tout entier a, de tes plumes d'oie, -m- • * tr~t ~v -
Roulé sur.tes cahiers de classe, ô douce joie ! - ",jm*
Petit Maurice aimé, bien mieux que Petit-Jean
Tu connais le Soleil, la Lune aux rais d'argent,
-Les Babyloniens et Vénus Callypige ;
'Aux Carpocratiens tu peux faire la pige ;
Tu connais les amours de la Reine Margot,
Tu connais le breton, le javanais, l'argot,
Le basque, le sanscrit, et l'esperanto même,
Sans les avoir jamais appris, sombre problème !
Tu sais tout, oui tout, le contenu des Bottins, , r
Tous les cancans, tous les ragots, tous les potins.
v Moi qui ne sais qu'un peu de musique et de danse,
Je me sens très petite, et je te trouve immense.
Toi, tu connais les philosophes grecs, romains
Et. provençaux. Quoi donc ? Hier encore mes mains
Dans tes cheveux bouclés che reliaient les pique-tête,
Et maintenant ton front pâlit sur Epictète.
Quoi donc ! Est-ce possible ? Il y a quelques jours
1 Tu regardais Guignol jouer ses méchants tours
Au naïf commissaire et maintenant, sans pose,
Tu lis Nietzsche, Stirner, Bjoernson et, je suppose, -
Platon. Tu traités Kant de petit paltoquet
Et trouves qu'Aristote est un pâle toqué,
Capable tout au plus d'esbaudi r des poupées.
Hegel, Hume, Bergson, vieilles poires tapées,
A ton commandement, évanouis, dissous,
Rentrent en moins de rien au troisième dessous.
"IF Tu renvoies sans broncher Gœthe à sa ca^conade^ *-y
D'un geste tu réduis Leibniz en mar.monade,
Et Musset, sous les traits de to n verbe avisé,
Se revoit à nouveau ridicoculisé.
Eh quoi ? Hier encor tu te tordais de rire
Aux contes de Puff-Puff et de Jean-Tire-Lire.
Et maintenant d'un trait tu dé vores Zola
Et tu dis, méprisant : « Quoi ? Ce n'est que cela ? a:
Toi qui battais des mains aux histoires de fées,
Du noir Gustave Hervé tu scrutes les pensées 1
Hier encore, prenant un plaisir très réel
A dévorer les fruits du labeur paternel,
Tu feuilletais YAiglon% la Princesse lointainer
Monsieur de Bergerac et la Samaritaine ;
Tu t'enthousiasmais pour Fia mbeau dit Flambard
Qui mangeait du cheval par un froid de canard,
En disant : « J'aime mieux le Russe que l'onglée. »; :.,-_.
Tu pleurais lorsque « ça sentait la giroflée »,
Et tu ne trouvais rien sur la t erre de beau
Comme le rouge nez du vaillan t Cyrano !
Et maintenant, hostile aux viei Res amusailles,
Tu déclares que la comtesse de Noailles
A compris le secret de l'âme de Barrés ;
Qu'il fait soixante-dix degrés à Bénarès ;
Qu'on jouera Chantecler à la saison nouvelle - -
Et que l'on peut, sans trop se c reuser la cervelle,
— -., J Expliquer les romans de Madame Mardrus ;
- .,. Hier encore, je me fatiguais l'humérus
■ m , — A te porter comme un petit sai nt Jean-Baptiste,
Boule rose dans ta chemise de batiste.
Et maintenant lorsque tu t'en vas discourant
Sur Richepin-le-Jeune et reiphppin.io.Aran/» 1 ~-
Tu me cites. Plotin retouché par. Porphyre.
Et moi, la bouche bée, ô mon gars, je t'admire,
- -- f Et quand tu dis : « C'est beau ! » Que moi je réponds : a Oui »
Comme un pauvre hibou par le jour ébloui,
Ce n'est pas, mon petit, tout ce que tu racontes
Des peuples, des savants, des rois et des archontes
Qui fait trembler mon cœur ainsi, non, c'est de voir
Que moi j'ai fait un fils d'un aussi grand savoir 1
Un petit citoyen duquel la renommée
Eclipsera plus tard les seize Ptolémée,
Les nombreux Constantins, les trois Napoléons
Et les quatorze cent soixante Pharaons ;
C'est de voir que le nom (espo ir qui me chatouille!)
-a De Rostand n'est pas près de tomber en quenouille
C'est de voir que Pascal, Hugo, Pasteur, César, ,
Et le roi Sésostris et Teglath-Phalazar,
Tous les Augustes, y compris celui du cirque, v J-
Les trois Mousque. non, ça ne rime pas en irque 3
Les trois dessinateurs : Sem, Cham et puis Japhet,
Jaurès, Paul Deschanel, Jésus de Nazareth, 7 -
Cléopâtre, de Max, Néron, les deux Antoine (1), -
Et Coûtant l'antechrist, et Combes l'anti-moine,
Charlemagne, Mac-Nab, Solon, Mathusalem,
Otero, Bossuet, Annibal et Dranem, -
Ne peuvent désormais t'atteindre à la cheville,.
Et que, déjà, suprême honneur pour la famille, v
Même ton père Edmond, quelque académicien
Qu'il soit, n'est, près de toi, que rien, que rien, que rien r
** -, Pour copie conforme
"1 ----<- - - - Henry Mustière.
(1) Celui qui assista aux funérailles de César et celui qui les monta sur la grande scène de FOdéon.
CONTRE L'APACHIE
La nouvelle nous vient du Nord. Est-ce pour cela
une idée lumineuse? Qu'on en juge plutôt.
Ayant remarqué que depuis quelque temps la cri-
minalité augmentait dans de notables proportions
dans leur pays, les autorités du Connecticut
(U. S. A.) se sont avisées d'y porter remède.
Epousant en l'espèce les théories d'Emile Zola
sur l'atavisme, et celles de Cesare Lombroso sur le
criminel-né, les autorités connecticussoises — oui,
madame — ont décidé de tuer si possible le mal
dans l'œuf.
Aussi, une commission de doctes savants fut-elle
aussitôt nommée et chargée d'examiner les indivi.
dus détenus dans les prisons de l'Etat.
Après examen mental des prisonniers, cette docte
compagnie décida que le meilleur moyen d'empê-
cher la propagation du microbe criminaliste serait
de faire subir aux détenus mâles criminels-nés,
avant leur sortie de prison, une opération dans le
genre de celle qui jadis rendit célèbre le malheu-
reux Abailard.
Des essais ont, paraît-il, été faits et ont donné
d'excellents résultats.
C'est du moins ce qu'affirme un grave journal
américain.
Si NOII e vetQ,,*
Qu'en pensent ros apaches nationaux ?. et sur-
tout leurs amazones.
F.-D. DU ESSART9.
30e ANNEE. NUMERO 4200&-" PARIS & DÉPARTEMENTS : Le Numéro 15 Centimes
SAMEDI 25 DECEMr .iE 100?T
La fournée Parisienne :
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Grands Magasins Dufayeï ouverts au-
jourd'hui jusqu'à 6 h. 4j2 du soir.
Matinées. — Dans tous les théâtres de
Paris.
Baraques du Jour de l'an. — Pro-
menade traditionnelle, sur les grands
boulevards, des Parisiens en quête des
nouveaux jouets de l'année.
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Rédaction u c. c. 102-7.4
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Lu xammia nemmt pas mdue
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Départs de Courriers. — Amérique
du Sud : départ par Sud-Express ;
Crète (courrier hebdomadaire). —
Egypte, Syrie, Ceylan, Cochinehine,
Aunam, Tonkin, Chine. Japon, Corée;
Amérique du Sud ; Côte orientale
Afrique, Australie, Nouvelle-Calé-
donie.
Noël poup les petits
Linon, blondinette de six ans, .,/
à ses petits amis, tous les enfants
« J'AVAIS Mis NON S0VE1EB BAJFS LA (JlEMINkE. ri
Un jour, il y a très longtemps (je crois que,
je n'avais pas encore quatre ans), j'ai vu le
petit Jésus. C'était Noël, et j'avais mis mon
soulier dans la cheminée de maman avant de
me coucher. J'avais. aussi fait ma prière et
j'avais demandé au petit Jésus de. me donner
beaucoup de cadeaux : une poupée habillée
en bleu, un livre d'images, un parapluie, et
encore tout ce qu'il voudrait.
Quand j'ai été couchée, maman m'a bordée
dans mon berceau, m'a embrassée, et elle
m'a dit : « Endors-toi vite, ma petite Linon ;
a Noël ne vient jamais que quand les enfants
« dorment. »
Et j'ai dit : « Oui, maman », et j'ai fermé les
yeux.
Alors maman a cru que je dormais. Elle a
emporté la lampe et je suis restée toute seule,
dans la grande chamhre où il y avait la veil-
leuse allumée.
Je ne voulais pas m'en dormir, parced que je
voulais voir par où viendrait le petit Noël : je
croyais ça tellement impossible qu'il passe
par la cheminée !. Alors, pour m pas m'en-
cendre sur la terre, sûrement les méchants
hommes n'oseraient pas entrer dans les mai-
sons : alors, tout de suite, je n'ai plus peur.
Coucou 1 coucou ! coucou ! Oh 1 là, là ! J'en
l ai sauté dans mon petit lit !. Mais quoi ! c'est
en bas, dans la salle à manger, le coucou qui
dit l'heure. Un, deux, trois. (je sais comp-
ter jusqu'à vingt). Il sonne douze coups .: ça
? fait minuit.
| Mon cœur bat !. Vrai ! je n'ai plus du tout
envie de dormir !.
Du côté de la cheminée, j'entends un petit
bruit : je regarde, et ce que j'ai vu là, c'est
quelque chose de si extraordinaire que ja-
mais, jamais, je n'aurais cru que c'était pos-
sible !
Sur la grosse bûche éteinte, à moitié brûlée,
toute noire, un, puis deux petits petons roses;
le bas d'une robe- blanche comme la neige,
puis un corps tout entier, un petit enfant un
peu plus grand que moi, avec une figure dou-
ce, jolie, oh, mais ! jolie, enfin, comme on n'a
jamais rien vu de pareil, avec un sourire et
des yeux bleus, et des cheveux blonds frisés,
et tout autour de la tête, une petite couronne
si dorée qu'on aurait dit des rayons de soleil,
et qui n'était pas collée à sa tète, mais qui
volait tout le temps au-dessus. Après le petit
Jésus, il sort. de la cheminée des tas de tout
petits anges, rien qu'avec une tête et des ailes,
- comme celui de mon berceau, — et ils vo-
lent tout autour de Jésus en chantant douce-
ment des chansons avec des toutes petites
voix hautes. Et encore après, un grand ange
blanc, avec des ailes pointues dans le dos —
5 ça doit être celui-là qui aide Jésus à descen-
dre du ciel, - et il a des paquets plein les
! bras ; malheureusement, c'est tout enveloppé,
I on ne peut rien voir que. des jolis papiers
bleus. - .:
li DES TOUT PETITS ANGES, RIEN QU'AVEC USE TÊTE ET DES AILES. ET UN (UUÑD. AIQt lUltC:c.¡ M
dormir, j'ai ouvert les yeux très grands et j'ai,
regardé tout autour de moi.
J'ai commencé par faire des risettes au petit
ange qui est collé sur la croix d'ivoire, au-des-
sus de mon berceau : un drôle de petit ange
avec des grosses joues rondes, une chevelure
loute frisée, et detix petites ailes, sans bras,
ni jambes : rien qu'une tête ; ((. C'est pas des
vrais anges, ça », que j'ai dit.
Après mon petit ange, j'ai, compté les fleurs
de l'étoffe qui est au lit de maman, tout près
;de mon lit : mais il y en a bien plus que jus-
qu'où je sais compter.
Et de temps en temps, je regardais mon
soulier : pn gentil soulier verni, qui faisait
sur le marbre blane comme une tache d'encre
au milieu d'une belle feuille, de papier sauf
que c'est plus joli 1 Et je pensais à tout ce
qu'il y aurait demain dans ce petit soulier, et
à côté.
Hum ! Hum 1 Pourvu qu'il n'y ait pas de
verge !
Tiens ! cette veilleuse !. comme elle dan-
se !. Ça fait danser des ombres noires au
plafond !. Ça n'est pas drôle de voir ça : on
dirait des bêtes I.
Et puis, il ne fait pas de bruit du tout dans
la maison, seulement des petits craes dans le
parquet ou dans les armoires, et même dans
Je lit de maman.
On dirait qu'il y a quelqu'un, là dedans.
Mais non, maman est à la messe de minuit
avec papa et ma bonne tes attend dans la
chambre à côté.
Si je l'appelais ?. ■
Je n'ose pas. J'ai, trop peur que si elle vient,
ça empêche le petit Noël.
Enfin, je me dis qu'une nuit où il doit des-
Il se penche devant la cheminée ? il met
tous les paquets devant mon soulier, et je
crois qu'il n'y a pas de verge.
Le petit Jésus le regardait faire. Quand
ç'a été fini, l'ange s'est relevé et il a attendu.
Le petit'Jésus s'est approché de moi, pro-
bablement pour voir si je dormais.
Alors, j'ai fermé les yeux pour faire sem-
blant. Il s'est penché sur mon front et il m'a
embrassée tout doucement. Et j'ai très bien
senti ses cheveux chatouiller mon petit
cou.
Je l'ai encore entendu remuer dans la
chambre, mais je n'ai pas osé ouvrir les yeux.
Alors, je me suis endormie, et je n'ai pas vu
quand il est parti, et par où ; si c'est par la
cheminée, ou par la fenêtre, ou à travers le
mur.
Mais, tout ce que je sais, c'est que demain,
quand je me suis réveillée, j'ai trouvé dans
mon soulier toutes les cboses que je lui avais
demandées.
Et maman m'a ait que j'avais eu bien au
bonheur de voir de près le petit Noël, parce
que tous les enfants voudrait, mais que
; presque pas n'y arrivent.
! Cécile Fournery-Coquard,
I {Illustrations tfe Félix Fournery).
., 1 C'EST L 'lRS'IANT 1 MON CŒUR BAT 1 S
ÉDITORIAL
"*' -.
Les Mendicités annuelles
Mon Dieu, je ne suis l'ennemi ni du pour-
boires, ni des étrennes. Je trouve très naturel
qu'on reconnaisse par une gratification non
pas des services rémunérés d'autre part, mais
ce qu'on pourrait appeler le superflu de ces
services : un certain zèle, un particulier em-
pressement, une affabilité attentionnée.
Seulement, il faut que cette gratification
garde le caractère d'un don volontaire, et ne
prenne pas celui d'un impôt obligatoire. Et
cet impôt ne doit pas se superposer aux au-
tres taxes, et arriver à faire corps avec elles
jusqu'à être escompté par les pouvoirs pu-
blics, comme le fait se produit pour les fac-
teurs des postes. On dit couramment, dans
l'administration : tel emploi de facteur vaut
quatorze eents francs et deux cents francs
d'étrennes. On n'en est pas encore à l'impri-
mer sur les annuaires. Mais cela viendra.
Et encore, je passerais condamnation pour !
les facteurs des postes, bien qu'à leur grati-
fication annuelle s'ajoutent maintenant celles
des facteurs d'imprimés, des télégraphistes,
des distributeurs de, journaux, et même des
porteurs de prospectus. Il faut être bien
malheureux pour qu'au moins une fois dans
l'année ce messager des tristesses et des bon-
heur s ne vous ait pas apporté un peu de joie
dans un carré de papier, et c'est une aimable
et bonne superstition que de récompenser ce-
lui qui, même inconscient, vous transmet, un
peu de plaisir ou d'espérance. -
Mais
peu, se sont groupés autour de ces braves
gens, voici maintenant que « les employés du
gaz » viennent réclamer leurs étrennes ! Cette
fois, c'est tout de même un peu fort. Voilà un
personnel qui a réclamé avec un acharnement
peut-être légitime,, mais bruyant, son assimi-
lation avec les employés de la Ville, et main-
tenant qu'il l'a obtenue, maintenant qu'il est
devenu un personnel municipal, c'est aux par-
ticuliers, qu'il s'adresse pour se procurer une
augmentation d'appointements ! Et à quel ti-
tre, grand Dieu ! les employés du gaz récla-
ment-ils des gratifications ? Quels services
personnels, quelles complaisantes obligean-
ces justifient cette extraordinaire prétention ?
Il faut pourtant qu'il y ait une limite : nous
ne pouvons pas payer deux fois nos impôts.
Les administrations doivent intervenir énergi-
quement si elles ne veulent pas être tenues
pour complices de honteuses et fatigantes
mendicités. ,
GIL BLAS.
ÉCHOS
*
Les courses.
Aujourd'hui, à i h. 15, courses a Vincennes.
Pronostics du Gil Blnt e <
Prix de Larré. — Guetten; Gaulois.—~— -1
Prix de Casserens. — Gardenia, La Bobine.
Prix de Tresses. - Espoir, Finassier.
Prix du Lieu Harras. - Franco, Eduen,
Prix de Semallè. - Loustic, Fibleur. *
Prix de Sully. — Faon, Ginette. \1
IL Y A CENT ANS
Samedi 25 décembre 1809.
On attend sous peu de jours la nouvelle de la
signature de la paix avec la Suède Il faut que ce der-
nier royaume accède, au système continental contre
FAngtctene.
— Hambourg. — Le 68 régiment d'infanterie West-
phalienne, en garnison dans notre ville, est parti
hier pour Cuxhaven. Il sera, remplacé par d'autres
roupes westphaliennes.
- Rotterdam. — Les préparatifs contre Walche-
ren deviennent de jour en jour plus sérieux.
.--- x-
Bien rugi, lion !
S'il rugit encore, il rugira sans lui, le maître des
fauves, l'indomptable dompteur ; galant avec les
dames, courageux et ardent, la cravache d'une
main, le sourire aux lèvres, il triomphait des ti.
gres, et conquérait les tigresses. Bidel est mort! Il
vivait depuis dix ans à l'écart du boulevard — du
boulevard extérieur — et vieillissait après avoir vu
le déclin de sa royauté : ses enfants s'étaient par-
tagé sa gloire, ses voitures, son troupeau, et disper-
saient aux quatre coins de la France un nom autre-
fois unique. -
Pendant vingt années, d'ailleurs, Bidel avait ré-
gné sans conteste. C'était de 1875 à 1895. Vingt
années de fortune. Le music-hall n'avait pas encore
mis à la portée, de tous, animaux, gymnasiaiques,
acrobates, et le cirque ou la ménagerie allaient par
les villes, toujours attendus, toujours brillants. Bi-
del et Pezon parcoururent l'Europe et gagnèrent
tous deux renom et argent. Puis la décadence est
venue : et les barbares ont transformé en tristes ba-
raques sans attrait les établisements sompteuux de
jadis que conduisaient des trains spéciaux parmi
tes populations surexcitées.
Bidel quitta ses parents, riches cultivateurs du
Calvados, à vingt ans, pour obéir à sa vocation. Il
voulait être « montreur d'ours ». Il réussit en ce
métier, alors un peu sommaire, acheta de plui vas-
tes troupeaux, multiplia ses voitures, et peu après
la guerre sa vogue commença. Des accidents servi-
rent sa renommée. Plusieurs fois, il fut assailli par
ses lions et faillit perdre la vie. Il meurt à soixante-
six ans, dans sa villa d'Asnières, paisiblement, en
bourgeois heureux. ,
Il avait été beau garçon, de prestance héroïque,
à la fois élégant et volontaire. Toutes ses vertus
semblent désormais inutiles. Il n'y a plus de publIc.
plus de dompteurs; il n'y a surtout plus de lions.
- x
Eloquence.
Les Amitiés françaises — joli titre pour une jo-
lie chose — continuent à appeler en Belgique des
conférenciers français. Nous avons dit quel succès
Alfred Capus obtint récemment à Liège. Mme Ca-
tulle Mendès sera non moins fêtée, en cette même
ville, le 7 janvier prochain, lorsqu'elle paraîtra de-
vant le public wallon attentif, avec cet imposant
éclat que le. Tout-Paris des premières admire sans
se lasser. -
Les Amitiés françaises ont pris pour délégué à
Paris notre excellent confrère de la Petite Républi-
que, M. Pascal Bonetti. Mme Catulle Mendès par-
lera, dans sa conférence, de chers poètes disparus,
et célébrera peut-être leurs vertus..
X
On liquide. --
Hier matin eut lieu le tirage de la loterie dite de
liquidation. Pas de liquidation des congrégations,
encore qu'elle ne serait pas inutile, si les liquida-
teurs continuent quelque temps encore leurs petits
travaux d'enrichissement personnel. Il s'agit de
se libérer de deux douzaines de loteries plus ou
moins importantes, que le Parlement autorisa peut-
être imprudemment et qui, multipliées à l'excès, ne
trouvèrent même pas à couvrir leurs frais.
Une loterie générale, avec gros lots d'un million,
nous en doit débarrasser — jusqu'à la prochaine
fois. Hier, en tous cas, la fortune a fait, d'un seul
coup, trois heureux. Le milion a été gagné par M.
Raoul Guiet, vingt-cinq ans, originaire de Tours,
coiffeur à Poitiers. M. Guiet avait pris son billet à
la succursale du Crédit Lyonnais, en participation
avec M. Tranchant, boulanger, route de Bordeaux,
et M. Aubugeau, son ouvrier.
Les trois compères avaient rédigé et signé un ac-
cord aux termes duquel il était entendu que, si le
lot n'était pas supérieur à 50 francs, la somme se-
rait consacrée à un festin intime. Au-dessus de 50
francs, on devait procéder à un partage sans condi-
tion, chacun touchait sa part régulière dans cette
poportion : Tranchant deux parts, les autres cha-
cun une. Et naturellement, ils se déclaraient hier,
tous les trois, surpris, émus, philosophes, bref ra-
vis.
Ils parlent déjà de continuer leur travail quoti-
dien et de répandre deo bienfaits autour d'eux. Ah !
les prodigues, les prodigues, va penser M. Georges
Leygues..
Le vieux Noël poudré de gel.
Le vieux Noël, poudré de gel, pesant d'années,
Parcourt la ville blanche en la neigeuse nuit.
Sur l'éclatant tapis, fantôme allant sans bruit,
Hotte remplie au dos, tôle encapuchonnée.
Il frappe aux seuils joyeux qui s'ouvrent devant lui :
.- Noël ! Je veux voir en cohorte
S'aligner des soldats de plomb.
—Noël 1 Dans mon sabot apporte
Des arbres verts, de blancs moutons,
Un chien, un pâtre doux et blond.
— Je désire une farandole
De pantins fous au bout d'un fil.
— Je veux l'aile plane qui vole
Et passe la mer sans péril.
Où Noël est venu,pour écouter ces rêve?.
Les petits lits douillets sont des nids précieux =
Quand sera l'heure pâle où le sommeil fait tvève^
Les beaux jouets luiront dans l'ûtre spacieux.
"Le vioii.v N'oei, poudre ue ger, pesant d'années,
Parcourt la ville blanche en la neigeuse nuit.
Sur l'éclatant tapis, fantôme allant sans bruit,
Il entend qu'on le prie aux pauvres cheminées :
- Ami des enfants, bon Noël !
Ecoute comme nos dents claquent.
Noël 1 C'est que le vent du ciel
Souffle fort dans notre baraque.
Noël 1 Du feu serait si beau,
Tordant sa flamme en l'âtre chaud :
Mais l'hiver, la vie est bien chère .1
Jette en nos sabots de misère,
Le soleil et les primevères.
Or, messire Noël n'est point dispensateur
Des rêves merveilleux dont s'émeut la pauvraille.
.; L'heure fuit ; le matin, avec morne lenteur,
Par la vitre givreuse, attache à la muraille
Des logis froids son spectre blanc et, dans ces lieux,
Noël ni le soleil ne voulurent descendre :
Où la vie est tragique, où grelottent les gueux,
Ne s'accomplissent point, hélas ! les contes tendres,
Et gisent les sabots dénués sur la cendre;
B. REYNOLD.
Le goût d'une femme.
On parle de tous côtés de la transformation du
Grand Hôtel en magasin de nouveautés, en théâtre,
en établissement financier, etc. En attendant, son
intelligent et sympathique directeur, M. Régly,
laisse dire et fait des merveiles. Les transforma-
tions qu'on doit à son artistique initiative en ont
falt une maison dont les hôtes ne savent pas ce qu'il
faut apprécier le plus du confort ou de l'agrément.
L'heureux directeur a été admirablement secondé
dans sa tâche par Mme Régly; et ce qui fait le
charme du Grand Hôtel, c'est qu'on y sent partout
te goût délicat d'une femme.
-- -----.x
A propos de « Chantecler ».
La grande question du printemps dernier était :
Qui jouera Chantecler? — Guitry fut désigné, et
ce choix fut universellement approuvé.
Mais qui publiera Chantecler ? se demandait-on
depuis l'automne. — Ce sera VIllustration, dès le
lendemain de la première, en quatre numéros ex-
ceptionnels.
•
M. Cook est définitivement convaincu de n'être
pas allé au Pôle, après cent Pearygrination et cent
Pearypéties. Mais une agence célèbre de voyages
est dégoûtée. L'agence Cook s'appelera désor-
mais l'agence Pol Peary.
Lé Diable boiteux.
LIBRES PROPOS
Menu de Réveillon
Si nous étions sérieux, la nuit de Noël nous ap.
prendrait ou nous rappellerait bien des choses.
Le moins qu'elle puisse nous apprendre ou nous
rappeler — même à nous qui ne sommes pas sé-
rieux — c'est l'art de la gastronomie. On prétend
que cet art est en baisse depuis Berchoux, depuis
Brillât-Savarin, et particulièrement depuis Charles
Monselet, qui fut le dernier à comprendre la poésie
de la mangeaille. Peut-être cepentbnt n'a. vous-
nous pas dégénéré autant que nous le supposons. Et
voici un menu qui évoque sans peine toutes les joies
culinaires, tous les grands souvenirs historiques, et
par surcroît tous les mystères du beau langage fran-
çais.
C'est en vain qu'on prétend, en effet, que la lan-
gue française est en décadence. Elle a des ressour-
ces infinies et elle se renouvelle incessamment. Que
dites-vous de ce menu, qu'on pourrait faire expli-
quer dans les écoles ? J'estime que les écoles laïques
et les écoles congréganistes se réconcilieraient aisé-
ment autour de lui !
1 y a d'atord : les huîtres royales d'Ostende. Un
enfant de six ans expliquerait facilement que les
huîtres s'appellent ainsi parce qu'il y a beaucoup
d'huîtres à Ostende, même en dehors de la saison
mondaine, parce que le roi des - -- Dieu ait
son âme ! — y fréquenta et non prxnt parce que l'â-
J J..h. .:.I;l.: t:t)-:"-
me belge y prit son essor. Après les huîtres, nous
prénons le consomme i"îveur en tasse, et nous sa-
vons bien que lorsque tout sera consommé, le viveur
quittera la tasse pour !a petite voiture. Nous som-
mes prêts maintenant pour les timbales de homard
à l'américaine, ainsi nommées parce que les ho-
mards font rougir le teint des Américaines ou parce
que les Américaines ont souvent le teint cuit du
homard. Quant aux côtelettes d'agneau, à la maré-
chale, elles ne suscitent aucun embarras, et nous ne
savons pas de quelle maréchale il s'agit. D'ailleurs,
il n'y a plus de maréchales. Le chapon pris à la ge-
lée passe comme une muscade. Les cailles à la
George Sand surprennent au premier abord : ou
bien elles appellent des comparaisons trop vulgai-
res, ou bien il faut convenir que George Sand mé-
rite mieux que de donner son nom à une caille. Il
serait plus sage de dire cailles à la Pompadour, en
mémoire de Voltaire. Un jour que la Pompadour
mangeait une caille qu'elle trouvait grassouillette,
Voltaire lui dit : -
Grassouillette, entre nous, me semble un peu caillette,
Je vous le dis tout bas, belle Pompadourette !
Bien entendu, la salade Diplomate va de soi.
Partout où pasgent les diplomates, tout est brouil-
lé. Des fruits, à cette heure, et quelques petites
friandises. Un dernier verre de Champagne. Des al-
cools en veux-tu en voilà. Et avouons que la
langue française en voit de raides la nuit du Réveil-
lon. Espérons qu'elle se rattrape le jour de Noël.
J. Ernest-Charles.
LIRE EN TROISIEME PAGE :
LA CHROMIOUE. DE LONDRES
Par Sir John
"01L BLAS"
va pou à peu se transformer
Tu-sais-tout !
—
Parodie 'de la belle "pic ce de vers 'de Mme Rose monde Gérard, parue à b gloire de M. Maurice Res*
tond, soji fils, dans le numéro de Noël de ILLUSTRATION et entrée aussitôt dans immortalité.
C'était hier. Je vois tes petites phalanges
Toutes moites encor des horreurs de tes langes
Suivre sur l'alphabet le trajet bien connu : -
B, Ba, Be, Bi, Bo, Bu, C, Ca, Ce, Ci, Co, Cu.
Puis il faut épeler : ce sont de longs murmures :
J'ai-fait-mon-pi-pi-dans-le-pot-aux-con-fi-tu-res ;
Pa-pa-dans-son-ni -ni - faut- pas- met-tre-son-doigt.
Et maintenant, c'est toi qui m'en remontres, toi
Qui m'expliques lorsque j'ai la tête lambine
'A bien saisir le sens d'un terme de marine.
On vante ton esprit, ta science et ton goût.
Et le monde devrait t'appeler : Je-Sais-touS
Car tu sais tout ; j'écoute et c'est un charme immense 1
Tous les rois, avec la date de leur naissance v
Et celle de leur mort, tous les auteurs latins,
Golhs, hottentofs, chinois, hindous et levantins,.
Les six sœurs Barison, tous nos Louis, les urnes
Funéraires, les cols à fraise, les cothurnes,
Le pere Ubu-la-Frousse et la belle Didon
Qui, dit-on, dînait du dos dodu d'un dindon ! -
Le passé tout entier a, de tes plumes d'oie, -m- • * tr~t ~v -
Roulé sur.tes cahiers de classe, ô douce joie ! - ",jm*
Petit Maurice aimé, bien mieux que Petit-Jean
Tu connais le Soleil, la Lune aux rais d'argent,
-Les Babyloniens et Vénus Callypige ;
'Aux Carpocratiens tu peux faire la pige ;
Tu connais les amours de la Reine Margot,
Tu connais le breton, le javanais, l'argot,
Le basque, le sanscrit, et l'esperanto même,
Sans les avoir jamais appris, sombre problème !
Tu sais tout, oui tout, le contenu des Bottins, , r
Tous les cancans, tous les ragots, tous les potins.
v Moi qui ne sais qu'un peu de musique et de danse,
Je me sens très petite, et je te trouve immense.
Toi, tu connais les philosophes grecs, romains
Et. provençaux. Quoi donc ? Hier encore mes mains
Dans tes cheveux bouclés che reliaient les pique-tête,
Et maintenant ton front pâlit sur Epictète.
Quoi donc ! Est-ce possible ? Il y a quelques jours
1 Tu regardais Guignol jouer ses méchants tours
Au naïf commissaire et maintenant, sans pose,
Tu lis Nietzsche, Stirner, Bjoernson et, je suppose, -
Platon. Tu traités Kant de petit paltoquet
Et trouves qu'Aristote est un pâle toqué,
Capable tout au plus d'esbaudi r des poupées.
Hegel, Hume, Bergson, vieilles poires tapées,
A ton commandement, évanouis, dissous,
Rentrent en moins de rien au troisième dessous.
"IF Tu renvoies sans broncher Gœthe à sa ca^conade^ *-y
D'un geste tu réduis Leibniz en mar.monade,
Et Musset, sous les traits de to n verbe avisé,
Se revoit à nouveau ridicoculisé.
Eh quoi ? Hier encor tu te tordais de rire
Aux contes de Puff-Puff et de Jean-Tire-Lire.
Et maintenant d'un trait tu dé vores Zola
Et tu dis, méprisant : « Quoi ? Ce n'est que cela ? a:
Toi qui battais des mains aux histoires de fées,
Du noir Gustave Hervé tu scrutes les pensées 1
Hier encore, prenant un plaisir très réel
A dévorer les fruits du labeur paternel,
Tu feuilletais YAiglon% la Princesse lointainer
Monsieur de Bergerac et la Samaritaine ;
Tu t'enthousiasmais pour Fia mbeau dit Flambard
Qui mangeait du cheval par un froid de canard,
En disant : « J'aime mieux le Russe que l'onglée. »; :.,-_.
Tu pleurais lorsque « ça sentait la giroflée »,
Et tu ne trouvais rien sur la t erre de beau
Comme le rouge nez du vaillan t Cyrano !
Et maintenant, hostile aux viei Res amusailles,
Tu déclares que la comtesse de Noailles
A compris le secret de l'âme de Barrés ;
Qu'il fait soixante-dix degrés à Bénarès ;
Qu'on jouera Chantecler à la saison nouvelle - -
Et que l'on peut, sans trop se c reuser la cervelle,
— -., J Expliquer les romans de Madame Mardrus ;
- .,. Hier encore, je me fatiguais l'humérus
■ m , — A te porter comme un petit sai nt Jean-Baptiste,
Boule rose dans ta chemise de batiste.
Et maintenant lorsque tu t'en vas discourant
Sur Richepin-le-Jeune et reiphppin.io.Aran/» 1 ~-
Tu me cites. Plotin retouché par. Porphyre.
Et moi, la bouche bée, ô mon gars, je t'admire,
- -- f Et quand tu dis : « C'est beau ! » Que moi je réponds : a Oui »
Comme un pauvre hibou par le jour ébloui,
Ce n'est pas, mon petit, tout ce que tu racontes
Des peuples, des savants, des rois et des archontes
Qui fait trembler mon cœur ainsi, non, c'est de voir
Que moi j'ai fait un fils d'un aussi grand savoir 1
Un petit citoyen duquel la renommée
Eclipsera plus tard les seize Ptolémée,
Les nombreux Constantins, les trois Napoléons
Et les quatorze cent soixante Pharaons ;
C'est de voir que le nom (espo ir qui me chatouille!)
-a De Rostand n'est pas près de tomber en quenouille
C'est de voir que Pascal, Hugo, Pasteur, César, ,
Et le roi Sésostris et Teglath-Phalazar,
Tous les Augustes, y compris celui du cirque, v J-
Les trois Mousque. non, ça ne rime pas en irque 3
Les trois dessinateurs : Sem, Cham et puis Japhet,
Jaurès, Paul Deschanel, Jésus de Nazareth, 7 -
Cléopâtre, de Max, Néron, les deux Antoine (1), -
Et Coûtant l'antechrist, et Combes l'anti-moine,
Charlemagne, Mac-Nab, Solon, Mathusalem,
Otero, Bossuet, Annibal et Dranem, -
Ne peuvent désormais t'atteindre à la cheville,.
Et que, déjà, suprême honneur pour la famille, v
Même ton père Edmond, quelque académicien
Qu'il soit, n'est, près de toi, que rien, que rien, que rien r
** -, Pour copie conforme
"1 ----<- - - - Henry Mustière.
(1) Celui qui assista aux funérailles de César et celui qui les monta sur la grande scène de FOdéon.
CONTRE L'APACHIE
La nouvelle nous vient du Nord. Est-ce pour cela
une idée lumineuse? Qu'on en juge plutôt.
Ayant remarqué que depuis quelque temps la cri-
minalité augmentait dans de notables proportions
dans leur pays, les autorités du Connecticut
(U. S. A.) se sont avisées d'y porter remède.
Epousant en l'espèce les théories d'Emile Zola
sur l'atavisme, et celles de Cesare Lombroso sur le
criminel-né, les autorités connecticussoises — oui,
madame — ont décidé de tuer si possible le mal
dans l'œuf.
Aussi, une commission de doctes savants fut-elle
aussitôt nommée et chargée d'examiner les indivi.
dus détenus dans les prisons de l'Etat.
Après examen mental des prisonniers, cette docte
compagnie décida que le meilleur moyen d'empê-
cher la propagation du microbe criminaliste serait
de faire subir aux détenus mâles criminels-nés,
avant leur sortie de prison, une opération dans le
genre de celle qui jadis rendit célèbre le malheu-
reux Abailard.
Des essais ont, paraît-il, été faits et ont donné
d'excellents résultats.
C'est du moins ce qu'affirme un grave journal
américain.
Si NOII e vetQ,,*
Qu'en pensent ros apaches nationaux ?. et sur-
tout leurs amazones.
F.-D. DU ESSART9.
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